B) La question du niveau d’information des électeurs
Les partis politiques restent une référence dans la formation de l’opinion publique, dans le vote. Un certain nombre de travaux proposent de montrer comment les électeurs vont voter. Les électorats ne sont plus aussi stables qu’avant mais les partis demeurent tout de même des références. On voit cela dans un certain nombre d’études comme Le nouveau désordre électoral publié en 2004 : il existe une très forte capacité de désigner les partis que l’on rejette. Dans des enquêtes entre 1988 et 2002, on s’est rendu compte que les partis d’extrême gauche sont des repoussoirs pour 50% des personnes, le PS pour 12%, l’UDF pour 10%, le RPR pour 26% et le FN pour 81%. On voit cette augmentation des réponses par lesquelles les électeurs disent que ces partis constituent ce qu’ils ne veulent pas. Le repérage et les systèmes de référence restent constants. La part des non-réponses va en diminuant. On a de moins en moins de proximité partisane. Les partis continuent à baliser le spectre politique mais d’une autre manière, il y a plus de stabilité.
Chapitre XII (faut pas trop suivre la numérotation ^^): Désistements, coalitions, négociations, proximités idéologiques et stratégies électorales
La plupart des rares ouvrages sur les coalitions travaillent de manière macro avec des comparaisons en cherchant à déceler des points communs. Depuis 1990, il y a des travaux proposant d’autres travaux, plus microsociologiques qui cherchent à voir comment se construisent les coalitions, quelles sont leurs influences sur les militants et la vie du parti. Ces approches cherchent à appréhender le monde réel des coalitions. Dans ce chapitre, on va s’intéresser aux approches macrosociologiques.
Il existe beaucoup plus de travaux sur les coalitions de gouvernement que sur les alliances électorales.
I) Les alliances électorales
Le mode de scrutin constitue une contrainte ou une ressource pour les partis dans les alliances entre partis. Dans le cas des scrutins à un tour, les alliances vont nécessairement se jouer avant les élections, surtout si le scrutin est majoritaire. Dans le cas d’un scrutin proportionnel à un tour, un parti peut toujours espérer obtenir des sièges et constituer une coalition après les élections. Dans le cas de scrutins majoritaires de liste, les petits partis sont contraints à des alliances pour avoir quelques uns des leurs sur la liste présentée par le parti majoritaire. Dans le cas d’un système à deux tours, la plupart du temps majoritaire, on a des jeux d’alliance qui se font entre les deux tours. Même dans le cas d’un scrutin à deux tours, on va parfois avoir des alliances avant le premier tour. Se pose alors la question de la crédibilité de l’alliance lorsqu’on le fait entre les deux tours (et qu’on a mené campagne les uns contre les autres au premier tour). Pour éviter des critiques qui pourraient nuire à la coalition au moment du deuxième tour, on va pouvoir opérer des alliances avant le premier tour. On peut nouer des alliances dès le premier tour pour des visées politiques, pour créer visiblement une proximité. On peut faire une alliance dès le premier tour en s’accordant sur des désistements pour le second tour dans d’autres circonscriptions.
