Thèse pour l’obtention du diplôme de Docteur de l’Université Paris VII spécialité : Géographie


Projets et construction territoriale. Le rôle du projet collectif



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4 Projets et construction territoriale. Le rôle du projet collectif.


Les projets, en tant qu’énoncés des pratiques à venir, formulation des fondements de l’action, participent aux processus de changement territorial. Ils constituent d’abord des pratiques inédites au sein des territoires. Ils s’expriment surtout à travers une parole consciente des enjeux, des possibilités, des atouts personnels, sociaux et territoriaux. En tant que construction d’un mode de modification de la situation dans laquelle l’individu ou le groupe est engagé, ils visent et/ou produisent la modification des territoires au sein desquels ils s’inscrivent.
Le projet collectif systématise les processus déjà évoqués de co-construction sociale et territoriale : il concerne plusieurs individus engagés dans une dynamique d’action commune. Leur formulation, leur réalisation exige l’accord des intentions, et donc une forme d’accord sur la perception de leur territoire et de leur insertion dans ce territoire. La dynamique de construction territoriale est incluse dans la mise en oeuvre du projet lui-même.

Les projets collectifs semblent ainsi participer d’une manière active aux processus de changement intentionnel du territoire, et d’autant plus encore s’il s’agit de projets collectifs concernant la création de structures ou d’instances concernant directement le territoire : projets visant à modifier les conditions concrètes d’habitation ou projets de territoire, qui consistent explicitement à construire du territoire.

Nul doute que l’analyse de ces projets particuliers éclaire avec acuité les processus du changement territorial intentionnel. L’action, l’innovation ne portent non pas sur les pratiques133 mais directement sur les conditions de ces pratiques, sur la structure même du territoire. Le projet concerne ainsi l’identité du territoire, l’aménagement de ses instances politiques et/ou institutionnelles. Il envisage une action concernant la modification, la création, l’élimination de structures matérielles du territoire, qui sont les lieux mêmes d’exercice de la territorialité des acteurs. Le territoire se construit là dans la pleine conscience de l’action engagée.

La recherche d’un accord toutefois tend-elle peut-être à limiter les capacités créatrices de chacun, et à produire une action paradoxale. Son efficacité est certes grande, dans la mesure où sa portée est évaluée et participe de la construction-même du projet. Cependant, cette intention est susceptible d’obliger à l’abandon de pistes marginales, et de réduire ainsi le caractère innovant de ce même projet.

L’étape de l’identification de la situation actuelle, des éléments qui justifient une action, et des moyens pour la mettre en place, est indispensable à la formulation du projet. Cette action s’opère à travers une réflexion134 sur le territoire comme construction opérée dans le temps long de l’histoire, et s’opérant dans le temps court du présent. Quel est ce territoire que nous pratiquons ? Que voulons-nous changer ? Comment y parvenir ? Avoir la volonté d’agir sur l’identité du territoire c'est-à-dire sur les représentations elles-mêmes revient à mettre en mouvement ce que Maurice Halbwachs nomme « mémoire collective », qu’il définit comme une reconstruction du passé en fonction des besoins du présent. « Les acteurs sociaux, qui construisent et reconstruisent au quotidien le territoire ne sélectionnent dans ce but que certaines séquences de son histoire. Ils retiennent celles qu’ils jugent les plus aptes à consolider l’identité socio-spatiale et à mobiliser les énergies locales, dans une perspective qui manque rarement d’arrière-pensées politiques135 ».

Cette réflexion sur les divers temporalités impliquées dans le système territorial s’opère également relativement aux différentes échelles du territoire. C’est ainsi que les acteurs évaluent ou tentent d’évaluer les différentes dynamiques actuelles du territoire, l’articulation des différents éléments du système territorial, et la portée éventuelle de leur action.


Conclusion.


Les projets d’acteurs permettent de saisir les dynamiques territoriales en ce qu’ils soulignent tout à la fois les conditions d’habitation des acteurs et leurs modes de modification.

La formulation, l’énoncé et la réalisation de projets par des individus et des groupes révèlent ainsi les processus d’émergence de l’innovation sociale, tels que nous avons tenté de les définir.

Leur analyse permet d’accéder à la complexité des situations territoriales, et à celle des pratiques d’acteurs au sein des territoires ; elle révèle ainsi les dynamiques de construction territoriale.


Conclusion de la partie un


Cette première partie visait à un positionnement théorique et méthodologique indispensable à la mise en place d’une analyse géographique des processus de l’innovation sociale.

C’est ainsi que la relation innovation/territoires a pu être éclairée, à la lumière d’une approche systémique des dynamiques territoriales mettant en valeur le rôle des acteurs dans les processus de construction territoriale, le rôle de l’organisation des territoires dans les processus d’émergence de l’innovation. Les pratiques des acteurs - et tout particulièrement les projets d’acteurs, qui expriment ces pratiques - inscrites dans et pour le territoire, révèlent et spécifient cette dynamique complexe.

Une analyse des processus de l’innovation sociale dans les territoires ruraux périurbains nord-montpelliérains nécessite ainsi de caractériser le système territorial périurbain, et pour cela, de saisir la spécificité du rapport des habitants périurbains à leur territoire. La partie suivante vise ainsi à présenter les territoires périurbains, afin de les définir comme des territoires propices à l’émergence de l’innovation sociale.

partie deux

les territoires périurbains :

des lieux d’innovation sociale

Introduction. Hypothèses.

