Henri Caroff (Brest)
Il convient de s’attacher aux partis de la gauche qui ont une vocation démocratique et exclure à priori les partis d’extrême gauche (LCR, LO, PT) dont la philosophie politique ne les porte pas à la participation au pouvoir. Le parti communiste tient une place à part mais compte tenu de ses faibles effectifs il faudrait envisager une évolution à l’italienne en direction du parti socialiste, ou même d’une fusion avec un PS réformé.
Le PS, actuellement première force de gauche devrait définir sa position « idéologique » vis-à-vis du système économique actuel en Europe, c'est-à-dire l’économie de marché.
Je pense qu’il faut accepter le fait que le système capitaliste est le mode de production qui s’est montré plus efficace que le système « socialiste » développé dans l’ex Union Soviétique et ses satellites. Toutefois il faut que l’Etat concentre son intervention économique dans les secteurs qui ne peuvent se satisfaire des règles du marché :
l’emploi (lutte contre le chômage, définition du contrat de travail) car il n’y a pas équilibre des forces entre l’entrepreneur et le travailleur
les services publics pour assurer l’égalité d’accès de tous les citoyens aux services indispensables : éducation, transports, justice etc. et permettre un certain équilibre dans l’aménagement du territoire
la santé : définition de la politique de santé publique, prévention, renforcement des pouvoirs de la sécurité sociale dans la définition de son rôle vis-à-vis de la médecine libérale et de l’industrie pharmaceutique (prix des médicaments)
L’intervention de l’Etat doit aussi être primordiale dans la définition de la politique de l’énergie et à ce titre il devrait conserver des moyens d’action pour peser sur le marché de l’énergie : politique fiscale, prise de contrôle dans des entreprises de pointe, recherche etc.
L’eau et la lutte contre la pollution sont aussi les deux domaines dans lesquels l’Etat devrait conserver le « leadership ».
En matière de politique européenne il serait nécessaire d’arriver à un consensus: quelle Europe voulons nous ? (fédération, confédération, zone de libre-échange…) quels domaines de la politique économique et de la politique étrangère sommes nous capables de transférer à l’Europe, quelle position adopter vis-à-vis des nouveaux adhérents, notamment de la Turquie et surtout que propose-t-on pour relancer l’Europe ? : nouveau référendum ?, nouvelle constitution ? Recherche de positions communes avec les autres partis de gauche en Europe.
Pour revenir à l’organisation de la vie politique en France un « grand parti de gauche » qui aspire à revenir au pouvoir devrait se poser le problème : quel type de gouvernement pour un pays qui fait partie d’un ensemble de 450 Millions d’habitants et dont beaucoup de décisions lui échappent ou vont lui échapper ? Est-ce un régime présidentiel et dans ce cas quelle organisation mettre en place pour assurer le bon fonctionnement et le contrôle du gouvernement ? Est-ce un régime parlementaire « pur », une VI e république etc. Non seulement se poser le problème mais répondre… avec toutes les conséquences que cela entraine : réduction des besoins des administrations centrales, que faire des départements ?
Quant à l’organisation des relations « globales » il faut définir ce que peut être une mondialisation pour les différents partis de gauche et quelle est la position à adopter vis-à-vis des instances actuelles comme l’OMC (on casse tout, on réforme dans quel sens…) la Banque Mondiale, etc. Il y a suffisamment d’économistes ancrés à gauche pour avoir des avis circonstanciés sur l’évolution possible de toutes ces structures compte tenu de l’évolution des pays depuis la mise en place. Il est vraisemblable que la « mondialisation » des activités de la planète va s’accentuer et on doit s’interroger sur son organisation (monde multipolaire, déplacement du centre de gravité économique et politique).
Enfin dans l’immédiat il faut s’interroger sur ce qui constitue le socle immuable de gauche (le fameux ancrage à gauche) : répartition des revenus, sécurité (sociale, emploi, personnes) et ne pas oublier la production de richesses pour pouvoir mieux répartir (favoriser les entreprises petites et moyennes lorsqu’elles créent des emplois non délocalisables, et celles de haute technologie). Et surtout l’Europe.
