Frédérique Lerbet-Sereni
Université de Tours
Mars 99
Au-delà de la double face toujours présente de l’interaction, qui veut que celle-ci soit nourrie à la fois de la dimension “ relation ” et de la dimension “ contenu ” (cf. P. Watzlawick et al. , à la suite de G. Bateson), peut-on essayer d’interroger les rapports qu’entretiennent entre elles ces deux dimensions dans des situations d’interactions vécues, faisant l’hypothèse que le sens serait justement le produit d’un couplage entre ces deux dimensions, la première renvoyant à première vue au sensoriel et la seconde à la signification ? D’un rapport pathogène de type double contrainte, à un double étayage (renforcement) réciproque qui surcharge l’interaction d’un sens unique autosuffisant, en passant par l’absorption d’une des deux dimensions par l’autre, comment concevoir des pistes pour rendre interrogeable ce couplage, afin d’essayer de n’être ni piégé à la relation, ni piégé au contenu, et de pouvoir s’y engager en s’en dégageant (et l’inverse). C’est au fond le rapport entre énoncé et énonciation dans le procès de construction du sens qui est en question.
En termes de références théoriques, il s’agira de comparer les approches trinitaires telle que celle de Peirce où le triptyque, déplié aussi exhaustivement que possible, fait “ émerger en creux ” un espace de non-sens complémentaire du plein de sens, les approches binaires telle que celle de Saussure qui ne prend en compte que l’énoncé comme plein de sens total possible, laissant penser que le non-sens serait du côté de l’énonciation, et d’autres formes de trinité où le troisième terme serait non pas aisément identifiable pour faire un triptyque bien d’aplomb, mais plutôt mouvant, paradoxal, multiple, et “ efficace ” au sens de notre quête pragmatique, parce que jamais assignable absolument nulle part définitivement. Il endosserait ainsi la tension sens/non-sens pour la soutenir dynamiquement, plutôt que pour la retenir et la circonscrire, ce qui tend à le constituer en propre comme tiers inclus.
Cette réflexion s’appuiera sur deux corpus de recherche très différents l’un de l’autre, pour tenter, à travers leur confrontation, de proposer des éléments pertinents de construction d’un questionnement du “ sens de l’action ” (ici verbale) qui n’aplatisse pas ce qui, justement, relève du sens.
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Il s’agit d’une part de dialogues pédagogiques, où l’émergence et le manque de certains indicateurs linguistiques peuvent fournir un premier niveau d’interrogation de la situation pédagogique comme situation complexe. Le deuxième, d’autre part, est constitué d’un extrait d’entretien mené avec deux psychologues conjointement. C’est un entretien qui porte sur le secret et le rapport, qu’en tant que professionnel de la parole, on entretient avec les mots de l’autre et leur circulation. Au cours de cet entretien, mes interlocuteurs ont été amenés à aborder ce que l’on peut appeler la radicale différence de sens des mêmes mots, selon le contexte, l’interlocuteur, et la relation qu’ils supportent et qui les supporte, au point qu’ils seraient comme “ surchargés ” du sens de l’énonciation : la relation serait ainsi paradoxalement du côté de la signification. Ils évoquent aussi la nécessité en même temps que l’impossibilité de faire part à un “ autre ” de cette charge énonciative dont ils ne sont pas en propre auteurs. La confrontation des “ acquis ” de ces deux corpus, parfois contradictoires, semble pouvoir permettre de travailler certaines des dimensions paradoxales à l’oeuvre dans la complexité des interactions langagières, que l’entreprise nécessaire de modélisation ne peut que transcrire en termes de questionnements ; la réponse, si toutefois elle existe, serait en effet l’affaire de chacun p.
