Colloque 2 les nouvelles technologies dans l'enseignement superieur


SCIENCES DE L’EDUCATION ET NOUVELLES TECHNOLOGIES



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SCIENCES DE L’EDUCATION ET NOUVELLES TECHNOLOGIES.

Jacques AUDRAN

Université de Provence

Sciences de l’Education

Groupe de Recherche en Evaluation et apprentissage (GREA).

Avec l’explosion d’Internet se pose de manière urgente, en Sciences de l’Education, la nécessité de mener des recherches portant sur les changements induits par l’usage des Technologies de l’Information et de la Communication dans les pratiques d’éducation et de formation. Toutefois, l’analyse scientifique de faits éducatifs en relation avec les technologies informatiques ne va pas de soi. Il est, notamment, délicat de définir un objet d’étude qui se situe clairement dans le champ des Sciences de l’Education et dans le même temps puisse être corrélé aux technologies informatiques. Les Technologies de l’Information et de la Communication en Education (nouvellement nommées TICE) constituent-elles, en elles-mêmes un objet de recherche pour les Sciences de l’Education ? Comment articuler le champ de l’éducation avec celui de l’informatique, ou des Sciences de l’Information et de la Communication ?



Education et nouvelles technologies au second cycle

Ces questions se sont posées lors de la mise en place d’Unités d’Enseignement (UE) de licence et de maîtrise de Sciences de l’Education consacrées à l’étude de faits d’éducation où les technologies de l’information et de la communication jouent un rôle important. Ces enseignements de second cycle ont été répartis en deux sous-ensembles, l’un consacré aux technologies comprises comme instruments (Rabardel, 1995) au service de l’apprentissage et l’autre aux situations d’éducation où les nouvelles technologies sont elles-mêmes objet d’apprentissage (usage des ordinateurs et des logiciels dans la sphère éducative). Ces deux orientations nous ont donc conduit à faire porter les enseignements sur des contenus propres aux Sciences de l’Education, sur des savoirs technologiques indispensables à un travail d’élucidation et de compréhension des phénomènes d’éducation, et, à l’articulation des deux mondes, sur l’étude de dispositifs éducatifs faisant appel à ces technologies. Co-responsable de ces UE et coordonnateur d’une petite équipe chargée des enseignements, j’ai été plus particulièrement chargé d’en assurer le suivi et l’évaluation. Au sein de l’équipe, nous avions conscience au moment de la mise en place de ces UE que concilier le monde technologique et des phénomènes liés à l’humain ne serait pas chose facile. En conséquence, afin d’améliorer ces enseignements, nous avons tenté de procéder à l’évaluation de leur portée à travers l’analyse des écrits produits par les étudiants à l’occasion de la remise des dossiers40 qui constituaient l’épreuve de validation des UE. De ce point de vue c’était donc moins les étudiants qui étaient évalués, que les contributions propres aux intervenants de ces UE, la construction et la répartition des modules, ou les choix en matière de contenu. Ces écrits ont donc été considérés comme participant d’une synthèse de ce qui avait été enseigné durant le semestre.


L’approche présentée ici, fondée sur analyse de ces écrits, est une réflexion destinée à constituer un faisceau d’hypothèses, et, compte-tenu du manque de recul, doit seulement être considérée comme préliminaire à une recherche future. Les observations qui suivent portant sur à peine plus d’une vingtaine de « dossiers » de licence et de maîtrise ne doivent bien sûr pas être généralisées. Notre attention s’est portée tout d’abord sur l’objet étudié par le dossier de validation. Les thèmes les plus souvent abordés sont les suivants : analyse de logiciel, utilisation scolaire d’un progiciel, conditions techniques de réalisation d’un site Web, ergonomie des interfaces, manipulation de l’ordinateur. En second lieu, nous nous sommes intéressés au respect de la perspective anthropocentrique (Rabardel, 1995) que nous avions tenté de développer lors de nos interventions. Le fait le plus marquant des propos est la quasi-absence des sujets en situation d’apprentissage et des études sur les interactions humaines. La technologie passe nettement au premier plan et semble servir de « matrice » à la pensée. A titre d’exemple, une situation scolaire où l’on utilise Internet est souvent analysée selon un découpage qui suit les protocoles du réseau : l’emploi du Web, du courrier électronique et des chats41 sont comparés sans interroger les autres ressources du dispositif éducatif en place, ni observer ce qu’il déclenchent. Un écart existe donc bien entre ce qui est produit et ce qui était attendu, ce qui nous a contraint à retravailler les critères de validation. La réflexion présentée ici tente non seulement, comme cela a été dit, d’élaborer les hypothèses pour une recherche future pour mieux comprendre ce phénomène, mais aussi, plus prosaïquement de tirer des enseignements de ces écrits afin d’affiner les critères d’évaluation et de validation.