Quant à la définition de la stratégie il faut s’y attaquer sans attendre car il serait souhaitable que tout cette réflexion qui va demander du temps puisse aboutir, même incomplète, AVANT les prochaines municipales et soit prête au moins deux ans avant la prochaine présidentielle.
Jean-Pierre Vives
L'AGGIORNAMENTO, LE FAUX DEBAT
Après la défaite de Ségolène Royal, l'idée de modernisation refait surface, cette volonté de modernisation du PS est soutenue par les Royalistes, les Strauss-kahniens, les Rocardiens, Libération, le Nouvel Observateur, Marianne mais également le Figaro, la droite, Bayrou et Sarkozy !!!
Selon eux, pour gagner la prochaine fois, le PS doit se moderniser. Qu'entendent-ils par modernisation du Parti Socialiste ?
Selon eux pour que le Parti Socialiste se rénove, le PS doit accepter l'économie de marché, il doit arrêter d'être laxiste en matière de sécurité, il doit arrêter d'ignorer les questions d'immigration, il doit regarder la réalité, il doit s'allier avec le centre, il doit abandonner ses références marxistes, bref, selon eux, le PS doit se droitiser, se social-démocratiser.
Ces conditions de la modernisation sont en réalité un faux débat comme je vais le montrer :
En effet, le Parti Socialiste a déjà accepté l'économie de marché comme le montre l'exercice du pouvoir par la gauche entre 1981 et 1986, entre 1988 et 1993 et entre 1997 et 2002.
Lorsque la gauche a exercé le pouvoir, a-t-elle aboli la propriété privée ? Non au contraire, elle a même participé à la libéralisation des échanges via la construction européenne et l'OMC, elle a même beaucoup plus privatisé que la droite, Jospin a plus privatisé que Balladur et Juppé. Le PS n'ignore pas le marché comme le montre « le tournant de la rigueur entre 1983 et 1986. Le PS a même baissé l'impôt sur le revenu en 2001. Il n'y a pas que dans la pratique et dans l'exercice du pouvoir que le PS a accepté le capitalisme, les discours, les contributions, les motions, les Universités d'été et les Congrès le montrent, par exemple lors d'une université d'été, Lionel Jospin disait « Oui à l'économie de Marché, Non à la société de marché »
Les modernisateurs reprochent au PS de courir derrière l'extrême gauche en matière de sécurité et d'être donc laxiste. Ce reproche est injuste, en effet, le PS n'est pas laxiste en matière de sécurité comme en témoigne, le « tournant de Villepinte » où Jospin et Chevènement ont mis fin à « l'excuse sociologique ».
Les pseudo-modernisateurs pensent comme Sarkozy que le PS soutient les voyous ? Le PS a-t-il supprimé la police ? A-t-il proposé comme l'extrême gauche, la suppression de la police municipale ou la suppression de la BAC? Non, preuve que le PS ne court pas derrière l'extrême gauche.
Sur les questions liés à l'immigration, les modernisateurs reprochent également au Parti Socialiste de courir derrière Besancenot et Laguiller. C'est encore faux, en effet, le PS n'ignore pas les questions liés à l'immigration et là encore, il ne courre pas après la gauche révolutionnaire, en effet le PS ne propose pas
la régularisation massive des sans-papiers, de plus avez-vous le PS à Cachan ? Le PS n'ignore pas les questions d'immigration comme le montre le concept d'« immigration partagée » développé par le projet socialiste.
Bien que le PS ne soit pas gauchiste, les Français ne feront jamais confiance à la gauche républicaine sur les questions d'immigration ou de sécurité. Le PS doit faire de la pédagogie et faire attention à ce que la droite et les Français ne fassent pas le lien entre immigration et insécurité.
Les « modernisateurs » affirment que le PS doit regarder la réalité mais le PS regarde déjà la réalité comme en témoigne l'acceptation de l'économie de marché que j'ai évoquée plus haut.
