Congrès afsp 2009



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Naissance et mort des partis politiques. Genèse, cycle de vie et déclin des partis politiques

Agnès RAVEL-CORDONNIER, Professeur d’Histoire

Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

agnesravel@yahoo.com

Session n°1

IVie et mort du « parti dévot » dans le Royaume de France (XVIIe-XVIIIe siècles)

Comment naît et meurt un parti politique ? Cette contribution s’intéresse à ces moments clefs de la vie d’un parti, dans la France d’Ancien Régime. Les partis politiques apparurent avec la Révolution, qui permit l’élargissement du corps politique (de la noblesse sous l’Ancien Régime à la bourgeoisie sous la monarchie constitutionnelle, aux hommes majeurs sous la Première République), mais aussi la mise en place d’élections au suffrage censitaire puis universel1. Les partis politiques furent définitivement légitimés sous le Second Empire, avant de trouver un cadre légal grâce à la loi sur les associations de 19012. L’objectif de nos recherches est de prouver qu’un jalon essentiel dans l’histoire des partis politiques fut posé sous l’Ancien Régime : la mutation des « factions » (partis organisés autour des personnes, des personnalités, des clans, des familles3) en partis où les individus entrent pour défendre des idées exclusivement politiques, où ils œuvrent à prendre le pouvoir, où ils militent pour faire appliquer leur programme.


Notre objet de recherche est le « parti dévot »4. L’emploi des guillemets sert à signaler que ce sont les historiens qui ont dénommé ce parti. En effet, sous l’Ancien Régime, appartenir à un parti était considéré comme une injure, comme un attentat à l'unicité du corps politique ; être un « dévot », c’était être un tartufe5. Dans les sources, l’expression « parti dévot » est noyée au milieu d’expressions tout aussi dénigrantes : « parti moliniste », « parti jésuite », « parti du clergé », « parti de la famille royale », « parti contre la Pompadour », « parti contre les Parlements », « les constitutionnaires »6, « les ultramontains » ou tout simplement « les dévots »… Les membres du « parti dévot » préféraient se présenter comme des « politiques », des hommes et des femmes qui défendaient l’autorité royale et la religion catholique. Les historiens de la IIIe république, épris de lutte pour la laïcité, ont popularisé l’expression « parti dévot », qui disqualifiait et stigmatisait ses membres. Forgée dans la matrice de l’antijésuitisme7, de l’anticléricalisme8, de la méfiance à l’égard des partis9, la formulation « parti dévot » est désormais consacrée dans l’historiographie française et anglo-saxonne10.
Une première partie traite des conditions de naissance et de ses conséquences sur la vie interne du « parti dévot ». Une seconde partie examine la mutation de ce parti en un parti exclusivement politique. Une troisième partie explique les raisons de sa mort, au début des années 1780.

I La lente émergence du « parti dévot » (1610-1715)


Le « parti dévot » tel qu’il est décrit dans l’historiographie n’apparut qu’au terme d’un siècle de compositions, de scissions et de recompositions des dévots politiques. Il se définit par les adversaires contre lesquels il luttait : protestants, puis libertins, enfin jansénistes et parlementaires.

I.1 La « cabale des dévots » (1610-1666)


Du XVIe siècle au début du XVIIe siècle, des guerres civiles de religion avaient opposé les catholiques aux protestants, créant des partis religieux11. Elles avaient légitimé et provoqué deux régicides sur Henri III (1589) et Henri IV (1610), ces deux rois étant accusés par les catholiques d’être trop favorables aux protestants. Le Royaume de France devenant ingouvernable, certains catholiques se réunirent, de manière informelle au départ, pour défendre les intérêts de leur religion, tout en respectant l’autorité royale12. Ces « politiques », comme on les appelait alors, soutinrent la reine Marie de Médicis, Régente du roi Louis XIII13, car elle se heurtait aux révoltes des Grands orchestrées par les protestants. Leur objectif était de rétablir la monarchie, d’organiser un pouvoir politique fort au nom de l’absolutisme. Défenseurs de la religion catholique, les « politiques » se réjouirent de l’édit de paix d’Alès (1629), qui mit fin aux guerres civiles de religion dans le Royaume.
Après la défaite du « parti protestant », les dévots « politiques » se divisèrent sur la conduite à tenir. Tous souhaitaient l’éradication des protestants et le développement de l’absolutisme royal. Les uns, centrés autour de la reine Marie de Médicis et du garde des sceaux Michel de Marillac, voulaient profiter de la paix intérieure retrouvée pour remédier à la paupérisation du Royaume et permettre à la religion catholique de supplanter définitivement le protestantisme14. Les autres, sous l’égide du cardinal de Richelieu, comptaient sur la paix intérieure pour lutter contre les Habsbourg, qui encerclaient la France ; ils ne renâclaient pas à une alliance tactique avec les puissances européennes protestantes15. Les querelles entre les deux tendances aboutirent à la « journée des dupes ». Le 11 novembre 1630, Louis XIII sembla, d’abord, céder aux injonctions de sa mère ; puis, changeant d’avis, il disgracia le garde des Sceaux Michel de Marillac et accorda sa confiance à Richelieu16. Tous les dévots politiques acceptèrent la décision royale, malgré l’injustice du traitement de Marillac et des siens. Ils préféraient défendre les idées au cœur de leur parti, plutôt que de céder au « devoir de révolte » d’un parti mécontent17.
Dans les années 1660, le pouvoir royal s’en prit aux dévots. La Compagnie du Saint-Sacrement avait été créée sous les auspices du cardinal de Richelieu et de Louis XIII18. Maints dévots laïcs appartenaient à cette Compagnie ; dans toute la France, ils œuvraient aux conversions, versaient d’abondantes aumônes aux familles pauvres, aidaient à l’éducation des plus nécessiteux… Par ses bonnes œuvres, la Compagnie du Saint-Sacrement entretenait une abondante clientèle et concurrençait le pouvoir du Roi et le pouvoir de l’Eglise. Contrairement à d’autres organisations religieuses19, certains de ses membres n’hésitaient pas à critiquer les adultères, y compris les adultères royaux. A partir de 1660, Louis XIV s’en prit personnellement à cette « cabale des dévots ». Il soutint la procédure de suppression de la Compagnie du Saint-Sacrement par le Parlement de Paris. En septembre 1661, il fit arrêter et condamner l’un des chefs du « parti dévot » à la cour de France : le surintendant des finances Nicolas Fouquet20. Le Roi soutint Molière, qui avait brocardé les dévots dans son Tartufe21. Mais, dans les années 1670, il constata que toutes ses tentatives avaient échoué pour anéantir la « cabale des dévots ». Louis XIV changea, alors, de politique. Il céda sur leur principale revendication : l’éradication des protestants en France. En 1685, il révoqua l’édit de Nantes22. Puis, il appliqua la stratégie de « diviser pour mieux régner ». Avec succès. Les dévots entrèrent dans une période de crises intra-partisanes, sur des questions théologiques : quiétisme, molinisme, jansénisme. Dans les années 1690, ils s’entre-déchiraient.

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