Turquie: début du procès des meurtriers présumés du journaliste Hrant Dink
lundi 2 juillet 2007, 7h49
Par Nicolas Cheviron
ISTANBUL (AFP) - Le procès des meurtriers présumés du journaliste turc d'origine arménienne Hrant Dink, dont l'assassinat avait bouleversé la Turquie en janvier, doit s'ouvrir lundi à huis-clos devant un tribunal d'Istanbul.
Mais les avocats de la partie civile craignent que cette procédure, considérée par certains observateurs comme un test du fonctionnement de la justice turque, laisse dans l'ombre des éléments cruciaux de l'affaire.
Au premier rang des accusés comparaîtra Ogün Samast, un chômeur de 17 ans originaire de Trabzon (nord-est) et proche des milieux ultra-nationalistes de cette ville, d'où sont originaires également les 17 autres prévenus.
C'est lui qui, de son propre aveux, a abattu de deux balles dans la tête et une dans le cou Hrant Dink le 19 janvier à Istanbul, devant les locaux de l'hebdomadaire bilingue turc-arménien Agos, que dirigeait le journaliste.
Le ministère public a requis de 18 à 24 ans de prison à son encontre pour le meurtre, ainsi que de 8,5 ans à 18 ans de prison pour port d'arme illégal et appartenance à une organisation terroriste.
Le huis-clos a été ordonné en raison de son âge.
Aux côtés de Samast, les deux dirigeants de l'organisation et commanditaires de l'assassinat -selon l'acte d'accusation-, Yasin Hayal et Erhan Tuncel, encourent des peines de prison à vie incompressibles.
Hayal, qui a déjà passé plusieurs mois en prison pour un attentat à la bombe visant un restaurant McDonalds à Trabzon, qui avait fait six blessés en 2004, est également poursuivi pour avoir proféré des menaces à l'encontre du prix Nobel de littérature 2006 Orhan Pamuk, connu pour ses positions contestataires sur la question arménienne.
M. Pamuk a fait savoir qu'il n'assisterait pas à l'audience.
Des peines allant de 7,5 ans à 35 ans de prison ont été requises contre 15 autres comparses supposés, selon leur degré d'implication dans l'assassinat.
Mais pour la partie civile, d'autres protagonistes auraient dû être poursuivis.
"Les forces de sécurité en activité à Trabzon, où le meurtre a été planifié, à Istanbul, où il a été exécuté, et à Ankara, où les renseignements sont rassemblés, n'ont pas été incluses dans le dossier, alors que leurs liens avec les suspects, le non accomplissement de leur devoir, leur dissimulation de preuves et même leur apologie du crime et du criminel ont été établis", a déclaré vendredi à la presse l'avocate Fethiye Cetin.
L'organisation non-gouvernementale de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch a qualifié dans un communiqué vendredi le procès Dink de "test crucial de l'indépendance de la justice turque".
Elle a enjoint les juges de "considérer comme pénalement responsable toute force de sécurité qui sera reconnue coupable de négligence ou de collusion" avec les criminels.
Hrant Dink, qui militait pour une réconciliation entre les Turcs et les Arméniens, s'était attiré la haine des cercles ultra-nationalistes pour avoir ouvertement qualifié de génocide les massacres d'Arméniens commis en Anatolie entre 1915 et 1917, une qualification rejetée par la Turquie.
Une marche à la mémoire du journaliste avait réuni en janvier, le jour de ses obsèques, plus de 100.000 personnes scandant des slogans tels que "Nous sommes tous Arméniens, nous sommes tous Hrant Dink".
Les amis de Dink ont prévu de manifester en sa mémoire lundi, non loin du tribunal où s'ouvrira le procès.
http://fr.news.yahoo.com/02072007/202/turquie-debut-du-proces-des-meurtriers-presumes-du-journaliste-hrant.html
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