Le journal du cnrs numéro 21 Avril 2008


Enquête : Énergie, quels choix pour demain ?



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Enquête : Énergie, quels choix pour demain ?


Quelles sources d'énergie utiliserons-nous demain ? Une question qui sera largement débattue du 17 au 22 novembre prochains, lors de la 1re Semaine des énergies renouvelables, du bâtiment et de la maîtrise de l'énergie, organisée par l'Ademe et le ministère de l'Écologie. Reste que les solutions n'ont rien d'évident… Alors que la demande mondiale ne cesse d'augmenter, que le pétrole semble en voie de disparition, et que les énergies fossiles dans leur ensemble n'ont plus le vent en poupe, les alternatives se multiplient, du nucléaire à la kyrielle d'énergies renouvelables déjà performantes (solaire, éolien, géothermie, biomasse, etc.). Dans un futur plus lointain, celles-ci seront rejointes et peut-être supplantées par des technologies surprenantes, en train de naître dans les laboratoires, et qui iront jusqu'à convertir les mouvements du corps en énergie. Le journal du CNRS fait le point.

Sommaire enquête


Ces énergies qui vont faire parler d'elles

Les alternatives au pétrole

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Ces énergies qui vont faire parler d'elles


Aujourd'hui, l'« équation énergétique » mondiale a des allures de quadrature du cercle. Pour la résoudre, outre les économies d'énergie, les chercheurs planchent sur les énergies du futur. Si l'éolien ou le solaire ont de beaux jours devant eux, construire un monde durable nécessite aussi des idées neuves. Les laboratoires n'en manquent pas. Revue de détail.

Des océans d'énergie

S'il est un environnement encore peu exploité où l'énergie est inépuisable, c'est bien la mer et les océans. Ainsi, le projet Harvest a pour but de convertir l'énergie cinétique des courants marins ou fluviaux en électricité via l'installation de turbines sous-marines. Initié en 2001 sous l'impulsion de Jean-Luc Achard, du Laboratoire des écoulements géophysiques et industriels (Legi) (Laboratoire CNRS Université Grenoble 1 INPG), le projet financé depuis 2006 par l'Agence nationale de la recherche (ANR) regroupe une vingtaine de chercheurs de quatre laboratoires. Pour Didier Imbault, chercheur au laboratoire « Sols, solides, structure, risques » (3S-R) (Laboratoire CNRS / INPG / Université Grenoble 1), à Grenoble, qui anime Harvest depuis cette année, l'énergie dite hydrolienne ne manque pas d'attraits : « Elle est évidemment renouvelable. De plus, les courants sont périodiques, voire permanents, donc plus prédictibles que les vents. Ensuite, à puissance équivalente, les hydroliennes sont des systèmes plus compacts que les éoliennes, car l'eau est 1 000 fois plus dense que l'air. » Sans compter que l'installation d'hydroliennes nécessite peu d'infrastructures. « Il faut un système d'ancrage au fond de la mer, difficile toutefois à installer aux grandes profondeurs. Après quoi l'hydrolienne fonctionne avec le courant d'eau qui fait tourner ses turbines. Un générateur capte cette énergie mécanique pour la transformer en électricité qui sera ensuite acheminée sur le continent via un câble électrique », poursuit le scientifique. Actuellement, des turbines « miniatures » de 200 millimètres de diamètre et 200 millimètres de hauteur sont en phase d'essais dans un canal hydraulique du Legi. Mais dans les prochains mois, un prototype devrait être installé dans un canal d'EDF aux environs de Grenoble. L'occasion de tester le système en conditions réelles. Pour être fonctionnelles, les hydroliennes nécessitent une vitesse de courant supérieure à 1 mètre par seconde. Ainsi, en France et en Europe, elles pourraient être implantées jusqu'à une quinzaine de kilomètres des côtes, à des profondeurs allant de 40 à 100 mètres. À terme, avec un courant de 2,5 mètres par seconde, une tour d'hydroliennes de 25 mètres de hauteur pourrait fournir une puissance de l'ordre de 500 kW, ce qui équivaut à une éolienne de 43 mètres de diamètre exposée à un vent de 40 km/h. Énergie des courants, mais également énergie de la houle. Comme le fait remarquer Bernard Multon, au Satie, « sur les côtes atlantiques, un mètre linéaire de front de vague a une puissance moyenne de plusieurs dizaines de kilowatts ». D'où l'idée d'Alain Clément, au Laboratoire de mécanique des fluides (LMF) (Laboratoire CNRS / École centrale de Nantes), de développer le projet « Système électrique autonome de récupération de l'énergie des vagues » (Searev) qui a été présenté à la presse le 25 septembre dernier. Celui-ci se compose d'un flotteur clos à l'intérieur duquel est suspendu une sorte de pendule de 400 tonnes relié à un mécanisme permettant de convertir l'énergie mécanique en électricité. Un prototype à l'échelle 1, de vingt-quatre mètres sur quatorze, inscrit au cinquième Contrat de projet État-Région (CPER) de la région des Pays de la Loire, devrait être testé en mer à l'été 2010. « La puissance d'une telle installation dépendra du site retenu, explique Bernard Multon, qui participe au projet. Mais l'idée c'est de générer une puissance maximale comprise entre 500 et 700 kilowatts par bouée. » De quoi alimenter jusqu'à 200 foyers en moyenne par an.

