Thèse pour l’obtention du diplôme de Docteur de l’Université Paris VII spécialité : Géographie



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2 Hypothèses et problématique


Ce travail de recherche voudrait proposer une analyse géographique de l’innovation sociale et du changement et souhaite s’inscrire pleinement dans les problématiques d’une géographie du mouvement. Pour autant qu’elle emprunte à la sociologie, à l’ethnologie, à l’économie aussi, cette approche n’est pas interdisciplinaire. L’interdisciplinarité est ici un instrument pour la mise en place d’une approche géographique. Une géographie science sociale n’en reste pas moins géographie, attentive à l’empreinte des hommes sur leurs espaces, et réciproquement.

Notre problématique centrale est celle de la caractérisation des territoires périurbains, et spécifiquement des territoires périurbains nord-montpelliérains, comme des lieux d’innovation, et ceux d’une innovation spécifique, dont il s’agira de déterminer les processus. Celle-ci est considérée comme partie prenante des dynamiques territoriales et instrument particulièrement pertinent pour l’analyse de ces dynamiques.


Autrement dit, les questions qui guident cette recherche sont les suivantes :

_ Quelle est la spécificité des territoires périurbains nord-montpelliérains ? En quoi cette spécificité est-elle à même de favoriser l’innovation ?

_ Quels sont les processus de l’innovation sociale périurbaine, c'est-à-dire du changement territorial périurbain ?

_ Quel est le rôle des acteurs au sein des territoires ? Quel est leur pouvoir de changement ?

_ Quelle est la nature de la relation innovation/territoires ? Comment le territoire produit-il de l’innovation, et, inversement, l’innovation produit-elle du territoire ?

Soit plusieurs hypothèses ou objectifs qui présideront à cette recherche :



1. L’organisation des territoires produit les conditions de l’émergence et de la diffusion de l’innovation. Ce travail voudrait participer à une analyse géographique de l’innovation, et tenter d’évaluer et de caractériser le rôle de l’espace dans l’émergence de l’innovation sociale, dans sa diffusion, dans sa nature même. L’émergence de l’innovation sociale et les formes qu’elle prend sont ainsi liées à la spécificité du système social dans lesquelles elles s’inscrivent ainsi qu’à son organisation spatiale.

2. L’innovation, spécifiée par l’organisation des territoires, agit sur les territoires, et produit des territoires spécifiques. L’innovation sociale est l’un des processus du changement des territoires.

3. L’analyse des pratiques des acteurs est véritablement le mode privilégié d’analyse du système territorial, et de ses dynamiques. L’innovation est l’un des modes du changement territorial initié par les acteurs.

A travers l’exemple des territoires ruraux périurbains nord-montpelliérains, il s’agira aussi de mettre en évidence la nature d’une relation innovation et territoires, et de proposer une analyse de la relation innovation/changement territorial.


3 Les terrains de recherche


L’étude s’est portée sur les territoires ruraux périurbains de la garrigue nord-montpelliéraine et, tout particulièrement, sur les cantons de St-Martin-de-Londres et de Claret. Ces cantons de la garrigue nord-montpelliéraine sont situés à une trentaine de kilomètres de l’agglomération montpelliéraine, et constituent pleinement des espaces périurbains de la troisième couronne périurbaine, telle que définie par Bernard Kayser7.

Ces territoires sont en outre situés au sein des territoires métropolisés fortement attractifs qui s’étendent sur l’ensemble de la façade méditerranéenne française, de Nice à Perpignan. Ils accueillent de nombreux nouveaux résidents, en provenance de la ville de Montpellier certes, mais aussi de la France en son ensemble, voire de l’Europe.

Outre le fait qu’il m’était facile d’y organiser des enquêtes, ces territoires sont apparus intéressants par leur forte représentativité au sein des territoires périurbains français. L’attractivité et la croissance démographique particulièrement élevées du Sud de la France, et celles de la ville de Montpellier s’ajoutent ici à l’attractivité périurbaine classique.

Ainsi, parce qu’ils amplifient les processus périurbains sans les biaiser, ils ont été considérés comme susceptibles de permettre une appréhension facilitée du changement social périurbain.


4 Méthodologie sommaire : des entretiens qualitatifs.


Le travail de recherche a été essentiellement basé sur des entretiens et un travail de terrain effectués entre mars 1999 et juillet 2001.

