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La structure des suspension de ciment



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4. La structure des suspension de ciment


La pâte de ciment se présente sous la forme d'une suspension concentrée; si les grains de ciment étaient tout à fait indépendants les uns des autres, à la manière des grains d'un sable, par exemple, ils tombent sous l'effet de la pesanteur pour former, au fond du répicient contenant la pâte, un sédiment surmonté d'une épaisseur couche d'eau. Or, il n'en est rien : l'existence d'une suspension stable, même avec les teneurs en eau élevées des pâtes usuelles, ne peut s'expliquer que par une interaction des grains provoquant un arrangement, une structuration, comme cela se passe pour les sols argileux, par exemple. Néanmoins, la dimension des particules d'argile, beaucoup plus faible que celles des ciments, donnent une part essentielle aux forces de liaison intergranulaires conférant au matériau des propriétés bien particulières (propriétés coïlloidales); dans les pâte de ciment, ces forces subsistent, mais leur effet, moins marqué, laisse les forces de gravité jouer un rôle non négligeable. Retenons simplement, pour l'instant, que les grains de ciment ont un comportement intermédiaire entre les sables et les argiles.


L'établissement de modèles cherchant à décrire la structure des suspensions du ciment dans l'eau se heurte, lui aussi, à des difficultés provenant essentiellement :
- de l'extrême variété des grains de ciment dans leur taille (de quelque microns à une centaine de microns) et dans leur composition minéralogique (silicates, aluminates, gypse, ajouts divers, etc...);
- de leur forme comportant des faces planes, des arêtes, etc, se prête mal à une modélisation;
- de leur état de surface, qui nous le verrons par la suite, est assez profondément altéré par le broyage;
- de l'évolution chimique de l'ensemble où, très rapidement, des ions passent en solution, des cristallisations s'opèrent, etc.
Aussi, serons-nous amenés à échafauder un modèle en simplifiant considérablement la réalité. Dans la mesure où notre objectif est surtout de donner une explication qualitative des phénomènes, ces simplifications sont admissibles. Tout d'abord, une compréhension de la microstructure de la pâte de ciment est nécessaire et après on va aborder un modèle simple d'un grain ciment isolé des autres, lorsqu'il est sec et lorsqu'il est entouré d'eau. Puis, nous verrons quelle peut être l'interaction de deux grains, avant d'aborder l'étude structurale de la suspension.

4.1 Microstructure de la pâte de ciment

Les ciments sont des liants hydrauliques constitués de minéraux anhydres cristallisés, contenant essentiellement des oxydes de calcium, de silicium et de l'aluminium. Leurs mélanges avec de l'eau seule donnent des pâtes pures, avec de l'eau et du sable: des mortier, et avec de l'eau et des graviers : des bétons.


4.1.1 Les ciments hydraté

Le ciment anhydre est en général composé de clinker et de gypse auxquels on ajoute éventuellement des cendres volantes, du laitier ou de la pouzzolane. Le clinker, riche en silicates et en aluminates de chaux, est obtenu par cuisson à 1450°C d'un mélange intime d'argile ou de marne et de calcaire finement broyés. L'ajout de silice, d'alumine, de fer et de magnésium (par l'intermédiaire de cendres, de laitier, de filler ou de pouzzolane) permet parfois d'augmenter la résistance à l'agression chimique.


Les principaux constituants du clinker sont les suivants (la notation cimentière est indiquée entre parenthèses:
- le silicate tricalcique 3CaO.SiO2 (C3S) 50-70%

- le silicate bicalcique 2CaO.SiO2 (C2S) 15-30%

- l’aluminium tricalcique 3CaO.Al2O3 (C3A) 5-10%

- l’aluminoferrie tétracalcique 4CaO.Al2O3.Fe2O3 (C4AF) 5-15%


L'ajout d'eau à cette poudre de ciment permet d'obtenir une pâte de ciment, milieu poreux composé de phases solides hydratées et d'une solution aqueuse interstitielle remplissant les pores.
Cette hydratation s'opère par dissolution des solides anhydres, suivie d'une précipitation en hydrates formant une structure mécaniquement stable (théorie de Le Chatelier). Elle passe par les 5 étapes suivantes [2]:

FIG. 1 22:
Evolution schématique de la quantité de chaleur dégagée lors de l’hydratation [Taylor 1997]
Vernet et Cardoret [3] ont proposés une liaison entre ces étapes avec les schémas de hydratation des grains ciment comme suivant:
1 - phase de "pré-induction" de quelques minutes caractérisant le mouillage des grains, dans cette phase, on obtient une accélération très rapide de réaction chimique et une dégradation thermiques assez forte. Les premiers hydrates se forment et entourent des grains.

FIG. 1 23:
Période de début du gâchage [Vernet et Cadoret 1992]

2 - phase "d'induction", ou période dormante, pouvant durer quelques heures et pendant laquelle les réactions sont très lentes, la dissolution des anhydres étant ralentie par la couche protectrice des premiers hydrates formées



FIG. 1 24:
Période dormant [Vernet et Cadoret 1992]
3 - phase d'accélération, coïncidant approximativement avec le début de prise et la croissance des hydrates

FIG. 1 25:
Période de prise [Vernet et Cadoret 1992]
4 - phase de décélération (après 6 à 24 heures pour les ciments à base de clinker à température ordinaire), correspondant à la formation progressive de la microstructure du liant, ralentissant l'hydratation par un effet de barrière poreuse

FIG. 1 26:
Période de durcissement [Vernet et Cadoret 1992]
5 - phase finale de densification progressive du ciment hydraté, limitée par des phénomènes de diffusion à travers les couches d'hydrates formées.