Si l’on en vient aux formes que peuvent prendre les coalitions électorales, on a un premier cas de figure qu’on appelle les apparentements. C’est une forme de coalition électorale qu’on va trouver uniquement dans les élections à la proportionnelle et qui organise deux ou plusieurs listes. Cela a existé en France en 51 et 56 mais ce n’est plus prévu dans la législation électorale. L’apparentement est prévue avant le scrutin, chaque organisation présente sa propre liste mais avec un apparentement avec d’autres listes. On va décompter les voix isolement pour chacune des listes. En revanche, l’attribution des sièges se fait en regroupant les listes ayant conclu un apparentement. C’est surtout intéressant dans des scrutins qui prévoient une répartition des sièges avec une prime majoritaire. Chaque parti va garder au moment du scrutin son autonomie. En revanche, chaque parti y a intérêt puisque l’apparentement va accroître le nombre de sièges. En 51 et 56, on était pour les législatives sur un scrutin à la proportionnelle, de liste. La loi prévoyait que, sur les 102 circonscriptions du territoire, il était possible de conclure des apparentements dans 95 d’entre-elles. La condition pour les apparentements était que les listes soient présentes dans au moins 30 départements. Les listes apparentées entre-elles gagnant plus de 50% des suffrages gagnent tous les sièges de la circonscription. Ce système empêchait les partis régionaux de se joindre aux apparentements bien que se ne soit pas l’effet principal recherché. En fait, on cherchait plutôt à favoriser les partis centristes. Un autre effet de la législation est de permettre à des petits partis d’obtenir des sièges alors qu’ils n’auraient pas put en obtenir autrement. Il y a tout un ensemble de petits partis qui obtiennent 10% des suffrages et qui, à la proportionnelle, n’arrivent pas à obtenir de sièges (quand la magnitude est restreinte). Ont voit bien ici que çà va être une ressource important pour les partis et va influencer leurs stratégies politiques pour emporter les 50% des suffrages. En France, les communistes vont dénoncer le système des apparentements en indiquant que la loi a été pensée contre eux (les socialistes préfèreraient s’allier au centre). Les gaullistes vont considérer ce système défavorable puisqu’il est favorable au centre. Ce système ne produit pas les résultats escompter et va être abandonné. En Italie, une loi électorale dans les années 50 permet les apparentements afin de préserver une majorité démocrate chrétienne contre les socialistes et contre les communistes. Au niveau national, les listes apparentées obtenant 50% des suffrages se voient donner 380 sièges sur les 510 de l’assemblée. Là encore, on tend très largement sur un système mixte ou du moins avec inflexion de la proportionnelle. Certains vont parler d’une « loi de l’arnaque ». Cela ne va pas très bien marché, les démocrates chrétiens vont obtenir 49,4% et vont passer à côté de la prime.
Un autre type d’alliance va fonctionner sur le principe des désistements. De manière générale, on peut parler de toute situation où il y a un retrait volontaire de la part d’un candidat (y compris avant le premier tour). Mais on emploie souvent le terme pour un concept plus étroit : le retrait d’un candidat en faveur d’un autre candidat. On a parfois des désistements qui vont se faire avant un premier tour de scrutin unique ou a deux tours. Un exemple, c’est celui de l’élection du 1er ministre en Israël en 1999 : initialement, il y a 5 candidats mais 3 se désistent avant le premier tour. Les désistements entre deux tours se voient très fréquemment dans le cadre français des élections législatives sous la Vème république. On a plusieurs manières d’interpréter ces désistements. 1ère stratégie, on peut se désister pour bloquer un adversaire commun. Sous la IIIème république, la discipline républicaine faisait que les candidats républicains se désistaient dans l’entre-deux tours pour faire barrage aux conservateurs. Dans les années 80, il y a la même chose pour faire barrage à un candidat FN. Ces désistements étaient organisés localement, il n’y avait pas de consigne nationale. 2ème stratégie plus ambitieuse : la stratégie de coalition. Il ne s’agit pas de refouler un autre candidat mais de se coaliser entre deux partis pour s’accorder sur des candidats et sur des désistements en fonction du premier tour. C’est le cas lorsqu’on prévoit une coalition parlementaire ou une coalition de gouvernement. 3ème stratégie : le désistement de partis pour chercher les faveurs d’autres partis. Des partis faibles vont se désister en faveur d’un grand parti en espérant un certain nombre d’avantages ou de contreparties. Dans les années 80, on avait des candidats FN se désister en faveur du RPR et de l’UDF. Le FN avait alors cherché à sortir de son isolement politique. Ce n’était pas très cher politiquement étant donné que le FN n’avait que très peu de chances de s’en tirer.
Certains types de désistements sont refusés par certains partis au nom du « choix de l’électeur ». Ce n’est pas aux partis de faire le choix pour l’électeur.
II) Les coalitions parlementaires et gouvernementales
Tome III du traité de Sciences Politiques, chapitre sur l’interaction des groupes politiques : Jean et Monica Charlot.