Gisements sous-marins

La mer recèle un autre trésor énergétique. Moins durable sans doute, mais dont les stocks – dix mille milliards de tonnes d'après les estimations de l'United States Geological Survey (USGS) – font tourner la tête. Il s'agit des hydrates de gaz, aussi appelés clathrates. Concrètement : une étonnante glace composée d'un mélange de molécules d'eau et de gaz (essentiellement du méthane, mais aussi du propane et d'autres hydrocarbures légers, du dioxyde de carbone ou de l'hydrogène sulfuré), mélangée aux sédiments qui tapissent le plancher océanique. Pierre Henry, au Centre de recherche et d'enseignement de géosciences de l'environnement (Cerege) (Centre CNRS/ Universités Aix-Marseille 1 et 3 / IRD / Collège de France), à Aix-en-Provence, tempère : « La valeur donnée par l'USGS à la fin des années 1980 semble maintenant un maximum. Par ailleurs, cela n'indique pas ce qui est réellement exploitable. » Il n'empêche, longtemps considérés comme une lubie de géophysiciens et toujours perçus comme un risque potentiel pour l'environnement, les clathrates intéressent aujourd'hui les compagnies pétrolières. Les plus avancés sont les Japonais, qui ont effectué ces dernières années une série de forages dans la marge de Nankai au large de l'archipel nippon. L'Europe n'est pas en reste. Ainsi, le CNRS participe au projet international « Integrated Ocean Drilling Program » (IODP), dans le cadre duquel des forages ont notamment été effectués en Arctique en 2004 et au large de Vancouver en 2005. Pour quel potentiel industriel ? « Aujourd'hui, la pression est plus importante sur le pétrole que sur le gaz, donc à court terme, je ne parierai pas sur les hydrates. Mais après-demain… », répond Pierre Henry.