F
IG. 1 27
: Période de ralentissement [Vernet et Cadoret 1992]
Les principales réactions d'hydratation des ciments sont résumées dans la liste suivante:
* Hydratation des portlands
C3S + (y+3-x) H2O → CxSHy + (3-x) CH
C2S + (y'+2-x') H2O → Cx'SHy’ + (2-x') CH
C3A + 6 H2O → C3AH6
C3A + 3(Cs.2H) + 26 H2O → C3A.3Cs.H32
C3A + Cs.2H + 10 H2O → C3A.Cs.H12
* Hydratation des alumineux
2.CA + 11 H2O → C2AH8 + AH3
3.CA + 12 H2O → C3AH6 + 3.AH3
* Hydratation des laitiers
C2AS + 8. H2O → C2ASH8
* Réaction pouzzolanique
x.CH + (y-x) H2O → CxSHy
L'hydratation du C3S et du C3A se produit rapidement et n'évolue pratiquement plus après 28 jours. En revanche, le C2S et le C4AF s'hydratent pendant plusieurs mois voire plusieurs années : le C2S par exemple n'est hydraté qu'à 72% à 17 mois et 87% au bout de 4 ans 1/2 [4].
La prédiction à long terme de la durabilité de ce milieu nécessite la connaissance de la composition, de la structure et de la solubilité des phases hydratées. Une bonne compréhension des équilibres chimiques entre les hydrates et la solution aqueuse permet de savoir si une phase est stable ou métastable, distinction primordiale pour notre modèle (une phase stable ne se dissout pas s'il n'y a pas modification de la solution aqueuse en équilibre, tandis qu'une phase métastable se dissout spontanément en faveur d'une phase plus stable). En effet, un modèle de prédiction de l'état d'une pâte de ciment à 300 ans doit uniquement prendre en compte les phases stables.

4.1.2 Les hydrates de la pâte de ciment



A. Les CSH ou silicates de calcium hydratés
En tant que constituants principaux d'une pâte de ciment Portland, les CSH sont à l'origine d'une grande partie de ses propriétés.
CSH est un terme très général. Il décrit une multitude de phases solides:
- plus ou moins cristallisées.
- naturelles ou synthétiques.
- de rapports calcium sur silicium (C/S) et silicium sur l'eau liée (S/H) variables,...
Les divers CSH sont obtenue dans le ciment soit par hydratation des silicates tricalcique (C3S) et bicalcique (C2S) à température ordinaire, soit par réaction d'additions pouzzolaniques avec de la portlandite. Ils peuvent par ailleurs être synthétisés par réaction d'un sel de calcium (CaCl2, 6H2O) avec un silicate de sodium (Na2OSiO2, 5H2O) ou par réaction d'un hydroxyde de calcium avec de l'acide silicique.

Tab. 1 9 : Différents CSH naturels et synthétique
La structure et les caractéristiques thermodynamiques des CSH dépendent de leurs conditions de formation. Par exemple:
- le rapport C/S des CSH dépend des quantités de calcium et de silicium disponibles, et de la composition de la solution au contact (cf infra).
- leur degré de cristallisation dépend de la température de réaction et de l'agitation. Ainsi, à température ordinaire, une suspension de C3S agitée violemment s'hydrate en afwillite (C3S2H3), un minéral naturel très bien cristallisé et plus stable que les gels de CSH rencontrés dans une pâte de ciment [5].
F
IG. 1 28
: Electron Micrograph : CSH, Ettringite & Calcium Hydroxide in cements
Les CSH de la pâte de ciment sont généralement très mal cristallisés. Leur structure est donc extrêmement difficile à caractériser. Ceci pose plusieurs problèmes:
- des méthodes telles que la diffraction des rayons X ne permettent pas de distinguer deux CSH de structure légèrement différentes et donc de propriétés thermodynamiques dissemblables.
- de même, toute modification structurale dans le temps sera difficile à appréhender.
Par conséquent, d'un auteur à un autre, les résultats expérimentaux concernant la structure des CSH et leurs équilibres chimiques avec les solutions aqueuses au contact sont sensiblement différents.
B. Les phases solides dans le système Al2O3-CaSO4-CaO-H2O
Les phases solides du système Al2O3-CaSO4-CaO-H2O observables dans une pâte de ciment sont les hydrates suivants:
- 3CaO.Al2O3.3CaSO4.32H2O : l'ettringite
- CaSO4.2H2O : le gypse
- 3CaO.Al2O3.CaSO4.12H2O : le monosulfoaluminate, qui forme peut-être une solution solide avec une phase 4CaO.Al2O3.19H2O ou avec une phase faiblement sulfonée
- 2CaO.Al2O3.8H2O
- 3CaO.Al2O3.6H2O, qui, selon certains auteurs, est la forme stable de la solution solide composée de monosulfoaluminate.
- du CaO. Al2O3.10H2O à faibles températures (<20°C).
Ces différentes phases résultent en général de hydratation du C3A en présence de gypse. En effet, celui-ci empêche la cristallisation immédiate du C3A en plaquettes hexagonales de C2AH8 et C4AH19 puis en C3A H6 qui, en provoquant une fausse prise, rendrait le matériau peu malléable. La présente du sulfate amené par le gypse permet à l'éttringite de précipiter autour des grains de C3A en les empêchant de s'hydrater. L'ettringite se dissout ensuit pour reprécipiter en aiguilles d'ettringite, en monosulfoaluminate, en C3AH6, en C4AH19 suivant les teneurs de la pâte de ciment en calcium, alumine et sulfate. Naturellement, il peut y avoir cœxistence de plusieurs phases.





FIG. 1 29:
(a) ettringite crystals et (b) gypsum twin crystals [6]
C. Les phases aluminosilicates
Dans la bibliographie, il n'existe que deux types d'aluminosilicates de calcium stables:
- la gehlenite hydratée : C3A SH8
- la solution solide d'hydrogrenat (C3A H6- C3A S3)
- Le premier est bien connu, il peut être obtenue à température ambiante par réaction du C3S avec du C3A en présence d'eau ou par réaction d'une solution de chaux avec un gel aluminosilicate, des pouzzolanes ou des argiles. Il est toutefois difficile de l'obtenir pur; en général, il coexiste avec un CSH ou un hydrogrenat. Sa structure est proche de celle du C4AH13 [2]. Du fait de cette difficulté, il n'a pas été prouvé que sa dissolution fût incongruente. Finalement, Atkins [7] modélisent son équilibre en solution par une dissolution congruente.
En présence de portlandite, la gehlenite hydratée est instable et se transforme en hydrogrenat.
Dron [8] a proposé dans le système Al2O3-CaSO4-CaO-H2O un diagramme d'équilibre des phases comportant deux phases métastables: C4AH13 et C2ASH8.
A terme, ce système doit évoluer vers un système stable où les deux phases métastables sont remplacées respectivement par C3AH6 et la solution solide d'hydrogrenat.
- Hydrogrenat est un terme général pour définir les composés de la solution solide C3AH6-C3AS3. La structure de cette solution solide ressemble à celle d'un grossulaire (grenat particulier). Dans un hydrogrenat, certains atomes de silicium (Si4+) du grenat sont remplacés par des atomes d'hydrogène. On obtient un grossulaire lorsque chaque atome de silicium est remplacé par 4 atomes d'hydrogène (H+).
Pour les hydrogrenats ayant un rapport silicium sur calcium supérieur à 0.42/3, nous avons simultanément deux hydrogrenats en phase solide: l'un pauvre et l'autre riche en silicium. Pour les solides riches en silicium, on observe la présence d'un gel de CSH pouvant contenir jusqu'à 20% d'aluminium (% molaire).
D. Les autres phases solides de la pâte de ciment
* La portlandite (Ca(OH)2)
Cette espèce est très bien connue, elle précipite lors de l'hydratation du C3S en CSH. Sa solubilité a été étudiée à différentes températures.





