Submersions fertilisantes comprenant les travaux


part de celles du littoral de la Normandie, était à



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part de celles du littoral de la Normandie, était à
l’état de marais, c’est-à-dire improductive et mal-
saine. Mais peu à peu le renouvellement des submer-
sions naturelles, avec des eaux produisant un limo-
nage notable, en a exhaussé le niveau, et à mesure
que le sol se trouvait ainsi assaini et amendé par
de riches limons, il se couvrait spontanément des
meilleures plantes fourragères. Telle est l’origine de
la plupart des grands herbages de la Normandie.

Cette action améliorante ne s’est pas opérée d’une,


manière uniforme. Pour les vallées dont il s’agit,
comme pour toutes celles où il se produit des débor-
dements périodiques d’eaux généralement limo-
neuses, les parties les plus voisines des rivières sont
exhaussées bien plus rapidement que les autres ; ce
qui amène alors une déformation du protil transver-
sal et empêche les eaux débordées de rentrer facile-
ment dans leur lit.

Tel était en dernier heu l’état de la vallée de la


Dives, où il restait des parties marécageuses donnant
lieu à des lièvres.

C’est à cette dernière circonstance que l’on s’est


rattaché pour arriver à l’exécution du projet actuel,
qui sera un grand bienfait pour le pays. On a invo-
qué l’application des articles 35, 36 et 37 de la loi

du 16 septembre 1807, mettant les dépenses de sa-


lubrité à la charge des communes intéressées ; mais
avec faculté pour elles de réclamer des propriétaires
devant profiter des travaux, une contribution spé-
ciale, proportionnée aux avantages qu’ils en retire-
ront (1).

Il y a une vingtaine d’années, époque à laquelle


la majeure partie des propriétaires croyaient encore
à l’utilité des digues, on eût probablement rencon-
tré de grandes résistances, pour opérer dans cette
voie. Mais il n’en a plus été de même, en présence
des constatations récentes, ne laissant aucun doute
possible, sur le grand avantage que devrait retirer
toute la vallée d’un système qui assurerait à la fois :
1° le maintien, 2° l'évacuation en temps utile des
submersions fertilisantes.

Au commencement de l’année 1857, M. le mi-


nistre des travaux publics a donné son approbation
à un premier projet ayant pour but l’amélioration de
la vallée de la Dives. Ce projet comprenait d’abord
simultanément deux choses distinctes, savoir : 1° l’as-
sainissement de la vallée, au moyen d’un canal de
dessèchement à ouvrir depuis Mery-Corbon jusqu’à
la mer; 2° l’irrigation de la même vallée et de quel-
ques bassins secondaires.

D’après les avis formulés dans l’enquête, l’admi-

(1) On retrouve toujours ici le principe des plus-values, base fonda-


mentale de la loi de 1807, sur les dessèchements. Seulement à défaut
d’accord préalable des propriétaires et à défaut d’un concessionnaire
étranger, les communes lui sont substituées.

nistration des travaux publics jugea convenable de


séparer les deux questions et de s’occuper d’abord
exclusivement du dessèchement de la vallée; ce qui
était évidemment l’intérêt principal.

La commission nommée en vertu de l’ordonnance


du 18 février 1834, donna son avis le 3 septembre
1838 et exprima le vœu :

« 1° Qu’il fût pris des mesures efficaces pour as-


surer le dessèchement des marais de la Dives ;

« 2° Que l’on devait, avant tout, assurer le colma-


tage
des terrains, par les eaux de la rivière, qui sont
d’excellente qualité ;

« 3° Que des travaux, en rivière, et surtout des


digues n’auraient que des résultats insuffisants ; et
qu’il était nécessaire de recourir à un canal de des-
sèchement ; mais qu’il convenait de restreindre son
parcours, de manière à assurer d’abord l’assainisse-
ment des parties les plus mauvaises de la vallée. »

La justesse de ces observations ayant été recon-


nue par l’administration supérieure, MM. les ingé-
nieurs présentèrent, en janvier 1839, un nouveau
travail dans ce sens.

Voici quelques détails techniques à l’appui de ce


système, le seul qui soit en rapport avec les besoins
de la localité.

Le volume des crues ordinaires de la Dives est


d’environ 44 mètres cubes par seconde, tandis que
son lit n’en peut débiter que 21 mètres cubes. Le
surplus, c’est-a-dire un débit de 23 mètres cubes par
seconde, passe par-dessus les digues et submerge la

vallée qui, recevant en outre les eaux pluviales,


reste couverte pendant un temps plus ou moins
long; attendu que l’écoulement définitif ne peut
s’effectuer que par la partie inférieure de la rivière.

