Journal intime



Yüklə 434,99 Kb.
səhifə7/11
tarix16.11.2017
ölçüsü434,99 Kb.
#31909
1   2   3   4   5   6   7   8   9   10   11

Hier soir, nous sommes allés voir la dernière pièce de notre saison d'abonnement au TNP: "Les Iris" de Georges Lavaudant. Plus qu'une pièce, c'est une suite d'essais dramatiques, des nouvelles théâtrales, parfois sans relations entre elles, parfois se répondant en écho. C'est un peu mince, intéressant et bien écrit, mais sans doute pas indispensable. Je ne pense pas que Joëlle ait aimé, mais nous n'en avons pas parlé. Avant même la représentation, elle se plaignait de ces abonnements qui nous obligent à sortir lors même que nous préférerions faire tout autre chose. Je crains cependant que si nous ne nous mettions pas en situation d'être forcés à aller au spectacle, la paresse l'emporterait et nous renoncerions souvent à aller voir des pièces ou des opéras qui nous plaisent et dont nous ne regrettons pas ensuite qu'elles nous aient distraits de nos occupations courantes. Certes, il y a forcément du déchet et si l'on voulait gagner à tous les coups, on n'irait voir que des grands classiques, se privant de toute la richesse des recherches dramatiques contemporaines. Comme je n'ai pas l'intention d'aller seul au théâtre, je crains bien que nos sorties au TNP ne touchent à leur fin.

J'ai beaucoup de mal à intéresser Joëlle à l'informatique. Elle a beau dire qu'il faudrait absolument qu'elle s'initie à cette technique dont la méconnaissance risque de la gêner dans son travail, dès que je lui parle de ce que je fais, je sens que je l'ennuie. Impossible de lui faire admirer les résultats obtenus avec des progiciels que je juge géniaux (EXCEL, par exemple): elle trouvera toujours à redire et ne voit rien qui justifie mes enthousiasmes. Elle a de toutes façons une prévention contre ces machines et contre leurs répercussions. Samedi, Marcel, qui n'a pas la même passion que moi pour la micro-informatique, bien qu'il soit amené par son travail à l'utiliser quoti0diennement, faisait part de ses craintes de voir l'ordinateur supplanter le contact direct avec la chose écrite. Moi qui suis passionné par les perspectives qu'offrent les nouvelles technologies, de l'hypertexte aux bases de données multimédia en passant par les livres virtuels, et qui pensent que l'ordinateur, loin de mettre l'imprimé en péril, en multiplie les possibilités et en facilite l'usage, je me suis senti bien seul.

Samedi 20 juin 1992 (21h.33)


Malgré mes inquiétudes, le stage s'est bien déroulé. Certes, il n'y avait rien de trop et, face à un public plus exigent ou plus retors, j'aurais pu être mis en difficulté, car je suis loin de connaître à fond tous les logiciels dont nous avons parlé. Heureusement, il ne s'agissait que d'une initiation, un aperçu destiné à donner les rudiments d'une culture informatique, et non une formation spécialisée prétendant enseigner la maîtrise des produits sur lesquels nous avons travaillé. C'est surtout le temps qui m'a manqué, étant donné la quantité d'informations que je voulais faire passer et mon inexpérience de ce style de stage. Je ne sais pas encore quand aura lieu une nouvelle session de cette formation, mais je ne manque pas de travail pour mettre au point un cours parfait, ainsi qu'un support convenable pour l'accompagner. Je suis, dans l'ensemble, satisfait, et cependant j'étais soulagé, hier soir, de voir se terminer ces trois jours qui ont exigé de moi un travail et une tension intensifs. je m'étais promis, à l'issue de ce stage, de souffler un peu, mais, avec toutes les tâches que j'ai laissé de côté pour me consacrer entièrement à ma mission, je sais d'avance que je ne pourrai dormir sur mes lauriers la semaine prochaine.

Nous voici déjà presque à la fin du mois de juin et nous continuons de subir les assauts du mauvais temps. Presque chaque jour nous amène son orage et, pour un jour de soleil, nous avons droit à plusieurs journées grises. La température passe d'un extrême à l'autre, le soleil, quand il daigne se montrer étant déjà chaud.

