Vanité des vanités, et tout est vanité, hormis aimer Dieu et ne servir que lui. Voici la suprême sagesse : par le mépris du monde tendre au royaume des cieux. Vanité donc de rechercher des richesses qui périront et de mettre son espérance en elles. Vanité de briguer les honneurs et de se pousser à une haute situation. Vanité de suivre les désirs de la chair et de désirer ce dont il faudra plus tard être sévèrement puni. Vanité de souhaiter une longue vie et d'avoir peu souci d'une bonne vie. Vanité de ne penser qu'à la vie présente et de ne pas songer à ce qui lui fera suite. Vanité d'aimer ce qui passe avec tant de rapidité et de ne pas courir où la joie éternelle réside. Souviens-toi fréquemment de ce proverbe : L'œil n'est pas rassasié de ce qu'il voit, ni l'oreille, remplie de ce qu'elle entend. Applique-toi donc à détacher ton cœur de l'amour des choses visibles et à te porter vers les invisibles. Car ceux qui suivent l'attrait de leurs sens souillent leur conscience et perdent la grâce de Dieu.
Irénée contre les hérésies 4,37, SC 100, 938: Le bien qui est en nous ne pourrait pas même être perçu par notre intelligence, s'il n'était pas le fruit de notre exercice. La vue non plus ne serait pas pour nous si désirable, si nous ne savions quel mal est la cécité ; la santé aussi est rendue plus précieuse par l'épreuve de la maladie, tout comme la lumière par le contraste des ténèbres et la vie par celui de la mort. Ainsi le royaume céleste est-il plus précieux pour ceux qui connaissent celui de la terre ; et plus il sera précieux, plus nous l'aimerons ; et plus nous l'aurons aimé, plus nous serons glorieux auprès de Dieu.
C'est donc pour nous que Dieu a permis tout cela, afin que, instruits de toutes manières, nous soyons désormais scrupuleusement fidèles en toutes choses et demeurions dans son amour, ayant appris à aimer Dieu en hommes doués de raison : car Dieu s'est montré magnanime en présence de l'apostasie de l'homme, et l'homme, de son côté, a été instruit par elle, selon la parole du prophète : Ton apostasie t'instruira (Jr 2,19). Ainsi Dieu a-t-il fixé toutes choses à l'avance en vue de l'achèvement de l'homme, et de la réalisation et de la manifestation de ses desseins, afin que sa bonté éclate et que sa justice s'accomplisse, que l'Église soit configurée à l'image de son Fils, et qu'un jour enfin l'homme en vienne à être assez parfaitement mûr pour voir et saisir Dieu.
Jean Cassien Conférence 3,6, SC 42,145:
Il nous faut parler maintenant des renoncements. La tradition des Pères s'unit à l'autorité des Écritures pour montrer qu'ils sont au nombre de trois. Les accomplir doit être toute notre étude. Le premier est corporel : c'est celui qui nous fait mépriser toutes les richesses et les biens de ce monde. Par le deuxième, nous renions notre vie passée, nos vices, nos passions de l'esprit et de la chair. Le troisième consiste à retirer notre esprit des choses présentes et visibles, pour contempler uniquement les choses à venir et ne désirer plus que les invisibles.
Qu'il faille les accomplir tous trois, c'est le commandement que le Seigneur faisait déjà à Abraham, lorsqu'il lui dit : Sors de ta terre, et de ta parenté, et de la maison de ton père. Sors de ta terre, c'est-à-dire : Renonce aux biens de ce monde et aux richesses d'ici-bas. Sors de ta parenté, c'est-à-dire : Renonce à ta vie et à tes habitudes d'autrefois, à tes vices aussi : toutes choses qui nous sont si étroitement unies depuis notre naissance qu'elles en ont contracté avec nous comme une sorte d'affinité, voire de parenté de nature, et qu'elles semblent en vérité de notre sang. Sors de la maison de ton père, c'est-à-dire : Bannis de tes regards tout souvenir du monde présent.
Désertant de cœur cette demeure temporelle et visible, nous portons nos regards vers celle où nous habiterons éternellement. Cet état sera le nôtre dès là que, vivant dans la chair, nous cesserons cependant d'agir selon la chair, pour militer au Seigneur, et qu'en toute vérité nous pourrons redire la parole du bienheureux Apôtre : Pour nous, notre cité est dans les cieux.
Le profit serait donc médiocre d'embrasser le premier renoncement, fût-ce avec une souveraine dévotion de foi, si l'on n'accomplissait le deuxième avec un soin pareil et d'une égale ardeur. Celui-ci réalisé nous donnera la possibilité de passer au troisième : sortis alors de la maison de notre premier père, nous n'aurons plus de regards que pour le ciel.
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