Ces « modernisateurs » qui affirment que le PS doit « regarder la réalité », veulent que le PS accompagne la droitisation du pays, pour mieux justifier la droitisation du PS qu'ils appellent de leurs vœux.
Le Parti Socialiste et la gauche n'ont pas pour but de suivre l'opinion, le PS doit convaincre et non plaire, le PS a pour rôle de devancer l'histoire et l'opinion. Si le PS se contente de suivre l'opinion la peine de mort serait encore en vigueur. Parfois, il faut oser être en désaccord avec les sondages et l'opinion.
Toujours selon les « modernisateurs », le PS pour être moderne doit s'allier avec le Centre et donc abandonner l'alliance de gauche. Pour justifier cette alliance avec le Centre, les modernisateurs le justifient par le mauvais score du PC et des Verts mais ils oublient que beaucoup ont voté « utile » suite au 21 avril 2002.
Les « modernisateurs » réclament l'alliance avec le centre alors que le Centre n'existe pas puisque Bayrou est de droite comme en témoigne son programme :
1/ Le « ni gauche, ni droite » l'histoire politique montre que ce slogan est toujours utilisé par la droite, en particulier le général De Gaulle et Jacques Chirac.
2/ Le nom de son ancien et de son nouveau parti le renvoie également à droite, en effet l'histoire montre que les mouvements politiques dont le nom ne porte pas le mot parti sont des mouvements conservateurs comme le montre l'UDF (Union) et le Mouvement Démocrate (Mouvement), le MPF de De Villiers, l'UMP, le MNR et le FN, aucun parti de droite ne met dans son nom le mot parti.
3/ Les heures supplémentaires, comme Sarkozy, Bayrou veut défiscaliser le plus possible les heures supplémentaires.
4/ Les 35 heures, en effet Bayrou est l'un des plus farouche opposant aux 35 heures
5/ La laïcité, en effet Bayrou n'a pas voté la loi sur les signes religieux à l'école (une loi qui a été votée par la gauche et la droite, lui qui veut faire travailler la gauche et la droite ensemble, il n'a même pas voté cette loi). Par ailleurs, Bayrou a tenté de modifié la loi Falloux lorsqu'il était ministre de l'Education Nationale.
6/ La Turquie, concernant la Turquie, Bayrou est farouchement opposé à son entrée comme Nicolas Sarkozy, au nom d'une Europe chrétienne et d'une Europe géographique
7/ L'ISF, Bayrou le trouve injuste !!!!
8/ La sélection à l'entrée de l'université, en effet Bayrou veut introduire la sélection à l'université
Avec tant de différences, comment faire alliance donc compromis avec le « centre ».
De plus le système institutionnel et le mode de scrutin empêchent l'existence d'un centre autonome, en effet le scrutin majoritaire renforce le bipartisme, la bipolarisation.
De plus le PS occupe déjà le centre-gauche, sur le plan politique et sociologique.
Les partisans de la modernisation appellent le PS a abandonné ses références marxistes comme le SPD lors de son Congrès de Bad Godersberg mais le PS a déjà abandonné ses références marxistes. En effet, le PS n'appelle pas à la Révolution, le PS a abandonné la dictature du prolétariat, le PS a abandonné l'idée de parti de classe et du rôle central donné à la classe ouvrière.
Le PS parle même d'alliance de classe, concept lancé par Lionel Jospin en 1999, cette alliance vise à faire avancer de front les exclus, les couches populaires et les classes moyennes.
Le PS n'a même jamais été marxiste-léniniste.
Par ailleurs, une partie de l'étude du capitalisme par Karl Marx est encore d'actualité notamment la concentration du capital, en effet Marx avait vu très tôt ce qu'à quoi on assiste aujourd'hui : la concentration du capital dans les mains d'un faible nombre de personnes.
On le voit, l'aggiornamento demandé par les modernisateurs a déjà été fait, donc le problème n'est pas la modernisation.
La défaite n'est donc pas due à un soi-disant archaïsme.
