Introduction
Notre contribution dans cet atelier « Apprendre et enseigner en francophonie » relève d’une expérience de formation réalisée dans le cadre d’un module d’initiation au métier d’enseignant, destiné à des étudiants de licence de Sciences-Physiques de l’Université Montpellier II. Nous tenterons, sous la forme d’un compte-rendu chronologique, d’expliquer les transformations des objectifs d’enseignement de ce module par deux raisons principales : d’une part des changements dans les besoins institutionnels et d’autre part des changements dans les attentes en formation des étudiants.
Précisons brièvement, ce que nous attendons par objectifs d’enseignement et ce que recouvre la prise en compte des attentes en formation des étudiants.
Nous nous plaçons d’un point de vue didactique qui considère la définition d’objectifs d’enseignement comme non pas figée mais façonnées par les éclairages différents que l’on peut porter sur un contenu. Le facteur principal de transformation des objectifs que nous avons retenu sont les attentes en formation des étudiants. Derrière ces attentes nous cherchons en particulier à savoir quelles sont les idées des étudiants sur les relations entre formation à l’enseignement et formation à l’apprentissage.
Nous rendons compte à présent de cette expérience d’enseignement (menée sur deux années) en articulant notre propos autour de deux parties :
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La première partie porte sur l’origine et l’évolution du cadre institutionnel afin d’identifier le statut et la place d’un module pédagogique et didactique dans les filières universitaires scientifiques.
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La deuxième partie porte sur les définitions successives des objectifs d’enseignement du module, depuis 1998, date à laquelle une série de recherches exploratoires, portant sur les attentes des étudiants, a été conduite. Outre les changements dans les besoins institutionnels, nous verrons en particulier comment les résultats de ces études ont participé à la transformation du module.
I – origine et évolution du cadre institutionnel du module
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1980 : création d’une licence et d’une maîtrise d’enseignement en sciences Physiques, ouverte à des étudiants qui se destinent au métier d’enseignant du secondaire et préparent pour cela le CAPES, qu’ils présentent à la fin de la maîtrise.
La formation prévoit à côté des enseignements disciplinaires, deux modules d’initiation au métier d’enseignant, un en licence l’autre en maîtrise.
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1991 : création des IUFM qui recrutent à un niveau bac +3 tous les futurs professeurs des écoles ou du secondaire. Seul le module de licence est conservé. C’est un module de 100heures qui se divisent en trois parties : informatique/expression française/didactique.
Notre équipe intervient seulement sur la partie didactique du module et organise des enseignements portant sur la didactique des sciences physiques, sur les techniques de base et les diverses stratégies d’enseignements.
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1999-2000 : création d’un module à part entière de 50 heures, considéré alors comme un module préprofessionnel qui s’inscrit dans la perspective de la formation initiale prodiguée par les IUFM qui à pour nouveauté d’organiser un stage d’observation en classe (18 heures). Les enseignements couvrent donc les 32 heures restantes.
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Depuis 1998, un programme de recherches est associé au programme d’enseignement du module afin que les conceptions des étudiants sur ce la fonction d’enseignement, mais aussi leurs attentes en formation, soient prises en compte dans la formation.
Série d’étude de recherches menées :
1998-1999 : - étude sur les conceptions des étudiants concernant la fonction d’enseignement
1999-2000 : - étude sur les attentes des étudiants vis à vis du module
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étude sur les attentes des étudiants vis à vis du stage d’observation en classe
II –Transformation des objectifs de formation (depuis 1998) en raison des changements d’ordre institutionnel et de la prise en compte des attentes en formation des étudiants
Le module a pour objectif principal de faire connaître aux étudiants quelques outils qui permettent de comprendre les situations d’enseignement-apprentissage afin qu’ils puissent agir sur elles.