Or, même en temps d’étiage, le niveau des eaux


de celle-ci se trouvait très-peu en contre-bas de
celui des terres riveraines. De sorte que pour opérer
leur assainissement, avant la saison de la végétation,
on était obligé d’ouvrir de nombreux fossés, allant
déboucher dans la Dives, généralement à de grandes
distances. Mais à chaque crue la pente disparait el
les marais restaient couverts d’eau.

Enfin, habituellement les terres, môme égouttées


superficiellement, restaient trop voisines du plan
d’eau, et les récoltes étaient détériorées.

On a également obvié à cet inconvénient. Mais le


fait, qui est ressorti avec le plus d’évidence de ces
investigations, est l’utilité du colmatage.

Depuis longtemps on avait constaté que les ter-


rains se trouvant pendant l’hiver à 0m,30 ou 0m,40
au-dessous des eaux, pourvu que celles-ci pussent
s’écouler vers le commencement d’avril, présentaient
la végétation la plus riche, en herbes de première
qualité ; tandis que dans les mêmes conditions de
niveau, et pour la même composition du sol, les
terrains défendus par des digues ne donnaient plus
que de chétifs produits, qui allaient toujours en di-
minuant; et que, surtout, la qualité des pâturages
finissait par s’y détériorer complètement.

Dans l’enquête dont il vient d’être parlé, l’utilité

du limonage opéré par les submersions naturelles de
la Dives a donc été proclamée par tous les proprié-
taires intéressés et a dû nécessairement servir de
base aux dispositions du projet modifié.

Dès lors on a eu pour but principal de faire en


sorte, non d’exclure les submersions, ce qui serait
presque impossible, mais au contraire de favoriser
leur arrivée et leur extension sur les terres, de ma-
nière à leur laisser déposer le plus complètement
possible leur limon fertilisant; en assurant, en
temps utile, leur prompte évacuation.

Un canal émissaire devenait indispensable pour


cet objet, et son tracé est à peu près le même que
celui d’un canal de simple dessèchement, dont il pro-
duit d’ailleurs tous les effets, au point de vue de l’as-
sainissement. Mais tandis qu’un simple émissaire en
supprimant, ou tout au moins en amoindrissant les
submersions, aurait rapidement appauvri le pays, le
canal actuel, que l’on peut appeler un ouvrage à
double effet, produira une amélioration complète,
qui triplera, d’ici à peu de temps, les ressources
alimentaires de la vallée.

Le projet, définitivement adopté consiste, donc


dans l’ouverture d’un canal principal de dessèche-
ment, dans les terrains de la rive droite, combiné
avec des canaux secondaires qui viendront en com-
pléter l’effet. Des siphons placés sous le lit de la
Dives verseront dans le canal principal les eaux des
terrains de la rive gauche. Enfin des ponts, pon-
ceaux et aqueducs seront établis, partout où cela

sera nécessaire pour le rétablissement des chemins,


ou cours d’eau, rencontrés par les canaux et rigoles.

Le canal principal, divisé en six sections, com-


prend deux régimes distincts : celui des eaux sau-
vages, qui doivent être évacuées, en trois jours au
plus, et celui des eaux pérennes. Pour le premier
cas la hauteur d’eau, déterminée de manière à éva-
cuer le bassin de Troarn, a été fixée à lm,10 pour les
quatre premières sections; et à lm,50 pour partie de
la cinquième et pour toute l’étendue de la sixième.

Quant aux eaux pérennes, les observations faites


sur divers points de la vallée ont démontré qu’une
hauteur de 0ra,50 sur le plafond de la cuvette serait
suffisante.

Sur la première section le canal a 1 mètre de lar-


geur au plafond et lm,10 de hauteur de section
mouillée. D’après la formule de Prony, elle peut,
dans ces conditions, débiter lm,041 par seconde. La
surface totale des terrains qui y versent leurs eaux
est de 583 hectares, qui enverront au canal 729 litres
d’eau par seconde. —Cette section, bien que très-
restreinte, est donc plus que suffisante.

Les dépenses de ce travail sont d’ailleurs minimes,


relativement aux avantages à en obtenir. Avec les
indemnités de terrain et y compris une somme
à valoir de 25.539 fr., elles s’élèvent au chiffre
de 600.000 fr.

Mais les travaux d’amélioration peuvent profiter

à une étendue totale de 4.252 h.

soit même, en nombre rond 4.000 h.

et cela ne correspond par hectare qu’à une dépense
de 150 fr.

L’accroissement de revenu net est évalué (au mi-


nimum) à 75 fr.

ce qui, même au taux élevé de 4 p. 100,


correspond à un accroissement de va-
leur foncière, également par hectare, de 1.875 fr.
En déduisant de ce chiffre une somme
de 375 fr., pour intérêt des annuités,
frais d’entretien et dépenses diverses,
il reste encore une plus-value nette de 1.500 fr.

Ce qui correspond, pour les 4.000 hectares, à un


bénéfice total de six millions de francs; c’est-à-dire
au décuple de la somme dépensée.