Prospective et Pragmatique II
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Guy LOINGER
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Session 18 AM6
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Prospective des territoires et élaboration des politiques publiques :
des représentations des devenirs à l’action collective
LOINGER Guy
L’approfondissement des concepts et des méthodes de la prospective stratégique est une nécessité en général, et en particulier par rapport à la question des territoires. En effet la prospective s’est développée essentiellement dans la sphère du management des entreprises, générant des méthodes qui se donnent comme étant de portée générale alors qu’en réalité elles ne sortent pas, ou difficilement, de son paradigme d’origine. Le passage à la question des territoires, et plus précisément des sociétés dans leur être localisé, c’est-à-dire dans leur vie et leurs pratiques quotidiennes, qu’il s’agisse du travail, des loisirs, de la vie personnelle, de l’économie non seulement sur le plan des flux d’échange marchands, mais aussi sur celui des formes d’organisation, des pratiques administratives réelles, de la politique au quotidien, de la culture, des identités, voire des irrédentismes locaux ou régionaux, qui vont parfois jusqu’à menacer de faire exploser les Etats-nations supports, pose à la prospective des questions de fond que la prospective académique a du mal à saisir dans les mailles trop larges de ses filets, dans les cadres trop réducteurs et simplificateurs de ses méthodes et de ses façons de faire.
Le moment arrive de déconstruire la prospective académique pour la reconstruire sur de nouvelles bases, en intégrant certains éléments positifs des “ outils ” existants, de façon à engendrer une prospective nouvelle, capable de prendre en considération des couches plus profondes de la réalité et du phénomène sociétal. A cet égard, la prospective territoriale a vocation à jouer le rôle de passeur, c’est-à-dire de levier pour produire une prospective générale, notamment sur le plan des méthodes et des concepts, voire des paradigmes dit ou le plus souvent non-dit, autrement dit en enveloppant le corpus actuel de la prospective pour le dépasser.
Plusieurs domaines doivent être explorés en urgence notamment.
- la question des temporalités, en particulier la question de la coexistence entre des temporalités longues (évolutions de l’armature urbaine, des structures d’organisation institutionnelles et administratives, des structures sociales et familiales, des structures économiques...) et les temporalités courtes (effets de mode, d’ambiance, de mode de vie, d’impact d’effets externes, du type processus de mondialisation, délocalisation d’activités, évolution du marché du travail, des marchés et des flux d’échanges des produits et des services...), et des effets des interactions entre ces différents types de séquences temporelles sur la dynamique des processus en un lieu et un moment donné.
- la question des effets d’inertie liés à l’existence de structures sociales, des comportements, des habitus locaux, enracinés dans l’histoire profonde des sociétés locales, qui génèrent des mécanismes de réactivité par rapport aux processus externes spécifiques, qui peuvent être à l’origine de retards dans les prises de conscience des enjeux, à l’origine de tropismes et trajectoires récurrentes que l’on peut assimiler à de détermination de processus.
- la question du caractère multiple, non ou faiblement cohésif a priori des logiques d’acteurs dans les contextes territorialités, qui sont à l’origine de formes de régulation ex-post variés et complexes, dont certaines formes transitent par la logique de la crise comme mode de résolution des enjeux alors que d’autres les évitent par le jeu du débat et du dialogue.
- la question de la relation entre la sphère de décision collective publique, celle qui a largement le monopole du discours affiché, par rapport aux logiques d’acteurs et aux processus actifs locaux, qu’il s’agisse de la société civile citoyenne ou de la “ société ” économique locale, ou des pratiques d’appropriation du champ de la connaissance, ou encore des formes de la gouvernance locale et régionale par rapport à ses enveloppes nationales ou européennes..., la question de fond étant de se demander quelles sont les implications de l’absence de véritables centres de décision unifiés, aux différentes échelles territoriales, sur les processus socio-économiques réels, ce qui pose à son tour la question de la relation entre la sphère du politique et du socio-économique dans les société développées actuelles.
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- la question des relations entre la systémique d’un objet territorial particulier et celle des autres objets territoriaux, soit entre types différents de territoires, par exemple une région et une nation, soit entre deux types similaires de territoires, selon qu’ils sont en contact les uns avec les autres ou non, ou encore entre une structure d’espace et une autre, par exemple un système local de production et son référent à l’échelle internationale, qui pose toute la question des effets d’influence et de dépendance, de l’endogène par rapport à l’exogène, de la problématique de l’autonomie...
