XXI
UN COUP DE KANDJAR
Le Directeur de l’intérieur, les agents étaient partis. Seul Canetègne demeurait les pieds cloués au sol, près de la ligne fictive limitant les possessions françaises. Dans son cerveau grondait l’orage. Tout ce qu’il tentait contre ses adversaires échouait piteusement. La police elle-même le secondait avec mollesse, pour ne pas dire avec mauvaise volonté.
Il rêvait ainsi lorsqu’une main se posa sur son épaule. Il tressaillit, leva la tête et reconnut le ramousi Nazir qu’il avait embauché à Mahé. L’Hindou riait. Il s’était tenu à l’écart durant l’entretien précédent. Il avait observé et deviné ce qui se passait. L’Avignonnais le regarda avec colère.
– Tu ris ? commença-t-il.
– Oui, parce que j’avais raison en te disant : le kandjar est l’ami le plus sûr.
– Oui, peut-être.
Dans son irritation, Canetègne, rebelle par nature aux moyens violents, arrivait à en admettre l’utilité.
– Écoute, Sahib, ce que Nazir a pensé.
– Parle.
– Les pays français sont trop peu étendus. Ceux que tu chasses t’échapperont toujours. Il faudrait les arrêter en un point de l’Inde anglaise, assez longtemps pour que tu puisses obtenir leur arrestation de la police britannique.
– Et le moyen ?
– Ils fuient vite, donc ils emploieront le cheval de feu.
– Hein ?
– Le railway, comme disent les blancs. À Madras, ils seront obligés de reprendre la mer pour gagner Yanaon. Viens à Madras. Je prendrai passage sur le même navire qu’eux et…
Le Ramousi termina sa phrase par un geste expressif. Sa main caressa la poignée du kandjar recourbé qui ne le quittait jamais. Puis, tranquillement, comme s’il se fût agi de la plus licite des besognes :
– Combien te faut-il de jours pour tes démarches auprès du gouvernement de l’Inde britannique ?
– Trois semaines, un mois.
– Bon. Partons pour Madras. Là, tu attendras de mes nouvelles et agiras aussitôt que je t’informerai de la réussite de mon projet.
Canetègne se leva sans ajouter une parole. À son tour il quitta le territoire de Pondichéry et se dirigea vers la plus prochaine station du South India Railway.
Le 18 avril, à deux heures, il descendait à la gare de Madras. Sur le conseil de Nazir, il s’enferma dans une chambre d’hôtel. Quant au Ramousi, il se mit en quête des amis de Mlle Ribor. Il avait calculé juste. Ceux-ci, vu l’impossibilité de gagner Yanaon par terre, avaient résolu de rejoindre à Madras un steamer de la British India Company, et de ne pas quitter le navire jusqu’à Calcutta. À l’escale d’Yanaon, l’Américaine descendrait à terre, et de Calcutta elle se rendrait à Chandernagor afin de s’enquérir, dans l’une et l’autre enclave, du voyageur Antonin. Ainsi, tous les établissements auraient été visités ; il était évidemment inutile de se rendre dans les factoreries ou loges que nous possédons à Surate, Calicut, Mazulipatam, Balassore, Dakkou, Patna et Jangdia.
En avance de quelques heures sur Canetègne, tous avaient atteint Madras. Le vapeur Nerbadah, qu’ils devaient prendre à Pondichéry lors de la rencontre fâcheuse de l’Avignonnais, était attendu dans la soirée et ne repartirait qu’au jour. Ils retinrent leurs places à l’agence maritime, puis tranquilles de ce côté, ils songèrent à se reposer. Douze heures passées en chemin de fer justifiaient cette préoccupation. Malheureusement, vers le soir, ils crurent bon de s’assurer que le navire attendu était en rade. Et Nazir qui, depuis son entrée dans la ville, se tenait en sentinelle vigilante aux abords de l’appontement de l’embarcadère, les rencontra.
L’Hindou eut un sourire de satisfaction. Adroitement il se rapprocha des voyageurs, saisit au vol leurs questions au sujet du départ du steamer, et bien renseigné, retourna à l’hôtel où Canetègne l’attendait.
