Fondée par quatre partenaires, dont le directeur du Laboratoire de recherche en génie des procédés-environnement agroalimentaire (Gepea) (Laboratoire CNRS / Université de Nantes / École des mines de Nantes / École nationale vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation Nantes-Atlantique), AlgoSource Technologies est une start-up de conseil dans la production de microalgues. Jean Jenck, son président, présente cette bio-ressource d’avenir.
Le Journal du CNRS : Créée en 2008, AlgoSource Technologies ne vend pas un produit mais un savoir-faire. De quoi s’agit-il?
Jean Jenck : Nous sommes une entreprise d’ingénierie et de conseil pour la production et la valorisation industrielle des micro-algues aquatiques. Comme les autres végétaux chlorophylliens, ces algues microscopiques sont capables de photosynthèse : elles consomment du dioxyde de carbone (CO2) et rejettent de l’oxygène tout en produisant de la biomasse, qui peut être utilisée comme source de protéines, d’huiles, d’ingrédients chimiques, etc. Bref, elles transforment le CO2, indésirable, en matières utiles grâce à la lumière. L’intérêt de ces algues, du point de vue environnemental, est que leur production par hectare pourrait être trente fois supérieure à celle des végétaux classiques! Et ce, sans compétition pour les terres arables et l’eau douce. Mais la production varie beaucoup selon les conditions de culture. AlgoSource Technologies propose donc une solution adaptée à chaque client.
Le Journal du CNRS : Pouvez-vous nous donner un exemple?
Jean Jenck : D’abord, nous identifions les conditions de température, d’ensoleillement, de salinité, etc. Puis, en fonction du type de micro-algues à faire pousser et, surtout, de ce que l’on veut en tirer comme produits (des lipides, des sucres, des protéines, des pigments...), nous définissons le meilleur réacteur: grand bassin ouvert ou sous serre, tubes fermés, etc. Par exemple, la culture en tubes est plus sûre, car moins sujette à contamination, mais elle coûte plus cher. Comme les cultures absorbent aussi nitrates, phosphates, chaleur, etc., des sociétés qui en émettent peuvent nous demander une solution écologique et rentable économiquement pour les éliminer. Notre rôle clé est aussi de les mettre en contact avec des producteurs qui souhaitent vendre des micro-algues ou des matières qui en sont extraites.
Le Journal du CNRS : On peut donc considérer les recherches scientifiques dans ce domaine comme un élément essentiel de votre expertise?
Jean Jenck : Oui. D’ailleurs, Jack Legrand, directeur du Gepea, est l’un des quatre partenaires de la société. Les recherches visent en particulier à optimiser les photo-bioréacteurs – où poussent les micro algues – en fonction de la lumière disponible, du taux de CO2, de la forme du bassin... Il faut savoir que les photons ne pénètrent dans l’eau qu’en surface. Et que, moins il y a d’eau à filtrer, plus la récolte est facile. L’une des pistes d’optimisation consiste donc à n’utiliser qu’un fin film d’eau. On le fait ruisseler sur un plan incliné pour que l’eau circule sans qu’il ait sédimentation. Ce projet fait partie du programme ANR Biosolis. Quatre brevets au moins devraient être déposés par le Gepea et les laboratoires partenaires (Laboratoire procédés, matériaux et énergie solaire (UPR CNRS, Perpignan), Laboratoire de génie chimique et biochimique (Clermont-Ferrand), Enki Innovation (Sainte-Foy) et cotraitant Saint-Gobain).
Le Journal du CNRS : Comment est née l’idée de créer AlgoSource?
Jean Jenck : Après plus de trente ans dans l’industrie chimique, j’ai créé une micro-entreprise de conseil en technologie et je suis également devenu directeur de recherche associé au Gepea. Séduit par leurs travaux du fait de leur potentiel écologique, j’ai eu envie de les industrialiser. J’ai donc réfléchi avec Jack Legrand à un transfert technologique. Et nous nous sommes alliés à Alpha Biotech, créée dans la région par Bertrand Lépine dès 1993. Cette société, spécialisée dans la culture des micro-algues et dans la vente d’extraits, est le plus ancien acteur industriel du secteur en France.
Le Journal du CNRS : Où en est le développement de votre start-up?
Jean Jenck : Nous espérons un chiffre d’affaires d’environ 300000 euros pour 2010. Nous avons un premier salarié, chercheur en génie biologique, qui travaille notamment sur l’apport protéique des micro-algues chez les animaux. Un leader mondial de l’alimentation animal est d’ailleurs notre client. Nous avons aussi participé à l’enregistrement des micro-algues dans la liste recommandée pour l’alimentation animale en Europe par l’EABA (European Algae Biomass Association), qui nous a élus membre directeur. C’est une vraie reconnaissance.
Le Journal du CNRS : Quels sont vos projets?
Jean Jenck : Nous attendons différentes innovations, principalement sur la récolte des micro-algues. J’aimerais surtout développer les recherches sur le raffinage afin de mettre à profit toutes les matières que l’on peut tirer de la biomasse récoltée. Pour ce qui est d’AlgoSource elle-même, nous allons élargir notre activité à la production de biomasse algale et au négoce.
Propos recueillis par Charline Zeitoun
Contact : Jean Jenck, jean.jenck@algosource.com
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