Des piles pour faire face

Si l'avenir des hydrocarbures est incertain, quid du futur de la pile à combustible ? Son principe, connu depuis la première moitié du XIXe siècle, consiste à produire de l'électricité par oxydation d'un combustible. Le combustible peut être de différentes natures (méthanol, gaz naturel, gaz de biomasse…), mais la pile la plus couramment étudiée est la pile à hydrogène. De fait, la combustion de ce dernier ne produit pour seul déchet que de l'eau. La pile propre par excellence ! Comme l'indique Jean-Claude Grenier, à l'Institut de chimie de la matière condensée de Bordeaux (ICMCB) du CNRS, et codirecteur du groupement de recherche (GDR) « Piles à combustible tout électrolyte membrane » (Pacte), « historiquement, le moteur à explosion l'a emporté, mais la pile à combustible possède un rendement très supérieur, et c'est un non-sens qu'il n'y ait pas eu plus de travaux sur le sujet ». L'un des enjeux actuels est le développement de piles à combustible à la fois efficaces et dont la durée de vie soit compatible avec les applications. Ce qui passe entre autres par la mise au point de matériaux nouveaux. « Le CNRS est très bien placé dans ce domaine, assure Jean-Claude Grenier. Et la France est un des rares pays à proposer de nouveaux matériaux. » Comme par exemple les nickelates, des composés à base de nickel, à la fois peu onéreux et faciles à mettre en forme, mis au point par son équipe pour la cathode d'une pile à hydrogène, et qui sont intégrés par des développeurs européens dans des systèmes hautes températures. Autre exemple : les travaux menés par les chercheurs du Laboratoire d'énergétique et de mécanique théorique et appliquée (Lemta) (Laboratoire CNRS / INPL Nancy / Université Nancy 1) et du Laboratoire structure et réactivité des systèmes moléculaires complexes (Laboratoire CNRS / Université Nancy 1), à Nancy. Ils sont en effet parvenus pour la première fois à faire fonctionner une pile à combustible dans un appareil d'imagerie par résonance magnétique nucléaire, afin d'y observer en direct la réaction de production d'eau par oxydation de l'hydrogène. Une plongée dans l'intimité d'une pile qui devrait permettre de comprendre et d'améliorer son fonctionnement. D'aucuns prévoient un bel avenir à la pile à hydrogène dans l'automobile. Plus précisément pour des marchés de niche, tels des groupes de secours en remplacement du diesel, ou des groupes portables pour les chantiers. Comme l'explique Paul Lucchese, directeur des nouvelles technologies de l'énergie au CEA, « pour l'automobile, une pile à hydrogène doit être fiable et peu coûteuse. Il y a cinq ou six ans, on n'y était pas du tout. Aujourd'hui, on est à 90 % pour la fiabilité mais encore trois fois trop cher ». Autre application probable : des systèmes couplant production d'électricité et de chaleur, pour alimenter des bâtiments. Le « must » étant peut-être cette idée proposée dernièrement par des chercheurs de l'Institut de technologie du Massachusetts (MIT) : exploiter l'énergie solaire convertie en électricité par des cellules photovoltaïques en journée. Le surplus d'électricité sert à produire de l'hydrogène par électrolyse, afin de produire ensuite de l'électricité dans une pile à combustible la nuit ! Reste que si la pile à hydrogène fait figure de convertisseur miracle d'énergie, elle pose néanmoins deux problèmes de taille. D'une part l'hydrogène gazeux n'existe pas sur Terre, il faut donc le produire. D'autre part, c'est un gaz extrêmement inflammable qu'il faut comprimer et stocker. Or les deux opérations nécessitent une dépense énergétique. L'idéal serait évidemment de produire de l'hydrogène à partir d'énergies renouvelables ou de l'énergie nucléaire couplée à des procédés thermochimiques à haute température. Côté stockage, deux possibilités s'offrent actuellement aux scientifiques. Soit dans des réservoirs en composite, selon un procédé très proche de l'industrialisation. Soit dans des matériaux très poreux appelés hydrures, afin de permettre l'accrochage en surface des atomes d'hydrogène, une technique encore au stade de la recherche fondamentale. Le CNRS et le CEA ont par exemple proposé récemment un réservoir prototype contenant 10 kg d'hydrure permettant de stocker 1 290 litres d'hydrogène à pression atmosphérique. Qui sait alors si l'avenir ne se trouve pas dans la pile à combustible dite bactérienne, développée actuellement au Laboratoire Ampère (Laboratoire CNRS / Université Lyon-I / École centrale de Lyon / Insa Lyon), à Lyon ? Son principe : utiliser des bactéries en guise de catalyseur sur les électrodes d'une pile. Plus exactement recueillir, sous forme d'électrons, à la surface de la membrane d'une bactérie, l'énergie de dégradation de déchets organiques par ce micro-organisme, afin de la convertir en électricité. « L'idée a au moins cent ans, indique Timothy Vogel, à l'origine du projet avec Jean-Michel Monier. Mais les progrès de la biochimie l'ont fait exploser dernièrement. » Au point que le Laboratoire Ampère, en collaboration avec une municipalité, teste actuellement son prototype de pile bactérienne sur une station d'épuration, où des bactéries se nourrissent du contenu d'eaux usées. « Dans une ville de taille moyenne, la facture d'électricité de la station d'épuration s'élève à deux millions d'euros par an, explique le chercheur. En imaginant de travailler avec l'intégralité des eaux sales d'une telle station, sachant que l'efficacité d'une pile bactérienne est comprise entre 10 et 20 %, on peut imaginer ramener la facture électrique à zéro ! » Le système est encore en développement, mais le laboratoire monte actuellement une start-up afin de le commercialiser prochainement. « Plusieurs industriels nous ont contactés, confie Timothy Vogel. L'idée de baisser leur facture d'électricité les fait rêver ! » La pile bactérienne pourrait également permettre de faire tourner des stations d'épuration dans des régions du monde où l'électricité est peu abondante par exemple. Même la Nasa s'intéresserait au concept pour traiter, dans le futur, les eaux usées de ses astronautes !