F
IG. 1 30
: Cristal de portlandite (G x 500) et Cristaux de calcite tapissant un cristal de portlandite (G x 1000) - [Cliché LERM]
* Le gypse (CaSO4.2H2O)
Cette phase, que l'on ajoute au clinker, est stable dans certains cas dans la pâte de ciment. Sa structure et sa solubilité sont bien connues.
* Les hydrates ferrifères du ciment
Le fer contenu dans une pâte de ciment provient essentiellement du C4A F. L'hydratation de ce composé donne les mêmes types d'hydrates que ceux obtenus avec du C3A, mais avec du fer (Fe3+) à la place de l'aluminium (Al3+):
- Aft: 3CaO.Fe2O3.3CaSO4.32H2O
- Afm: 3CaO.Fe2O3.CaSO4.12H2O
- Hydrogrenats ferrifères: C3FH6-C3FS3-C3AS3-C3AH6
- ...
Dans les phases Aft et Afm, l'aluminium peut n'être que partiellement substitué par le fer. L'importance de cette substitution dépend de la composition de la solution aqueuse en équilibre.
Les hydrogrenats forment une solution solide. Dans des conditions de pression et de température normales, il peut se former tous les composés de la solution solide C3FH6-C3AH6. La phase solide la plus riche en silice qui peut se former par réaction du C4AF avec du C3S a la composition suivante: C3AxF(x-1) SH4. Naturellement, la composition de la solution solide dépend de la composition de la solution aqueuse en équilibre.
* Les autres phases solides
Des impuretés peuvent se substituer aux constituants majeurs des phases solides. En effet, un grand nombre de substitutions peuvent se produire dans les phases Aft et Afm. En général, on décrit les formules suivantes pour les décrire:
- C3X.3CY.xH2O
- C3X.CY.yH2O

X peut représenter Al3+ ou Fe3+ mais aussi Mn3+, Cr3+, Ti3+ dans certains cas
Y peut être SO42-, CrO42-, CO32-, 2Cl-, 2OH-.
Certaines des phases Afm formées dans la pâte de ciment sont peu cristallisées et intimement mélangées avec les CSH.
Bien évidemment, cette liste des phases du ciment n'est pas exhaustive.

4.2 Bilans des forces des suspensions:

4.2.1 Interactions interparticuliaires

Du point de vue physique, toutes les lois d'écoulement (rhéogramme, lois de viscosité) énoncés précédemment sont associées à des interactions interparticulaires. On distingue des interactions entre particules au repos et en écoulement. Dans la littérature, ces différentes forces sont classées en fonction de leur nature (répulsives ou attractives), de la taille des particules (habituellement supposées sphériques), de la concentration volumiques solide, etc ...[9,10].


4.2.2 Interactions colloïdales

Ces interactions touchent les fines particules dont les dimensions s'étendent d'environ 1nm à 100nm [11,12]. Par leur petite taille, ces particules peuvent interagir les unes avec des autres. Ces interactions peuvent être de type attractif ou répulsif, dont les principales sont les forces de London, Van Der Waals, les forces électrostatiques.



4.2.3 Forces hydrodynamiques

La présence de particules au milieu d'un fluide, lors de l'écoulement d'une suspension, induit des perturbations du champ de vitesse par rapport à celui qu'il y aurait avec le fluide seul. Ces perturbations augmentent le taux de dissipation de l'énergie visqueuse, même lorsque les particules sont éloignées les unes des autres. Elles décroissent très lentement avec la distance entre particules [11,12].


4.2.4 Forces de contact

Elles concernent essentiellement les grosses particules (supérieures à quelques microns), lorsque les interactions colloïdales deviennent moins importantes. On distingue trois principaux types de contact : les contacts directs de types frictionnels ou de types collisionnels et les contacts indirects de types lubrifiés [11,12].


��Contacts frictionnels
Ce type de contact est rencontré en présence de suspensions très concentrées. Ils sont liés aux forces de frottement lorsque deux particules solides glissent l'une sur l'autre et leurs surfaces se touchent pendant une durée assez longue. L'intensité de ces forces dépend donc de la rugosité et de la forme des particules. Elles peuvent être décrites localement par une loi de type Coulomb.
��Contacts collisionnes 
Les contacts collisionnels sont surtout prédominant en présence de suspension faiblement concentrées et aux fortes vitesses de cisaillement. Ils sont caractérisés par des durées de contact très brèves, pendant lesquelles des échanges de quantité de mouvement, avec ou sans perte d'énergie, se produisent.
��Contacts lubrifiés
Ce sont des contacts indirects qui existent lorsque les particules sont proches les unes des autres (suspension concentrées). Les forces mises en jeu dans ce cas sont liées à des dissipations visqueuses d'énergie suite aux mouvements relatifs des particules séparées par de fines couches de fluide interstitiel (les mouvements de ce fluide dissipent une énergie beaucoup plus grande que celle résultant des mouvements du reste du fluide).

4.3 Modèle du grain unique

4.3.1 La surface du grain unique

Le ciment est obtenu par broyage, lors de cette opération les matériaux sont soumis à des chocs importants dont le but est de diviser les grains pour les réduire à des dimensions inférieur à une centaine de micron.


