Erda ou le savoir



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2.6.La conscience

2.6.1. Naissance de la conscience


« La conscience de soi est d'abord simple être pour soi, identique à soi par l'exclusion de soi de tout ce qui est autre. Elle a pour essence et objet absolu JE ; et dans cette immédiateté, dans cet être pour soi, elle est entité singulière. Ce qui pour elle est autre chose, est, en tant qu'objet inessentiel marqué du caractère du négatif.»282

Mais cette conscience pure est-elle autre chose qu'une invention de philosophe ? Car la conscience n'est pas née d'un coup de baguette magique, mais d'un long processus d'évolution biologique, où elle a probablement été d'abord, conscience de quelque chose. Parler de processus biologique c'est bien entendu rejeter d'emblée toute transcendance de la conscience, donc de l'esprit, par rapport à la matière ; ce qui ne signifie pas pour autant que l'émergence de la vie, puis de la conscience soient des événements banals dont la compréhension soit scientifiquement assurée283. Est-il d'ailleurs utile de prouver l'origine purement biologique de l'esprit ; à partir du moment où l'on nie tout dualisme esprit/matière, c'est une évidence, dans le cas contraire, on sort du domaine scientifique, et toute logique devient impuissante. De toute façon, le problème qui nous concerne n'est qu'indirectement celui l'émergence de la conscience, mais de ses transformations internes.


2.6.2.6 Et la conscience fut


Nous l'avons vu plus haut, J Eccles, neurologue chevronné, prix Nobel de médecine, se livre à une étude minutieuse du cerveau, mettant en relief son extrême complexité, puis craque à la fin de son livre: pour l'esprit, il faut la main de dieu, l'âme sera insérée dans l'embryon. Dans la mesure où il est exact que la science, dans l'état actuel de son développement ne peut justifier cette étrange propriété de la matière qu'est la conscience, aucun argument décisif ne peut être présenté contre cette thèse purement métaphysique, donc non scientifique. Il faut quand même remarquer, que non seulement cette thèse occulte tous les problèmes, mais elle rend nuls et non avenus tous les travaux concernant les rapports entre l'esprit et le cerveau284. Pourquoi y aurait-il de tels rapports puisque l'âme est insérée dans le corps avant la formation du cerveau. Certes on peut alors soutenir que l'âme travail de conserve avec le programme génétique pour façonner les structures cervicales ; mais alors pourquoi l'enfant ne naît-il pas avec sa conscience toute faite ? Le seul chemin de repli est l'éternel dessein impénétrable de Dieu ! Mais la science s'arrête où les impénétrables desseins de Dieu prétendent au rang d'axiomes ; et l'homme qui cherche la connaissance ne peut accepter ce chemin. Gardons-nous cependant de croire que l'esprit est une propriété de la matière ; ce ne peut être que le produit d'une longue évolution. Dire qu'il s'agit d'une propriété émergente des systèmes nés de l'organisation de la matière dans des conditions particulières (de température par exemple), ne revient pas du tout à la même chose. Le mot émergence, qui ne doit nullement être confondu avec transcendance précise ce dont il s’agit : propriété d'un système qui n'appartient à aucune de ses parties.

Ainsi, il paraît difficile, et même impossible de parler de commencement ou de naissance de la conscience. Ne sommes-nous pas devant un problème aussi incompréhensible que le commencement de la vie et plus loin encore, de l’univers ? A l'instant 0, il n'y a rien. Rien, mais quand même une forme d'énergie occupant le vide qui est absence de tout lieu285. On peut, à la rigueur admettre un tel état potentiel de l'univers, puisque nous savons, en fin de compte que toutes les formes de matière se ramènent à l'énergie, et que les processus qui permettent de transformer une énergie pure, comme l'énergie cinétique, en matière, ont effectivement été reproduits expérimentalement dans les accélérateurs de particules286 ; on ne peut par analogie parler de conscience potentielle sans tomber dans un panpsychisme287 qu'aucune expérience ne permet d'étayer. Comment imaginer un être pour soi dans la plénitude de son identité à soi (en fait l'en-soi de Sartre), mais n'ayant pas conscience d'exister dans le monde ?


