4.3. Les ateliers du renouvellement urbain et la charte du relogement : poursuivre les échanges, écrire pour stabiliser les conflits
Dans la suite des Etats Généraux va se mettre en place, un comité de suivi des Etats Généraux. Parallèlement, les techniciens du Grand Lyon en lien avec les élus et le comité de suivi proposent un nouvel espace de rencontre : les ateliers du renouvellement urbain. Le premier se déroulera le 15 novembre 2004. L’objectif est simple : « améliorer la clarté et la transparence de l’action publique ainsi que sa diffusion en suscitant la diversité des expressions et en privilégiant l’écoute, le dialogue et le débat, en favorisant l’échange d’avis argumentés et de propositions motivées ».
4.3.1. Le rôle du comité de suivi
Très rapidement (juste après la tenue du premier atelier), le comité de suivi va avancer différentes propositions :
1 mettre au point une charte du relogement et l’intégrer au PLH
2 améliorer globalement la concertation (en référence à la charte de la concertation du Grand Lyon) à intégrer au futur PLH
3 mettre plus en avant la réhabilitation
4 reconstruire avant de démolir
5 mettre en œuvre des baux temporaires dans les immeubles à démolir
6 mettre en adéquation la nouvelle offre de logement avec la demande
7 mettre en place un observatoire du renouvellement urbain
« Après les Etats généraux, on avait bien vu que le point d’achoppement, c’était les démolitions et leur principe même. Il y avait un gros désaccord et certains élus sont ressortis des Etats généraux un peu blêmes ! Les habitants demandaient un moratoire sur le principe même des démolitions puis après étaient avec l’idée qu’on construit d’abord mais qu’on démolit après. Les élus étaient pas sur ce champ, certains sont ressortis choqués. Donc rapidement le comité de suivi a souhaité poursuivre les choses, c’est la FONDA qui en a assuré le secrétariat. Ils se sont réunis très régulièrement et ont rencontré Charrier pour créer un lieu de discussion par rapport à ça. Charrier avec l’accord des autres vice-présidents a dit d’accord à la condition que ce ne soit pas un espace de discussion par rapport à chaque projet. Et c’est parti comme ça ! »
Ces ateliers vont s’engager dans un travail important de stabilisation des conflits non pas autour de la décision de démolition mais de ces effets auprès des populations. Deux chartes sont rédigées en ce sens l’une concerne le relogement dans les opérations de renouvellement urbain, l’autre concerne la participation des habitants dans ces mêmes opérations. Comme si, seul, le travail d’écriture et de mise en mot pouvait participer de l’apaisement. Mais ils sont aussi d’emblée situés dans un cadre spécifique par la puissance publique : celui de la conférence d’agglomération de l’habitat dans le cadre de la préparation du futur PLH. Ils vont réunir chaque fois élus, services de l’Etat, associations de défense du droit au logement, collectifs d’habitants de quartier opposés aux démolitions, bailleurs et services du Grand Lyon.
Après les Etats Généraux, la décision politique à l’agglo, ca a été de dire que c’était un sujet à traiter donc on met en place les ateliers du renouvellement urbain. Ca marche, car il y a trois vice-président qui suivent, Charrier à la politique de la ville, Polga puis Blein à l’habitat et Claisse à la concertation. Et derrière, c’est porté techniquement par trois services et trois personnes. Et on peut aboutir à la charte du relogement. Sur le contenu, quand même chapeau… Autant de signataires pour un texte aussi complet, si on m’avait dit dans les années 80, qu’on arriverait un jour à un truc pareil, j’y aurais pas crû ! Ca participe d’une lente maturation d’une politique de l’habitat sur l’agglomération avec sa succession d’étapes : la CPHS, l’arrivée de Michel Noir, la continuité avec Barre et Collomb, le renouvellement urbain… Il y a une progressivité et il y aussi un milieu qui assure une continuité, ça c’est très important par rapport à d’autres agglomérations. Sur la longue durée, il y a une stabilité des personnes, on est un certain nombre à se situer dans une même lignée. Ca tient aussi au centrisme lyonnais, à cette tradition de catholicisme social, etc… Il y a trois raisons de cette montée en charge d’une politique de l’habitat sur Lyon, une stabilité du discours politique, une qualité du milieu sur la durée et une capacité à se retrouver dans l’action même si les présupposés ne sont pas les mêmes. C’est la seule agglomération où la politique de la ville est structurée comme ça… La seule agglomération où on a refusé le dialogue avec l’ANRU communes par communes… en conventionnant avec l’ANRU à l’échelle de l’agglomération… C’est une situation exceptionnelle qui a quand même fait des émules…
Vue du prisme de l’agglomération, la lente maturation de la politique de l’Habitat est faite d’étapes et de conflits qui la réinscrivent dans un mieux de l’action publique intercommunale. Vue du côté des associations locales, les choses sont plus complexes.