Diamnche 21 juin 1992 (21h.20)
A l'occasion de la Fête des Pères, nous avons réuni aujourd'hui nos trois filles à la maison. Yaël est venue seule, François ayant une répétition dans l'après-midi. Lionel, par contre, était là, mais je crois qu'Aurore s'en serait bien passée, car elle cherche par tous les moyens à s'en débarrasser et à lui faire comprendre qu'il est de trop, mais lui s'accroche désespérément, ce qui est compréhensible. Je pense qu'il ne s'écoulera pas longtemps avant que ces deux-là se séparent. Ce sera dommage pour Grégory, qui mériterait plus que cette errance à laquelle le condamne les difficultés sentimentales de son père. Pour Lionel qui n'a rien d'autre que ce foyer qu'il avait commencé de bâtir avec notre fille, cet échec sera difficile à assumer et nous redoutons ses réactions qui sont aussi imprévisibles qu'inquiétantes.

Compte tenu de l'importance que l'informatique a prise pour moi, mes filles m'ont offert un siège adapté aux longues heures que je passe devant mes écrans. En outre, Blandine m'a acheté un tapis pour souris, idée que j'avais moi-même suggérée.

Le repas nous a donné l'occasion d'ouvrir une bouteille vénérable qui ne nous a pas déçus: un Rioja de 1970, cadeau du père d'Alberto. Par comparaison, le Paniza de 1966 qui a suivi nous a semblé un peu plat.

C'était également aujourd'hui la fête de la Musique, ce qui a eu pour résultat que Blandine, qui était déjà partie ce matin à la voltige, s'est éclipsée à peine terminé le repas pour aller jouer dans les rues avec ses collègues du "Quatuor de Fourvière". Déjà hier, elle était rentrée fort tard, et je sens que ce soir elle va encore nous faire coucher à des heures impossibles. Et comme demain matin Joëlle doit partir de bonne heure à Cluses, la semaine va encore commencer avec de la fatigue. Si seulement j'étais assez raisonnable demain soir pour ne pas veiller trop tard, je pourrais arriver à récupérer, mais l'absence de Joëlle risque de m'ôter un frein salutaire.

Je ne sais pas depuis combien de temps ma mère est à Rumilly, mais ce que je sais c'est que sa présence ne me manque pas du tout et que, bien au contraire, je ne suis pas fâché de pouvoir souffler un peu.. Je ne perds rien pour attendre, et, dès qu'elle rentrera, je retrouverai les problèmes à régler et le courrier à faire, mais du moins, pendant quelques semaines, je me serai senti un peu libre.

Lundi 22 juin 1992 (20h.50)


Hier, c'était également la Fête-Dieu, et je pense que c'est pour cela que la première communion d'Aline avait lieu à cette date. Aline, que je n'ai pas revue depuis Noël et à laquelle je pense souvent; Aline, auprès de qui je trouve la gentillesse et la tendresse que me refuse Blandine.

J'ai attendu jusqu'à une heure et demie du matin le retour de Joëlle et de Blandine. J'ai travaillé à ma base de données de proverbes espagnols qui, de ce fait, a bien avancé. Puis j'ai poursuivi la lecture du passionnant roman de Barbara Wood que j'ai actuellement à mon chevet. Mais je n'ai pas eu le courage de tenir plus longtemps. Bien que nous nous soyons levés à six heures moins le quart, je ne sens cependant pas trop la fatigue.

Je ne croyais pas si bien dire hier: ma mère est revenue et m'a téléphoné tout à l'heure. Bien entendu, il y a du courrier à faire et des problèmes à régler.

Je fais de moins en moins de différence entre mon travail personnel et mes activités professionnelles. La confusion joue dans les deux sens, car si je n'hésite pas à préparer mes formations à la maison, je n'ai pas non plus de scrupules à utiliser mon temps et mon matériel au CIRTIL à des fins personnelles. Le plus délicat, c'est d'arriver à gérer son temps et à ne pas oublier ses obligations lorsque l'on est embarqué dans la résolution de problèmes qui ne relèvent pas de la fonction pour laquelle on est rémunéré. C'est ainsi qu'aujourd'hui j'ai effectué des copies et des essais de logiciels dont j'ai imprimé la documentation sur mon imprimante de travail. Cela peut paraître répréhensible, mais, après tout, mes cours se nourrissent de tout ce que je fais, tant au CIRTIL que chez moi.

Après une belle et chaude journée, comme celle d'hier, nous ne pouvions avoir, aujourd'hui, autre chose que la pluie et le froid. Nous rêvons de sorties au bord de l'eau, sous un soleil écrasant, de chaleur caniculaire, d'étés aragonais...