2.6.3. Métamorphoses de la conscience


Au cours du Ring nous assistons à plusieurs véritables mutations des personnages. La première, et sans doute la plus importante est celle que subit Wotan avant même que le drame ne débute. Il boit à la source éternelle, et après l'échange mythique, il devient autre. On interprète parfois la perte de l'œil comme l'échange d'une vision extérieure contre une vision intérieure. On peut donc y voir un gain de conscience, ou encore le passage d'une simple conscience à la conscience d'ordre supérieur selon Edelman. Le passage à cette conscience supérieure est attesté par les mythes qui font du dieu (Wotan ou les dieux qui sont équivalents, comme Odin), un élément naturel comme le vent ou la tempête.

Avec Brünnhilde nous assistons également à une métamorphose de la conscience : nous la voyons, au cours des deux derniers actes de La Walkyrie se transformer presque brutalement ; de simple chose de Wotan, en s'affirmant comme étant la vraie conscience du dieu.

On ne sent pas pareille rupture chez Siegfried, même s'il est transformé, en connaissant la peur par la découverte, en Brünnhilde, de la femme.

2.6.4. Niveaux de conscience


Selon la psychanalyse il existe en nous un subconscient au quel obéissent bon nombre de nos comportements. En fait nous connaissons les deux extrémités d'une chaîne qui va de nos comportements instinctifs dont le contrôle nous échappe totalement, comme la respiration, la circulation sanguine, la digestion etc, jusqu'à nos actes volontaires, ou que nous ressentons comme tels288. Nous passons ainsi de ce qui est commun à toutes les espèces vivantes à ce qui semble bien être l'apanage de l'homme. Si l'on évalue maintenant ce qui sépare les primates de l'homme, échelon immédiatement inférieur dans cette échelle de la conscience, il semble bien qu'il y ait quelque part solution de continuité, c'est-à-dire rupture dans une évolution sage et continue. Mais ce n'est pas sur cette hiérarchie de niveaux que nous allons fixer notre attention ; Nous partons maintenant de l'homme lui-même et de sa conscience explicite, conscience d'être dans le monde.

Revenons d'abord sur l'idéologie des trois fonctions ; ce retour est justifié par le fait que le niveau de conscience d'un individu dépend en grande partie de la position sociale qu'il occupe, à l'exception de ceux qui, pour des raisons de convictions personnelles refusent de s'identifier à la classe qui est objectivement la leur.

Rappelons que la première fonction est spirituelle, « administration du sacré, du pouvoir et du droit » (Dumézil), la deuxième est celle de la force physique, la troisième, de « l'abondance et la fécondité ». A ces trois fonctions, ne correspond pas, et n'a jamais vraiment correspondu trois classes sociales, au sens où il y a une classe ouvrière289 bien qu'elles soient sous-jacentes à une répartition sociale, sans contour nettement définis. Elles suggèrent cependant une organisation de la société aboutissant à un certain partage du pouvoir et d'une sorte de conscience supra-individuelle qui seule permet à la conscience individuelle d'exister réellement. Les trois fonctions engendrent alors une humanité d'ordre supérieur, où domine une tripartition du pouvoir : (1) Pouvoir spirituel correspondant à la première fonction, scientifique, philosophique, religieux, artistique ; on y trouve tous ceux qui, dans ces différents domaines, ont droit à la parole. (2) Pouvoir politique et militaire (3) Pouvoir économique. Et le reste ? L'immense majorité de ceux qui forment le corps de ce tricéphale.

Ce qui caractérise les sociétés dites démocratiques est le fait de la perméabilité des classes sous-jacentes aux trois fonctions, et surtout à la collusion des trois classes correspondant à l'idéologie classique (la quatrième classe n'est en même tant, qu'un vaste réservoir, et le domaine d'action des trois autres ; sans elle, la notion même de pouvoir n'aurait aucun sens, mais elle ne compte pour rien dans l'histoire des hommes.). Et pourtant la classe dominante sous-jacente aux trois fonctions incarnant le pouvoir, n'a aucune réalité humaine ; lorsque vous approchez ses membres, vous n'y trouvez que des hommes290 comme les autres, des hommes vulgaires291.