Ce fractionnement de la matière s'accompagne de plusieurs phénomènes, dont les plus notables sont:
La désorganisation de la surface des graines [13]
La création des sites non saturés électriquement [13]
On constate généralement que les grains de ciment, ainsi d'ailleurs la plupart des matériaux rocheux, sont davantage chargés négativement que positivement.

4.3.2 L'eau au voisinage du grain



A. L'Effet électrostatique
Dès que les grains ciment et l'eau sont mélangés, les produits les plus solubles passent très rapidement (en quelques minutes, c'est-à-dire la durée habituelle du malaxage) en solution [14]. Cela est dû, certes, à l'importance de la surface en contact avec l'eau, mais également à la désorganisation superficielle mentionnée plus haut. Ainsi, la phase aqueuse est pratiquement saturée en ion Ca++,Na+,K+,SO4--,OH-, etc. sans oublier les ions provenant de la dissociation de l'eau (probablement H9O4+ et H7O4-). De plus, la molécule d'eau n'est pas symétrique (hétéropolaire) et se présente donc avec un moment dipolaire qui la rend susceptible de s'orienter et d'être attirée par un élément chargé.
Ainsi, compte tenu du fait que la surface du grain est électriquement chargée, on s'attend à ce que ces éléments saturent cette surface en formant une couche mono-ionique. En réalité, à cause de l'agitation thermo-moléculaire et de l'empilement d{u} aux raisons géométriques évoquées précédemment, ils se répartissent en une couche plus étendue (couche diffuse de GOUY-CHAPMANN). On montre que la densité ionique varie exponentiellement lorsqu'on s'éloigne de la paroi pour tendre asymptotiquement vers la densité moyenne dans le liquide.
Les ions entourent le grain, formant alors un réseau plus ou moins rigide qui enserre les molécules du liquide; si on s'éloigne du grain, le tissu d'ions devient de plus en plus lâche et les molécules d'eau de moins en moins figées. Or, on sait que si la mobilité des molécules d'un liquide est diminuée, les propriétés physiques du corps changent. Ainsi, par exemple, des mesures de viscosité effectuées sur des lames d'eau très minces où les atmosphères ioniques des parois interfèrent, montrent qu'à des distances de 50 Ǻ, la viscosité de l'eau est multipliée par 10 et qu'il faut atteindre des distances de 1000 Ǻ entre les plaques pour ne plus sentir d'effets appréciables [15].
Bien que, en toute rigueur, du fait de l'allure asymptotique de la distribution, l'épaisseur de la couche diffuse soit infinie, l'expérience précédente permet de fixer les idées sur l'ordre de grandeur de l'épaisseur effective (500 Ǻ, dans ce cas).
Des théories plus récentes que celle de GOUY-CHAPMANN, comme celle de STERN, donnent l'expression de la position présumée du centre de gravité de la couche diffuse, position adoptée généralement comme frontière effective de celle-ci, soit:

avec :
ε : constante diélectrique de la phase liquide.
k : constante de Boltzmann = constante-des-gaz-parfaits / nombre-d'Avogadro = 1,38.10-23 joule/degré.
T : température absolue en degré K.
no : nombre d'ion par unité de volume de la phase liquide non perturbée électriquement.
z : valence des ions.
e : charge électrique élémentaire (charge d'un électron) = 1,602.10-19 coulomb
Afin de ne pas alourdir la rédaction, la théorie de STERN n'est pas davantage précisée dans ce paragraphe. La formule précédente, établie dans des condition très restrictives, notamment en supposant que tous les ions du liquide ont la même valence, est, en fait, présentée ici pour donner une idée de l'influence des divers facteur sur l'épaisseur effective de la couche diffuse.
Il apparaître que l'influence de la température est faible; une élévation de 20° à 40° n'augmente Hc que de :

La constante diélectrique du liquide joue un rôle plus important; en remplaçant l'eau par du benzène, par exemple, on réduit ε de 40 fois environ et l'épaisseur de la couche diffuse de 6,3 fois. D'autre part, un doublement de la concentration en ions entraine une réduction de cette épaisseur de 1,4 fois environ. Enfin, la valence des ions en solution joue un rôle important puisque 1/H varie proportionnellement avec elle.
B. L'Effet des force non-électriques [16]
Les forces d'attraction électrostatique (forces coulombiennes) ne sont pas les seules mises en jeu dans la création d'une couche d'eau liée au grain de ciment. Il existe toujours, entre toutes les particules, des forces indépendantes de l'état électrique de surface, dont nous ne donnerons ici que les aspects les plus significatifs.
* Forces de Van der Waals
Les électrons d'un atome ne se trouvent jamais symétriquement disposés par rapport au noyau; l'atome se comporte donc comme un dipôle, changeant son orientation à chaque instant (les radiations émises ont une longueur d'onde de 10-6mm environ, ce qui correspond à une fréquence de 3.1015 hertz).Lorsque deux atomes sont voisins, l'interférence entre les rayonnements se traduit par une mise en phase dans les mouvements électroniques; compte tenu de l'effet dipolaire, il en résulte une force d'attraction moyenne fa qui varie en fonction de l'inverse de la puissance septième de la distance interparticulaire, soit:


Par analogie avec la dispersion de la lumière, qui est également fonction de la radiation électromagnétique de l'atome, on appelle ces forces "forces de dispersions"; cette terminologie prête malheureusement à confusion car ces forces, attractives, tendent à rapprocher les atomes et non à les disperser. Notons que ces mêmes forces existent aussi, entre les ions et les molécules; c'est pourquoi, par la suite, on parle de forces entre particules, sans préciser davantage leur nature.
* Forces de répulsion
Il existe des forces de répulsion de la forme:


qui deviennent effectives lorsque les nuages électroniques des atomes se rencontrent, c'est-à-dire à de très petites distances (de l'ordre de quelques Ǻ)
* Conséquences
La résultante des deux forces précitées est donc:

sous forme énergétique:

