L’astrophysique, née avec la spectroscopie, voit émerger au début du XXe siècle une nouvelle spécialité : l’astrophysique extragalactique. Ce sont les travaux de l’astronome américain qui inaugurent le passage du concept de nébuleuses à celui de galaxie.
Notre travail repose principalement sur une analyse d’archives, en particulier celles de l’observatoire Lowell de Flagstaff où Slipher a poursuivi ses travaux de 1901 à 1954. Cette recherche a été complétée par une revue de périodiques et d’ouvrages astronomiques publiés sur cette période, ainsi que par le recours à de nombreuses sources secondaires historiques et philosophiques.
Après une introduction qui résume l’état des connaissances sur les nébuleuses à la fin du XIXe siècle, la première partie retrace la vie et l’œuvre de Vesto Slipher ainsi que les relations scientifiques qu’il entretient avec ses collègues. Elle montre la découverte inattendue d’une grande vitesse de déplacement des nébuleuses spirales dans la ligne de visée (vitesse radiale). Cette découverte, jugée très importante par la communauté des astronomes, est poursuivie régulièrement. Ces données vont permettre à d’autres d’établir des relations nouvelles, comme Hubble et la relation vitesse-distance ou De Sitter, avec le test d’hypothèses cosmologiques en relation avec la théorie de la Relativité Générale. Slipher trace également le premier chemin qui conduit à l’étude de la dynamique des galaxies, non seulement en prouvant l’existence de leur rotation mais aussi en proposant une solution à la question de leur orientation dans l’espace. Président pendant six ans de la Commission des nébuleuses de l’Union Astronomique Internationale, Slipher contribue en outre au rayonnement de l’astrophysique extragalactique.
La seconde partie examine comment est né le concept de galaxies en faisant appel à la notion de modèle. L’instrumentation, pourvoyeuse d’images interprétées à l’aune d’hypothèses théoriques de travail, contribue de façon essentielle à l’observation astronomique destinée à justifier le modèle adopté. On analyse dans cette optique comment Slipher passe du modèle de nébuleuse protostellaire, dérivé de Laplace, à celui de nébuleuse extragalactique.
La troisième partie s’interroge sur le contexte culturel et professionnel de l’apparition de l’astrophysique extragalactique. Des conditions politiques, sociales, institutionnelles ont conditionné l’apparition de cette spécialité aux Etats-Unis. Le retard français, souvent présenté comme résultant du seul sous-équipement instrumental, résulte en fait de causes multiples, parfois intriquées, où le poids des structures et des mentalités s’associe aux défauts de financement et au désastre de la Première Guerre Mondiale.
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