En 2008, au hasard d’une promenade, le paléontologue américain Lee Berger découvre dans une grotte située à 40 kilomètres de Johannesburg, en Afrique du Sud, les squelettes de deux petits êtres d’environ 1,30 m chacun. Il ne le sait pas encore, mais sa découverte va bientôt faire le tour du monde. En effet, tous deux appartiennent à une espèce d’australopithèques jamais décrite auparavant. Il s’agit d’une femelle adulte et d’un enfant d’une dizaine d’années, qui vécurent il y a 1,9 million d’années, et qui seraient morts en même temps après être tombés dans la grotte où ils ont été retrouvés. La revue Science du 9 avril derniers publie la découverte de cette nouvelle espèce d’hominidés, baptisée Australopithecus sediba, ainsi que les résultats des premières analyses des fossiles. Celles-ci ont été réalisées par une équipe internationale dont fait partie Geoffrey King, chercheur à l’Institut de physique du globe de Paris (Unité CNRS / IPGP / Universités Paris 6 et 7 / Université de la Réunion). Ces fossiles pourraient représenter une avancée importante pour comprendre l’évolution des hominidés. « Les squelettes ont été retrouvés dans des conditions de conservation extraordinaires. Ils ont été recouverts de sédiments très fins et ne présentent pas les traces d’érosion que l’on retrouve dans la plupart des fossiles retrouvés dans la vallée du rift, en Éthiopie. Ils sont tellement bien conservés que l’on peut même observer les points d’insertion du muscle à l’os! » affirme Geoffrey King. Mais ce n’est pas tout. « Ces fossiles ont un peu moins de 2 millions d’années, et c’est à cette époque que sont apparus les premiers hominidés du genre Homo. Or justement, Sediba, tout en restant un australopithèque, présente de nombreux caractères proches d’espèces comme Homo erectus », ajoute le chercheur. D’après les premières analyses des squelettes, ces australopithèques devaient être de bons grimpeurs, mais ils étaient aussi capables de se déplacer et même de courir comme des humains. Seraient-ils donc une sorte de chaînon manquant entre les australopithèques et le genre Homo auquel nous appartenons ? Pour certains spécialistes, parmi lesquels leur découvreur, Lee Berger, cette nouvelle espèce est effectivement un sérieux candidat au titre de plus proche ancêtre des Homo. Geoffrey King reste néanmoins prudent et pense que les très vives controverses sur les ancêtres du genre Homo ne se résoudront pas grâce à cette découverte. « Je pense que la découverte de Sediba va activer le débat plutôt que de le clore, admet-il. De plus, il y a de très nombreux endroits en Afrique du Sud qui n’ont pas du tout été explorés et où l’on pourrait découvrir bien des espèces intermédiaires entre les premiers Homo et leurs ancêtres. »