Documents de l’educateur 172-173-174 Supplément au n°10 du 15 mars 1983 ah ! Vous ecrivez ensemble ! Prat ique d’une écriture collective Théor



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TEXTES COLLECTIFS

DANS UN L.E.P.
Aujourd'hui précisément, tout le monde en a ras le bol. Je crois que moi aussi, ça commence à faire, à faire, à faire... Mais fais donc, fous moi une claque dans la gueule si tu as envie, fous une bombe ici s'il le faut, mais réveille-toi. Prends tes responsabilités, pars, mais ne te cache pas, bats-toi, petit cheval, hennis. Je suis triste et j'ai envie de pleurer, mais ces larmes n'arrivent pas à sortir de mes yeux ce qui me fait encore plus mal. Je m'emmerde ici alors que j'étais si bien, dimanche à la manif et cette foutue jambe qui me fait mal, et toutes ces emmerdes, je me demande ce qui pourrait me remonter le moral. Je suis lasse, lasse, je pense à toi, je voudrais que tu sois près de moi, que l'on rie, que l'on danse, que l'on s'amuse, que l'on chante, que l'on voyage, partir dans le ciel, percer l'air avec un hélicoptère. Rire aux éclats, se tordre en deux et fuir loin, très loin, cueillir tout, chercher l'infini, l'irréel, le surnaturel, le rêve, l'illusion, tout ce qui n'est pas définissable, qui ne s'explique pas avec des mots mais que l'on sent dans le coeur et l'âme. Seule, déprimée, je suis. Une larme de souvenirs glisse sur mon visage, humecte mes lèvres et tombe dans le lointain. Je suis triste, triste à mourir, pour combien de temps ? pour l'éternité ? pour une seconde ? un siècle ? que sais-je ? je suis perdue. Ce L.E.P, de malheur m'emmerde, je voudrais y foutre une bombe, BOOM... et plus rien que cendres et cadavres. Tant mieux. Je deviens sadique, méchante parfois mais c'est le climat qui règne ici qui m'oppresse, m'étouffe, me prend à la gorge. Salut la vie, bonjour l'éternel. Oui, c'est vraiment ce que jai envie de faire, crever comme une chienne puante et sale. Seule dans mon coin. Pas de fleurs, rien, pas de larmes, surtout pas. Ras le bol, ras le cul ! Les stages c'est la merde. Qu'est-ce qu'on patauge dans ce fichu bahut, la merde totale ? Con, oui, c'est ça, ils sont tous cons, bêtes partout, il faut toujours que l'on s'écrase, et moi, je ne veux plus m'écraser, y'en a marre de s'écraser, je veux gueuler oui GUEULER, foutre le feu dans les baraques dans lesquelles on vit et tout recommencer à zéro. Oui, moi aussi je veux vivre, je veux cracher ma peine, la vérité sur ce maudit bahut, mais comment puis-je faire contre une administration qui a le droit de nous trimbaler à son gré sans se soucier de ce que l'on pense. Nous sommes des pantins, des marionnettes qui se laissent dérouter et leurrer. Fini tout cela. Je veux crier à tout le monde que je suis une fille qui a autant besoin de vivre que les autres. Eh oui, on nous prend pour des pantins mais on ne doit rien dire, rien faire, il faut tout accepter sinon ça marche à coups de sanctions. Je voudrais me révolter mais je préfère me taire car sur le nombre d'élèves je pourrais paraître ridicule. Je crois qu'ici tout le monde en a ras le bol, mais malheureusement sur le nombre d'élèves, il y a plus de moutons de panurge que de révoltés. Elles préfèrent s'emmerder, se faire engueuler que de réagir, c'est incroyable, j'ai envie de les secouer, mais à quoi bon, quand on est con, on est con. Et ce temps de chien, notre dernier mercredi avant que l'on parte si le temps est comme aujourdhui et bien, il sera bien arrivé. Je pense à lui, je ne peux pas m'empêcher, Que lui est il arrivé ? pourvu qu'il n'ait pas eu d'accident, comme je regrette de ne pas être allé avec eux, au moins aujourd'hui, je saurais, mais là, je suis dans la crainte et ne dois compter que sur l'espoir et la chance. La chance cela n'existe pas ; l'espoir il existe mais à quoi bon espérer, espérer des choses inutiles, dingues, idiotes. Pourquoi rester enfermé pendant toute une journée alors qu'on serait si bien dehors malgré le vent qui nous balaye nos cheveux et nous les plaque sur le visage ? Une cigarette nous aiderait à nous évader un peu ne serait-ce que quelques minutes. Partir et toujours rire sont mes envies. Simples mais compliquées aussi. Le poisson nage, il ne réfléchit pas, il se sent bien dans l'eau si celle-ci est pure. Il rencontre une amie. Ils se reproduisent. Ils ont beaucoup d'enfants. Mais la fin de cette histoire ne sera pas « ils vécurent heureux ». Ils se trouvent dans une partie du Pacifique, et cette partie est polluée par des déchets d'usine, aussi ce joli poisson et sa femme ainsi que les enfants moururent dans l'eau trouble et sale ; le ventre à l’air.