Hassen Ben Lahoual, un militant socialiste
DES PISTES A EXPLOITER
Que les partis s'appuient plus sur les syndicats, qui s'ils ne semblent pas représentatifs (8% de syndiqués), ont une force d'entrainement très importante lors des élections dans la fonction publique, les grosses entreprises et les PME.C'est au PS à proposer des structures qui permettent aux travailleurs dans les TPE (et elles sont nombreuses) de s'exprimer : un gros syndicat autonome des Services et Commerce est à créer.
Autre point d'ancrage : les seniors qui vont être de plus en plus nombreux et dont l'espérance de vie augmente. Aucun parti n'a vraiment développé des propositions sérieuses, pendant la campagne présidentielle, alors que les 2/3 des retraités voient leur pouvoir d'achat diminuer. De plus, hormis les seniors qui travaillent souvent par nécessité, il existe une masse importante de seniors qui participent activement au fonctionnement de leurs villes (associations, soutien scolaire, etc.) Une véritable économie s'est créée qui ne coûte rien au contribuable.
C'est ce que j'aurais dit à Ségolène si j'avais pu l'approcher, lors de son passage, à Aix-en-Provence.
Jean-Pierre Ferrero
La 5e république écrite pour De Gaulle a toujours failli par son aspect "Janus". Son article 20 la rend présidentielle par délégation quand le gouvernement nécessairement issu de la majorité parlementaire a la même couleur politique que le président. Le même article la rend parlementaire et génère donc une cohabitation quand les 2 majorités présidentielle et parlementaire sont différentes. La France depuis 1958 est donc un pays qui n'a pas su choisir entre le régime parlementaire du RU par ex et le régime présidentiel des USA pour ne prendre que 2 exemples volontairement choisis dans la seule culture "anglo-saxonne" que l'on présente souvent en France comme homogène. La réforme du quinquennat et l'élection législative qui suit la présidentielle tord le cou aux principes de 58, et la rupture sarkosienne oblige à faire un choix. Un organigramme gouvernemental mis en place sans le Parlement, des projets de lois préparés hors des sessions parlementaires illustrent bien l'orientation : déformer un peu plus les institutions pour en faire un régime présidentiel. Sauf à simplement supprimer le Parlement, pourquoi pas ? Pourquoi pas, sauf que... Les citoyens américains, pragmatiques ont d'emblée donné au président les moyens de gouverner : ils ont donc institué un régime présidentiel avec son "administration" (on ne dit pas gouvernement) et ses secrétaires d'Etat (dont la dénomination illustre bien la fonction d'exécution dans laquelle ils sont confinés). Mais, très méfiants dans ce pouvoir central, ils l'ont tout aussitôt flanqué d'un contre pouvoir de contrôle, le Congrès. Ce pouvoir partiellement réélu tous les 2 ans, a des prérogatives fortes qui peuvent, moyennant des majorités, contraindre le président. Les 2 pouvoirs doivent se respecter. L'interaction des 2 pouvoirs est constante. Leur indépendance l'un par rapport à l'autre est une donnée de base. Le régime ne bascule pas au gré des élections. Chiche ? Il faut alors aller plus loin que la réforme Chirac/Jospin et élire simultanément le même jour pour éviter les effets amplificateurs délétères le président et le parlement. Il faut que le Parlement ne puisse plus être dissout par le président. Il faut que le Parlement ait la maîtrise de son ordre du jour. Il faut des élections partielles de mi-mandat (ce que le quinquennat a supprimé en passant de 7/5 à 5/5). Dans le cas contraire il faut un vrai régime parlementaire comme au RU : La France ne parait pas prête à remettre en cause l'élection présidentielle au SU (pourtant le summum de la démagogie) et donc son corollaire les pouvoirs du président. Néanmoins la faisabilité doit être étudiée d'un véritable gouvernement selon l'article 20 issu du Parlement et qui gouverne !