F
IG. 1 31
: Schéma de la force de Van der Waal et de répulsion entre deux atomes
Nous pouvons imaginer maintenant l'effet de ces forces entre les particules situées à la surface des grains et les particules (molécules, atomes, ions) de la solution environnante. A la distance ro du grain, caractérisée par un puit de potentiel, la force résultante est nulle. Pour rapprocher les particules de la solution du grain, il faut exercer un effort de compression alors qu'il faut effectuer une traction pour les en éloigner.
Au delà de ro, distance extrêmement petite, les particules de l'eau de gâchage sont donc attirer par le grain pour former une couche dit "absorbée" dont les propriétés physiques sont différentes de celle de l'eau libre. Comme la couche diffuse de GOUY-CHAPMANN, la couche absorbée a une épaisseur en principe infinie et il est nécessaire d'introduire, ici encore, la notion d'épaisseur effective. Les auteurs sont loin d'être d'accord sur les valeurs de cette dernière. On peut toutefois admettre un ordre de grandeur de cinq molécules d'eau comme valeur moyenne, soit 2,5x5=12,5 Ǻ ; la couche d'eau absorbée par les forces de Van der Waals serait donc beaucoup moins épaisse que la couche diffuse GOUY-CHAPMANN. Cela ne signifie pas pour autant que ses effets sur les propriétés de la pâte sont négligeables.
L'étude des forces existant entre les particules de l'eau de gâchage et celle se trouvant à la surface du grain a montré l'existence, autour du grain, d'une couche d'eau plus ou moins liée suivant son épaisseur. Nous allons maintenant étudier le rôle joué par ces couches lorsque les grains d'une pâte de ciment sont suffisamment rapprochés pour qu'elles interfèrent.

4.4 Les interactions entre deux grains dans l'eau

4.4.1 La gravité

Dans une pâte de ciment au repos, les grains s'appuient les uns sur les autres, sur le fond et sur les parois du récipient, directement ou par l'intermédiaire des couches d'eau adsorbées. De tous façon, ils subissent l'effet de la pesanteur, donnant lieu à des réactions entre les grains eux-mêmes, sur le fond et les parois du récipient (la masse volumique "apparente" des grains de ciment dans l'eau est environ 3,15-1=2,15 g/cm3).



F
IG. 1 32
: Schéma de l’énergie potentielle en fonction de la distance r

4.4.2 Attraction et répulsion électrostatiques



A. Les attractions coulombiennes directes
Nous avons vu que, sur les aspérités des grains, l'empilage des ions compensateurs est instable et que ces zones pouvaient, par conséquence, présenter, dans l'eau, des charges électriques non saturées. Il peut donc y avoir, entre les points de charges opposées, des attractions coulombiennes directs, la force entre deux charges élémentaires q distances de r étant de la forme:

ε étant la constante diélectrique du milieu dans lequel se trouvent les charges.
Ces zones anguleuses non saturées peuvent également, au même titre que les ions en solution, être attirées par des charges de signes opposés, situées sur les faces plan des grains et donner, ainsi, naissance à des associations de type point-face, se substituant localement à la couche d'eau liée. Nous verrons par la suite que ce phénomène revêt une importance capitale dans les propriétés mécaniques de la pâte de ciment avant, également pendant la prise.
B. Les répulsions des couches diffuses
Quand on rapproche deux grains de ciment de même nature, une force de répulsion apparaît lorsque les couches diffuses qui les entourent commencent à s'interpénétrer. Les grains étant plutôt chargés négativement, les couches diffuses ont une charge moyenne positive et ont tendant à se repousser entre elles.
L'étude théorique d'un modèle à faces parallèles distantes de H donne la variation du potentiel électrique d'une surface à l'autre. La force de répulsion résultante est d'autant plus importante que le potentiel de surface Ψo des grains sera plus élevé et que les grains seront plus rapprochés. Elle dépend également, bien entendu, de l'épaisseur de la couche diffuse [17]

4.4.3 Attraction et répulsion non-electriques

Les forces ne se manifestent pas uniquement entre la surface d'un grain et les particules d'eau environnante, mais également entre les grains eux-mêmes.


Par intégration, on montre que l'attraction entre deux faces planes distantes de H, due aux forces de dispersion, est de la forme [18]:

avec :
A : paramètre dépendant des caractéristiques du matériau


D : valeur dépendant de la nature du fluide interstitiel

f(p) : fonction de , λ représentant la longueur d'onde de la radiation électromagnétique entre les deux plaques.



4.4.4 Les conséquences sur une suspension de grain sphériques

Imaginons une suspension dont la phase solide serait formée de grains sphériques à surfaces uniformément chargées électriquement. La forme sphérique permet, dans un premier temps, de faire abstraction des effets d'arête pour consacrer exclusivement aux couches d'eau liée. Les surfaces en présence ne sont donc pas planes et de plus, les forces intergranulaires ne se manifestent pas seulement entre deux grains, mais entre chaque grain et les grains environnants. Toutefois, en restant dans le domaine qualitatif, nous utiliserons les courbes de bilan énergétique pour expliquer comment ces forces influent sur la structure de la suspension.


A. L'état floculé
L
a courbe (b) correspond à un état où l'énergie d'attraction est prépondérante, abstraction faite du voisinage immédiat de la surface.

FIG. 1 33: Energie entre deux faces parallèles attractives
Si la concentration en solide (rapport du volume de la phase solide à celui de la phase solide plus liquide) est faible et que la distance séparant les sphère telle qu'il n y ait pas interaction; ces dernière vont descendre sous l'effet de la pesanteur. Dès qu'elles seront suffisamment près les unes des autres, il y aura attraction et formation de flocons indépendants : c'est le phénomène de floculation et on dira du mélange qu'il est floculé.
Si la concentration est telle que tous les flocons sont jointifs, on dira du mélange qu'il est floculé.
Si la concentration en solide augmente encore, le nombre de liaisons deviendra de plus en plus important jusqu'à ce qu'on atteigne l'état floculent le plus dense possible, qui correspond à la disposition géométrique des sphères donnant la compacité maximale (réseau hexagonal pour des sphères identiques).
A partir de ce moment, on ne peut plus théoriquement faire entrer de nouvelles sphères dans le mélange; on peut cependant y mettre moins d'eau, ce qui provoque automatiquement la présence d'air et la création d'un nouveau type de force, d'attraction capillaire, dont nous aurons l'occasions de parler plus loin.
Signalons, à titre d'exemple, qu'on peut tendre vers des états de ce type en mélangeant du ciment avec du toluène; ce liquide, de très faible constante diélectrique (35 fois plus faible que celle de l'eau) et de molécule homopolaire (sans orientation électrique privilégiée) laisse, en effet, une part prépondérante aux forces d'attraction.
B. L'état dispersé
La courbe (a) représente un état où l'énergie de répulsion est prépondérante parce que, par exemple, les forces électrostatiques sont importantes. Les sphères, en faible concentration, vont descendre sous l'effet de pesanteur jusqu'à ce que leurs distances mutuelles soient telles que les forces de répulsion entrent en jeu. Elles vont alors se repousser mutuellement pour former un mélange dit dispersé.