Elle n'a aucune réalité humaine, dans la mesure où justement elle donne naissance à une conscience qui semble transcender toutes les consciences individuelles. Ainsi ceux qui servent, tels les prêtres d'une religion, cette entité qu'on appelle l'état, ont l'obligation de réserve ; qu'est à dire sinon que leur conscience individuelle ; même confrontée au pire des scandales, doit se taire. Et que le vrai scandale serait de parler, c'est-à-dire de révéler publiquement ce qui, aux yeux de n'importe quelle personne sensée est scandaleux. Les règles morales auxquelles obéit cette super-conscience sont quand même étonnantes, au regard de la morale naturelle de la petite espèce ; une forfaiture qui n'est pas officiellement reconnue, même si elle viole les règles les plus élémentaires du droit n'est jamais reconnue comme telle. Pire c'est celui qui la dénonce qui devient coupable. Pire encore : supposons que celui par qui le scandale arrive, parce qu'il a dénoncé une forfaiture, sans respecter l'obligation de réserve, soit condamné et traîné au banc d'infamie (pour diffamation par exemple), si ultérieurement la justice lui donne raison, il ne sera jamais réhabilité, et, a fortiori, personne ne jugera opportun de récompenser son sens de l'honneur véritable292. Fricka réclame à Wotan, qui lui accorde, la tête de Siegmund pour avoir violé les liens sacrés du mariage, mais le vrai scandale, celui du rapt de Sieglinde (et du meurtre de sa mère) est oublié ; entre temps Hunding a été blanchi en se montrant respectueux des bonnes règles.

C'est pourtant à l'abri de cette conscience supérieure que tous les pouvoirs s'abritent, les petits comme les grands. Les contre- pouvoirs qui naissent spontanément hors de cette nébuleuse - dont on a le sentiment qu'elle n'est qu'une bulle prête à éclater, ne laissant que le vide dont elle est faite, mais qui est en réalité d'une extraordinaire résistance - ne s'exercent que dans des zones banalisées, comme les fictions littéraires, théâtrales, artistiques en général, si bien que chacun peut facilement se convaincre qu'ils n'ont rien à voir avec la réalité. La conscience qui habite ces contre- pouvoirs, et qui est pourtant la vraie conscience humaine, est ainsi niée en tant que réalité, et considérée comme conscience fictive, donc inférieure. Siegmund sacrifié, Sieglinde abandonnée à Mime, qui ne prend d'elle que Siegfried dont il espère faire l'instrument de sa conquête du pouvoir, Brünnhilde abandonnée sur son rocher. Mais, tôt ou tard, l'avenir donnera raison à Wagner, mais il n'y aura plus aucune conscience pour savourer cette victoire293.


2.6.5. Conscience et raison


Wotan, en acceptant le sacrifice de Siegmund, reconnaît que finalement c'est la conscience supérieure des dieux qui doit triompher devant celle d'une humanité qui ne veut se soumettre qu'à des lois naturelles dont la première est celle de l'amour libre de toute contrainte294. Il aura donc extérieurement une attitude qui défend les intérêts de sa classe, mais il fera tout pour que triomphe la raison adverse, et laissera (et surtout aidera d'une manière décisive) à la constitution du couple Siegfried/Brünnhilde. Ainsi, d'une certaine façon, le clan des dominants est constamment menacé par la trahison de ses membres les plus prestigieux par l'intelligence. Otages, peut-être, mais dont le courage intellectuel permet malgré tout de bousculer bien des barrières.

Naguère encore, on considérait que les plus hautes consciences s'incarnaient dans les créateurs des grands systèmes, qui thuriféraires aidant étaient considérés comme détenteurs de vérités absolues qu'il incombait aux communs des mortels de découvrir. Ce temps là n'est pas tout à fait révolu puisque cette solide morale sert encore quelques mandarins qui sévissent encore dans les universités de tous les pays295.