Avec la question européenne qui a fait éclater la gauche d'Epinay, la question des institutions parait fondamentale pour une gauche rénovée. Je ne suis pas sûr que la position pour un parlementarisme rénové soit l'option actuellement majoritaire dans le pays. On doit plutôt, à mon avis, imaginer une option présidentielle avec des pouvoirs renforcés du Parlement pour un véritable équilibre des pouvoirs, moyennant l'emprunt aux USA de quelques indispensables correctifs. Ces 2 questions de fond (l'Europe et les Institutions) paraissent incontournables dans une refondation de la gauche et va conditionner les alliances. Pour le reste tout le monde, même Sarkozy est d'accord, niveau déclarations tout au moins.
Les Français ont expérimenté les cohabitations. Il semble qu'ils s'en soient lassés ? Il faut trouver une règle stable et constante avec des contre pouvoirs dont on cornait a priori les règles. L'équilibre des pouvoirs : une règle fondamentale pour une république !
Andromède (JA Le Foll)
AGGIORNAMENTO OU HARA-KIRI ?
La tradition japonaise a longtemps imposé aux soldats vaincus de pratiquer le seppuku, ou hara-kiri, plutôt que de se rendre à l’ennemi. Ce suicide était nécessaire pour préserver l’honneur des vaincus et de leurs familles.
Mais, le but est ici de faire renaître notre parti sur de nouvelles bases, et non de l’enterrer avec tous les honneurs, en une belle oraison funèbre.
Cependant, après la défaite du 6 mai dernier, certains de nos camarades semblent avoir adopté le sinistre code de l’honneur des samouraïs. Et commencent déjà à échafauder plusieurs scénarios encore aléatoires, confondant toutefois aggiornamento et révision.
L’aggiornamento, pour moi, apporterait un nouvel éclairage intellectuel, une renaissance idéologique. Alors que la révision, à mon sens, serait inévitablement synonyme de reniement, de renoncement et voudrait surtout dire court-circuiter. Pour résoudre l’équation complexe, à plusieurs inconnues, que représente notre situation, nous sommes confrontés à un dilemme : soit nous sombrons, soit nous refondons.
C’est pour cette raison que je suis persuadé qu’il nous faut réactualiser la stratégie du congrès d’Epinay. Le mérite de François Mitterrand a été d’accomplir le changement. Mais dans la continuité de nos valeurs et principes de gauche. Il ne faudrait pas maintenant créer un schisme et faire table rase de notre héritage politique. C’était l’une des raisons qui avaient poussé Léon Blum à préférer « garder la vieille maison » plutôt que de transiger avec les principes et valeurs qu’il considérait inestimables. C’était aller à l’encontre de la tendance de l’époque, qui était de croire que les adhérents à la troisième Internationale, comme Cachin et Frossard, étaient des hommes de l’avenir, alors que Blum et Sembat étaient censés être des hommes du passé.
Cela nous renvoie inévitablement au présent, où certains de nos camarades prétendent nous amener à supposer qu’une nouvelle donne a vu le jour après le 6 mai et que se cramponner à nos valeurs socialistes ne serait pas politiquement correct. Or, pour moi en tout cas, la question qui se pose n’est pas celle de la remise en cause de nos postulats, mais plutôt celle de notre capacité à inventer une nouvelle identité socialiste en diapason avec notre temps. Il nous faut trouver un moyen d’harmoniser les forces centripètes et centrifuges traversant notre société. Malheureusement, les ambitions individuelles et quelquefois mesquines de certains de nos caciques nous empêchent d’avancer sur la voie qui me semble la plus cohérente, la création d’un véritable pôle d’attraction fédérateur où doivent converger toutes les forces progressistes de notre société. La seule chose que nous proposent ces hiérarques - en fonction de leurs intérêts respectifs – est le remplacement d’une politique d’alliance par une autre.
Or, ce que l’immense majorité de nos militants demande est la fin des clivages et que nous trouvions la capacité à rassembler une partie de la gauche modéré et démocratique avec les secteurs rationnels et innovateurs de ce nouveau centre politique attaché aux valeurs de justice sociale, et qui refusent - comme nous - de se faire absorber par la pensée unique engendrée par le modèle néo-libéral. Pensée unique qui devient aussi pensée inique puisque ce modèle est basé sur l’exclusion et la différence, et dont les seuls paramètres sont l’argent, le profit, au détriment de ce qui reste la vraie richesse de nos sociétés modernes : la valeur humaine.
