Innombrables sont les récits du monde



Yüklə 3,58 Mb.
səhifə36/110
tarix07.01.2022
ölçüsü3,58 Mb.
#79343
1   ...   32   33   34   35   36   37   38   39   ...   110
IV. 3. 1. 5. 2. Changement chez les 3/4 ans

Le tableau (9) montre que le changement de référence se réalise majoritairement par des formes nominales (72%) contre des formes pronominales ou ellipses (28%). Mais il révèle également une différence d'emploi de la forme nominale simple (catégorie 1) opposée à la forme disloquée (catégorie 2 et 3) dans la fonction de changement. 67 changements de référence, soit 24,5%, s'effectuent à l'aide d'une forme nominale simple, comme dans l'exemple (37), contre 128 (46,5%) de dislocations à gauche ou à droite, illustrés par l'exemple (38).

(37) 04;00k 3a 010 i [garçon] met ses bottes (xxx) son chapeau, 010 ses bottes,

011 la grenouille n'est plus là. 020

(38) 03;11h 4a 007 le chien i saute, 010

008 petiN enfant i reste dans la maison. 010

Si l'on examine le corpus de façon plus précise, on se rend compte que dans la moitié des cas, les enfants n'ont pas réellement le choix entre les deux formes, puisque 35/67 formes nominales simples (52%) sont utilisées après des formes présentationnelles ou dans des formes de "labelling" sans verbe.

(39) 04;06a 8- 029 après y a le chien,

On trouve également des cas où les formes nominales simples sont des abandons au cours de l'énonciation ou sont utilisées après l'intervention de l'adulte qui entraîne la production d'une telle forme.

(40) 04;06d 1- adulte : c'est quoi ça /

003 une grenouille.

Ces remarques montrent que dans ces cas là, les sujets répondent tout naturellement aux contraintes structurelles de la langue, ce qui a pour conséquence de diminuer encore la place qu'occupent les formes nominales simples pour le changement de référence dans le système des 3/4 ans.

Pour ce qui est de la dislocation à gauche, elle est utilisée pour le changement de référence avec une certaine préférence (en comparaison avec la forme article + nom) lorsque ce changement a lieu à un changement d'images (49,5% de dislocations à gauche contre 46% de formes nominales simples à un changement d'images).

Dans cette fonction de changement, on repère également 17 occurrences de dislocations à droite (6%). Elles sont utilisées dans trois circonstances particulières : le changement d'images, l'alternance entre le garçon et le chien, et dans le cas de clauses coordonnées par parce que. L'exemple (41) illustre les deux premiers cas de figure, alors que celui de 03;03i illustre le troisième (42).

(41) 03;11f 12b 041 petit chien il est sur la tête du petit garçon.

13a 042 (xxx) mais i ben le i i fait !chut! comme ça le petit garçon,

(42) 03;03i 8- 017 le l'oiseau i sort - l'hibou i sort de son nid. 010

018 parc'que il est méchant le chien. -

Ces dislocations à droite montrent que les enfants sont conscients de la nécessité d'utiliser des formes référentielles plus explicites pour cette fonction, afin de construire un discours cohérent et d'éviter toute ambiguïté référentielle pour l'auditeur. Toutefois, le pourcentage reste encore faible. Les dislocations à droite qui se situent elles à un changement d'images indiquent que les sujets se basent sur le prédécoupage pictural pour construire leurs narrations, et par là même ne construisent pas un discours complètement indépendant du contexte extra-linguistique.

Enfin, on trouve un cas d'utilisation d'article + nom + pronom relatif qui en fait, représente un emploi erroné de la relative, puisqu'il n'y a pas de proposition principale qui introduise la relative, et deux cas de pronom personnel disjoint + dislocation à droite, qui s'apparentent à l'emploi de la dislocation à droite seule et que nous avons donc réunis.

Le tableau (9) indique également que, bien que les 3/4 ans maintiennent les référents en position de sujet en utilisant des formes moins explicites (78%) et qu'ils changent de référence en employant des formes linguistiques plus explicites (72%), ce qui est conforme à un discours clair, il reste néanmoins que 22% des maintiens et 28% des changements se font de façon inappropriée. En effet, dans le premier cas, ils répètent les formes nominales comme dans l'exemple (43), dans le second, des formes pronominales (44).