Mercredi 24 juin 1992 (20h.54)


Aujourd'hui, c'eût été l'anniversaire de monsieur Henry. Je ne sais pas s'il y en a beaucoup, au CIRTIL, qui y ont pensé. Pour ma part, il ne se passe pas de jour où, au travail, son souvenir ne me revienne en mémoire. Ce n'est pas que sa mort m'ait touché plus que celle d'Antonio, mais je revis constamment son absence. Ma position particulière, les commodités dont je profite, tout ce qui me fait prendre goût au travail que je fais, c'est à lui que je le dois. Il n'est pas question de l'idéaliser, et je sais bien que ma carrière ne prendrait sans doute pas l'orientation qu'elle est en train de prendre s'il était encore là, car il se montrait réticent pour s'engager dans l'aventure de la micro-informatique. Mais, après tout, c'est lui qui m'a permis, juste avant son départ, de suivre la formation qui m'a permis à la fois d'asseoir mes connaissances et de faire reconnaître mes nouvelles compétences.

Il aurait eu aujourd'hui cinquante-trois ans. Lui qui n'aimait pas avouer son âge, il n'aura pas eu l'occasion de vieillir. Où en serai-je, dans huit ans? C'est une banalité de dire que nous sommes peu de choses et que la vie est courte, mais cela n'en reste pas moins une vérité qui se rappelle à nous dans ces occasions et tempère nos illusions.

Samedi 26 juin 1992 (10h.51)
Dispute avec Joëlle, hier matin. Au départ, il s'agissait d'une broutille, un désaccord sans importance que j'ai, dans un premier temps, pris à la légère, le mettant sur le compte d'une irritation circonstancielle. A la longue et en y réfléchissant tout au long de la journée, ce qui m'a blessé et que je ne parviens pas à effacer de mon esprit, c'est l'image de moi qui se dégage de ses propos. Ce qui m'attriste également, ce sont toutes les rancoeurs enfouies qui ressurgissent à l'occasion d'un tel accrochage, comme si l'attitude habituelle de Joëlle n'était qu'une façade qui disparaît au premier incident. Au fond, je doute de son amour. Je sais bien, de toutes façons, que j'ai perdu depuis longtemps l'auréole dont elle m'avait paré jadis. Nous avons évolué chacun de notre côté et chacun à notre manière, au point qu'il est difficile de trouver maintenant un terrain sur lequel nous puissions nous retrouver et nous comprendre. L'entente entre nous a-t-elle jamais véritablement existé? Il y a toujours eu entre nous des problèmes qui ont empêché un accord parfait. Et maintenant, il est sans doute trop tard pour faire marche arrière et recoller les morceaux. Je sais bien que, pour sa part, elle regarde de plus en plus à l'extérieur, et je la soupçonne de rester avec moi plus par commodité et par souci de ses intérêts matériels que par véritable attachement. En ce qui me concerne, je me retrouve toujours aussi seul, n'ayant aucune amitié qui puisse me faire oublier mes échecs et m'apporter un réconfort que je ne peux espérer ni de ma femme ni de mes files.

Dimanche 28 juin 1992 (21h.34)


Hier, vers midi, coup de téléphone de Lionel effondré qui me demande conseil et réconfort. Situation délicate, car je ne veux ni le bercer d'illusions, ni le pousser au désespoir. Je ne peux lui cacher que je suis - en partie - au courant des problèmes de leur couple, mais, outre qu'Aurore a fait ses confidences à sa mère et non à moi, je regrette qu'elle n'ait pas eu le courage de lui dire plus clairement ses intentions et qu'elle n'ait pas profité de l'occasion d'une discussion pour en terminer une bonne fois avec cette liaison qui n'en finit pas de mourir, si sa résolution est vraiment prise de vivre avec ce Patrice qui, soit dit au passage, a fait une impression déplorable à Yaël. Ce que j'ai dit à Lionel, c'est que notre porte ne lui serait jamais fermée, pas plus qu'à Grégory, auquel je me suis attaché, et je souhaite même que, si Aurore cesse toute relation avec lui, nous continuions de les voir tous les deux.

Contrairement à nos habitudes, c'est moi qui ai répondu au téléphone, parce que Joëlle était couchée, terrassée par une crise de foie, comme elle en a assez régulièrement. Elle a passé la moitié de la journée au lit, mais le soir elle allait bien de nouveau.