Certes, il ne faut pas tomber dans le manichéisme, grand travers de l’extrême gauche, qui adore diaboliser les riches et les patrons, et déifier les pauvres et les opprimés pour préparer ces derniers à une sorte d’Armageddon qu’ils osent appeler révolution. Il s’agit plutôt de faire l’analyse de la situation dans une véritable optique dialectique, comme il se doit à l’intérieur d’un parti politique. Mais pour moi, un parti politique du 21e siècle doit raisonner comme une véritable entreprise génératrice des biens politiques. Il doit avoir la capacité de proposer un vrai projet, soutenu par un vrai programme, et surtout être capable d’interpréter ce que ses militants souhaitent vraiment. Avec une communion véritable entre la direction et la base, en privilégiant notamment l’activité militante au niveau local. Car c’est dans la synergie des noyaux que sont nos sections que nous pourrons réinventer cette nouvelle superstructure dont nous avons tous besoin.
Mais nous préférons persister dans l’erreur de favoriser un modèle par rapport à un autre.
Pourquoi devoir toujours copier plutôt que créer ?
Pourquoi devoir toujours nous entêter à importer des paradigmes venant d’autre part ?
Bien que cela puisse sembler très anodin, je pense que si on est en France, le modèle le plus cohérent avec notre pays, celui qui nous ressemble le mieux, est tout simplement le nôtre…
Cela ne nous empêche évidemment pas d’observer ce qui se fait ailleurs. Et de chercher quelques inspirations dans d’autres pays, en particuliers d’Europe, pour trouver une certaine originalité susceptible de nous aider à trouver notre propre chemin pour la politique, l’économie et la société.
Mais tout cela passe avant tout par un sentiment volontariste de construire et non de détruire. La critique prend tout son sens et n’est valable que si elle est accompagnée de propositions concrètes. Il est bien d’avoir ouvert la boîte à réflexion. Mais certains semblent l’utiliser comme boîte à gifles. Or nous ne sommes pas un club de masochistes, ni une secte religieuse adepte de pénitences. Nous sommes simplement des hommes et des femmes engagés, qui militent dans un parti politique prétendant gouverner un jour. Et pour y parvenir, nous devons ouvrir d’autres boîtes, comme celles de l’audace et de l’ambition politique.
Hugo Allendes Castro, militant de la section François Mitterrand dans le 15e arrondissement.
… OU PLUTOT PLUS RIEN NE DOIT ETRE COMME AVANT
Le six mai au soir, une partie du peuple français s’est retrouvée anéantie par la suprématie incontestable de la droite sur la vie politique. Plus encore, la gauche a fait face à sa troisième défaite présidentielle consécutive.
Comment une telle chose a-t-elle pu devenir possible ? Qu’appelle-t-elle à l’avenir pour les décideurs des orientations de la gauche ?
Plus rien n’est comme avant ou plutôt plus rien ne doit être comme avant. Un gouffre s’est ouvert devant les regards ébahis des ténors du peuple de gauche, seule la refondation idéologique, culturelle et sociologique saura l’enjamber par un pont, porteur d’un nouvel espoir électoral.
Effectivement, si la gauche ne veut plus demeurer l’éternel parti de l’opposition, qu’elle entretient depuis une quinzaine d’années, le dogme d’Epinay doit d’abord devenir une contingence, sur laquelle s’appuyer, pas simplement le passe-partout pour justifier l’absence d’actualisation de ses idées.