(43) 03;08g 4a 020 le chien - saute par la fenêtre. 050

4b 021 le chien - lèche le p'tit garçon. 010

(44) 03;11h 8- 021 et le chien i court. 010

9a 022 après i [garçon] monte dans dans: gros caillou. 060

Peut-on conclure de ces chiffres que les enfants ne disposent pas encore d'un système référentiel stable ? J'opterais plutôt pour une réponse impliquant la prise en compte des différents types de contraintes nécessaires à l'élaboration d'une narration cohérente et plus particulièrement le rôle des contraintes discursives/narratives sur ce système référentiel.

Cette hypothèse tend à se confirmer lorsqu'on examine l'emploi des dislocations à gauche dans la fonction de maintien. En effet, 90% (28/31) des dislocations à gauche sont utilisées à un changement d'image, ce qui a pour conséquence un sur-marquage de la référence.

(45) 03;11h 6b 015 le petit garçon i regarde le trou / 020

7- 016 après le petit garçon i va voir les mouches, -

Ce fait illustre que les jeunes enfants considèrent l'histoire comme une suite d'images représentant des événements indépendants les uns des autres. Cela a pour conséquence un traitement local de la tâche avec la réalisation d'une cohérence locale en contradiction avec une cohérence à un niveau supérieur, celle du texte. On peut tirer les mêmes conclusions de l'usage que font les enfants de la dislocation à droite pour remplir la fonction de maintien, puisque les quatre cas apparaissent à la frontière de deux images.

(46) 03;11f 8- 027 et lui il est tombé.- petit garçon.

9a 028 ben i veut monter sur une pierre, - le petit garçon.

De plus, il apparaît clairement que l'identité des participants et leur rôle dans la continuité thématique a une influence non négligeable sur les expressions référentielles utilisées. En effet, les pronoms personnels sujet dans la fonction de changement de référence sont plus largement utilisés lorsqu'il s'agit du garçon (68%), du couple garçon/chien (17,5%) et du chien (9,5%) que pour tous les autres participants confondus (5%). On retrouve ici le rôle de protagoniste privilégié attribué au garçon et dans une moindre mesure au couple garçon/chien. Le garçon est traité comme un protagoniste privilégié, ce qui constitue la "stratégie du sujet thématique". Rappelons à ce propos qu'il est souvent difficile de déterminer exactement si les enfants parlent du couple garçon/chien ou bien du seul garçon en raison de l'homophonie des deux pronoms personnels sujet, singulier il et pluriel ils ainsi que de l'absence de marque du pluriel sur les verbes du premier groupe au présent. Cette tendance à considérer le garçon comme personnage principal se confirme si l'on observe l'utilisation des pronoms personnels dans une autre position que dans celle de sujet. Les données montrent que sur 25 pronoms personnels autres que sujet, 13 renvoient au seul garçon (52%) en position de complément d'objet direct (10), d'objet indirect (2) et de locatif (1). Ainsi, on peut conclure de cette étude des pronoms personnels dans la fonction de changement que leur emploi est motivé par les contraintes discursives/narratives au détriment des contraintes communicationnelles (sous-marquage).

En conclusion, on observe deux stratégies majeures employées par les 3/4 ans : l'utilisation de pronoms personnels sujet pour le maintien du même référent en position de sujet et celle de dislocations à gauche pour le changement de référence. Ces utilisations sont appropriées en français. Toutefois, il faut noter que le système des sujets n'est pas encore totalement conforme au système cible, dans la mesure où les données montrent également un emploi important de pronoms personnels sujet dans la fonction de changement, et ce, principalement lorsqu'il est question du garçon ; ainsi que de dislocations à gauche dans celle de maintien du même référent. Ces remarques vont dans le sens d'une maîtrise incomplète des formes et de leurs fonctions. Cette maîtrise incomplète joue un rôle non négligeable sur la cohérence des productions, puisque les références aux personnages sont soit sur-marquées, soit sous-marquées. Ces sur- et sous-marquages sont le reflet de la difficulté des enfants à remplir les différentes contraintes de manière simultanée.




Yüklə 3,58 Mb.

Dostları ilə paylaş:
1   ...   32   33   34   35   36   37   38   39   ...   110




Verilənlər bazası müəlliflik hüququ ilə müdafiə olunur ©muhaz.org 2024
rəhbərliyinə müraciət

gir | qeydiyyatdan keç
    Ana səhifə


yükləyin