FIG. 1 34: Energie entre deux faces parallèles répulsives
On peut augmenter la concentration en solide jusqu'à ce que tout le système soit dispersé et en équilibre sous l'effet du poids propre des grains et des réactions aux parois. Au-delà de cette concentration, il faudra appliquer, à l'aide un piston, par exemple, une pression sur la surface libre pour s'opposer à la résultante de la répulsion des sphères entre elles. En d'autres termes, on ne pourra faire entrer de nouvelles sphères dans le mélange qu'en exerçant une contre-pression permettant de vaincre l'augmentation de la répulsion ou en laissant de l'air rentrer et créer des forces capillaires.
Nous verrons par la suite que c'est justement le rôle de certains adjuvants et ajouts que d'augmenter l'épaisseur de la couche diffuse et, par là même, les forces de répulsions.
C. L'état intermédiaire
Les deux états précédents, où prédominent toujours, soit les forces d'attraction, soit les forces de répulsion, sont des cas extrêmes. On rencontre aussi le cas intermédiaire, représente par la courbe (c). Les sphères étant supposées uniformément chargées, cette configuration peut être, par exemple, celle d'un mélange dans lequel les forces de répulsion électrostatiques sont suffisamment faibles pour laisser une part non négligeable aux forces d'attraction Van der Waals.
F
IG. 1 35
: Energie entre deux faces parallèles
Ce modèle de sphères identiquement chargées, dans l'état intermédiaire, est très éloigné de la structure de la pâte de ciment où les forces de répulsion électrostatiques sont importantes; nous verrons que seule une hétérogénéité dans la distribution des charges de surface peut donner alors, par des associations entre sites de charge opposée, des structures modérément floculées.
On peut toutefois, à l'aide du modèle précédent, se rendre compte des changements que peuvent apporter, à la structure, des modifications de la phase liquide. Ainsi, par exemple, un apport d'électrolyte, en augmentant le nombre no d'ions diminue l'épaisseur de la couche diffuse et donc les forces de répulsions électrostatiques; il faut donc un effet floculant. Au contraire, l'élimination des sels dissous aura un effet dispersant.

4.5 La structure des pâtes de ciments

Nous avons, jusqu'à présent, étudié les différents facteurs qui réagissent les propriétés physiques des mélanges de grains et d'eau et montré leur influence qualitative sur le comportement macroscopique d'un modèle très simple.


Les pâtes de ciment s'éloignent de ce modèle en ce sens que, notamment, la force anguleuse des grains modifie les équilibres de la structure. De plus, la composition même du ciment est variée et les équilibres ioniques sont beaucoup plus compliqués que ceux qui ont servis d'hypothèses à l'établissement des équations et des courbes précédentes.

4.5.1 L'état de floculent des pâtes de ciment

Compte tenu des raisonnements précédents, la pâte de ciment ne peut présenter qu'une structure flocule, c'est-à-dire composée de flocons jointifs formant un réseau continu.


N
ous pensons qu'une telle structure n'est disponible que grâce à des liaisons coulombiens directs pointe-pointe ou pointe-face, telles que nous l'avons déjà décrites; seules, en effet, de telles configurations géométriques sont relativement stables et permettant d'atteindre les valeurs habituelles du rapport ciment sur eau.

FIG. 1 36: Schéma de la structure floculent de la pâte de ciment
Au voisinage d'une association point-face l'arête O du grain A, est attirée fortement par les charges de signe opposé du grain B, les forces attractives de Val de Waals venant encore s'ajouter à l'attraction coulombienne. Cette association est donc très intense, mais s'exerce sur une surface très faible: il est alors logique de penser que la zone de contact se comporte à la manière d'une articulation.
Au voisinage de cette articulation, nous nous trouvons en présence de deux faces plans non parallèles; peu de calculs ont été conduits pour ce type de configuration, mais on peut, toujours qualitativement, utiliser en première approximation, les résultats obtenus pour des faces parallèles. Ainsi, lorsqu'on s'éloigne de la zone d'association point-face, on rencontre des zones de déplacement de couches adsorbées et d'interpénétration de couches diffuses, c'est-à-dire des endroits où la pression de disjonction joue pleinement son rôle. Les forces sont d'autant plus faibles qu'on s'éloigne de la zone d'association.
On peut grossièrement estimer la distance x à partir de laquelle les forces sont négligeables; en appelant θ l'angle d'ouverture et H l'épaisseur de la couche d'eau liée, on a:


soit, par exemple, pour θ = 15° et H = 250 Ǻ, x ≈ 2000 Ǻ = 0,2μm
Les forces répulsives auraient tendance à ouvrir l'angle de contact si la structure environnante ne les empêchait; elles contribuent ainsi à l'équilibre de l'édifice granulaire qui, sans elles, s'écroulerait sous l'effet de la pesanteur.
Compte tenu de la dimension des grains de ciment, on voit que l'équilibre de la structure est assuré très localement, au voisinage immédiat des associations point-face et que le reste des vides intergranulaires est essentiellement rempli par de l'eau libre.