- la question de la relation entre le domaine des représentations et des “ visions ” par rapport au domaine de l’action et des “ politiques ” sachant que l’élaboration de ces représentations est tributaire des effets de mode ou d’ambiance, qui ont tendance à occulter la capacité des acteurs locaux à construire leur propre représentation de la réalité. D’autre part le lien entre les représentations des devenirs possibles et l’élaboration de stratégies capables d’entraîner une modification de l’état des choses, dans le sens des avenirs souhaités ou désirés, reste problématique, d’autant que nombre de prospectivistes s’interdisent de poser la question du passage d’un domaine à l’autre, au nom d’un principe contestable selon lequel les experts en prospective doivent se contenter d’offrir une palette de situations aux politiques, à charge pour eux de puiser dans le filet de pêcheur de la prospective les visions qui leur conviendront, un peu comme on choisit une belle pièce de poisson sur l’étalage de la criée au retour d’une sortie en mer.
- la question des “ techniques ” d’élaboration des représentations des devenirs possibles des objets territoriaux, ce que l’on appelle de façon habituelle les scénarios, en particulier la question de la relation entre les approches exploratoires et les approches normatives, la question des paradigmes implicites des scénarios, et de leur expression, qui apparaît souvent comme un ressucé de tous les poncifs dominants à un moment donné, sans véritable capacité à servir de fil conducteur à l’expression de véritables stratégies collectives. Au-delà se pose le problème de la relation entre le “ discours ” de prospective et le “ débat public ”, qu’il s’agisse d’un public de cadres d’entreprises ou de citoyens qui se penchent sur le devenir de leur s territoires de proximité.
- la question de la façon d’appréhender les territoires par exemple en distinguant les territoires vécus par rapport aux territoires “ virtuels ”, ceux qui résultent de la diffusion des technologies de l’information, qui prennent une importance croissante, voire qui se substituent aux territoires réels, lesquels ont tendance à ne plus être que des coquilles vides, ou pire encore, que le cadre de ce résidu incompressible de substrat humain, l’habiter au quotidien : acheter le matin son journal, - et encore, pendant combien de temps -, accompagner ses enfants à l’école, prendre un autobus, payer ses impôts locaux, assister à des agressions, voir les files d’attentes au guichet de l’ANPE. Ainsi le territoire semble échapper à son objet, ce qui pose la question de la “ pertinence ” des territoires et in fine de la nature des espaces sur lesquels les acteurs publics vont s’appuyer pour construire leur stratégie.
- la question de savoir s’il ne faut pas se pencher davantage sur une prospective des modalités et des façons de faire que sur une prospective des finalités, c’est-à-dire moins sur une prospective de ce que l’on veut et davantage sur une prospective des méthodes et des moyens pour parvenir à un objectif désiré.
- la question des “ faits porteurs d’avenir ” ou des signaux faibles ou des phénomènes en émergence par rapport aux tendances dites lourdes dans la mesure où, dans un contexte instable et complexe, c’est-à-dire fortement réticulé, où tous les facteurs interagissent à la fois en interne et dans la relation entre l’objet lui-même et le reste du monde, les phénomènes émergents, ou “ presque déjà là ”, comme dirait le philosophe Yankelevich, jouent un rôle croissant alors que les moyens d’observation, en terme d’indicateurs ou de signes sont très insuffisants, ce qui a pour effet une propension des observateurs ou des acteurs à se laisser surprendre : la “ surprise ” dans le monde de l’expertise en prospective étant la chose la plus courante qui soit, ce qui pose quelques problèmes de fond sur la capacité des soi-disant experts à rendre compte de la réalité dans sa dynamique et ses processus.
Ces quelques questions seront évoquées à travers un certain nombre d’exemples concrets, en particulier des études de prospective que nous avons réalisées récemment pour des collectivités régionales, notamment en Lorraine, en Poitou-Charentes et en Picardie p.
Prospective et Pragmatique II
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Jean-Claude LUGAN
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Session 18 AM6
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Pour une prospective régionale souple :
l'expérience de Midi-Pyrénées
Jean-Claude LUGAN
L'expérience de prospective en MP a été conduite de 1990 à 1992 à l'initiative du Préfet de région. Elle a mobilisé les universités toulousaines et leurs centres de recherches dans le domaine des sciences sociales et économiques et des disciplines se préoccupant de l'Aménagement du Territoire. Aucun cadre intellectuel n'était préimposé, simplement des échéances devaient être respectées.