Durant cette fin de semaine, nous avons eu un très beau temps et, de ce fait, il s'est mis tout de suite à faire chaud. Nous n'en avons guère profité, à la fois parce que nous sommes trop pris par les activités dont nous n'arrivons pas à nous détacher et parce que nous ne nous attendons pas à voir arriver le soleil. Nous sommes allés voir ma mère, que nous n'avions pas dû voir depuis plus d'un mois. L'idéal serait de ne pas la voir plus souvent: nous la supporterions sans doute mieux et nous sentirions moins à quel point sa conversation est vide.

Nous savons maintenant que nous aurons au moins une visite cet été: Jordi a téléphoné ce soir pour nous annoncer leur venue la première semaine d'août. Il reste maintenant à décider Jenaro à venir la semaine suivante.

En attendant, nous commençons à mettre sur pied des projets de sortie: ce n'est pas trop tôt, car, même si j'appréciais de disposer de temps pour me livrer à mes passions informatiques, j'éprouvais le besoin de partir et de voir du monde. La semaine prochaine, nous devons aller à Grenoble; pour le 14 juillet, Joëlle veut organiser une rencontre familiale en Saône-et-Loire, avec sa mère et sa soeur. Le 25 juillet, nous devons amener Blandine à Conches, pour son stage d'équitation, et ce sera peut-être l'occasion de faire un peu de tourisme (Vézelay?).

Mardi 30 juin 1992 (18h.40)


Depuis hier, la circulation dans Lyon est une épreuve pour laquelle il faut beaucoup de patience et d'ingéniosité. L'instauration, à partir de demain, d'un système de permis à points suscite un mouvement de protestation de la part des transporteurs qui, une fois de plus, prennent en otages des utilisateurs qui n'en peuvent mais. Les accès autoroutiers sont bouchés et, dans le centre, les embouteillages prennent des proportions inhabituelles. On ne peut pourtant pas légaliser les infractions et admettre des tolérances pour des usagers qui,en bonne logique, devraient montrer l'exemple! Malheureusement, l'épreuve de force est engagée et, si chacun campe sur ses positions, risque de se prolonger, voire même de se durcir.

Lionel, du moins, aura échappé à ces problèmes: il est rentré à l'hôpital pour soigner la dépression dans laquelle l'a plongé l'attitude d'Aurore. Il semblerait que, contrairement à ce qu'il m'avait dit au téléphone hier matin, il ait remis sa démission à son employeur. Lorsqu'il se rendra compte que la partie est finie et qu'il n'y a pas d'espoir de reprendre la vie commune avec Aurore, je crains qu'il ne se laisse complètement aller. De ce côté là, les perspectives sont préoccupantes.

Le beau temps n'aura pas duré longtemps: dès aujourd'hui, la pluie est revenue, au risque de faire baisser de nouveau une température qui commençait à prendre des airs d'été.

Hier soir, j'ai commencé de donner à Joëlle et Blandine leur premier cours d'informatique. Cela va me prendre, durant le mois de juillet, toutes mes soirées, mais si cela change l'attitude de Joëlle, je n'aurai pas perdu mon temps. Un seul problème: mon imprimante est tombée en panne. Heureusement, elle en encore sous garantie. Mais comme je suis en rupture de stock d'encre au CIRTIL, je ne peux même pas avoir recours à ma "laserjet", qui refuse désormais tout service.

Jeudi 2 juillet 1992 (22h.31)
Hier, je me sentais abattu et découragé. Outre la fatigue, il y avait les problèmes matériels (panne d'imprimante et de cafetière, difficultés croissantes de la circulation, temps épouvantable...) et le souci pour l'avenir et la santé de Lionel. En outre, je ne suis pas satisfait du déroulement de la formation que je donne à Blandine et à Joëlle. C'est surtout Joëlle qui me pose des problèmes, avec son attitude négative et ses exigences sans lesquelles le cours pourrait avancer beaucoup plus rapidement et de façon beaucoup plus profitable.

La situation n'a guère changé aujourd'hui: les accès à Lyon sont plus que jamais bouchés et l'approvisionnement commence à devenir problématique. Tout au plus, il m'a semblé qu'il y avait un peu moins d'encombrement en ville, peut-être parce que l'essence manque. Le temps est toujours aussi pluvieux. Je n'ai pas trouvé le temps de porter à réparer mes appareils, qui, de toutes façons, seraient restés bloqués. Aurore ne nous a pas donné de ses nouvelles ni celles de Lionel depuis le début de la semaine.

