3Le formaldéhyde responsable de symptômes pro-inflammatoires 3.1Etudes épidémiologiques
Dans la population générale, les résultats d’études épidémiologiques semblent également montrer un lien entre exposition au formaldéhyde, état pro-inflammatoire et symptômes asthmatiformes. Ainsi, chez des enfants sains, un état inflammatoire « subclinique », apprécié par une augmentation du NO exhalé, a été retrouvé chez les enfants exposés au domicile à un taux de formaldéhyde supérieur à 60 µg.m-3 par rapport aux enfants exposés une concentration inférieure. Les taux mesurés de NO exhalé étaient de 15,5 ppb et 8,7ppb, respectivement (Franklin et al, 2000). De plus une prévalence des sifflements a été retrouvée significativement plus élevée lors d’une enquête téléphonique chez 1 396 habitants de maisons isolées avec une mousse urée-formol par rapport au groupe contrôle (1 395 habitants de maisons sans mousse urée-formol) (Thun et al, 1982). Enfin, Norbäck et coll ont mis en évidence dans un groupe de 88 suédois une relation significative entre la présence de gênes respiratoires nocturnes et les concentrations de formaldéhyde mesurées au domicile avec un OR de 12,5 (IC 95%, 2,0 – 77,9) (Norbäck et al, 1995). Le taux moyen (min – max) de formaldéhyde mesuré au domicile des sujets présentant des symptômes respiratoires étaient de 29 (< 5 – 110) µg.m-3 contre 17 (<5 – 60) µg.m-3 dans les maisons des sujets n’ayant pas de gênes respiratoires nocturnes. Au vu de ces études, l'exposition au formaldéhyde semble donc corrélé à des symptômes respiratoires. Des études expérimentales chez l'animal ont cherché à objectiver cette relation.
3.2Etudes expérimentales chez l'animal
Dans un modèle expérimental chez la souris, une exposition chronique à de faibles doses de formaldéhyde (96, 480 et 2 400 µg.m-3, 16h/j, 5j/sem pendant 12 semaines) a révélé dans le lavage broncho-alvéolaire (LBA) une diminution significative des taux de Nerve Growth Factor (NGF) chez les souris sensibilisées lorsqu'elles étaient exposées à 96 et 480 µg.m-3, par rapport aux souris sensibilisées contrôles non exposées au formaldéhyde (Fujimaki et al, 2004). Cette décroissance n'était pas retrouvée pour la concentration la plus élevée de 2 400 µg.m-3. Ces résultats permettraient de faire un lien entre l'exposition chronique à de faibles doses de formaldéhyde et les altérations neuro-sensoriels retrouvées dans l'hypersensibilité chimique multiple et notamment le caractère multi-organique de la symptomatologie. D'autres études sur les liens entre formaldéhyde et NGF seront nécessaires pour une meilleure compréhension des modulations des interactions neuro-immunes lors de l'exposition à ce composé chimique.
4Le formaldéhyde responsable de symptômes d'irritation 4.1Symptômes d'irritation bronchiques
Les effets irritants respiratoires d'une substance se caractérisent par une rhinorrhée sans prurit ou éternuements, de la toux, une dyspnée et un sifflement occasionnel qui peuvent apparaître dès la première exposition à une substance à des concentrations élevées. Ce caractère irritant se définit par la disparition rapide des symptômes à l'arrêt de l'exposition (Zeiss et al, 1977).
Ainsi, des études expérimentales chez l'homme sain et/ou asthmatique ont mis en évidence des propriétés irritantes pour le formaldéhyde lors de tests d'exposition à ce composé sans que des marqueurs d'inflammation n'aient été mesurés. Quelle que soit la technique utilisée pour générer le formaldéhyde sous une forme gazeuse, selon les méthodes citées précédemment, les concentrations étaient relativement élevées, variant de 600 à 3 600 µg.m-3 (Witek et al, 1987; Green et al, 1987; Harving et al, 1990; Sheppard et al, 1984). Une exposition à 2 400 µg.m-3 de formaldéhyde ne provoquait pas de bronchoconstriction immédiate ou tardive chez des sujets asthmatiques (Witek et al, 1987). Néanmoins, les patients décrivaient au moment du test la perception d'une mauvaise odeur, une irritation de la gorge et des yeux. Une exposition à des concentrations supérieures, dix minutes à plus de 3 600 µg m-3, induisait rarement des modifications du calibre bronchique (Green et al, 1987; Harving et al, 1990) et aucune augmentation de la résistance des voies aériennes n’a pas été observée (Sheppard et al, 1984). Il est important de noter que les concentrations généralement utilisées dans ces études ne reflétaient pas une exposition en environnement intérieur domestique.
4.2Syndrome d'hypersensibilité chimique multiple
L'exposition chronique à des taux plus faibles dans des milieux intérieurs clos non industriels, est suspectée de provoquer une hypersensibilité chimique multiple aussi appelée syndrome des bâtiments malsains. Il s'agit d'une pathologie très discutée et non reconnue par la plupart des sociétés savantes (AAAAI, 1999). Elle regroupe un grand nombre de symptômes : effets neurotoxiques (céphalées, fatigue, baisse de la concentration), irritation des membranes et des muqueuses (oculaire, ORL), symptômes respiratoires (sensation d’oppression, toux, sibilants), symptômes cutanés (rash, prurit, dessèchement), altérations sensorielles (perception accrue ou anormale des odeurs, troubles visuels) (Redlich et al, 1997). Les polluants les plus fréquemment mis en cause sont les Composés Organiques Volatils (COV) et notamment le formaldéhyde. Des études épidémiologiques ont été effectuées pour des expositions professionnelles en milieu non industriel. Des employés travaillant dans des bureaux préfabriqués exposés à des taux de 144 à 1 920 µg.m-3 de formaldéhyde présentaient plus de sensation d'irritation oculaire (81 contre 17%), de sensation d’irritation de la gorge (57 contre 22%), de fatigues (81 contre 22%) et de maux de tête que les employés des bureaux traditionnels (Main et al, 1983). De même, une étude danoise a comparé les symptômes de 70 employés qui travaillaient dans des locaux de type « mobile home » à 34 employés travaillant dans des structures fixes, exposés à 288-660µg.m-3 de formaldéhyde et 60-132 µg.m-3, respectivement. Les employés des mobiles homes rapportaient plus fréquemment des symptômes tels qu’une soif excessive, une sensation d'irritation oculaire, des maux de tête que ceux du groupe contrôle (Olsen et al, 1982).
Au vu des résultats de ces études cliniques, il semble peu probable que le formaldéhyde soit à lui seul responsable de bronchoconstriction chez des sujets exposés dans un environnement intérieur clos non industriel (Sheppard et al, 1984). Son caractère irritant est toutefois fortement perçu pour des concentrations élevées, tandis que l'exposition à des concentrations plus faibles de formaldéhyde semble jouer un rôle plus insidieux en raison de son caractère pro-inflammatoire. L'air intérieur étant un milieu complexe formé d'une grande diversité de substances chimiques et biologiques, il semble de plus en plus nécessaire de se pencher sur les interactions possibles entre les différents constituants.
Ainsi, l’inhalation concomitante de formaldéhyde et d’aéro-allergènes pourrait avoir un impact sur la réponse allergique comme cela a été montré pour d’autres polluants chimiques comme l’ozone (O3) ou le dioxyde d’azote (NO2) (Molfino et al, 1991; Devalia et al, 1994).
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