4.5.2 L'état dispersé des pâtes de ciment

Quand les grains de ciment sont secs, les surfaces non saturées électriquement provoquent une attraction électrostatique. En milieu aqueux, lorsqu'ils sont contact avec de l'eau, une couche hydraté diffuse se forme et entoure deux ou groupes des particules qui augmentent la floculation. Lors d'un cisaillement, les 2 particules s'éloignent après rupture du joint entre les 2 membranes, les parties de membranes brisées s'hydratent à leur tour et guérirent la peau cassée. En raison de ce cure ces joints ne peuvent pas alors reformer de la même manière quand la structure vient pour se reposer, c.-à-d. l'agglomération n'est plus possible, elle est irréversible, les membranes occupent une position associée à une énergie répulsive. Ce modèle est conformé à tous les deux la formation instantanée d'une couche protectrice sur le ciment et à la notion des liaisons entre les particules proposées par Tattersall



F
IG. 1 37
: Modèle destructure par cisaillement de la pâte de ciment
On se perçoit que la pâte de ciment est une structure floculée qui va influencer importante sur le comportement rhéologique de la pâte. En outre, la structure de la pâte de ciment est évolutive à cause de l'hydratation des grains de ciment dans la suspension, donc il ne faut pas oublier le phénomène chimique lors d'étudier le comportement rhéologique des suspensions cimentaires.

4.6 Les paramètres influant sur les mesures rhéologiques des pâtes

4.6.1 Introduction

Différentes études sur le comportement rhéologique des pâtes et des mortiers, vis à vis des paramètres de composition, études réalisées par Banfill et Kitching [19] ou encore Murata et Kukokawa [20], seront résumées. Un intérêt particulier a été porté sur l’effet de la température, du malaxage, du rapport eau sur liant, ainsi que de l’effet de certains ajouts cimentaires.


4.6.2 Effet du malaxage

Banfill et Kitching [19] ont montré que l’augmentation de la vitesse de malaxage d’un mortier dans un rhéomètre (Brabender plasticorder) accélère l’hydratation du ciment. Le taux d’accroissement du moment de cisaillement augmente, donc la valeur de la contrainte de cisaillement, ainsi que la viscosité des mortiers. En effet, l’hydratation entraîne, par la formation de semi-hydrates et de chaux, une augmentation de la teneur en solides, donc une surface spécifique accrue d’où découlent un regain d’attraction par des forces de Van der Waal, ou par liaison hydro gène.

De surcroît, l’énergie apportée par le malaxage augmente sensiblement la température du mélange, ce qui a pour effet une diminution du seuil de rigidité et une augmentation de la viscosité plastique.



FIG. 1 38. Effet déstructurant du malaxage et recomposition structurelle au repos [KHAYAT, 2002][21]

4.6.3 Effet de la vibration

Afin de compléter cet exposé, et bien que la vibration soit inutile dans le cas des BAP, il convient de traiter son effet sur la rhéologie des matériaux à matrice cimentaire. En facilitant la défloculation des grains de ciment (en apportant une énergie sous forme d’onde obligeant les particules en suspension à bouger les unes par rapport aux autres et rompant ainsi les liaisons électrostatiques formées), la vibration réduit la cohésion de la pâte de ciment. Il en résulte une diminution du seuil de cisaillement. [21] Dans ce système floculé, les forces d’attraction entre particules peuvent être détruites par l’agitation (i.e. le malaxage). Il y a alors rupture des liaisons et dépassement du seuil de rigidité, d’où fluidification du système. Ce phénomène correspond à la destruction des hydrates et des cristaux d’ettringite par le malaxage, il est en partie réversible car la viscosité de la pâte de ciment revient à sa valeur initiale quand celle-ci est au repos. Ceci s’explique par la reconstruction, après un certain temps de repos, de la structure floculée des grains de ciment. Les liaisons entre particules augmentant avec le temps, au fur et à mesure de l’avancement de l’hydratation.


4.6.4 Effet des ajouts

Selon Legrand [13], l’augmentation de la concentration en éléments solides dans une pâte de ciment augmente la densité des grains de ciment, et donc multiplie le nombre de points d’attraction entre particules, ce qui entraîne un effet analogue à celui du malaxage.

Il faut toutefois noter que, selon les études de Juvas [22] et Gjorv [23], le remplacement partiel du ciment par de la fumée de silice entraîne une meilleure dispersion des particules, diminuant par là même la viscosité plastique du mélange, sans grande influence, toutefois, sur le seuil de cisaillement. Cela reste vrai tant que la concentration en fumée de silice reste inférieure à une valeur seuil par rapport à la teneur en ciment du mélange. Certains ajouts ne sont cependant pas neutres vis-à-vis du superplastifiant (adsorption d’une partie de l’adjuvant) et de l’eau de gâchage (demande initiale en eau supérieure à celle du ciment). Un remplacement d’une partie trop importante du ciment peut mener à une diminution de la fluidité du mélange.

4.6.5 Effet de la composition chimique du ciment

Mis à part les incompatibilités entre certains couples ciment / adjuvant, Greszczyk et Kucharska [24] ont montré que le seuil de rigidité d’une pâte de ciment varie avec sa teneur en alcalis et en C3A. Cette étude fut complétée par Suhr [25] qui a montré que le seuil de cisaillement augmente proportionnellement à la teneur en C3A et diminue quand la concentration en SO3 augmente.


Le premier point (i.e. l’effet de la teneur en C3A) s’explique par le fait que la rigidité du milieu est essentiellement fonction, selon Uchikawa [26], de la formation d’ettringite dans la phase interstitielle, elle-même issue de l’hydratation des aluminates tricalciques. En effet, chaque mole d’ettringite créée consomme 32 moles d’eau qui seront puisées dans la phase interstitielle, au niveau de l’eau libre, empêchant ainsi leur rôle lubrificateur. Il est à noter que la forme de l’ettringite (en aiguilles lors de cette réaction) est également un facteur influençant les propriétés rhéologiques. Quant à l’effet de la concentration en sulfate, les ions SO4 provenant de l’apport de gypse (CaSO4, 2H2O) modèrent l’hydratation du C3A, diminuant ainsi l’effet de la réactivité des aluminates. Il en découle qu’un paramètre important influant sur les paramètres rhéologiques est le rapport aluminates sur sulfate.

FIG. 1 39. Effet de C3A et de SO3 sur le seuil [SUHR, 1991] [25]

4.6.6 Effet de la surface spécifique du ciment

Les grains de ciment provenant du broyage du clinker par procédé mécanique présentent des surfaces irrégulières et non électriquement neutres, favorisant ainsi les attractions électriques décrites précédemment, et donc influençant la rigidité du milieu. Ce phénomène est accru par la finesse du ciment. En effet, plus celui ci est broyé finement, c’est à dire plus sa surface spécifique augmente, et plus les sites d’attraction ou de répulsion sont nombreux, augmentant par là même les valeurs du seuil et de la viscosité.