Pourtant, je me sens moins touché par toutes ces contrariétés qui devraient, avec le temps, trouver une solution. La seule chose qui suscite en moi un peu d'irritation c'est qu'alors que je m'apprêtais à passer une soirée tranquille, je viens de perdre une heure et demie au téléphone avec Janine qui me raconte sa vie et celle de Marcel. J'aime bien Janine, mais j'eusse aimé pouvoir abréger une conversation qui tendait à s'éterniser.

J'ai fini aujourd'hui "Séléné" de Barbara Wood, roman historique remarquablement documenté, mais surtout constamment original et imprévisible. Beaucoup d'idéalisme et de grandeur de vue font de ce feuilleton une oeuvre qui impose le respect.

Les traditions ne se perdent pas: nous avons célébré aujourd'hui au CIRTIL notre repas de départ en vacances. Dommage que c'ait été l'occasion de deux maladresses de Lassonde. Tout d'abord, il était pour le moins inélégant de ne pas inviter à l'apéritif les personnes de Saint-Etienne qui étaient dans nos murs à l'occasion d'une formation. Ensuite, s'il était admissible de faire à monsieur Catalano une réflexion sur son intempérance, il fallait aller jusqu'au bout et ne pas se laisser enferrer dans une discussion où l'autorité du directeur adjoint et peut-être bientôt directeur se trouvait bafouée.

Samedi 4 juillet 1992 (9h.20)


Les difficultés pour entrer ou sortir de Lyon ainsi que la pénurie de carburant, conséquences de la grève des transporteurs, nous ont fait renoncer à nous rendre à Grenoble cette fin de semaine. Pour une fois que nous nous étions organisés pour sortir, nos projets tombent à l'eau. Il risque d'en être de même pour notre voyage en Saône-et-Loire, mais pour d'autres raisons: le peu d'empressement de Pascale à nous recevoir nous dissuade de mettre notre dessein à exécution.

En discutant avec Lionel, hier matin au téléphone, j'ai eu sur cette grève des camionneurs un autre point de vue que l'image schématique qui nous en est donnée habituellement. A l'en croire, ce n'est pas tant le permis à points qui est en cause que les conditions de travail des routiers. Dommage que cet aspect du problème ne soit pas suffisamment mis en avant: cela ferait plus facilement accepter ce mouvement de revendication par les automobilistes bloqués ou les citadins perturbés dans leur vie quotidienne.

En tout cas, ce qu'il y avait de plus positif dans ma conversation avec Lionel, c'était de le voir s'animer et s'intéresser aux problèmes extérieurs. On m'a rassuré sur son état à l'hôpital et je pense qu'il ne tardera pas à sortir. Après, il lui restera à affronter les problèmes non résolus sur lesquels le recul lui aura permis de porter un autre regard. Je lui ai proposé de venir loger chez nous à sa sortie de l'hôpital jusqu'à ce qu'ils y voient plus clair tous les deux et prennent une décision sur leur avenir.

En ce qui concerne Gérard, les problèmes sont plus simples: il semblerait que ses ennuis de santé proviennent de calculs dans la vésicule biliaire, et il doit, après une grave crise la semaine dernière, être opéré mercredi prochain. Espérons qu'il n'y a pas d'erreur de diagnostic et qu'après cela il sera enfin tranquille.

Dimanche 5 juillet 1992 (19h.41)
Hier, déjeuner et après-midi passés avec madame Poupignon. Elle est toujours aussi vive, presque trop, au point de ne pas écouter toujours ce que l'on a à lui dire et de trancher péremptoirement dans les débats. Sa conversation est intéressante, malgré cette tendance à suivre son chemin en oubliant le sens de l'échange. Comme personne n'est parfait, elle manque totalement de sens pratique, ce qui ne va pas sans lui poser des problèmes matériels qui me font sourire quand ils ne m'énervent pas. Nous allons avoir l'occasion de vérifier si nous sommes capables de la supporter en vivant avec elle plus longtemps que les quelques heures que nous passons épisodiquement avec elle: dimanche prochain, si les routes sont libres et les réservoirs pleins, nous l'emmènerons dans son mas de Villecroze, projet que nous avions déjà formé il y a bien longtemps et que nous n'avons encore jamais réussi à réaliser.

Dans l'après-midi, j'ai eu un appel téléphonique d'Aline, qui voulait nous informer que Véronique avait trouvé un camping en Saône-et-Loire pour mettre à exécution notre projet d'excursion. J'étais navré de les décevoir et, à défaut de faire ce voyage, j'aimerais bien que nous nous retrouvions, mais ce n'est pas facile d'organiser quelque chose.