Au delà d’un exposé des méthodes employées pour cette étude, il s’agit plutôt et surtout de mesurer la validité et la pertinence de ces démarches dans le cadre de cette problématique. Elles seront présentées de façon plus approfondie ultérieurement.

Les méthodes d’enquêtes quantitatives m’ont immédiatement paru inadaptées à la recherche et l’analyse des processus du changement. La recherche de l’irrégulier, du hasardeux, du nouveau a ainsi exclu de fait le recours systématique au questionnaire, lissant toute aspérité. L’essentiel des informations m’a semblé ne pouvoir être recueilli qu’à l’aide d’enquêtes directes, au contact des sociétés périurbaines. Des entretiens non-directifs ou semi-directifs, multipliés sans recours à un questionnaire-type, mais guidées par une grille souple, m’ont permis de déceler les signes des innovations qui intéressent cette recherche. L’observation et l’écoute ont ainsi été les principales armes, éminemment qualitatives, de ce travail d’enquête, s’inspirant des méthodes longues et fastidieuses de l’ethnologue.

L’observation directe, qui occupe également une place importante dans le recueil d’informations n’a été qu’un « espèce de préalable logistique pour mettre l’oreille à portée des énonciations en cours ou probables8 ». D’où une stratégie du regard pour voir ce qui mérite de devenir ethnographique dans l’interaction ou le spectacle en cours. Il s’est agi d’abord d’observer les lieux, espaces, bâtiments, objets, voies de circulation et de rassemblement. Cet ensemble d’objets constitue le cadre territorial, celui de l’application spatiale des interactions sociales. Seule l’expérience de l’observation peut saisir ce « cadre de vie », d’abord de l’extérieur puis de l’intérieur, dans une démarche proche de celle de l’ethnologue. L’observation permet « l’appropriation raisonnée de l’espace des interactions humaines9. »

L’observation bute cependant bien vite sur l’information partielle que seul « ce qui ne se voit pas » est à même de compléter. Marcel Mauss écrivait à ce sujet : « Ne pas croire. Ne pas croire qu’on sait parce qu’on a vu10 ». C’est alors que s’impose la parole des acteurs - acteurs peut-être sélectionnés grâce à l’étape de l’observation - comme source privilégiée d’information.
L’écoute de la parole des acteurs a été le mode privilégié d’appréhension de l’innovation sociale.

Bien sûr, cette parole qui s’impose comme une nécessité face aux failles de l’observation, est elle-même mystérieuse, et le sens qu’elle délivre est partiel. C’est bien cette parole là, cependant, partielle, mensongère parfois, obscure, retenue, confuse, qui a été la principale source d’information, posée comme pertinente dans la recherche des processus de l’innovation sociale.

La parole recueillie lors des entretiens semi-directifs menés auprès des acteurs sur le thème de leurs « pratiques du territoire » est une construction sémantique. Loin de nous de croire que les discours tenus par nos informateurs délivrent des vérités, loin de nous également de les pousser à la révélation d’une quelconque et hypothétique vérité. Ces discours sont intéressants dans le cadre de la problématique de cette thèse, en tant qu’ils révèlent autre chose que la réalité des pratiques. Ils révèlent les modes de socialisation, de territorialisation des acteurs.

La situation d’entretien est particulièrement complexe et mérite attention. L’interlocution, c'est-à-dire la relation chercheur/informateur, est un rapport social en acte. En ce sens, « les énoncés ne sont pas des choses mais des événements11 » L’information délivrée dans les énoncés est une construction sociale, non seulement au regard du chercheur mais aussi de l’informateur. Celui-ci construit son discours et délivre du sens selon cette relation d’interlocution. La parole est ainsi construite à partir des représentations de l’acteur, représentations de lui-même dans le territoire, mais également représentations de lui-même en situation d’informateur.

La production de sens par l’informateur est conditionnée par la mise en signification de son monde qu’il effectue au regard de ce que le chercheur lui demande. La relation chercheur/informateur est ainsi une co-construction de la réalité.

L’observation fait pencher l’affabulation du côté du chercheur ; la parole du côté de l’informateur. C’est au chercheur cependant, bardé d’hypothèses, accroché à sa problématique, protégé de références bibliographiques et de postures méthodologiques, de reconstruire la réalité sociale et territoriale, en toute « objectivité », par la combinaison des multiples sources d’information recueillies. Comme le souligne dans une heureuse formule Jean Copans : « si le terrain est un montage de textes, il n’y a pas de doute que le texte doit être une démontage (une déconstruction-reconstruction) des terrains12 ».



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