Erda ou le savoir



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1.3.La coupure30

Supposons, avec S Hawking que la fin de la physique soit arrivée31 ; Autrement dit que la science ait atteint, avec une superthéorie, la possibilité de tout prédire et de tout expliquer concernant les phénomènes se déroulant dans l'univers. En conclusion, l'auteur se montre cependant très réservé : « Il semble pourtant probable que ces lois forment toutes une partie de quelque théorie unifiée que nous avons encore à découvrir. Nous faisons des progrès et il y a de fortes probabilités que nous découvrirons cette théorie d'ici la fin du siècle32. A première vue, il pourrait sembler que cela nous permette de tout prédire dans l'univers. Et pourtant nos pouvoirs de prédiction seront sévèrement limités : d'abord par le principe d'indétermination qui énonce qu'on ne peut pas prédire avec exactitude certaines grandeurs, mais seulement une distribution de leur probabilité, et ensuite, de manière encore plus importante, par la complexité des équations, qui les rend impossible à résoudre sauf dans des situations très simples. Nous serions donc encore très loi, de l'omniscience.» (Opus cité page 118-119). Autrement dit La fin de la physique pourrait fort bien être marquée par l'incapacité de l'être humain, dans l'état actuel de son développement mental d'aller plus loin dans la connaissance du monde de ce que nous en connaissons déjà aujourd'hui.

*

D'un coté, donc, les mythes et le sujet tout puissant33 ; de l'autre la science proposant un univers sans maître, dominé par des lois immuables, mais dont nous n'avons qu'une connaissance approximative, et qui, comme nous l'avons vu tend à éliminer le sujet pour atteindre à l'objectivité parfaite. Cependant, avec la mécanique quantique34, c'est à un retour en force de ce sujet que nous assistons. Est-ce par la même porte que le mythe revient en force ? On pourrait le croire, mais les choses sont de toute évidence, plus complexes.



Les relations d'incertitude, et d'une façon générale, les axiomes de la mécanique quantique, posés non pas arbitrairement, mais pour rendre compte de la réalité observable, ont des conséquences en telle contradiction avec l'intuition sensible que la métaphysique a beau jeu de relever la tête, et de tenter de reconquérir le terrain de cette intuition abandonné par la science35. Est-ce négligence ? Evidemment non. Incompétence ? D'une certaine façon oui ; si l'on taxe d'incompétence ceux qui refusent de prendre position sur des sujets qui ne relèvent pas, justement de leur compétence. Or la science ne peut rien faire d'autre, dans ce divorce apparent de l'intuition et des conséquences de la théorie quantique que de constater le fait, et faire cependant confiance à la théorie qu'aucun fait actuellement connu n'est venu démentir - alors que l'intuition humaine à maintes fois donné la preuve de sa faiblesse. La science ne peut guère que veiller à la cohérence de son discours, et, éventuellement, dénoncer les imprudents - ou les malins36 - qui utilisent sans vergogne des théories là où elles ne sont pas applicables.

*

Il y a une chose que le scientifique de haut niveau37 ne comprend pas très bien, c'est ce qui se passent dans la tête de ceux qui sont englués dans un contexte matériel sans attrait, pour qui les événements de la vie mentale se succèdent dans la plus complète incohérence, et qui ne prennent donc, globalement aucun sens. Cette incohérence ne fait d'ailleurs que refléter celle du déroulement des phénomènes matériels. Car enfin, c'est seulement la théorie qui donne un sens compréhensible aux phénomènes naturels. Somme toute, le discours de la science moderne s'adressant à l'immense majorité des hommes - y compris ceux qui ont atteint un certain niveau de culture - est sensiblement : « Ne vous inquiétez pas, nous commençons à comprendre... pour vous aussi, bientôt nous comprendrons.». Mais pour l'homme, aussi frustre soit-il au point de vue intellectuel, la seule vérité qui vaille est celle qu'il se sent capable d'atteindre. Et les nouveaux mages sont là, aidés par les médias, qui par ignorance ou cupidité, se font un plaisir d'aider les charlatans. Eux tiennent un discours qui a, au moins, trois vertus :



- avoir l'apparence du discours scientifique, mais en plus simple ;

- donc être compréhensible grâce à des images, suggérées parfois par les scientifiques eux-mêmes.