Je voudrais être feuille pour me laisser porter par le vent. Franchir tous les obstacles de la vie, être libre de fumer, de faire tout ce qui m'intéresse, ne voir aucune contrainte. Je vis dans l'espoir de vivre librement heureuse. Je voudrais que l'on m'aime comme moi j'essaie d'aimer les autres, mais personne ne semble m'écouter, me comprendre, tout le monde se fout pas mal de moi. Je ne voudrais pas être méchante et pourtant ici j'ai l'impression de le devenir.



Il n'y a pas pire qu'une sale prison où l'on nous jette interdiction sur interdictions, marre, marre, marre. Oui, c'est vrai et cela serait si beau mais où est-il. Cette nuit qui devient de plus en plus noire m'empêche de le voir chaque jour j'espère... j'espère... j'espère... j'espère rien mais l'espérance fait vivre, c'est ce que disent les autres. 6 h - le quart déjà, heures ne fuyez comme cela. Je vieillis chaque seconde, des amis, beaucoup d'amis, j'aime parier, discuter avec des amis, je me sens sereine quand j'aide quelqu'un, quand je lui apporte quelque chose de positif, quand je sais qu'il est heureux de recevoir une lettre de moi, ou quand il rit quand il me voit lui parler, le comprendre, l'aider, me délivrer de mes propres soucis, de mes malheurs, il faut parfois laisser ses emmerdes dans u ne poubelle et essayer de ressortir et nettoyer ceux des autres. Fantastique, je me sens soudain l'âme légère, tranquille, vidée, comme ce serait chouette si tous les jours c'était comme ça, comme se serait chouette, je me sens comme la plume au vent l'âme sereine, j'ai envie de donner mon coeur, de donner ma légèreté au plus malheureux du monde. J'aimerais pouvoir en mettre en réserve pour toujours afin de rendre tout le monde super heureux. J'aimerais aimer tout le monde pour n'importe quoi et ce soir, j'ai de l'amour en excès, je voudrais en faire profiter tout le monde.
TEXTES

D'UNE MAISON D'ARRÊT
« Nous commençons une partie de cartes. Au début, tout va bien. Mais il suffit d'une fraction de seconde comme si une ampoule s'allumait dans ma tête pour que je devienne pensif en oubliant ce que je fais. Immédiatement, je prends un livre, je lance une discussion sur un autre sujet pensant ainsi oublier. Non, rien à faire. Toujours cette idée fixe et ces mêmes pensées : comment vont les enfants ? Comment ai-je pu faire cette bêtis ?? Qui pourvoit au besoin des miens ? On dit très souvent, quand on a une idée fixe changeons-la par une autre idée ou par tel acte. Comment y arriver, étant dans une situation comme la mienne, si ce n'est d'avoir bien vite la liberté. Suis-je en train de perdre la tête ? Non, je ne crois pas. (A. G., 28 ans)
« Tous ces jours passés dans cette prison où rien ne peut passer au travers, où aucune plante ne peut vivre, où toute végétation fuit, ces murs, on ne cultive dans cet établissement que la dégénérescence, la paresse, le vice de l'homme. Puis un jour, on les libère pour qu'ils puissent à leur tour répandre cette déchéance, polluer le plus possible cette végétation extérieure, pour que les tribunaux et cette machine pénitentiaire soit toujours approvisionnée. (B., 43 ans)



Dossier pédagogique de l’Educateur n°172-173-174 : Ah vous écrivez ensemble ! – mars 83

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