Dans quel esprit avons-nous travailler ?
Intégrant les échecs des prospectives tendancielles, nous avons cherché à privilégier une prospective ouverte. Notre démarche devait donc comporter plusieurs étapes que nous nous sommes efforcés de respecter :
1) L'identification du phénomène ou de l'ensemble que l'on veut observer par rapport à ses environnements.
2) Le choix des outils conceptuels et méthodologiques L'instrument heuristique et le métalangage susceptibles d'articuler les différentes démarches disciplinaires pour identifier l'ensemble régional dans ses environnements nous a paru résider dans une démarche systémique pragmatique, itérative, didactique et fédératrice. Prenant en compte les limites de la formalisation en sciences sociales, le modèle systémique que nous avons cherché à construire pour fonder la démarche prospective fut un modèle essentiellement théorique.
Suite aux ateliers et aux résultats des études, finalement 8 sous-ensembles ou sous-systèmes ont été retenus pour décrire la réalité de Midi-Pyrénées et élaborer les scénarios : le système politique, le système de formation et recherche, le système culturel, le système économique du "croissant rose" (Toulouse), le système économique du "fond gris" (arrière pays de la région Midi-Pyrénées), le système socio-démographique, le système d'organisation territoriale, le système des échanges et de rayonnement international. A partir de cette matrice systémique, divers types de scénarios ont été élaborés : tendanciels, volontaristes et de rupture; ces derniers devant agir en quelque sorte comme un instrument d'optique permettant d'ouvrir le champ de vision, c'est-à-dire de mesurer toute l'étendue des possibles en se libérant des oeillères du présent.
Enfin soulignons l'idée que, selon notre point de vue, il n'y a pas de réflexion prospective dans l'absolu, c'est-à-dire en dehors d'une référence idéologique. L'identification des référents idéologiques est elle-même intrinsèque à la réflexion prospective, en ce sens qu'elle permet aussi l'identification des choix de société pour le futur.
Cette expérience régionale semble montrer que la prospective contemporaine doit représenter un effort d'intégration des éléments propres à rendre compte de la dynamique d'un système, resitué dans son contexte propre et exprimé dans la durée longue des processus sous-jacents à l'ensemble étudié.
A propos de ce système, elle ne doit pas privilégier la question : qu'est-ce que c'est, de quoi c'est fait ?, mais selon la formule de J.L Le Moigne : qu'est-ce que ça fait, dans quel environnement, en fonction de quelle téléonomie , dans quelle histoire?
La démarche prospective actuelle veut et doit se situer, dans le cadre d'une causalité moins linéaire que celle de la prospective tendancielle, c'est-à-dire intégrer le principe que les processus plus ou moins continus, endogènes ou exogènes par rapport à l'ensemble social étudié, génèrent des événements, des décisions, des stratégies qui viennent en retour les modifier. C'est là l'une des caractéristiques fondamentales des systèmes ou phénomènes complexes : la récursivité.
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L'émergence, autre caractéristique de la complexité, peut être considérée comme une propriété d'un système comme tout et qui provient de l'organisation dynamique de ce tout. La déduction propre aux démarches analytiques en général et à la prospective tendancielle notamment, ne peut saisir les émergences. Cette attitude ouverte au repérage des émergences doit permettre à son tour de mieux discerner les menaces, les risques, les inerties, les dangers, les faits porteurs d'avenir, les opportunités d'action, les logiques d'acteurs porteurs de projets ou les virtualités de modifications de la règle du jeu dans les conduites d'acteurs, qu'il s'agisse d'acteurs internes au système considéré ou d'acteurs externes susceptibles d'influencer celui- ci.
En d'autres termes, la prospective qui vise une représentation raisonnée du réel en devenir, consiste à penser le temps long pour agir avec plus d'efficacité sur les mécanismes de la prise de décision à courte échéance, afin de réorienter le système. Il est donc nécessaire de repérer les processus propres à chaque sous-système dans la durée, c'est la temporalité des processus. Ces différentes échelles de temps qui se manifestent dans les systèmes et phénoménes socio-culturels constituent aussi l'une des sources de la complexité de ces ensembles et préfigurent bien sûr la nature des stratégies que l'on peut leur appliquer.