Jean et Monica Charlot arrivent à la conclusion que la plupart des partis ne peuvent pas gouverner seuls dans un système pluraliste. Dans le monde, 80 à 90% des gouvernements seraient des gouvernements de coalition. Riker est l’un des premiers à travailler sur les coalitions. Si l’on suit Riker, il faut souligner que toutes les coalitions n’aboutissent pas à des majorités parlementaires. Il y a également des coalitions d’opposition. La question qui se pose le plus fréquemment pour les analystes est celle de la stabilité, de la continuité des coalitions. Riker parle de ce qu’il appelle les coalitions victorieuses (critère V) : c’est la coalition qui permet d’obtenir une majorité absolue dans une assemblée. Elle va pouvoir être maintenue lorsque chacun des acteurs, des partis va trouver un avantage, un intérêt à la majorité absolu. On n’a pas d’explication pour l’intérêt des acteurs à préserver ces coalitions. Riker est dans une approche en manière de choix rationnels. Ses ouvrages datent des années 50-60 dans la continuité des écrits de Downs sur les acteurs rationnels privilégiant l’efficacité instrumentale. La logique de chaque acteur serait : qu’est-ce que cette coalition me permet d’obtenir que je n’obtiendrai pas autrement ? D’autres auteurs vont tenter d’enrichir cette approche en détaillant les différentes modalités de ces coalitions victorieuses. Laver et Taylor vont proposer d’autres critères dans les années 70 : va être alors avancé le critère M, celui de la coalition minimale qui cherche juste à obtenir la majorité absolue. Tout membre superflu de la coalition est donc exclu. Pour le parti majoritaire, c’est l’intérêt de faciliter les négociations en limitant les alliés. Le risque, c’est que si l’un des alliés se retire de la majorité absolue, la majorité tombe. Ce sont des coalitions victorieuses minimales. Autre critère, les coalitions avantageuses (critère A). Un parti va chercher à peser sur ses partenaires. Les partis forts vont donc s’allier avec des partis plus faibles pour dominer l’alliance. Il peut y avoir une coalition minimale avantageuse. Une autre stratégie repose sur le critère N qui vise à limiter le nombre de partenaires pour favoriser le marchandage. Cela diffère du critère A qui peut chercher à rassembler le plus de partis possibles.
On est sur des critères qui répondent uniquement à des visées instrumentales. On ne prend absolument pas en compte la proximité idéologique. Gamson déclare que pour comprendre les coalitions, il faut intégrer au raisonnement des « préférences non-utilitaires » : les idéologies, les croyances, les affinités personnelles. Pour Gamson, c’est l’un des éléments qui fragilise énormément Riker. Ces théories se veulent prédictives mais fonctionnent relativement mal. Pour remédier à cela, il rajoute le critère de connexité (critère C). On considère que la coalition la plus homogène idéologiquement sera la plus favorisée. De Swaan considère que la motivation première pour un parti d’entrer dans une coalition est la possibilité de mettre en place son programme (il insiste donc sur la connexité puisqu’un rapprochement idéologique joue sur l’application d’un programme). Des partis faibles vont avoir un rôle essentiel dans la formation de gouvernements car pouvant faire basculer une majorité. C’est le cas des partis charnière (concept de Riker). Il s’agit du « dernier et indispensable partenaire d’une coalition minimale victorieuse ». Par exemple, un parti ayant obtenu 35% des sièges va s’allier avec différents partis et obtenir 48%. Il va donc chercher un parti charnière auquel il donnera satisfaction pour le conserver dans la coalition et donc conserver la majorité. On parle aussi de partis d’appoint. De Swaan parle de partis pivots ou médians : il s’agit du parti au centre de la coalition par son positionnement idéologique. C’est bien souvent ce parti là qui va faire le lien entre les différents bords de la coalition. Il va donc avoir un rôle important dans la stabilité de la coalition. Il va également avoir un rôle moteur puisqu’il peut équilibrer sur sa gauche et sur sa droite.
Il existe également des coalitions d’opposition. Dans certains cas, on a également des coalitions qui peuvent paraitre curieuses : ils pourraient être majoritaires seuls mais décident de nouer des coalitions. C’est le cas des Gaullistes en 68. On a aussi des situations où une coalition de gouvernement peut servir à espérer des coalitions au niveau local (alors qu’on est majoritaire au niveau gouvernemental). Ces théories de négociation et de coalition ne suffisent donc pas, à tout expliquer.