Aussi, lorsqu’à six heures du matin, par un temps couvert, le Nerbadah quitta la rade de Madras, il emportait, avec les compagnons d’Yvonne, le « bravo » gagé par son mortel ennemi. Il ventait frais, la mer était dure. La plupart des passagers demeuraient enfermés dans les cabines.
Le Ramousi eut donc toute liberté d’action. Il en profita, du reste, et apprit avec joie que Marcel et ses amis s’étaient réservé l’usage exclusif d’une cabine par personne. Chacune contenant deux couchettes superposées, il est de coutume de la partager avec un passager, mais miss Diana avait une trop haute idée du confort pour se plier à pareille incommodité. Elle avait insisté de telle sorte, que l’on s’était rendu à ses raisons. Et Marcel était seul ; Marcel, que l’Hindou avait choisi pour victime, pensant, comme un diplomate européen, qu’il faut priver une troupe de son chef pour la réduire à l’impuissance.
La brise tomba peu à peu. Le pont se peupla de « terriens » en toilettes claires. Ladies aux longues dents, officiers, banians vêtus de cotonnades à fleurs, radjahs avec leur suite brillante.
À la nuit, le paquebot mouilla en rade de Bellore. Le lendemain, il prolongea la côte des Circars, eut un court arrêt à Mazulipatam et jeta l’ancre, à la nuit, à l’embouchure de la rivière Godavery, sur les bords de laquelle se trouve l’enclave française d’Yanaon. Le Nerbadah devait rester sur son ancre le jour suivant, et Diana se proposait de remonter jusqu’à la ville de grand matin. En conséquence, elle souhaita le bonsoir à ses compagnons de voyage et se retira dans sa cabine, bientôt imitée par Yvonne, William et Claude.
Marcel resta seul sur le pont. Il songeait, non à la cité d’Yanaon, jadis la capitale d’un empire conquis par Dupleix et Bussy, dont les Anglais nous ont restitué, en 1839, une parcelle minuscule, mais à Yvonne. Ils ne se parlaient presque plus, évitant de se trouver ensemble, chacun s’enfonçant de plus en plus dans son erreur. La poursuite d’Antonin Ribor devenait nerveuse, exaspérée… Le sous-officier, la jeune fille, avaient hâte de l’atteindre, afin que le voyage fût terminé, qu’ils pussent se séparer, briser la chaîne qu’un amical dévouement avait rivée à leurs corps. Car ils le comprenaient, ou croyaient le comprendre, pas d’autre solution n’était possible.
Dalvan n’avait pas une seconde songé à renoncer à la recherche du jeune explorateur, et pas une fois, Mlle Ribor n’avait pensé qu’elle pût être abandonnée par son frère de lait. Penché à l’arrière, bercé par le clapotis des vagues se brisant sur la coque du steamer, Simplet se laissait aller à sa tristesse. Tapi derrière un rouleau de cordages, ramassé sur lui-même comme pour bondir, le Ramousi l’observait.
– Allons, prononça tout haut Dalvan, le mieux est encore de me coucher. À la cabine, maudit rêveur ; là au moins tu oublieras en dormant.
Glissant sur le pont ainsi qu’un spectre, Nazir gagna aussitôt l’escalier et plongea dans la pénombre des coursives. Marcel n’avait rien vu. Il quitta sa place, et lentement, de cette allure lasse de ceux qui ne sont point pressés d’arriver, il descendit à son tour dans le couloir des cabines. Mais au lieu de se diriger tout de suite vers la sienne, il alla d’abord écouter à la porte de sa sœur. Aucun bruit.
– Elle repose, murmura-t-il encore.
Et revenant sur ses pas, il prit le chemin de l’étroite chambrette dont il disposait.
– Tiens, fit-il en poussant la porte, je n’avais pas fermé.