4.6.7 Effet d’une augmentation de la teneur en eau

L’augmentation de la teneur en eau de la pâte conduit à une augmentation de la teneur en eau libre du système, ce qui a pour effet d’éloigner les grains les uns des autres, diminuant ainsi les attractions électrostatiques (forces de Van der Waals : elles décroissent avec la distance entre particules chargées). Il en résulte une baisse du seuil de cisaillement. De plus, cet apport d’eau permettant une meilleure lubrification (du fait de l’éloignement des particules, on diminue la friction lors de l’écoulement), il en résulte une diminution de la viscosité.


4.6.8 Effet de l’ajout d’un agent de viscosité

L’agent de viscosité (ou agent colloïdal) a un effet physique en adsorbant des molécules d’eau sur sa surface, d’où une diminution de l’eau libre du système, diminution d’autant plus sensible que l’agent colloïdal augmente sa surface spécifique par association de chaînes polymériques. De surcroît, l’augmentation de la longueur de ces chaînes favorise les ponts hydrogène et les attractions de type électrostatique entres chaînes voisines, donnant un comportement pseudo plastique, d’où résultent une diminution de la viscosité et une augmentation du seuil de cisaillement.


4.6.9 Effet de l’air occlus

L’air occlus a pour effet de diminuer les valeurs du seuil de cisaillement et de la viscosité plastique. En effet, les bulles d’air incluses dans la pâte ont un rôle mécanique de « roulement à billes », facilitant ainsi les déplacements entre les différentes couches du fluide, diminuant par là même ses propriétés résistives vis à vis de l’écoulement [21]. Ce phénomène peut être recherché, par exemple dans le cas d’un béton pompé.


La figure au dessous donne les variations des valeurs rhéologiques sur des bétons en fonction de la teneur en air. Il est observé que plus cette dernière augmente et plus les valeurs de g (relatif à 0) et de h (relatif à ) diminuent. Cette baisse est importante (de l’ordre de deux tiers de la valeur initiale) quand la quantité d’air occlus passe de 0 à 5%, puis les valeurs de ces deux paramètres se stabilisent au-delà de 5% d’air occlus. A partir de ce pourcentage, l’effet « roulement à bille » est alors optimal, un accroissement des bulles d’air occlus n’améliorant plus le déplacement des couches de fluide entre elles.

FIG. 1 40. Effet de l’air occlus sur les grandeurs rhéologiques (g et h) sur trois bétons [KHAYAT, 2002] [21]

4.6.10 Effet de la température

Une augmentation de la température engendre une augmentation des valeurs du seuil et de la viscosité. La figure 2-20 montre une augmentation de l’accroissement de viscosité avec la température, (noté ct dans la FiG.2-20). Un accroissement linéaire de avec la température est observé, accroissement d’autant plus rapide que le rapport E/C est faible. De surcroît, les valeurs initiales de l’accroissement de viscosité sont d’autant plus élevées que E/C décroît. Des phénomènes analogues ont pu être observés sur l’évolution du seuil de cisaillement initial avec la température (FIG.2-21) [27].

Cela s’explique par un effet d’accélération de la cinétique d’hydratation, dont les conséquences sont une accélération de la formation d’ettringite, et donc une rigidification de la suspension par accroissement de la concentration en solides. De surcroît, l’enchevêtrement des hydrates formés et la forme très irrégulière de la couche superficielle hydratée des grains de ciment accroissent ce phénomène. Plus la température augmente et plus l’hydratation est rapide. Quoiqu’il en soit, à basse température (inférieures à 20°C), le taux d’hydratation reste modéré. La diminution des valeurs du seuil de cisaillement et de la viscosité plastique est essentiellement due à la baisse de la tension de surface des ménisques d’eau entre les constituants solides. Ce phénomène sera accru par l’adsorption des éventuels adjuvants réducteurs d’eau sur les sites réactifs des grains de ciment. Toutefois, la baisse de la capacité d’adsorption du superplastifiant avec la baisse de la température du mélange peut engendrer une augmentation de la viscosité plastique. Pour des températures élevées, le taux d’hydratation élevé entraîne une formation rapide des hydrates, d’où une augmentation de la friction entre particules engendrant une hausse des valeurs de 0 et .

FIG. 1 41. Effet de la température sur l’accroissement de la viscosité plastique (noté ici ct) sur bétons non adjuvantés [MURATA et KUKOKAWA., 1997] [20]

FIG. 1 42. Effet de la température sur l’accroissement de g et h sur bétons faiblement adjuvantes [GOLASZEWKI et SZWABOWSKI, 2003] [27]


4.6.11 Effet du temps

Avec le temps, du fait de l’avancement de la réaction d’hydratation, la quantité d’hydrates augmente. Un effet similaire à celui décrit précédemment est obtenu. La figure 1.16 en est une illustration.




FIG. 1 43. Variation de g et h avec le temps sur bétons faiblement fluidifiés composés de différents liants à 20°C [GOLASZEWKI et SZWABOWSKI, 2003] [27]
En s’intéressant aux bétons fabriqués avec des CEM I sans ajouts (notés CEM A à C), il est observé une augmentation du seuil de cisaillement (ou du couple de rappel g) avec le temps sur la première heure, la viscosité plastique (ici traduite via la grandeur non intrinsèque h) ne semblant que peu affectée sur ce court laps de temps. Quoiqu’il en soit, l’avancement de la réaction d’hydratation engendre un accroissement de la formation d’ettringite, et donc une rigidification de la suspension par accroissement de la concentration en solides. De surcroît, l’encre vêtement des hydrates formés et la forme très irrégulière de la couche superficielle hydratée des grains de ciment accroissent ce phénomène. Il en résulte une élévation des valeurs du seuil de cisaillement et de la viscosité plastique avec l’avancement de la réaction. La présence d’adjuvants réducteurs d’eau, en inhibant certains sites réactifs (par adsorption sur les grains de liant), ne fait que diminuer le taux de formation d’hydrates. Il en résulte un effet retard. Même si les réactions chimiques sont ralenties, la formation continue d’hydrates engendre une augmentation des valeurs des grandeurs rhéologiques avec le temps.


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