5. Conclusions
La typologie et la comparaison romanes nous permettent d’observer que les adversatifs grammaticalisent des structures qui ont certaines caractéristiques sémantiques et/ou fonctionnelles: (a) elles indiquent des valeurs temporelles (la simultanéité transposée en contraste, comme pour le fr. or, it. ora – et le roumain iară10); (b) elles introduisent une comparaison et un renchérissement (illustré par les résultats panromaniques de magis); (c) marquent l’exception (lat. sed, it. solo, soltanto,etc.; en roumain populaire numai, fără numai11; (d) fonctionnent comme une anaphore conclusive/consécutive (it. però, sp. pero, port. porem, fr. pourtant, etc.; rôle insuffisamment prouvé, en roumain, pour însă et ce/ci). (e) fonctionnent comme focalisateurs (it. pure, roum. însă).
Pour les adversatifs du roumain, le parcours «normal» (Diewald 2006), dans le processus de grammaticalisation par évolution interne plus conforme aux tendances romanes, est illustré par iar (opérateur temporel > opérateur de contraste). Le connecteur însă suit un parcours de grammaticalisation moins typique parmi les langues romanes, mais assez plausible en perspective typologique (et qui correspond seulement en partie à l’évolution de l’it. pure): intensificateur > focalisateur (cf. «even», Heine / Kuteva 2002: 181) > conjonction > particule discursive. Les deux autres connecteurs illustrent la conservation de la fonction pragmatique (dar), ou la perte de la fonction pragmatique et la spécialisation grammaticale (ci). Les données dont on dispose renforceraient plutôt l’hypothèse de l’emprunt pour ci (présentatif > marqueur de continuité discursive > adversatif de correction) et pour dar (marqueur interrogatif > marqueur de rupture discursive > adversatif de contraste). L’emprunt peut inverser la direction du changement linguistique: on emprunte souvent une marque pragmatique (facile à découper et à haute fréquence conversationnelle), qui peut se grammaticaliser et donc réduire ou même perdre ses valeurs interactionnelles.
Cette analyse semble confirmer le caractère atypique des évolutions du roumain par rapport au reste des langues romanes: dû, probablement, au rôle accru de l’emprunt et à une typologie différente des nombreuses particules à valeur pragmatique.
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