La gauche, entendu que le PS s’en trouve le centre critique dans tous ses tourments, n’est pas seulement confrontée au choix entre radicalisme désaxé envers le monde contemporain ou de social démocratie, parangon d’un suivisme européen. Le socialisme s’est construit sur des valeurs encore aujourd’hui d’actualité : la solidarité entre les couches sociales, la défense de l’égalité entre les différentes catégories d’individu, la protection de l’Etat pour une juste répartition des richesses, tant économiques que culturelles. C’est pourquoi son libéralisme sociétal à tôt fait de porter des engagements fondateurs de la France d’aujourd’hui : l’IVG, l’abolition de la peine de mort pour les plus récents. Ainsi, la gauche peut s’estimer fière de son histoire. Alors, qu’en est-il de son futur ?
Depuis le revirement libéral de François Mitterrand en 1983, elle n’a toujours pas compris à quel point le monde d’aujourd’hui lui apportait une opportunité de se faire encore plus indispensable au sein de nos sociétés. Les hommes sont perdus, telle est la rengaine communément admise face à la perte de repère supposée des citoyens, dû à la mondialisation selon les déclinologues les plus optimistes. Pourtant, la fin d’un socle unificateur d’une société, au profit d’un zapping de chaque instant, qui touche même aux valeurs, ne porte-elle pas en elle la nécessité d’un point d’ancrage pour les personnes les « plus perdues », entendu les classes les plus défavorisées ?
La gauche, de par son histoire et la légitimité qu’elle en retire, peut et doit jouer ce rôle du berger bienveillant, sans pour autant dicter un suivisme grégaire. C’est pourquoi dans nos sociétés, face à une droite axée sur la défense de l’individu, de ses intérêts, par les dogmes de la méritocratie tout autant que de la discrimination positive, la gauche possède un joker d’avenir : son passé fonde son futur. La perte de ses valeurs, révélatrice des tensions éléphantesques, ou plutôt simiesques du PS, demeure la principale interrogation de l’électeur : celui-ci ne souhaite pas se soumettre à une tutelle de façade, mais aspire simplement à se sentir soutenue et encouragé dans sa vie par un centre fédéré de divers courants et fédérateur de la société dans son ensemble. L’expérience montre que cet espoir touche particulièrement les couches les plus en déshérence. Alors, à la gauche de faire son choix : imiter la perte sociétale, ou se confronter à elles par la réitération de ses valeurs légitimes.
Bien entendu, si nous insistons sur ce retour d’autorité historique de la gauche, ce n’est pas pour l’enfermer dans un radicalisme, qui est loin d’être immanent au PS, sinon aux autres partis de la gauche.
La réitération des valeurs gauchistes suppose une reconnaissance du changement intervenu dans nos sociétés. D’ailleurs, l’acceptation de la perte de valeurs demeure la plus importante des urgences, en ce que nous avons vu qu’elle recèle le remède aux dérives du socialisme du réel. Ce dernier est devenu la vache qui regarde passer les trains, parce qu’il se complaît dans une contemplation des interrogations de la société, s’en faisant le porte-parole, sans devenir une force de proposition. Pourtant, ce qu’ont démontré les récentes élections, c’est que les citoyens ont besoin d’une autorité qui les guide ! Personne n’aspire à devenir le berger aujourd’hui, sans pour autant se morfondre dans l’instinct grégaire des classes populaires. Ce que veut le citoyen, l’honnête homme comme dirait Nicolas Sarkozy, c’est se sentir porté sur une voie nouvelle, et que tous l’empruntent avec lui. Il cherche un chemin refondateur qui le porte dans un nouvel élan créatif de son existence, dans une redéfinition de ses rapports avec les autres et, surtout, dans une reconnaissance combattrice de la propre ex-centricité de son existence.
En somme, il s’agit pour la gauche, de ne plus s’apitoyer sur le rôle de contempteur d’une épée de Damoclès suspendue sur tous et qui menacent de nous anéantir, sans rien tenter, et beaucoup plus de se faire le nouveau Prométhée d’un sens de la vie rendue à l’Homme. La gauche est née sur une utopie des relations humaines qui a changé le monde, qu’elle devienne aujourd’hui, plus qu’une simple utopie, la vérité que chacun porte en son sein et n’ose dévoiler.
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