4.2.Réformer ?
Il fois de plus en cette rentrée 2004, il est question de réforme. Des dizaines de milliers de personnes se sont réunies et constater... qu'il urgeait de revenir en arrière. Pourtant, et d'habitude de nombreuses expériences avaient donné d'incontestables résultats merveilleux, enfin selon l'avis des expérimentateurs, car c'est une constante des expériences pédagogiques que d'être toujours des réussites. Et je parle en connaissance de cause, ayant été durant ma carrière d'enseignant confronté de nombreuses fois au problème.
Une autre constance est que l'avis des enseignants de la base, ceux qui sont confrontés quotidiennement aux réalités d'une classe n'est jamais pris en compte.
Pourquoi des échecs répétés ? J'ai déjà évoqué ce que le grand physicien Planck disait des théories nouvelles et de leurs difficultés à s'imposer alors quelles supplantaient les théories officielles : une théorie ne s'impose pas pour sa valeur intrinsèque mais parce que les tenant de l'ancienne finissent par mourir ou disparaître du monde scientifique. A partir de là on peut faire deux remarques :
- les formateurs des nouvelles théories pédagogiques font nécessairement partie de la vieille école, donc ne sont pas les mieux placés pour occuper cette fonction. D'autant pus qu'on leur demande des sacrifier des méthodes qui malgré tout ont fait leurs preuves. Pas forcément de la mauvaise volonté mais sûrement de la méfiance, et sans doute une certaine incompétence370.
- les thuriféraires des méthodes modernes s'appuyant sur les propos de Planck (même s'ils ne connaissent pas le physicien), dénoncent les passéistes et les accusent de paresse intellectuelle et de sacrifier l'avenir à un conservatisme reposant. L'argument est fort mais pervers car on lui doit les échecs les plus retentissants, comme celui des mathématiques modernes.
4.3.Qui suis-je ?
Ce n'est pas une interrogation métaphysique, mais il me paraît indispensable à ce niveau de donner au lecteur (s’il en existe un, un jour), quelques indications sommaires sur mon itinéraire. Je m'excuse, car il n'est ni glorieux, ni particulièrement original.
Etudiant raté pour cause d'ennui sur les bancs, et de l'école, puis l'absentéisme aussitôt que possible. Bac, école d'ingénieur où tout me rebute. Je trouve un exutoire dans le sport, mais là aussi je ne suis pas très doué. On m'impose des études techniques ? Je perds ma passion pour les sciences et les mathématiques, et me lance à corps perdu dans la philosophie. Hegel, Kant, Heidegger, Sartre et bien d'autres, à l'exception de tous ceux que l'on m'a infligé à l'école. N'étant pas bon à grand chose je rentre dans l'enseignement, sans aucune formation. Mathématique, puis, après 28 mois d'armée, physique. Nous sommes en 1962, et n'importe qui peut, avec un vague diplôme, enseigner en science, car le professeur dûment formé, donc compétent, est une denrée rare ; au bout de quatre années de bons et loyaux services, on me fout dehors (en m'exprimant des regrets car j'avais fait, paraît-il un travail honorable.). Je me retrouve prof de math, en lycée, comme bouche-trou. Après 12 années d'enseignement dans le second cycle des lycées comme contractuel, il sera finalement décidé que je ne suis pas qualifié pour cette fonction, mais on m'offre quand même une place en collège. Titularisé par pitié mon intérêt pour l'enseignement déclinant, je deviens de plus en plus mauvais. Au fur et è mesure que mes qualités pédagogiques vont décliner, mes notes administratives vont monter. J'arriverai à 20/20, lorsque je serai devenu franchement mauvais. Ce n'était pas grave puisque j'arrivais à la retraite.
Pourquoi ce gâchis ? J'ai été envoyé en Algérie avec le sentiment d'être victime d'un viol éhonté de conscience. La France était totalement responsable de la situation algérienne. Dois-je rappeler que la révolte du peuple algérien est née d'un acte inqualifiable commis par le gouvernement français le lendemain de l'armistice du 8 mai 45. Une manifestation pacifique a lieu à Sétif. On parle partout, avec la défaite du nazisme, de liberté. Et les algériens pensent qu'il serait temps qu'ils soient libérés de l'oppression post-colonialiste, car ils sont français, mais n'ont pas les mêmes droits que les citoyens de la métropole. Alors l'ordre vient de Paris de réprimer dans le sang, cette mini rébellion. Pas de quartier tous les hommes de moins de 15ans doivent être exécutés. Bilan, au moins 40 000 mille morts. Et l'on prétend me contraindre à combattre ces gens. Je ne serai pas objecteur de conscience, à l'époque c'est une sorte de suicide social, mais manifestant, malgré des conditions difficiles371, un solide antimilitarisme, j'ai été écarté de toute zone sensible, où les témoins étaient indésirables.
C'était une large digression, je m'en excuse, mais il me semblait important de préciser pourquoi, après rien n'a été simple pour moi. Toujours est-il que je disposais de beaucoup de temps libre, et que j'ai constitué sur place ma petite bibliothèque qui a pas mal voyagé/ Koléa, à côté d'Alger, Sidi bellabès, Oran, Blida, puis petit voyage aérien à Bizerte. Retour par la mer, etc.
Pour en arriver au contenu de ma bibliothèque baladeuse qui en fin de course pèsera plus de 30kg372. Hegel avec la Science de la logique, et la phénoménologie de l'esprit, soit déjà cinq volumes dans les éditions de l'époque, les recherches logiques, de Husserl, Sartre, La critique de la raison dialectique, qui a occupé mes nuits de garde comme chef de poste, dans une ferme isolée proche l'Alger, quelques opuscules sur différentes logiques, Nietzsche, deux ou trois ouvrage dont Ainsi parlait Zarathoustra. Kant et la Critique de la raison pure j’ai également quelques opuscules d'un certain A Einstein. Et les premiers livres de Bourbaki, où je prends une connaissance assez profonde de la Théorie des ensembles. Je suis conquis totalement par le structuralisme qui domine le formidable édifice de l'ouvrage. Le fondement logique de l'ouvrage intitulé métamathématique me fait comprendre, mes propres difficultés, et surtout celles des élèves du premier cycle que j'ai eu l'année précèdent mon départ pour l'armée. Je découvre en même temps l'œuvre de Jean Piaget qui deviendra dans le domaine pédagogique, mon maître à penser.
Début 1962 je trouve un poste de prof de sciences (je l'ai déjà dit, à l'époque l'éducation nationale ne fait pas la fine bouche et ne s'attache absolument pas à la qualification des personnes qu'elle emploie). Je suis pris d'un immense désir de connaissance. Je ne peux échapper à la magie de la mécanique quantique, et tout cela fait beaucoup de chose. Mais les deux années et demie de vie perdue me donnent un désir de revanche. Je crois tout possible : Je suis assidu au déploiement du traité de Bourbaki, aux travaux d'Epistémologie génétique, dirigés par Piaget, Messiah sera mon premier maître à penser en mécanique quantique, les ouvrages sur les relativité restreinte et générale deviennent abordables, le matin, dès 6heures, je me livre à ma première séance d'entraînement en forêt. Je n'ai pas renoncé à mes ambitions sportives malgré deux années d'interruption (en fait je faisais régulièrement mon footing dans la campagne algérienne, mais j'étais interdit de compétitions, mêmes militaires.)373
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