Cette partie vise à préciser le corpus d’hypothèses mis en place dans la première partie, afin d’introduire à une analyse des territoires ruraux périurbains nord-montpelliérains comme des lieux privilégiés d’innovation sociale. Elle nécessite ainsi de caractériser l’organisation des territoires périurbains, c’est-à-dire de saisir la spécificité du rapport des sociétés périurbaines à leurs territoires, dans une approche nécessairement diachronique.

Le territoire périurbain constitue lui-même une innovation. Les années 1970 et 1980 ont vu l’émergence d’un nouveau système social et spatial, et la constitution d’un territoire inédit, le territoire périurbain. Son organisation est définie par trois innovations sociales fondatrices : la pratique de la mobilité spatiale, la distinction lieu de travail/domicile et la diffusion massive de l’habitat pavillonnaire. Ces innovations sont autant de territorialités inédites, qui impliquent toutes une modification du rapport social à l’espace. Le territoire périurbain s’est ainsi construit dès sa naissance comme le lieu de pratiques inédites et spécifiques.

Aujourd’hui, les territoires périurbains ne constituent plus seulement l’espace privilégié des couches moyennes de la société de consommation, qui s’inventent des territorialités à partir de la distinction fondatrice entre lieu de résidence/lieu de travail. Ils ne sont plus non plus l’espace de la confrontation de ces nouvelles sociétés avec les sociétés locales. Territoires locaux spécifiques insérés dans les nouveaux territoires de la mobilité, ils sont plutôt à considérer comme des territoires métropolisés à faible densité. Leur ambivalence se double ainsi d’une complexité territoriale importante, constituant un vaste espace de déterminations et d’indéterminations territoriales, offert aux habitants pour la mise en place de territorialités périurbaines diverses.

L’analyse de la mise en place et de l’évolution de ces territoires nous permettra d’énoncer quatre hypothèses :

1.

L’ambivalence et la complexité territoriales constituent des ressources pour l’action. Mises en valeur, utilisées, détournées par les pratiques des acteurs, elles exigent et permettent un choix entre les différentes logiques territoriales en œuvre. Ce choix produit des territorialités proprement périurbaines, qui sont comme une résolution du système complexe et vaste de déterminations et d’indéterminations qui se propose aux acteurs.

Ces territorialités peuvent être des innovations. Elles naissent en effet d’une organisation territoriale au sein de laquelle les acteurs ont la nécessité de se positionner, et au sein duquel l’action créatrice trouve une marge importante pour s’épanouir. Les territoires périurbains exigent et permettent tout à la fois l’innovation.

2.

Les territoires périurbains semblent pouvoir être des lieux d’innovation à plusieurs titres, c'est-à-dire des lieux au sein desquels émergent plusieurs types d’innovation.

En tant que territoires métropolisés, ils participent des dynamiques de l’innovation telles qu’évoquées dans la partie un. Nouveaux territoires urbains, ils abritent, comme l’ensemble des territoires urbains, des sociétés aux pratiques marquées d’individualisme, de mobilité, de flexibilité, d’éphémérité. Ils sont pleinement concernés par les modifications radicales des modes d’habitation des territoires imposées par l’accélération et l’augmentation de la circulation des flux d’hommes, de produits, de capitaux ou d’informations à travers le monde, c'est-à-dire par la généralisation de la mobilité comme origine et conséquence de la mondialisation de l’économie.

Cependant, ils n’en sont pas moins des territoires à faible densité de population, voire des territoires ruraux. Définis par l’ambivalence et la complexité territoriales, ils initient aussi une innovation spécifique, qui concerne les territoires périurbains tout particulièrement.



3.

Dans les deux cas, l’innovation, évaluation et utilisation des différents atouts territoriaux, s’opère de façon privilégiée grâce à la mobilité spatiale, pratique périurbaine initiale et pratique urbaine généralisée, qui marque les conditions d’habitation en territoire périurbain.

Parce qu’elle permet la mise en relation du territoire avec les territoires proches et lointains, et la pleine participation des territoires locaux aux dynamiques urbaines et métropolitaines, la mobilité spatiale semble en outre être à même de faire le lien entre logiques métropolitaine et locale. Caractéristiques locales/rurales et urbaines/métropolitaines se complètent : leur utilisation sélective par le biais de la mobilité produit des innovations éminemment périurbaines.

Les trois premiers chapitres servent de support à la présentation des territoires périurbains nord-montpelliérains qui intéressent précisément ce travail. Une présentation ordonnée des différents travaux concernant les territoires périurbains est d’abord indispensable, pour éclairer les étapes de leur mise en place, tout autant que celles de leur prise en compte dans la recherche en géographie.

Les chapitres 4 et 5 présentent spécifiquement les étapes de la constitution des territoires périurbains, à partir des années 1970.

Le chapitre 6 s’efforce de déterminer la spécificité de l’organisation territoriale périurbaine aujourd’hui, et de caractériser la place des territoires périurbains dans les dynamiques territoriales actuelles.

Le chapitre 7 s’efforce enfin de présenter l’organisation des territoires périurbains nord-montpelliérains qui concernent cette étude, et tout particulièrement celle du groupe de communes qui a fait l’objet d’enquêtes approfondies.


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