- ouvrir à une transcendance que la science ne peut que considérer hors de son domaine de compétence, mais qu'on lui reproche de ne pas vouloir prendre au sérieux. La science, et pas nécessairement les scientifiques, beaucoup moins athées qu'agnostiques, refuse de prendre position, non pas par conviction, mais par honnêteté intellectuelle, puisque aucune preuve n'existe, pour ou contre l'existence de phénomènes échappant aux investigations scientifiques38.

La science donne-t-elle seule, une vision Vraie de notre univers - embrassant également celui de nos consciences ; ou existe-t-il une complémentarité fondamentale de nos approches de la réalité ? Approche scientifique et approche métaphysique. Exactement comme un objet quantique a deux aspects complémentaires, soit onde, soit corpuscule, incompatible dans la mesure où s'il est appréhendé sous une forme, il cesse d'être l’autre ? Tout concept, toute lecture de phénomène se ferait selon deux points de vue qu'il serait impossible d'occuper en même temps ; scientifique et métaphysique. Comme dans le cas des phénomènes quantiques, la même personne peut occuper successivement les deux points de vue, mais jamais au cours d'une même démarche intellectuelle.

Mais le problème reste inextricable. La raison essentielle en est probablement que l'idée de transcendance colle à toutes nos pensées tant nous sommes marqués par notre histoire, et peut-être par les structures fondamentales de notre psychisme qui nous poussent hors de la matérialité pure. La science nous demande de considérer nos sentiments, nos élans, en un mot notre conscience comme des phénomènes marginaux du fonctionnement physico-chimique de notre cerveau ; c'est selon toute vraisemblance la vérité, mais de quelle vérité s'agit-il ? Car d'éminents scientifiques ne supportent pas la matérialité de l'esprit, et en appel finalement à Dieu lorsqu'il s'agit de l'origine de la conscience. Voici comment John C Eccles, prix Nobel de médecine conclut un célèbre ouvrage 39 :

« Puisque les solutions matérialistes sont incapables d'expliquer notre expérience d'unicité, je me sens contraint d'attribuer l'unicité du moi (ou de l'âme) à une création spirituelle d'ordre surnaturel. Pour m'expliquer en termes théologiques : chaque âme est une création divine nouvelle implantée dans le fœtus à un moment compris entre la procréation et la naissance. C'est la certitude de l'existence d'un noyau intérieur d'individualité unique qui rend nécessaire l'idée de cette création “divine”. Je prétends qu'aucune autre explication ne tient. Ni l'unicité génétique avec sa loterie fantastiquement impossible, ni les différentiations dues à l'environnement, lesquelles ne déterminent pas l'unicité du moi, mais ne font que la modifier.»(Opus cité page 317)

Le moins qu'on puisse dire, c'est le texte est bien éloigné d'une quelconque rigueur scientifique, et même de pensée. Plutôt qu'essayer de donner l'impression qu'il présente des preuves, l'auteur aurait peut-être aussi bien fait de nous mettre au courant de sa foi, finalement assez proche de celle du charbonnier. La grande faiblesse des métaphysiciens40 est la fâcheuse tendance de l'homme à prendre ses désirs pour des réalités41, et ne pas hésiter, pour cela, à se mentir à lui-même - ou être en contradiction avec certains fondements de sa pensée42. Le scientifique a certes, comme tous les hommes, droit au rêve ; mais peut-il impunément mélanger les genres ? La science n'est pas contre Dieu, elle est en dehors de Dieu ; pour la simple raison que Dieu apportant une réponse à toutes les questions43, admettre Dieu dans les fondements de la connaissance scientifique, c'est tout simplement nier la nécessité de la science qui ne devient plus qu'un aimable passe-temps destiné à meubler ce moment désagréable qu'est notre passage sur la terre.

*

Imaginons un instant que la science ait atteint la capacité - grâce, éventuellement à ses connaissances peut-être non encore explicitées, mais potentiellement présentes - de se tenir, à elle-même, un discours parfaitement fondé, ne laissant aucune place à une vision alternative de la vérité sur l'univers44. Autrement dit supposons que tout rêve rationnel45, extrapolation scientifiquement fondée des connaissances explicitées, soit devenu impossible46 (sans tomber dans le délire des livres et films de science-fiction dont l'intérêt n'est pas évident). Qu'en serait-il cependant pour le reste de l'humanité ? Quel crédit l'homme du commun, qu'une longue tradition philosophique appelle le vulgaire, pourrait-il accorder, à une vérité qui lui est parfaitement impénétrable - autant que les desseins de Dieu - assortie de preuves inaccessibles ?



