2- Difficultés de mise en cohérence développement urbain / développement économique
Bien que la démarche de projet urbain devienne un aspect central de l’action publique locale en faveur du développement économique territorial, notamment grâce à ses vertus de mise au service de l’attractivité de la logique transversale, l’intervention économique du Grand Lyon s’enferme progressivement dans une approche stratégique et sectorielle à la fin des années 1990. Ce phénomène est en grande partie lié au cloisonnement professionnel et culturel très important qui se développe au sein de l’organigramme communautaire entre les services d’aménagement et d’urbanisme d’un côté, et les services économiques de l’autre.
Vertus intégratives de l’aménagement des surfaces d’activités
A partir de 1990, l’adaptation des services à la démarche stratégique, globale et transversale de l’action publique, ardemment souhaitée par l’exécutif communautaire, se généralise ainsi que leur adaptation aux nouvelles missions de conduite de projet sous-tendue par l’approche stratégique. Le service des Activités économiques, qui gère les relations avec les concessionnaires privés des opérations d’aménagement et les procédures contractuelles de DSQ298, est intégré dans le Département Développement urbain qui rassemble aussi les services d’urbanisme opérationnel, territorial et réglementaire. Il est également découpé en missions thématiques, afin de faciliter la mise en cohérence, la mise en œuvre et le pilotage des nouvelles politiques urbaines (habitat, développement économique, déplacements, écologie) et de projets plus ponctuels (espaces publics, DSU299), lancés dans l’agglomération parallèlement à l’élaboration du nouveau schéma directeur Lyon 2010.
Le nouveau dispositif est ainsi censé permettre une intégration fonctionnelle plus souple et pragmatique des politiques urbaines. Les actions économiques déployées par la MDE s’inscrivent en effet en relative complémentarité avec celles qui touchent le développement urbain de l’agglomération : participation à la gestion de l’urbanisme commercial à travers l’élaboration conjointe du SDUC, expertise technique et économique sur les projets d’urbanisme (études de faisabilité, y compris dans les quartiers sensibles concernés par les procédures de DSU), participation à la gestion de l’offre de sites d’accueil pour les entreprises à travers la création d’observatoires de l’immobilier et du foncier à vocation économique, accompagnement de la révision du POS sur la question du maintien de la place des activités économiques dans le tissu urbain, etc. (voir supra, Section 1).
Durant la première moitié des années 1990, la MDE s’occupe ainsi plus ou moins directement de l’aménagement de nouvelles zones d’activités périphériques, qui accompagnent le développement urbain et économique de l’agglomération. Elle assure notamment la conduite des études de faisabilité en amont des opérations de réalisation de nouveaux sites d’implantation pour les entreprises, ainsi que l’assistance économique au pilotage mené par les services opérationnels de l’urbanisme (ZAC du Chêne à Bron, ZAC du Parc d’Yvours à Pierre Bénite, ZAC du Parc de Gerland).
A partir de 1993, la maîtrise d’ouvrage des principales opérations d’aménagement des sites économiques retenus comme prioritaires par le SDAL est concédée à la SERL, qui bénéficie d’un retour en grâce providentiel aux yeux des autorités communautaires, en raison de l’éclatement de la bulle immobilière (voir supra). Un potentiel d’offres publiques aménagées de plusieurs centaines d’hectares est développé à destination des activités industrielles et tertiaires, à travers notamment les ZAC des Pierres Blanches, des Corbèges et le lotissement du Poste aux chevaux à Mions – Corbas, la ZAC du Paisy à Dardilly et la ZAC Thiers à proximité de la Part Dieu300 (voir cartes n°2 et 3).
La prise en main par l’organisme communautaire de la gestion de l’offre de sites d’implantation pour les entreprises au travers des démarches d’observatoire est ainsi complétée par la production de surfaces d’activités. La politique de développement économique s’appuie sur une certaine transversalité de l’action publique, alliant le volet urbanistique opérationnel et de la planification d’un côté, et le volet plus directement lié à l’économie de l’autre, tous deux portés par la même Direction du Développement Urbain. L’aménagement urbain est dès lors encore plus massivement mis au service du développement économique.
Les ZAC des Perches et du Feuilly à Saint-Priest, lancées en 1996 et 1998 et pilotées par la SERL, participent de cette dynamique d’aménagement spatial à vocation économique. Elles s’inscrivent dans la vaste opération de développement économique et urbain du site stratégique de Porte des Alpes, planifiée par le SDAL et permise par le POS de 1994, qui fait partie des projets urbains à vocation économique phares au niveau intercommunal (voir supra). Cette opération représente en effet la principale réalisation du Grand Lyon en matière de création de nouvelles surfaces d’activités pour les entreprises dans l’agglomération à la fin des années 1990. Elle est localisée sur les importantes réserves foncières constituées depuis la fin des années 1970 à proximité de la zone commerciale de Champ du Pont, de l’université Lyon 2 et de la ZAC du Triangle situées à Bron (Frénéa, 2001).