Sans attacher d’importance à cette remarque, il entra et commença à se dévêtir. Il tournait le dos aux deux couchettes étagées. Soudain, au bord de la plus élevée, une figure noire aux yeux brillants se montra. C’était le Ramousi. Il considéra le jeune homme et brusquement bondit sur lui. Renversé par le choc, Dalvan ne poussa pas un cri. Le bras de l’assassin se leva, la lame de son kandjar descendit dans un éclair et s’enfonça avec un bruit mat dans l’épaule du sous-officier.
Son crime accompli, l’Hindou s’élança vers la porte, la referma et courut se verrouiller dans sa cabine en ricanant :
– Canetègne-Sahib a tout au moins un mois devant lui !
Simplet était étendu sur le plancher de sa cabine, au milieu d’une mare de sang qui filait en rigole vers la porte. La violence du coup lui avait fait perdre connaissance. Bientôt cependant il rouvrit les yeux. Il regarda autour de lui, ne comprenant pas. Puis le souvenir lui revint. Un corps lourd était tombé sur lui et l’avait précipité à terre. Qu’était-ce ? Il voulut se lever pour s’en assurer, mais une douleur aiguë parcourut son épaule droite, amena un frisson qui le fit trembler de tout son être. Alors il s’aperçut qu’il était mouillé ; sa main baignait dans le sang. La réalité lui apparut ; il était blessé.
D’un effort surhumain, il réussit à s’asseoir. De nouveau la douleur le reprit. Il grinça des dents, sentant perler à ses tempes des gouttes de sueur. Mais la saignée abondante l’avait affaibli, ses yeux se troublèrent ; il rassembla ses forces pour appeler, un faible gémissement sortit de ses lèvres contractées. Autour de lui tout tournait, sa cabine lui semblait montée sur un pivot, les couchettes décrivaient des cercles. Puis, ses oreilles s’emplirent de bourdonnements, les cloisons se strièrent de raies de feu, et il retomba en arrière privé de sentiment.
Dans le couloir des cabines, un passager noctambule passa. Soudain son talon glissa sur une surface humide.
– Qu’est-ce ? fit-il à haute voix.
Les lampes qui éclairaient les coursives étaient assez distantes, et dans la demi-obscurité, le promeneur distingua seulement un filet liquide tremblotant sur le plancher. Il frotta une allumette, se baissa.
– Du sang, balbutia-t-il pris d’angoisse.
Et secoué par la terreur, il s’enfuit, escalada l’escalier du pont et, rejoignant l’officier de quart sur la passerelle, lui annonça sa lugubre découverte. Des matelots pénétrèrent dans la cabine et emportèrent Marcel à l’infirmerie. Le médecin du bord hocha la tête en le voyant.
– La blessure n’est pas mortelle par elle-même, mais le malheureux a perdu beaucoup de sang. Lui restera-t-il assez de vitalité pour résister à l’assaut de la fièvre.
Au jour, tout le monde connut le crime. La nouvelle sinistre parcourut le navire avec une rapidité vertigineuse. Équipage, passagers furent rassemblés sur le pont en quelques minutes. Des groupes se formaient. On pérorait. Quel pouvait être l’assassin ? Et parmi les plus diserts, les plus irrités, Nazir se faisait remarquer.
C’est au milieu de cette effervescence que Diana, donnant le bras à Yvonne, parut, En les voyant, on fit silence. On se sentait ému devant ces belles jeunes filles que le malheur touchait de sa griffe. Un officier s’approcha d’elles. Avec ménagement, il leur apprit l’accident survenu. Elles ne prononcèrent pas une parole, et d’un pas lent se dirigèrent vers l’infirmerie.
Sur une couchette, Marcel était étendu, pâle, exsangue, les yeux clos. Yvonne s’agenouilla.
– Mort ! il est mort, murmura-t-elle en appuyant son visage sur le drap.
Elle ne bougeait plus. Miss Pretty, très émue elle-même, voulut lui adresser quelques paroles d’encouragement, mais elle secoua la tête d’un air d’ennui, de lassitude irrémédiable. À ce moment, le médecin, prévenu de leur visite, arriva. D’un mouvement automatique, les jeunes filles se dressèrent devant lui, une ardente interrogation dans les yeux. Le praticien haussa les épaules.