La promesse des nouveaux biocarburants

Avant de couvrir nos besoins en énergie dans l'espace, les organismes vivants sont déjà à la tâche sur Terre. C'est toute l'idée des biocarburants, dont la première génération, issue du colza, du tournesol ou encore de la canne à sucre, fait déjà tourner le moteur de nos automobiles. Mais ils n'ont pas bonne presse. Si bien que les scientifiques planchent déjà sur une deuxième génération, à l'horizon 2020, qui présenterait notamment un meilleur bilan concernant les gaz à effets de serre. Contrairement à la génération précédente, les futurs biocarburants pourront être élaborés grâce à la totalité des plantes. Avantage : la possibilité d'utiliser une large gamme de cultures, praticables sur des sols qui ne requièrent pas les mêmes exigences que ceux utilisés pour la première génération, et n'entrant pas en compétition avec les productions alimentaires. Et ces biocarburants de deuxième génération pourront être produits à partir de déchets végétaux. Une avancée possible, par exemple, grâce au récent séquençage du génome du champignon filamenteux Trichoderma reesei, par des chercheurs américains et français du Laboratoire « Architecture et fonction des macromolécules biologiques » (AFMB) (Laboratoire CNRS / Universités Aix-Marseille 1 et 2), à Marseille. De fait, « les enzymes de ce champignon transforment les végétaux en sucres simples, dont il se nourrit. Ces sucres fermentent ensuite, ce qui facilite leur transformation en éthanol, un biocarburant utilisable dans un moteur à essence », explique Bernard Henrissat, responsable de l'équipe française. Or les chercheurs ont montré que seul un petit nombre de gènes sont responsables de l'activité enzymatique du champignon. De plus, il possède en très faible quantité de nombreuses activités enzymatiques permettant habituellement la digestion de la cellulose de la paroi végétale. Une bonne nouvelle, puisqu'ainsi, il devrait se prêter facilement à des améliorations génétiques, afin d'optimiser sa capacité à produire des sucres pour la synthèse de bioéthanol. Autre possibilité : produire des biocarburants non plus sur la terre ferme, mais à partir d'organismes marins. Comment ? Grâce à des micro-algues. « Elles ont une bonne plasticité génétique, ne nécessitent aucun pesticide, et leur culture n'entre pas en compétition avec les surfaces agricoles », explique Antoine Sciandra, au Laboratoire d'océanographie de Villefranche (LOV) (Laboratoire CNRS / Université Paris 6.), qui participe au projet Shamash, financé par l'ANR. Son but ultime : parvenir à produire des biocarburants à partir d'algues unicellulaires. Pour cela, les chercheurs devront répondre à moult questions. Quelles espèces sélectionner ? Comment favoriser leur métabolisme pour une production optimale ? Comment extraire les micro-algues de leur milieu de culture à des coûts énergétiques compétitifs ? Comment extraire ensuite de la matière végétale l'huile qui servira à la synthèse de carburants ? Etc. Le projet est à mi-parcours. « La bonne nouvelle, indique Antoine Sciandra, c'est que nous avons montré qu'il est possible d'accroître la teneur en lipides des micro-algues en manipulant les paramètres naturels qui régissent leur métabolisme. Mais actuellement, de nombreux problèmes importants demeurent, comme celui de la contamination des cultures par des espèces indésirables. » Autrement dit, la prudence est de mise. Mais pour autant, au terme du projet, une station pilote est envisagée. Et des pétroliers se montrent aujourd'hui intéressés par le concept. « Un autre intérêt, poursuit le chercheur, c'est le bilan carbone, en principe nul. Le dioxyde de carbone qui serait émis par la combustion de biocarburants issus de micro-algues aura été absorbé par la micro-algue dans l'atmosphère durant sa croissance peu de temps avant. »

Vous avez dit carbone ?