Pour ma part je me sens, et je suis, malheureusement, beaucoup plus près du vulgaire que de l'homme de science - même si je n'ai pas ménagé mes efforts pour ne pas me retrouver totalement en dehors du monde de la science - mais je récuse l'attitude de H Laborit dont il a déjà été question un peu plus haut ; l'auteur se propose d'exposer la théorie du Bing Bang: « Je voudrais reprendre ces premiers instants, en faisant confiance aux astrophysiciens, auxquels vous serez bien obligés de faire confiance vous-mêmes.».

Obligés ! Alors que la théorie en question, même si elle a la caution de la majorité des astrophysiciens, n'est fondée que sur des conjectures dont la fragilité n'a de pareille nulle part ailleurs47. Je ne vois guère de différence entre cette demande de croyance aveugle en une vérité transitoire de la science (plus justement en la parole des scientifiques) et les exigences de soumission aux dogmes religieux. Comme dans n'importe quel pari économico politique, l'homme du commun est perdant à coup sûr ; en cas d'erreur (ce qui est la quasi certitude, on lui aura fait prendre des vessies pour des lanternes ; quant au scientifique, il plaidera le fait qu'il n'a jamais, en exposant sa théorie, prétendu posséder la vérité absolue (ce qui sera d'ailleurs vrai dans la quasi totalité des cas).


*
« L'ancienne alliance est rompue : l'homme sait enfin qu'il est seul dans l'immensité indifférente de l'univers d'où il a émergé par hasard. Non plus que son destin, son devoir n'est écrit nulle part. A lui de choisir entre le Royaume et les ténèbres.»

Peut-on oublier cette terrible et splendide fin du livre de J Monod, Le hasard et la nécessité ? Splendide comme hymne à la liberté humaine ; splendide pour ceux qui vivent l'aventure humaine de la connaissance dans sa plénitude. Terrible pour ceux qui ne connaissent que la souffrance, souffrance aussi bien physique que morale.

Le Royaume, dont nous parle Monod est bien évidemment celui de l'épanouissement de l'homme dans la connaissance, dans la Vérité. Il est bien évident, pour Monod, que le seul espoir de l'homme - ou plutôt de l'individu48 - est de se réaliser dans ce monde. De se réaliser, en participant à cette glorieuse mais hypothétique marche vers la vérité. Mais quels moyens, quels instruments, possédons-nous, nous, hommes du commun pour que ce rêve de vérité ne soit pas une utopie de plus, rêve aussi vain que l'espoir millénaire d'une vie meilleure ? Devons-nous, comme pour le reste, nous satisfaire de voir ce rêve se réaliser pour les autres ? Toutes les religions ont imaginé un monde autre que celui où nous vivons ; un monde de justice et d'égalité, mieux encore, un monde où les inégalités de ce monde ci sont réparées, compensées par une vie meilleure, les derniers seront les premiers. Il fallait de fieffés coquins pour imaginer une telle supercherie...et que l'enjeu soit d’importance : pour maintenir sous le joug des peuples immenses qui pourraient en un instant balayer tous les privilégiés tant les rapports de forces sont inégaux. Mais la science, malgré l'immense estime que j'ai pour la pensée de Monod, nous offre-t-elle autre chose, elle qui quotidiennement donne des preuves de sa collusion avec les profiteurs et les assassins49. Celui qui s'investit dans la science (ou la connaissance, en général), qui à l'instar d'un haut responsable d'un état s'identifiant avec son pays, fait corps et esprit avec elle peut tolérer, sans doute - et on peut finalement le comprendre - l'idée des sacrifices à faire pour la servir, mais les autres ; ceux qui crient :

« Vous là-bas ! Moi aussi je suis humain : moi aussi j'ai des idées, des rêves, des sentiments, des désirs ; moi aussi j'ai été créé à l'image de Dieu, mais vous n'avez jamais fait attention à mon monde dans vos jolis contes.»50



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