Un système social est , quelque soit sa nature, plus ou moins déterminé de l'extérieur, ne laissant par conséquent que des marges de manœuvre limitées aux acteurs internes qui souhaitent développer une action stratégique. On pourrait dire d'une certaine façon qu'un système social est un mélange de sous-systèmes déterministes, aléatoires, chaotiques imprévisibles. Néanmoins les marges de manoeuvre ne sont pas pour autant inexistantes. Elles existent toujours et dans tous les systèmes, sinon il n'y aurait pas de changements d'état. Le problème est que certaines conséquences sont inattendues, d'autres non intentionnelles, et il faut en avoir conscience.
La prospective, quelque soit le domaine où elle s'applique est au fond un effort d'organisation d'un cadre intellectuel de réflexion et d'action collectif qui doit consister à mettre à plat les situations de base, les obstacles structurels, à s'interroger sur les façons dont les contextes peuvent influencer le système considéré, à mettre en évidence les ressources mobilisables sous condition d'organisation et de coordination des acteurs et les contraintes incontournables, à favoriser la création des situation d'émergence, c'est à dire l'apparition de propriétés des systèmes socio-éco-politico-culturels qui proviennent de leur processus d'organisation.
La prospective ne recherche pas le meilleur chemin; elle vise plutôt à préfigurer les différents chemins possibles par rapport à des états projetés des systèmes dans le futur, en évaluant les conséquences probables du chemin choisi. Ceci conduit à intégrer un autre principe fondamental de la complexité : le principe d'incomplétude. Il est en effet clair que l'équivalence entre l'entité complexe que l'on veut saisir et le modèle systémique ne peut jamais être totale; elle n'est recevable que du point de vue privilégié de la démarche des modélisateurs et de leurs projet Ce point de vue doit être reconnu et posé dès le départ. Un modèle systémique n'épuise jamais la représentation d'un ensemble social. et aucune représentation ne peut être considérée comme plus vraie que les autres.
Les configurations prospectives, ayant pour base le modèle systèmique ainsi construit, seront encore bien davantage soumise à ce principe d'incomplétudep.
Pragmatique, Droit, Société et Travail Social
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Béatrice MABILON-BONFILS
Laurent SAADOUN
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Session 17 AM2
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La connaissance de la connaissance en science politique :
du rapport Sujet/Objet
à une méta-connaissance complexe du Politique
Béatrice MABILON-BONFILS
Laurent SAADOUN
"L'histoire des sciences n'est pas seulement celle de la constitution et de la prolifération des disciplines, mais aussi celle des ruptures de frontières disciplinaires, d'empiètements d'un problème d'une discipline sur une autre, de circulation de concepts, de formation de disciplines hybrides qui finissent par s'autonomiser" ! La science politique à l'instar des sciences sociales, fait le pari Pascalien de l'intelligibilité des rapports sociaux et de la possible maîtrise collective par les hommes de leur destin, même (et surtout..) s'il n'existe pas d'administration scientifique de la chose politique ; cependant qu'elle peut à sa manière contribuer à la désoccultation de ces mêmes rapports sociaux en désacralisant le pouvoir. Ainsi quand elle se borne à une analyse (même politologique) des institutions, la science politique se clôt sur des délimitations disciplinaires, qui pour historiques qu'elles soient, n'en sont pas moins des frontières strictes que les gardiens de la doxa politologique du moment surveillent, tels des gardiens-douaniers d'un espace conceptuel, social et …politique." Le développement qu'a permis la reconnaissance de la frontière conduit à l'effacement de la frontière", comme le suggère François Lurçat : ce qui se conçoit pour la physique et la chimie est à nuancer pour la science politique, discipline qui aujourd'hui encore se construit sur le renforcement des frontières. Cependant, la pensée complexe, par le renouvellement des perspectives épistémologiques qu'elle impose aux sciences sociales en général et à la science politique en particulier, en ce qu'elle n'autorise plus le savant à produire un méta-langage de surplomb, permet de réfléchir et de déconstruire la mise en relation(s) gnoséologique(s) du sujet à l'objet rejetant toute appréhension réaliste du monde, selon laquelle la connaissance n'est que le