Aujourd'hui, nous avons rendu visite à Lionel, à l'hôpital Saint-Jean de Dieu. L'ensemble architectural et le parc qui l'entoure constituent un cadre agréable et reposant, mais cela a tout de même un côté déprimant. Lionel était un peu assommé par les médicaments lorsque nous sommes arrivés et je l'ai trouvé moins vif que lors de notre entretien de vendredi. Ce n'est sans doute pas la visite d'Aurore qui lui aura remonté le moral, car elle paraissait rien moins qu'affable, et, s'il n'a pas compris qu'il n'y avait plus d'espoir, c'est qu'il refuse de regarder la réalité en face.

Après cela, nous sommes allés à Saint-Fons, réparer les bêtises de Georges, qui s'était mis en tête d'arranger l'installation électrique de la cuisine. Trois fois, hier, j'ai été dérangé par lui ou par ma mère, parce qu'après avoir démonté les fils que j'avais posés, il était incapable de retrouver comment il fallait effectuer le montage. Et aujourd'hui, il a bien fallu aller voir l'étendue des dégâts, heureusement sans gravité.

Lundi 6 juillet 1992 (21h.04)
Tout va à vau-l'eau au CIRTIL. Lassonde est parti en vacances sans demander son reste. Il n'est même pas repassé au bureau vendredi soir, comme prévu, pour liquider les problèmes courants et montrer qu'en toutes circonstances il gardait le souci de ses responsabilités. Dans ces conditions, comment aurais-je des scrupules à m'occuper plus de mes affaires que de celles du service? D'ailleurs, c'est toujours de l'informatique que je fais, même si je passe plus de temps sur les micro-ordinateurs que devant les terminaux du système national. De toutes façons, je suis toujours là lorsque une URSSAF m'appelle au secours. Mais je ne fais pas de zèle sur un sujet dont j'ai quelque peu épuisé les charmes et dont il ne nous reste à traiter que les défauts et les lacunes.

Le temps est toujours aussi pourri. La pluie est presque tous les jours au rendez-vous et, même si la température est maintenant plus élevée, c'est un été bien triste que nous nous apprêtons à passer.

Le conflit avec les chauffeurs routiers est entré dans sa deuxième semaine, mais il commence à donner des signes d'essoufflement. Il restera ensuite à réparer les dégâts qu'entraîne toujours ce genre de mouvement evendicatif et à en chiffrer le coût. C'est ainsi que les pays riches gaspillent leur capital. Ailleurs les hommes s'entre-tuent, pour des raisons insignifiantes qui leur semblent primordiales. La Terre serait un paradis si les hommes n'étaient pas si stupides et bornés.

Vendredi 10 juillet 1992 (20h.56)


La semaine se termine et me voici libéré du travail jusqu'à mercredi prochain. J'en suis bien aise, même si je serais mal venu de me plaindre de ma situation au CIRTIL. En effet, en dehors de mes interventions d'assistance pour répondre aux appels au secours de nos adhérents, je peux dire que, durant toute cette semaine, je n'ai travaillé que pour moi, et le fait est que cela m'aura.été très profitable. Malgré tout (ou à cause de cela), je suis toujours très fatigué et la perspective de partir trois jours à Villecroze n'est pas faite pour me déplaire, d'autant plus que ce sera une occasion de me changer les idées et de sortir de ce cercle fermé dans lequel je tourne de façon presque obsessionnelle depuis presque huit mois. Il ne faut pas compter sur le beau temps, car, en dehors d'une éphémère apparition du soleil mercredi, nous sommes maintenant habitués à la présence presque constante de la pluie qui semble vouloir nous poursuivre tout l'été.

Gérard a été opéré mercredi et, comme l'ablation de sa vésicule a pu s'effectuer sans ouverture, il devrait être rapidement sur pieds. Mais il a de nouvelles inquiétudes sur sa santé, car, à l'occasion des radiographies réalisées à la clinique, on lui a trouvé une tache sur un poumon, et il se voit déjà menacé.


Yüklə 434,99 Kb.

Dostları ilə paylaş:
1   2   3   4   5   6   7   8   9   10   11




Verilənlər bazası müəlliflik hüququ ilə müdafiə olunur ©muhaz.org 2024
rəhbərliyinə müraciət

gir | qeydiyyatdan keç
    Ana səhifə


yükləyin