III) Efficacité stratégique et effets contre-productifs
Boudon indique que les effets pervers sont des effets de composition. Chaque acteur agit en fonction de ce qu’il pense conforme à ses intérêts mais l’agrégation de ces stratégies amène des résultats non-prévus par les acteurs. Boudon parle de l’effet boule-de-neige, des prophéties auto-réalisatrices (ex : baisse du court de la bourse). L’effet pervers n’est pas nécessairement contraire aux buts des acteurs, il n’était juste pas recherché par les acteurs. Ce n’est pas forcement un effet contre-productif.
Dans les stratégies d’alliance et de coalition, on peut voir émerger un certain nombre d’effets non recherchés par les acteurs. Dans le cas du désistement, on cherche à ce que la majorité des électeurs d’un désisté vote pour celui qu’il a désigné. Dans certains cas, cela peut nuire au candidat en faveur duquel on s’est désisté. Les désistements de candidats FN en faveur de la droite n’ont pas forcement entrainés un report des voies du FN mais ont, de plus, conduits certains électeurs à ne pas voter pour un candidat de droite soutenu par le FN. De manière générale, on va mettre en avant le fait que des électeurs plutôt idéalistes sont en attente de choix politiques inscrits dans un système de valeur identifiable. Un gouvernement va dès lors devoir appliquer son programme et se méfier des coalitions pour ne pas perdre son électorat. Les pratiques d’alliances électorales peuvent brouiller les électeurs qui n’arrivent pas à les différencier. Des coalitions larges s’entendant sur le plus petit dénominateur commun aboutissent à un brouillage des références politiques pour les électeurs et au sentiment qu’il n’y a pas de différence entre les partis. Dès lors, il y a un travail de justification, de construction de la réalité politique par lequel ils vont essayer de faire partager une vision du mode politique et de leurs alliances afin qu’elles apparaissent comme des victoires. Un élément essentiel correspond donc à la densité idéologique du parti (efficace/rationnel : idéologie souple). Evidemment, la coalition est beaucoup plus justifiable pour un parti à la densité idéologique faible qui pose en objectif la prise de postes de pouvoir. A l’inverse, un parti idéologiquement fort va avoir beaucoup de mal à justifier auprès de ses militants ses politiques de coalition. De même, les coalitions seront difficiles à faire perdurer. Plus la densité idéologique est forte, plus l’interprétation des termes du contrat de coalition devient un enjeu fort pour les luttes intra et inter-partisanes.
Les effets parfois contre-productifs des coalitions permettent d’expliquer certaines ruptures, par exemple quand la coalition électorale se révèle inefficace (pas de prise de pouvoir jugée suffisante), quand la coalition nuit à la crédibilité des partis en présence (trop hétérogène) ou quand, en interne, dans les partis politiques, la coalition pose de trop lourdes difficultés en termes d’identité partisane. A contrario, la coalition est un succès quand elle est reconduite aux élections suivantes.
Conclusion :
On ne peut pas questionner les coalitions sans questionner le système partisan. Elles se font en fonction de modes de scrutins, au sein d’un système partisan donné, en fonction des acteurs en présence, en fonction de leurs proximités idéologiques, etc. De manière plus générale, il est difficile d’isoler les stratégies de campagne d’un parti sans traiter les stratégies de façon plus large : c’est un processus concurrentiel.