résultat de l'enregistrement de données organisées dans le monde extérieur, par un sujet connaissant entretenant un rapport d'observateur avec une réalité supposée être et supposée indépendante par construction, et polstulant que la connaissance est construite par un sujet qui réorganise (voire qui invente/produit) les données immédiates. La prétention à la scientificité de la science politique pour légitime qu'elle soit, dans un champ scientifique fortement concurrentiel, ne doit pas annihiler le nécessaire dépassement mono-disciplinaire et celui d'une velléité de la disciplinarité à dire la totalité du monde social. La clôture auto référentielle de la discipline s'élabore, corrigée d'une reliance et d'une résonance avec les disciplines concurrentes/complémentaires/incommensurables ; la science politique devenant une sorte de métaconnaissance transdisciplinaire oeuvrant à la marge des disciplines constituées, socialement reconnues et plaidant en faveur de l'ouverture des frontières disciplinaires. Elle instaure des coopérations, des solidarités mais aussi des conflits, générateurs d'un savoir inter-trans-poly-disciplinarisé, porteur de marginalité créatrice. De la sorte, la science politique est une science plurielle, métissage de regards et croisements de méthodes : elle est pensée de l'hétérogénéité, construction holistique d'un savoir à vocation transdisciplinaire. Par les ruptures épistémologiques que le regard complexe impose, cette nouvelle science du Politique, intégrant rétroactivement le regard qu'elle porte sur elle-même, situe la connaissance de la connaissance dans une lecture symbolique du Politique, entendu comme système et dans l'examen renouvelé du rapport sujet/objet, en tant que méta connaissance complexe du Politiquep.
Enseignement : Ingénierie et Stratégie
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Jeanne MALLET
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Session 18 AM2
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Organisations apprenantes et apprentissages collectifs.
Apports des NTIC
Jeanne Mallet
Maître de Conférences
Université de Provence
1, avenue de Verdun - 13 410 Lambesc
tél : 04 42 57 17 17 ; fax : 04 42 57 17 07
e mail : mallet@romarin.univ-aix.fr
http:/www.up.univ-mrs.fr/~wse/
Résumé :
Nous souhaitons proposer que les NTIC, par les “ effets réseaux ” qu’elles permettent ou même induisent, mettent aujourd’hui en relief les dynamiques auto-organisationnelles au sein des organisations. Sur un plan théorique, elles sont l’occasion de tester encore plus clairement la pertinence de références ancrées dans le biologique, pour mieux comprendre ces dynamiques (entre les personnes et entre les équipes) et les implications managériales et formatives qui en découlent.
Mais la référence contemporaine aux théories du vivant, bien qu’omniprésente, nous semble faussement rassurante, car débouchant elle-même sur une mise en abîme : en effet, les exemples se multiplient aujourd’hui, dans bien des domaines, où les frontières entre le vivant et l’inerte sont questionnées; pour finir, nous devons accepter que ces frontières ne reposent que sur des conventions provisoires, et que les dynamiques auto-organisatrices et négentropiques débordent les champs traditionnellement définis comme relevant du biologique et du vivant.
Ainsi, le développement des technologies de l’information et de la communication, de leur appropriation par les acteurs sociaux et de leurs usages potentiellement reliants et intégratifs, non seulement amplifie les fonctionnements en réseau au sein des organisations (et plus largement au sein des tissus sociaux), mais participe à l’amplification de dynamiques entropiques et négentropiques à de nombreux niveaux. Ces changements, qui portent à notre attention les dynamiques auto-organisatrices en jeu, sont sans doute l’occasion de questionnements théoriques nouveaux : notamment, les dynamiques collectives négentropiques pourraient être vues autrement que juxtapositions de dynamiques négentropiques individuelles. Mais plus radicalement, l’omniprésence des dynamiques auto-organisatrices dans le champ du social participe au débat sur la dimension arbitraire et conventionnelle de notre définition du vivant, ouvrant peut être ainsi la porte à des réaménagements théoriques (ou à une épistémologie nouvelle) p.
Complexité, Psycho-sociologie et Pragmatique
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P. MARCHAIS
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Session 17 M5
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