Il n'en reste pas moins que les formes de domination intellectuelle du passé, avec la construction de vastes systèmes296 se voulant bases définitives de la pensée, sont désormais en voie d'extinction. Il y a déjà et il y aura sans doute toujours des formes nouvelles de domination, mais les démarches comme celles des Liebniz, Kant, Hegel, Schopenhauer, Comte, Husserl, tendant à construire - ou à découvrir - un sol ferme sur lequel construire une connaissance absolue, ne peuvent plus être crédibles. Lorsque Feyerabend écrit, Contre la méthode, puis Adieu la raison297, ce n'est pas à proprement parlé la raison qui est mise en cause, mais son exercice au service des grands systèmes qui n'ont d'autres buts que d'asservir la conscience humaine à des dogmes dont la vérité n'est jamais que relative. D'une certaine façon, il célèbre la victoire de Loge, flamme subtile et insaisissable, sur le Wotan du Walhall , la mort des pesants systèmes, anéantis par les flammes libres et joyeuses d'une pensée humaine enfin débarrassée des carcans idéologiques.

Il serait cependant injuste de condamner ces systèmes sans reconnaître leur contribution à l'épanouissement de l'esprit humain. Leur rôle a été double :

- l'homme a besoin de connaître des périodes de stabilité, et la vertu des grands systèmes est de créer des paliers qui durant un temps échappent aux turbulences de la pensée humaine, celle-ci retrouve ainsi son souffle. Le noyau stable, tel un cristal dans un liquide en fusion finit alors à céder jusqu'à ce qu'une nouvelle cristallisation s'amorce.

- la pensée a besoin d'obstacles pour progresser ; Wotan doit s'opposer à Siegfried pour que le destin de ce dernier ait un sens.

Le besoin de stabilité, sans doute profondément ancré chez toutes les espèces vivantes, a une redoutable conséquence lorsqu'il devient aussi une exigence de la pensée : les philosophes et d'une façon générale les tenants de la connaissance, restent plutôt proches des pouvoirs, de n'importe quel pouvoir. Heureusement, aucun système, aussi stable semble-t-il ne résiste longtemps aux turbulences lorsque la stagnation devient manifeste, et le danger de fossilisation n'est guère à craindre.

Il existe cependant un danger, mais l'expérience montre qu'il a toujours été conjuré, et qu'il n'y a vraiment aucune raison pour que cela change. Le philosophe, en entendant par là tous ceux qui sont concerné par la connaissance - philosophe au sens premier du terme - reconnaît d'abord qu'il a un intérêt personnel à ne pas trop s'écarter, intellectuellement parlant, des pouvoirs en place ; puis que le savoir lui-même peut et doit bénéficier de cette proximité du pouvoir298. L'escalade consiste alors à ressentir comme une nécessité ce qui n'était considéré au départ que comme une simple tactique. Ce qui n'était au départ qu'un jeu habile devient pour l'esprit une vérité qu'il est bon de défendre pour elle-même299.

L'ambiguïté d'une telle situation apparaît dans les propos, par exemple de Kant300. La question de fond est la suivante : peut-on défendre une bonne cause avec de mauvais arguments ? Le bon sens nous souffle la réponse : oui, devant les imbéciles ; mais la démarche de Kant est plus contournée, et d'une certaine façon, celui-ci noie le poisson.

« Je ne partage pas, à la vérité, cette opinion exprimée [...] à savoir que l'on peut espérer trouver un jour des démonstrations évidentes de deux propositions cardinales de la raison pure : il y a un dieu, il y a une vie future. Je suis certain, bien plus, que cela n'arrivera jamais [...]. Mais il est aussi apodictiquement certain qu'il ne se trouvera jamais d'homme qui puisse affirmer le contraire [...]. Que faire alors pour défendre ces deux vérités indémontrables, « dieu existe, il y a une vie future » ? (Laisser les D Hume, les Priestley développer les thèses du scepticisme). Contentez-vous de laisser faire ces gens là : s'ils montrent du talent, une imagination profonde et neuve, si, en un mot ils font seulement preuve de raison, la raison y gagne toujours [...] dans cette dialectique, il n'y a pas de victoire dont vous ayez sujet de vous alarmer.»

Je risque évidemment de déformer la pensée du philosophe en ne présentant pas tous ses arguments, mais je pense que ces extraits sont parfaitement clairs ; je continue donc.