Des difficultés particulières

Comme le souligne Mialaret (1998, p.14-15) les conditions d’existence (matérielles, spatiales, temporelles, historiques ou encore communicationnelles) des situations d’éducation sont constitutives des objets de la recherche. Il est donc légitime de vouloir s’intéresser à ces situations dès lors que l’on introduit dans le contexte des appareils de traitement de l’information (ordinateur, terminaux de réseaux), ou de diffusion de médias (téléviseurs, magnétoscopes, magnétophones, projecteurs visuels ou sonores). La difficulté survient lorsque l’on désire établir une relation entre les faits observés ou analysés et les éléments matériels mis en œuvre au moment de l’observation. Or cette relation a été établie dans les écrits des étudiants en privilégiant un point particulier : sur le plan de l’objet de recherche, ce sont les technologies pour elles-mêmes qui sont le plus souvent au centre des études et beaucoup plus rarement les dispositifs d’apprentissage ou les sujets apprenants. Les Sciences de l’Education sont inscrites au sein de la famille des Sciences Humaines. Ainsi que le souligne Vial (1999, p.9), décrire ou analyser une situation d’éducation ne suffit pas, encore faut-il que l’éducation soit comprise comme « un projet humain inscrit dans diverses pratiques sociales » et que ces pratiques soient rendues intelligibles par des modèles. Si les pratiques sociales disparaissent au profit d’études de logiciels ou de dispositifs technologiques, on peut considérer que l’enseignement a, au moins partiellement, manqué son but. Or, dans le cas qui nous intéresse, le besoin des étudiants à faire la démonstration de leurs compétences techniques a pris le plus souvent le pas sur la mise en évidence des problématiques éducatives à l’aide des modèles théoriques. Cette tendance a eu pour effet de subordonner l’observation de tout phénomène d’éducation à un cadre de réflexion technologiquement et historiquement marqué. L’une des difficultés de l’entreprise est bien de s’assurer que les pratiques sociales sur lesquelles porte l’analyse soient à la fois dépendantes du contexte technologique, mais dans le même temps que les domaines élucidés restent transférables malgré les évolutions inéluctables des objets techniques. C’est ce dernier point qui a constitué la base de référence des validations. Il restait à analyser, à travers les produits, le système de normes et d’expériences qui avait conduit une majorité d’étudiants à adopter cette perspective.


Il semble que plusieurs difficultés se cumulent. Une des particularités des débats autour de l’utilité des nouvelles technologies au sein de l’éducation réside dans le fait qu’ils se placent encore dans un registre très passionnel. Les enjeux, les valeurs, les croyances agitent les esprits mais ce sont surtout deux visions de l’avenir qui s’affrontent. Ces passions prennent racine dans l’image du rapport manichéen dominé/dominant, qui sous-tend généralement les discours sur la technique, où l’homme et la technique occupent l’une ou l’autre place, selon le paradigme dans lequel le locuteur évolue. Nous sommes marqués d’une empreinte culturelle, celle des philosophes allemands Marcuse, Heidegger, Habermas, qui ont révélé dans les années soixante, à travers leur critique d’une société politiquement assujettie à un productivisme économico-technique, hérité du dix-neuvième siècle, le risque du technicisme, du scientisme, de la technocratie, dès lors que les institutions y trouvent leur compte. Ces débats, de nos jours, sont essentiellement centrés sur l’emploi d’Internet et plus généralement des réseaux informatiques. Certains y voient la panacée en matière de formation et d’accès à la connaissance, d’autres un péril en puissance. Sur le plan de l’évolution sociétale, certains penseurs visionnaires entrevoient des transformations radicales des rapports aux média (Mc Luhan, 1968), de repérage (Serres, 1996) l’apparition d’une forme collective d’intelligence (Levy, 1990), ou encore, pour les plus radicaux, un renouveau de l’espèce humaine (De Rosnay, 1995) dans une optique résolument positive. Les autres nous mettent en garde sur le caractère fugitif, étriqué et superficiel des mondes technologiques, insistant sur « les fantasmes de la production, l’illusion du matérialisme historique, le virus de l’ethnocentrisme » (Baudrillard, 1975), affirmant que « la virtualisation du monde prépare un cyberculte » (Virilio, 1996), dans une vision très pessimiste du futur.
Le fait que nous manquons encore de recul vis à vis de ces nouvelles situations et l’évolution ultra-rapide des technologies, nécessite une réflexion sur les liens qui peuvent exister entre les systèmes techniques et l’évolution des modèles sociaux et culturels. Nous avons ici tous les ingrédients nécessaires à la naissance d’un mythe. Fantasmes, idéalisation, enjeux politiques sont autant d’éléments qui viennent nourrir une fascination pour ce qui est du technique, laissant croire à une future déterritorialisation absolue (Rallet, 2000). L’orientation d’un travail d’étudiant nous semble devoir être marquée par le souci de montrer qu’il est capable de mettre en évidence ces liens souvent peu visibles permettant de mieux comprendre le rôle des acteurs dans le contexte des nouvelles technologies. Mais ces liens sont autant de signes à découvrir par un travail quasi-ethnologique au sein des pratiques sociales. Vial (1999, p.9) a bien montré l’importance du terrain, ancrage que partagent les Sciences de l’Education et l’anthropologie. Il s’agit dans tous les cas d’aller sur ce terrain pour distinguer, plus que recueillir, des representamina pour reprendre la terminologie sémiotique de Peirce (1978), ces signes-témoins des pratiques d’éducation. Sur ce point, le travail des signes observés, à travers les modèles théoriques, semble de la plus grande importance.

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