– Il est très affaibli, fit-il entre haut et bas. La fièvre va le prendre.
Il tâta le pouls du blessé.
– Oui, oui, voilà que ça commence. Nous lutterons. Après tout, le sujet est jeune, bien constitué, il surmontera peut-être la crise. Mais il faut du repos, une tranquillité absolue. Je veux rester seul auprès de lui. Vous m’entendez, seul absolument !
Il avait pris les jeunes filles par le bras et les conduisait vers la porte. Elles eurent une résistance.
– Laissez la nature agir. Un cri, une parole, un sanglot peuvent paralyser la vie dans sa lutte contre la destruction. Le malade paraît insensible. Ne vous y fiez pas. Le cerveau veille souvent alors que le corps est anéanti. Combien de fois, des amis, des parents, croyant pouvoir donner libre cours à leur douleur, ont tué par l’émotion réflexe celui qui aurait été sauvé ! Je ferai pour le mieux.
Une fois hors de la vue du blessé, le docteur reprit :
– Maintenant, mesdemoiselles, il y a autre chose.
– Quoi donc ? interrogèrent-elles, surprises du ton du docteur.
– Un crime a été commis. Votre compagnon a été frappé par derrière d’un coup de poignard hindou.
– Hindou !
Elles répétèrent le mot en échangeant un regard. Toutes deux avaient eu la même pensée. Pour elles, l’assassin s’appelait Canetègne. Que venait faire ici cette arme indienne ?
– Oui, poursuivit le médecin. La lame a traversé l’épaule, perforé l’omoplate et est ressortie sous la clavicule, en frisant l’articulation de l’humérus. J’ajoute : nous ne sommes pas en présence d’un crime ordinaire, mais d’une vengeance. Tout le prouve : l’argent resté dans le portefeuille, la montre dans le gousset du pantalon, tout. Vous avez deux devoirs. Me laisser tenter de sauver la victime et aider la justice à découvrir l’assassin.
Comme figées, Yvonne et Diana écoutaient. Découvrir l’assassin ! Ah ! certes, elles le devinaient ! Elles étaient sûres que la main de l’Avignonnais avait dirigé l’arme, mais il leur était interdit de parler. Pour accuser, elles devraient raconter les origines de la haine du négociant. Et alors elles seraient prisonnières. Le blessé lui-même deviendrait captif. Il n’échapperait au trépas que pour être la proie de la geôle.
– Ne connaissez-vous au passager aucun ennemi ? articula nettement le docteur.
Le visage des jeunes filles prit des tons de cire. Mais la liberté de Marcel dépendait de leur énergie. Elles regardèrent leur interlocuteur bien en face, et d’un ton calme, assuré :
– Non, dirent-elles, aucun ennemi.
– Alors, un crime banal. Une vengeance d’Hindou froissé dans ses sentiments de religion ou de caste.
– Probablement.
– Ah ! les sauvages ! grommela le médecin complètement trompé par leur réponse. Enfin, je vous quitte. Je vais m’occuper de notre malade. Soyez tranquilles, il est en bonnes mains.
Après un cordial shake-hand, il rentra à l’infirmerie. Pas un instant il n’avait paru surpris de voir ces « misses » venir seules au chevet d’un jeune homme. Il était Anglais, médecin d’un steamer anglais, habitué à voir les Anglaises agir librement et ignorant du « potin », plaie de notre patrie française. Comme Diana et Yvonne s’éloignaient, elles rencontrèrent Claude qui arrivait tout bouleversé. Elles lui racontèrent leur entrevue avec le docteur. Lui, leur apprit que William Sagger, comprenant que miss Pretty ne pourrait quitter le bord, venait de s’embarquer pour Yanaon. Il s’enquerrait d’Antonin et rapporterait ce qu’il croyait utile au blessé. L’Américaine eut un mouvement de dépit.
– William ne devait pas sans me consulter…
– Le temps pressait, riposta Claude, et je l’ai approuvé, certain qu’elle – il montrait Yvonne – aurait besoin de vous.
– Ah !… en effet, vous avez raison.
– À la bonne heure, vous voici raisonnable.