La prise en compte des résultats sur les attentes des étudiants vis à vis du module d’enseignement-apprentissage, a eu pour conséquence d’associer à l’objectif préalablement défini en termes d’acquisition de connaissances un objectif en termes d’attitudes vis à vis du module, à savoir-faire passer les étudiants de la position «d’attentes de recettes » à celle «de constructeurs d’outils ». C’est à dire les faire sortir de l’idée qu’il y a des «trucs » pour être un bon enseignant et que si toutefois on parle de «trucs » c’est à chercher dans la capacité qu’à l’enseignant à s’interroger sur sa pratique ou sur celles d’autres enseignants mais aussi sur celles des élèves.
Pour atteindre un tel objectif cela suppose de travailler avec les étudiants sur leurs conceptions vis à vis de l’acte d’enseigner afin qu’ils prennent conscience des limites de la conception classique qui dissocie l’enseignement de l’apprentissage «enseigner c’est transmettre des connaissances » et s’approprient une conception qui associe la logique de l’enseignement à celle de l’apprentissage «enseigner c’est permettre aux élèves d’apprendre ».
Nous pensons que l’attitude passive des étudiants vis à vis du module s’explique en partie par cette conception disjointe qu’ils ont de l’enseignement et de l’apprentissage.
Les enseignements sont organisés autour de l’analyse de situations d’enseignement-apprentissage. Quelques concepts utiles de la Didactique (conception, objectif-obstacle, transposition didactique) sont introduits en cours magistraux et sont travaillés en TD sous forme d’étude de cas (productions d’élèves ou d’enseignants), ou sous forme de problèmes posés aux étudiants (les travaux pratiques et l’apprentissage de la démarche expérimentale, l’usage des représentations graphiques en sciences-physiques…).
La reconnaissance du module comme un module préprofessionnel aux métiers de l’enseignement (module de 50 heures comprenant un stage), qui s’inscrit dans la filière de formation initiale des enseignants, nous a conduit aujourd’hui à élargir les domaines d’interventions du module. A l’image de ce que proposent les IUFM, nous avons associé formation sur le contenu et formation en didactique mais aussi réflexion sur le métier d’enseignant.
Au-delà, d’un objectif centré sur la compréhension des situations d’enseignement-apprentissage, nous avons fixé deux autres objectifs visant à mener une réflexion sur le métier d’enseignant et les contenus à enseigner.
En conséquence de quoi les objectifs d’enseignement du module visent à permettre à l’étudiant de :
- situer le métier d’enseignant : dans son environnement institutionnel (connaissance du système éducatif, de l’établissement scolaire, de la politique éducative) et comme une profession (mettant en œuvre des compétences).
- comprendre les situations d’enseignement-apprentissage
- porter un regard critique sur la discipline physique-chimie : éléments d’épistémologie scolaire et d’histoire de sciences.
Par ailleurs, il apparaît que les attentes en formation des étudiants vis à vis du module sont largement orientées sur le stage d’observation en classe et que leurs motivations vis à vis du stage sont de différentes natures. Pour la majorité d’entre eux, «c’est voir comment l’enseignant fait la classe » qui les intéressent, pour d’autres c’est l’occasion «d’affiner un choix professionnel » ou «de découvrir une institution et son rôle social. En d’autres termes, l’on peut dire que le stage en établissement scolaire est surtout perçu comme un stage d’expérience professionnelle, parfois comme un stage d’expérience personnelle et très rarement comme un stage d’expérience sociale.
Cela nous a conduit à considérer le stage comme l’activité fédératrice du module. Une séance de travaux dirigés a été consacré à l’élaboration de grilles d’observation, une autre à la rédaction du rapport de stage. En outre, tout au long des différentes séances de travaux dirigés, nous avons favorisé les aller-retour entre les observations sur le terrain et réflexion théorique. La rédaction d’un rapport de stage et la soutenance orale de ce rapport ont donné lieu à une évaluation terminale.
Conclusion
Les choix d’enseignement que nous avons effectué sur ce module d’initiation au métier d’enseignant ont visé d’une part à transformer les conceptions de l’enseignement et d’autre part à répondre au mieux aux besoins en formation préprofessionnelle d’étudiants engagés dans une filière d’enseignement.
Dans quelle mesure une telle expérience est-elle transposable à d’autres universités francophones ?
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