A l’évidence, le mode de scrutin joue un rôle central dans les coalitions. Pour les régionales en 92, 98, il y a un scrutin à la proportionnelle à un tour. De fait, il y a peu d’alliances pré-électorales mais les coalitions se forment plus tardivement, au sein de l’assemblée régionale. L’argument qui a justifié la mise en place du système de scrutin à deux tours en 2003 a reposé sur la nécessité de faire apparaitre des coalitions stables. De plus, on a introduit une prime majoritaire pour encourager les coalitions. Les listes obtenant plus de 5% au premier tour ont la possibilité de participer aux alliances. En fonction des partis, on peut avoir des listes uniques dès le premier tour (surtout à droite). Cela peut être dangereux puisque l’on empêche les opinions de s’exprimer et l’on se prive d’un réservoir de vote. Néanmoins, cela peut éviter de s’allier au deuxième tour alors qu’on s’est entredéchiré au premier tour. La coalition parait plus stable. Pour différencier une coalition minimale de coalitions idéologiques, il faut aller sur le terrain voir comment elles sont vécues par les militants et comment elles sont décidées par les partis. Un article de Bue et Desage dans la revue Politix s’intitulait Le monde réel des coalitions : l’étude des alliances partisanes de gouvernement à la croisée des méthodes. Bue et Desage estiment que les études que nous avons vu reposent sur des postulats très contestables et n’expliquent pas toutes les coalitions. Ces postulats sont l’homogénéité des partis, l’homogénéité des membres, le parti est considéré comme un acteur unique et stable. Bue et Desage nous dise que l’on ne peut pas omettre les tensions internes. Il existe des incertitudes sur les choix de coalition, sur que faire de la coalition, sur ce qu’elle deviendra une fois au pouvoir, sur la capacité des acteurs à mettre en place leur programme au sein d’une coalition. Les coalitions ne débouchent pas nécessairement sur les objectifs qu’elles défendent. Par ailleurs, ces théories générales échouent très largement à produire un modèle prédictif alors qu’elles y prétendent. Bue et Desage isolent de nouvelles approches aux USA et en France. Ce sont des approches inductives plutôt qu’hypothéticodéductives. On part d’analyses de terrain, de pratiques de coalitions pour ensuite essayer de proposer une analyse plus globale. On ne considère pas le parti comme un tout. Ces nouvelles approches sont également plus soucieuses de la contextualisation, de la variation dans les approches des acteurs. Il peut y avoir des coalitions différentes dans deux élections étant donné du contexte changeant et de l’évolution des acteurs. Ces approches sont également plus attentives aux motivations propres aux acteurs, qui ne sont pas celles du parti. Les dirigeants, certes, mais les militants également.
Pour analyser les coalitions, on a besoin d’une sociologie interne des partis politiques. On peut analyser les coalitions parce qu’elles produisent. Les études de Bue et Desage dans le Nord-Pas-de-Calais se sont faite sur le terrain. Nicolas Bue propose un article sur les accords de coalition et la manière dont ils se négocient à Calais entre 1971 et 2008. C’est une étude ethnographique des coalitions via des entretiens. A partir de cela, il va interroger l’instrumentalisation des accords de coalition. Il distingue différents usages : des usages communicationnels à fin de légitimation. Le contrat de coalition est rendu public et oriente l’action politique sans la déterminer. Il va permettre aux partis impliqués de donner à voir qu’ils conservent une marge de manœuvre par rapport à leurs alliés. Deuxième usage : le contrat de coalition va être une ressource pour négocier l’action publique. Là, il y a beaucoup de choix de politiques publiques qui sont fait en dehors du contrat. C’est un point d’appuis pour les coalisés mais une ressource faible. De nombreux choix faits entre 71 et 2008 vont a contrario du contrat. Troisième usage, le contrat est un moyen de poursuivre la compétition par d’autres moyens. C’est une perspective qui prête attention aux acteurs et donc aux usages des coalitions pour les membres des partis : quels effets dans l’adhésion, dans la pratique des adhérents, dans la manière dont ils conçoivent leur rôle. Dechezelles dans « le malgré nous » déclare que les décisions des têtes ne sont pas toujours conformes aux volontés des adhérents du parti. Stéphanie Dechezelles travaille auprès des jeunes militants et la façon dont ils perçoivent l’alliance entre la Ligue du Nord, l’Alliance Nationale et Forza Italia. A l’intérieure d’un même parti, le rapport des jeunes au projet du parti et de la coalition ne va pas être le même. Dechezelles prend en compte la notion d’être militant dans les différents partis. Elle prend aussi en compte la probabilité pour ces jeunes d’accéder à des postes électifs et ce que fait la coalition à ce sujet. Autre facteur à prendre en compte : la position du parti dans la coalition (médian, d’appoint ?). Il faut aussi considérer la professionnalisation du parti politique. La coalition offre-t-elle aux jeunes un métier ou n’est-ce qu’une fonction de mobilisation partisane ? Stéphanie Dechezelles déclare que les perceptions sont surtout liées à la socialisation faite au préalable dans le parti politique. Bien souvent, dans ces mouvements de jeunes, il y a des pratiques de coalition qui viennent heurter cette socialisation. En fait, elle observe des perceptions très différentes entre les jeunes, surtout entre ceux de la Ligue du Nord et l’Alliance Nationale. La coalition serait moins bien perçue par ceux de la Ligue du Nord. Dans les deux cas, il existe une dissonance identitaire. La densité idéologique forte rend tout compromis difficile. Le mouvement de jeune de l’Alliance Nationale est beaucoup plus considéré comme un tremplin vers le métier politique. La coalition est donc conçue comme un « accélérateur de carrière ». Quand bien même ce ne serait pas le cas, les militants vont se plier plus facilement aux décisions des dirigeants puisqu’il y a un enjeu de professionnalisation. A contrario, les jeunes de la Ligue du Nord n’hésitent pas à remettre en cause les stratégies d’alliance et de coalition. Il va donc y avoir un discours de légitimation de la part de la coalition. Suivant les partis politiques, il y a une gestion différente ce qui suppose des démarches intellectuelles et des méthodes d’enquête différentes.