Ils se serrèrent la main sans savoir pourquoi. Longue fut la pression. Ils demeurèrent ainsi, les yeux dans les yeux, s’oubliant. Soudain, comme en un choc, ils eurent conscience de leur attitude et se séparèrent avec embarras. La journée fut interminable. Vers cinq heures, Sagger reparut. Antonin n’avait pas été vu à Yanaon, et le géographe avait dû se borner à faire provision d’oranges. Tous les portèrent aussitôt à l’infirmerie.
Le docteur les reçut fort bien, mais ne laissa personne pénétrer auprès du malade. Le délire commençait son œuvre. À travers la porte close, des éclats de voix parvenaient jusqu’aux visiteurs. Yvonne tremblait, les yeux fixés sur le panneau de bois, qui lui dérobait la vue de son frère de lait. Un instant l’aide du docteur entre-bâilla l’huis pour appeler son supérieur. Un rugissement passa dans l’air.
– Yvonne ! Yvonne ! défends-toi, me voici ! Puis un éclat de rire lugubre.
– C’est bien simple.
Frissonnante, éperdue, Mlle Ribor fut entraînée presque de force par Claude et Diana. Le docteur revint auprès de son client. La face empourprée, Dalvan s’agitait, combattant des ennemis imaginaires que l’hallucination suscitait autour de lui. Toute la nuit, le médecin le veilla. De deux en deux heures, il lui faisait absorber une dose de sulfate de quinine. Dans l’intervalle, il lui exprimait dans la bouche le jus d’une orange.
Le Nerbadah avait repris la mer. Durant les jours suivants la lutte contre le mal continua. Peu à peu les symptômes alarmants disparurent, et en arrivant en vue de l’embouchure de l’Hougly, bras méridional du Delta du Gange, sur lequel est bâti Calcutta, capitale des possessions anglaises, le praticien put dire à Yvonne :
– Il est hors de danger. Mais il lui faudra plus d’un mois de repos. Enfin il est assez bien pour être transporté au logis que vous choisirez.
Pour la première fois depuis le départ d’Yanaon, le sourire reparut sur les lèvres de la jeune fille. Elle entraîna miss Pretty sur le pont. Heureuse de savoir Simplet sauvé, elle semblait revivre. Et ainsi qu’il arrive souvent, dans le deuil où dans la joie, elle se persuadait que les objets extérieurs se mettraient à l’unisson de ses sentiments.
Jamais une journée ne s’était annoncée plus belle. Cette matinée du 25 avril était exceptionnelle. Comme le soleil se montrait radieux ; quelles délicieuses senteurs venaient de terre apportées par la brise ; comme le spectacle de l’immense lagune qui forme le Sunderbund, ou bouches du Gange, était merveilleux ! Cependant, laissant à droite la rade de Sangor et le banc sableux de Mizra, le steamer embouquait l’estuaire de l’Hougly, large de plus de douze kilomètres et remontait vers Calcutta. Le navire doublait le cap Hougly surmonté d’un sémaphore, brûlait Folta, près de son lac poissonneux, Atchipoor, Oolahburnia, le fort Gloucester, gardien du pont tournant de Budge-Budge.
Brusquement le cours d’eau s’infléchissait à l’est, et sur la rive gauche se montraient les premières villas de Garden-Reach, faubourg lointain de Calcutta. Un nouveau coude, et Calcutta s’étale sur les deux rives en panorama devant les voyageurs. À leur droite les docks, les bassins, le canal de Tolly-Nallah, l’arsenal ; à gauche le jardin botanique et le faubourg de Sihpoor. Le vapeur avance toujours, se glissant entre les embarcations nombreuses qui sillonnent la surface du fleuve, passant à une encablure des vaisseaux de toutes nationalités amarrés au quai du Strand, promenade de trois kilomètres, fréquentée par le high-life de la capitale indo-britannique. Presque à la limite de la ville noire, Black-Town, il s’arrête le long du quai élevé de quinze mètres, et la planche est jetée sur l’un des larges escaliers, ou ghats, qui permettent de descendre de la promenade au niveau des eaux.
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