Quoique le meilleur moyen d'éviter le rejet de gaz à effet de serre dans l'atmosphère soit encore de fabriquer du carburant directement à partir du dioxyde de carbone de l'air. Utopique ? Plus depuis les travaux réalisés dans le cadre du projet européen Elcat, initié en 2004, et auquel ont participé plusieurs laboratoires de différents pays, dont le Laboratoire des matériaux, surfaces et procédés pour la catalyse (LMSCP) (Laboratoire CNRS / Université Strasbourg 1). En effet, les chercheurs sont parvenus à « casser » des molécules de CO2 à température et pression ambiante, avant d'assembler les molécules de carbone en chaînes comptant jusqu'à neuf atomes de carbone, comme on en trouve typiquement dans les essences pour voitures. Comment ? Grâce à une technique à base d'énergie solaire, d'hydrogène et d'un accélérateur de réaction chimique (catalyseur) constitué de platine déposé sur ou dans des nanotubes de carbone. Rendement ? « Environ 1 % des molécules de dioxyde de carbone introduites dans le réacteur ont été transformées en hydrocarbures », indique Dominique Bégin, responsable français d'Elcat. C'est peu. Mais c'est déjà un exploit, quand on sait que la molécule de dioxyde de carbone est l'une des plus stables qui soient, et donc très difficile à transformer. Le scientifique se garde pour autant de tout triomphalisme : « Comme dans le cas de la pile à combustible, notre technique nécessite de produire de l'hydrogène, et puis il faut concentrer le dioxyde de carbone. Quoi qu'on fasse, il faut toujours un combustible, il n'existe aucune solution miracle… »



L'homme, source d'énergie ?

C'est pourquoi d'autres chercheurs imaginent déjà un monde dans lequel le corps humain serait source d'énergie. Le concept ne date pas d'hier : c'est la force de nos mollets qui alimente l'éclairage de notre vélo. Mais à l'heure où nos poches sont remplies de téléphones et autres GPS portables, le moindre de nos mouvements pourrait se muer en une source d'énergie capable d'alimenter un gadget électronique. Ainsi, l'Institut de technologie du Massachusetts (MIT) a été le premier à mettre au point des chaussures à dispositif piézoélectrique intégré dans le talon. Piézoélectrique ? « Il s'agit de matériaux capables de convertir une sollicitation mécanique en un courant électrique », explique Guylaine Poulin, chercheuse dans l'équipe « Caractérisation ultrasonore et piézoélectricité » à l'université de Blois. Matériaux qui sont en partie à l'origine de ce domaine de recherche encore très largement futuriste. « Dans un premier temps, on peut imaginer des capteurs médicaux pour le suivi de la personne, développe la chercheuse. Comme des personnes âgées risquant de faire une chute par exemple. Probable que les applications militaires, où le fantassin du futur devra être de plus en plus autonome du point de vue énergétique, accéléreront les recherches. C'est spéculatif, mais on peut miser sur une émergence de ces techniques auprès du grand public d'ici à dix ou vingt ans. » Toutes ces solutions ont un point en commun : si elles prennent en compte les questions environnementales, aucune ne fait figure de remède miracle. Laquelle faudra-t-il finalement retenir ? Comme le fait remarquer Jean-Michel Most, au Laboratoire de combustion et de détonique du CNRS, « les critères de décision sont autant scientifiques, techniques que politiques ». Une certitude : l'accès à l'énergie, quelle que soit sa forme, n'est jamais gratuit.

 Électricité : la piste de la supraconduction

La chasse au gaspillage est difficile à concilier avec une réalité incontournable : lorsqu'un courant électrique circule dans un câble, une partie de l'énergie qu'il transporte est dissipée dans l'atmosphère sous forme de chaleur. En France, les pertes en ligne représentent chaque année l'équivalent de la production de deux réacteurs nucléaires ! Pour y remédier, les physiciens comptent sur les matériaux supraconducteurs. En dessous d'une certaine température, dite critique, la résistance électrique de ces derniers devient nulle, ils conduisent donc le courant électrique sans aucune perte. Des dispositifs à base de supraconducteurs servent d'ailleurs au fonctionnement du LHC. « Avec des câbles supraconducteurs, on pourrait stocker de l'électricité à l'infini, explique Alain Sacuto(alain.sacuto@univ-paris-diderot.fr), au Laboratoire matériaux et phénomènes quantiques, de l'université Paris-VII. Et avec le développement de l'électricité solaire ou éolienne, les zones de production (des déserts ou l'océan) seront loin des consommateurs. D'où l'intérêt des supraconducteurs pour atténuer les pertes en ligne. » Pour l'heure, on voit mal l'intégralité du réseau EDF équipé de tels câbles. En effet, au mieux, un matériau est supraconducteur en dessous de – 110 °C. Pour autant, la société française Nexans a récemment équipé la commune d'Holbrook, près de New York, d'un câble supraconducteur refroidi en permanence par de l'azote liquide (– 192 °C) sur une longueur de 600 mètres ! De quoi supporter une intensité de 2 400 ampères, qui ferait fondre n'importe quel circuit électrique classique en une fraction de seconde. Et alimenter 300 000 foyers !