Les ateliers du renouvellement urbain, c’est que des propositions. Les politiques font ce qu’ils veulent. On est dans la compromission. Les politiques ont renoncé à imposer le moratoire sur les démolitions. Il fallait tenir là dessus, maintenant, on insiste pour que les démolitions viennent après les constructions. Il y en a encore trop qui croient à la mixité sociale, même le maire de Bron ne parle plus de mixité sociale mais de diversité urbaine, de diversification de la construction…. L’effet positif, c’est la charte du relogement. Ca donne des orientations mais c’est très malin, ça permet aux élus d’afficher des choses positives alors que le problème est pas forcément là. Sur les questions essentielles, est-ce qu’on demande l’avis des gens ? Non ! Lorsque les politiques décident, les choses sont bloquées donc je vois pas l’intérêt. En plus, la charte n’a pas force de loi. C’est aux offices à en tenir compte, c’est tout. C’est toujours orienté, les ateliers, c’est pas nous qui faisons l’ordre du jour, c’est comme en conseil de quartier quoi ! Il faudrait y aller avec nos propositions. Là, on est sur les loyers et les charges, mais on dévie encore du problème, ça, c’est une affaire entre les offices et les associations locales de locataires concernées, donc on a une lassitude, on sait très bien qu’on fera ce qu’on voudra.. Tant que les demandeurs de logements ne manifesteront pas plus vigoureusement, tant qu’on donnera la priorité à ceux qui ont un logement démoli alors qu’il y a des familles ou des appartements à 10 ou 12 dans un T2, on ne résoudra pas le problème du logement…
4.3.2. La charte du relogement
Dès la deuxième séance des ateliers du renouvellement urbain, il est décidé la constitution d’un groupe de travail spécifique pour préparer une charte du relogement dans le cadre des opérations de renouvellement urbain en réponse à la demande du comité de suivi des Etats généraux. Dans un second temps, c’est la question de la participation des habitants à ces opérations qui monte à l‘ordre du jour. Le troisième atelier se conclut ainsi : « les débats ont fait apparaître une tension entre, d’une part les préoccupations d’amélioration de la vie dans les quartiers et d’autre part, le coût humain de la crise du logement et la question du logement des plus défavorisés, dont l’échelle de traitement dépasse celle du seul périmètre des quartiers. (…) D’où la nécessité d’une démarche du renouvellement urbain centrée autour de l’humain. »1
Deux projets de charte vont se développer en parallèle : celle du relogement et celui de la déclinaison locale de la charte de la participation du Grand Lyon dans les opérations de renouvellement urbain.
Autant le devenir de la première sera assuré et par un travail de co-production sera finalisé en avril 2006, autant le devenir de la seconde va rester incertain. L’idée de la charte du relogement sera de donner un cadre général et identique à toutes les opérations de relogement portées par les bailleurs, maîtres d’ouvrage des opérations. Elle va poser quelques principes forts : locataire au centre de l’opération, transparence, qualité, délais raisonnable, inscription du relogement dans une démarche résidentielle positive. Cette charte sera signée par tous les maires des communes sur lesquelles ont lieu des opérations de renouvellement urbain, les bailleurs concernés, la CNL et la CSF. Elle sera inscrite en annexe du PLH et en constituera la fiche-action n°38. Elle marquera un satisfecit général : celui des participants aux ateliers du Renouvellement urbain dont le comité de suivi des Etats Généraux rend compte : « Depuis longtemps (toujours ?) les élus, les associations, les techniciens et les bailleurs, n’avaient pas été mis autour d’une même table et nous espérons que chacun y a vu un grand intérêt : le sujet du logement social est difficile et ne peut être traité en vase clos. »1 Mais le devenir de la déclinaison locale de la charte de la participation va rester plus incertain : c’est l’échelle de la concertation qui est en jeu.
Dostları ilə paylaş: |