Partie IV : Les systèmes de parti
Jean Charlot : « Ensemble de partis en interaction dans un système politique donné. »
Sartori : « Le concept de système perd toute signification – du moins dans le but d’une étude scientifique – à moins que (i) le système présente des propriétés qui ne se retrouvent pas dans la prise en considération de manière dissociée de ses différents éléments constitutifs et que (ii) le système résulte de, et consiste en, les interactions structurées de ses éléments constitutifs, impliquant de la sorte que ces interactions fournissent les frontières ou du moins indiquent la fermeture du système. Les partis font ainsi « système » seulement quand ils représentent des parties ; et un système partisan est précisément le système des interactions résultant de la compétition inter-partisane. »
Une interrogation classique vient du nombre. Combien de partis dans un système ? C’est une question rudimentaire qui donne peu d’informations mais, selon les pays, la réponse n’est pas la même. En corolaire avec cette interrogation vient celle de la taille des partis qui constituent ce système de partis. Certains systèmes vont posséder un ou deux grands partis susceptibles de gouverner seul et une multitude de petits partis. D’autres systèmes possèdent une multitude de petits partis forcés de faire des coalitions. A-t-on affaire à des systèmes concentrés ou éclatés ? Bref, on va devoir questionner tous ces aspects. Selon les approches retenues, les réponses seront assez différentes.
L’approche initiale part de la taille et du nombre des partis. Première question : qu’est-ce qu’on fait entrer dans le système de parti ? Fait-on entrer dans le système des Ligues, des comités ou des machines électorales ? La réponse va dépendre de la manière dont on envisage le système de parti. Si on l’envisage comme étant lié à une compétition électorale, il va falloir les intégrer. Se pose aussi la question de savoir ce qu’est un grand parti et ce qu’est un petit parti. On peut faire l’hypothèse que, dans certains pays, on a affaire à des partis politiques qui ne sont pas en interdépendance les uns entre les autres. Se pose la question de savoir si on doit intégrer ces partis autonomes dans le système de partis. Certains auteurs tentent de répondre à cette question. Sartori invite à prendre en considération l’influence des partis politiques. Il considère les partis politiques comme influents que s’ils ont un potentiel gouvernemental. Sartori sait que le critère est sans doute trop limité et propose donc un autre critère : le pouvoir d’intimidation des partis : est-ce qu’un parti peut peser sur les stratégies des autres partis sans pour autant pouvoir y participer. Attention, on n’a pas intérêt à confondre ces partis hors-système avec des partis antisystèmes (qui ont un pouvoir d’intimidation assez fort).
En même temps, des auteurs considèrent que les critères de la taille et du nombre ne suffisent pas. Ils proposent d’intégrer d’autres critères de définition.
Cf. article Les systèmes de parti en Europe : équilibre, changement et instabilité de Sauger.
Chapitre I : Le système de partis comme produit des règles du jeu politique
I) Une typologie classique des systèmes partisans
Dostları ilə paylaş: |