Les voitures carburent au lithium

Le développement des batteries à ions lithium, qui possèdent une haute densité d'énergie et nécessitent peu de maintenance, est crucial pour la voiture électrique ou hybride de demain. Aucun doute : la dizaine de laboratoires et la centaine de chercheurs français qui œuvrent sur le sujet font référence dans le monde. Des matériaux mis au point dans des labos du CNRS, à l'ICMCB notamment, ont ainsi été intégrés à la batterie réalisée par l'entreprise française Saft, qui équipe une flotte expérimentale de voitures électriques de la société SVE. Mais cette excellence s'exprime même dans les détails, comme le prouve un résultat récent… Le phosphate de lithium et de fer LiFePO4 apparaît comme un matériau de choix pour l'électrode positive. Mais il y a un problème de taille : le potentiel de l'électrode positive reste toujours constant, tandis qu'il varie dans les batteries classiques, indiquant l'état de la batterie au conducteur. « La plupart des jauges de batterie fonctionnent en effet par mesure du potentiel », explique Christian Masquelier (christian.masquelier@u-picardie.fr), du Laboratoire de réactivité et chimie des solides à Amiens, autre laboratoire de pointe de ce domaine. Les scientifiques de l'université de Picardie Jules Verne, avec la société Umicore, ont donc mis au point un procédé permettant de synthétiser des nanoparticules de phosphate de fer et de lithium qui servent pour la fabrication des électrodes. « Sous cette forme, ce composé donne des électrodes dont le potentiel électrique est fonction de l'état de charge de la batterie. » Une trouvaille en cours de dépôt de brevet.



Le CNRS rassemble les énergies

« Au CNRS, c'est une longue tradition », relate Jean-Bernard Saulnier (jean-bernard.saulnier@cnrs-dir.fr), responsable du programme Énergie au CNRS. « Les programmes de recherche sur l'énergie ont commencé il y a plus de trente ans et coïncident avec la prise de conscience progressive de la limite des ressources fossiles et de leur impact sur l'environnement. Après le solaire, c'est sur l'hydrogène que nos efforts se sont concentrés. » En lien direct avec les préoccupations de notre époque, les équipes du programme Énergie travaillent notamment à améliorer l'efficacité énergétique des systèmes qui nous entourent, celle des moteurs ou des maisons, en les équipant de superisolants par exemple. Second volet du programme : produire de l'énergie en réduisant les émissions de dioxyde de carbone. En continuant les efforts, par exemple, sur le photovoltaïque : « On travaille sur une nouvelle filière de production de silicium, ainsi que sur des films minces qui nécessitent dix fois moins de silicium que des cellules classiques. Autre piste de recherche : les polymères photovoltaïques. Leur rendement est encore faible (5 %) et leur durée de vie très courte mais ils auront l'avantage d'être très bon marché », souligne Jean-Bernard Saulnier. Dernier axe de recherche : optimiser les vecteurs (Un vecteur d'énergie permet de transporter et/ou de stocker de l'énergie. L'électricité ou l'hydrogène par exemple, qui résultent d'une première transformation, sont des vecteurs énergétique) . « On explore de nouvelles voies pour produire de l'hydrogène sans émettre de CO2. On essaye également de trouver des solutions pour stocker et transporter l'hydrogène en toute sécurité. »

Mathieu Grousson
Contact

Jean-Luc Achard, jean-luc.achard@hmg.inpg.fr


Didier Imbault, imbault@hmg.inpg.fr
Bernard Multon, multon@bretagne.ens-cachan.fr
Alain Clément , alain.clement@ec-nantes.fr
Pierre Henry, henry@cdf.u-3mrs.fr
Jean-Claude Grenier, grenier@icmcb-bordeaux.cnrs.fr
Paul Lucchese,paul.lucchese@cea.fr
Timothy Vogel, timothy.vogel@ec-lyon.fr
Bernard Henrissat, bernard.henrissat@afmb.univ-mrs.fr
Antoine Sciandra, antoine.sciandra@obs-vlfr.fr
Dominique Bégin, begind@ecpm.u-strasbg.fr
Guylaine Poulin-Vittrant, guylaine.poulin-vittrant@univ-tours.fr
Jean-Michel Most, jean-michel.most@lcd.ensma.fr

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