Le projet porte sur l’aménagement d’un parc technologique et scientifique à forte dimension environnementale d’environ 120 ha, destiné à l’accueil d’activités industrielles non polluantes, tertiaires et de recherche. Il s’inscrit dans le volet territorial du Plan Technopole du Grand Lyon, comme l’un des sept sites technopolitains de l’agglomération, mais sa capacité à recevoir de nouvelles implantations d’entreprises est toutefois limitée par son orientation sectorielle très spécifique, positionnée à l’interface entre environnement, technologie et activités économiques (voir infra). Celle-ci est notamment déterminée par l’implantation sur le site de la firme Mérial301 dès 1995, assurant le rôle de locomotive économique pour le lancement de l’opération et son orientation vers l’accueil des activités technologiques innovantes.
Après l’élan des années 1990, la dynamique de développement économique et d’urbanisation du site retombe d’autant plus vite depuis 2001 qu’il ne fait pas partie des priorités de la nouvelle majorité élue en matière de politique économique (Gonet, 2002). Malgré des surfaces disponibles importantes et relativement bien localisées par rapport au centre de la métropole et en termes de desserte autoroutière et aérienne (A43, proximité des aéroports de Bron et Lyon Saint Exupéry), l’opération de Porte des Alpes s’avère inadaptée pour remédier au problème croissant de la pénurie de foncier à vocation économique dans l’agglomération (voir infra). Elle constitue pourtant a priori une opportunité intéressante pour répondre à la crise de l’offre d’accueil pour les entreprises qui sévit dans l’agglomération au tournant des années 1990 et 2000.
Renouvellement urbain et développement économique
Parallèlement, la mandature de R. Barre définit une nouvel axe d’intervention pour la MDE, qui s’inscrit également en relation très étroite avec la politique de développement urbain communautaire : le lancement des premières opérations de requalification des zones industrielles aménagées dans les années 1960-70 (voir supra, 2ème Partie). Une dizaine de zones sont ainsi améliorées par la MDE à partir de 1996, notamment à Dardilly, Décines, Vaulx-en-Velin, La Mouche302, Meyzieu – Jonage, Corbas, Chassieu Mi-Plaine, Perica303, Vallée de la chimie, Craponne, Lyon Nord304 et Lyon Sud-est305. Plus de quatorze millions d’Euros sont investis en cinq ans (1997-2002) pour requalifier onze parcs ou zones d’activités de l’agglomération (Lensel, Rouzies, Degrugilliers, 2002) (voir carte n°6).
La coordination globale des opérations de requalification est assurée au niveau central par la DGDU du Grand Lyon. Sur chaque site, des comités de pilotage politique et technique regroupent les élus communautaires et municipaux concernés ou les services municipaux et communautaires concernés306, la CCIL, les industriels locaux rassemblés en association et un paysagiste chargé de l’AMO307. Cette organisation en grande partie territorialisée et décentralisée préfigure largement celle qui est mise en place pour l’action économique de la DAEI au début des années 2000 (voir infra).
Il s’agit d’un moyen d’agir en faveur du développement économique local commode, concret et relativement facile à mettre en œuvre pour les services du Grand Lyon, qui souffrent encore de leur manque de savoir-faire spécialisé dans le domaine économique au milieu des années 1990. En effet, ce type d’action permet de mobiliser les compétences techniques plus traditionnelles de l’intercommunalité – aménagement spatial, urbanisme –, qui se trouvent au sein de la DGDU à laquelle appartient aussi la MDE, afin de répondre de façon visible et assez immédiate aux attentes des entreprises en matière de localisation sur le territoire. Il s’agit aussi, non seulement de coller aux besoins des entreprises en matière d’offre d’implantation et de répondre à leur attente concernant leur environnement urbain immédiat (desserte, signalétique, stationnement, etc.), mais également de redonner de la valeur marchande et économique à des surfaces d’activités en perte de compétitivité face à l’évolution du marché des localisations urbaines pour les firmes, tout en palliant la pénurie de foncier disponible en périphérie et les limites posées à l’extension urbaine, grâce à la reconquête des quartiers péricentraux frappés par la désindustrialisation.
Les opérations de requalification des zones industrielles sont en effet révélatrices du caractère limité des disponibilités foncières dans l’agglomération, comme les nouvelles opérations de réalisation de zones d’activités menées durant les années 1990, qui sont toutes situées aux franges du territoire communautaire (voir supra). Le périmètre central est en effet largement saturé, il n’y a plus de foncier disponible pour accueillir les activités économiques, notamment industrielles. Le problème est moins criant pour les activités tertiaires, il est même inversé un temps au début des années 1990 en raison de la crise immobilière qui laisse une offre de bureaux pléthorique en mal de demande…
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