« Mais lorsque le public s'imagine que de subtils sophistes tendent à rien moins que d'ébranler les fondements du bien général, il ne paraît pas seulement prudent, mais encore permis et parfaitement honorable de se porter au secours de la bonne cause avec des apparences de raison, plutôt que de laisser à ces prétendus adversaires même l'avantage de nous forcer à ramener nos paroles au ton de modération[...] et avouer le manque de certitude spéculative et apodictique. Je serai cependant disposé à penser que rien au monde s'accorde plus mal avec le dessein de soutenir une bonne cause que la ruse, la dissimulation et le mensonge[...]. Je suppose donc des lecteurs qui ne veuillent pas qu'une bonne cause soit défendue avec de mauvaises raisons. »

Kant reconnaît à ceux qui doutent de la vérité des propositions cardinales de la raison pure, le droit de s'exprimer, ceux qui font confiance à la raison savent très bien à quoi sans tenir ; « Mais la jeunesse qui est confiée à l'enseignement académique doit-elle au moins être prévenue contre de pareils écrits et tenue à l'écart de la connaissance prématurée de propositions si dangereuses, jusqu'à ce que son jugement soit mûr ou que plutôt la doctrine qu'on veut lui inculquer soit assez fermement enracinée pour résister victorieusement à tout opinion contraire, de quelque part qu'elle vienne ? »

Kant sent le danger d'une telle méthode qui pourrait très bien induire chez les jeunes se laissant aller à « la curiosité ou à la mode du jour»,et poursuit : « c'est exactement le contraire de ce l'on conseille ici qui doit avoir lieu dans l'enseignement académique , mais sans doute à la condition qu'on suppose pour fondement une instruction solide sous le rapport de la Critique de la raison pure.[...]... il est absolument nécessaire de diriger contre la raison, sans doute encore faible, mais éclairée par la critique, les attaques si redoutable au dogmatisme et le l'exercer à examiner point par point, d'après ces principes, les assertions sans fondement de l'adversaire.».

« Exactement le contraire » et pourtant presque la même chose car Kant poursuit (nous sommes arrivés à la page 517) : « Il n'y a donc, à proprement parler, aucune polémique dans le champ de la raison pure. Les deux partis frappent des coups en l'air et se battent contre leurs ombres, car ils sortent des limites de la nature pour aller dans une région où il n'y a rien que leurs serres dogmatiques puissent saisir et retenir. Ils ont bien combattu ; les ombres qu'ils pourfendent se rassemblent en un clin d'œil, comme les héros du Walhalla, et ils peuvent toujours se donner le plaisir de combats peu sanglants. »

Le langage est étonnant de par son actualité. Car le caractère indécidable des propositions cardinales de la raison pure est aujourd'hui ce qu'il était hier ; à ceci près que les avancées de la science ont donné un avantage quasi décisif à ces suppôts de Satan que sont les sceptiques - car c'est bien là le cœur du problème, il ne saurait y avoir de bonne pensée qu'avec l'aide de Dieu - ; il n'y a toujours pas, pour les croyants, de combat pour la vérité, mais une hargne, qui n'a rien d'évangélique à nier ce qui tend à ne voir dans la foi qu'un engagement individuel auquel la raison est totalement étrangère. Et pourtant Kant l'exprime clairement ; il suffit de s'en remettre au tribunal de la raison pure pour que le scepticisme se résorbe de lui-même, sans que nulle polémique ne se développe: « Et quoique les coups qui ruinent l'édifice de l'ennemi soient également funestes à l'édifice spéculatif qu'il voudrait élever, si jamais il en a formé le projet, il est pourtant fort tranquille à ce sujet, puisqu'il n'a nullement besoin d'une semblable construction pour s'y loger[...]. Il n'y a donc, à proprement parler aucune polémique dans le champ de la raison pure 301». Finalement tout le monde est prêt à accepter cette conclusion de Kant, alors qu'en réalité rien n'a été réglé, puisque le philosophe entend imposer comme axiome ses propositions cardinales, et que ses ennemis ne les acceptent pas dans la mesure justement où rien ne permet de les fonder dans l'absolu. Manifestement nous sommes dans un cercle vicieux d'où Kant ne peut se sortir qu'en en appelant une fois de plus au pari de Pascal : l'homme a besoin d'un maître et se veut immortel, il faut pour sa satisfaction morale construire une philosophie reposant sur ces réconfortants principes.



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