Ainsi, déduction faite des dépenses d’entretien,


l’exécution du projet augmentera le revenu actuel
des terrains submersibles de 300.000 fr. correspon-
dant (à 5 p. 100) à un capital de six millions de
francs. Le gouvernement intervient pour un tiers
dans les dépenses, et la contribution des proprié-
taires est réglée par une redevance, représentant
27f,85 par hectare.

Les avantages de cette belle opération sont d’ail-


leurs bien compris par la grande majorité des pro-
priétaires intéressés. Dans l’origine beaucoup d’entre
eux montraient de l’éloignement et même du mau-
vais vouloir. Mais peu à peu le nombre des dissidents
s’est beaucoup restreint.

Dès les premiers mois de 1862, les propriétaires


de 2.300 hectares, représentant plus de moitié de la
superficie des terrains submergés, avaient souscrit
pour l’exécution des travaux. Et, depuis, ce nombre
s’est encore accru ; de sorte que le succès de l’entre-
prise peut être regardé comme assuré. Tel est le
système, simple et ingénieux, du canal de la Dives ;
qui tend à inaugurer un ordre de choses nouveau,
dont il est à désirer, dans l’intérêt de l’agriculture,
que l’administration favorise le plus possible les
applications.

CHAPITRE XXII.

SUBMERSIONS NATURELLES. — VALLÉE DE LA SAÔNE.

II — Observations préliminaires.

Il serait difficile de rencontrer une situation plus
caractérisée que celle de la vallée de la Saône, pour
donner la preuve du bénéfice que peuvent produire
sur les prairies, les submersions fertilisantes.

Ici ce fait s’accomplit, naturellement, et sur une


très-grande échelle; car cette belle vallée, dont la
partie inférieure, que l’on peut comparer à une vaste
plaine, semble avoir été disposée par la nature pour
réaliser ce bienfait, dans les plus grandes proportions.

Cette vallée, qui depuis les environs de Gray jusqu’à


Chalon-sur-Saône et de ce point jusqu’à Lyon ne
présente plus que des pentes très-douces sur plus de
240 kilomètres, est dans l’est de la France un des
principaux centres de production fourragère.

Les foins qu’elle produit en abondance et en excel-


lente qualité s’exportent dans toutes les directions et
à de grandes distances; presque exclusivement sur
bateaux; par la Saône et le Rhône pour le midi ; par
les canaux de Bourgogne et du Centre pour les autres
régions. En outre, pendant l’automne, ces mêmes

prairies, couvertes d’innombrables bestiaux, sont le


signe incontestable d’une agriculture florissante.

Or, ici, tout est dû au bénéfice des submersions


naturelles, qui se renouvellent chaque année dans des
conditions diverses; mais qui, à peu d’exceptions
près, sont toujours favorables à l’agriculture. Des
pentes longitudinales très-douces, dont la moyenne
peut être comprise entre 0m,40 et 0m,45 par kilomètre.
Des pentes traversales presque insensibles, mais
cependant assez prononcées pour que toutes les eaux
d’inondation puissent rentrer dans leur lit, au com-
mencement du printemps ; telles sont les conditions
principales qui caractérisent la situation de cette val-
lée, l’une des plus remarquables que l’on puisse
citer, comme application de l’avantage des submer-
sions d’hiver.

Il ne s’y fait, pour les prairies, aucune irrigation


d’été; car en cette saison l’eau et les pentes font
également défaut. Mais les bénéfices obtenus par
l'autre procédé se présentent sur une si grande
échelle qu’ils ne laissent rien à désirer.

Losque l’on parcourt cette vallée, dans la saison


d’hiver, on est frappé de son aspect. La submersion
y est tellement générale qu’on pourrait la comparer
à une petite Égypte.

Les prairies des environs de Gray, Auxonne, Saint-


Jean-de-Losne, Seurre, Chalon, Tournus, Senozan,
Mâcon, etc., ne sont que de vastes lacs dont la nappe
d’eau s’étend jusqu’aux pieds des collines.

Tout est donc ici dans les conditions normalespour tirer le meilleur parti de ce mode naturel de


fertilisation, qui s’opère sans aucune main-d’œuvre.
Dès lors la permanence de cette fertilité et la haute
valeur de ce territoire privilégié s’expliquent d’elles-
mêmes.

Il est inutile d’ajouter que la valeur des terres


(presque toutes en prairies), est en raison de la part
plus ou moins large qu’elles ont dans le bénéfice des
submersions. Celles qui n’en reçoivent qu’irréguliè-
rement sont moins productives que les autres, et
celles qui se trouvent en dehors de la zone submer-
sible rentrent dans la catégorie des terres ordinaires,
ne pouvant produire qu’à force d’engrais.

Il est hors de doute que si les inondations attei-


gnent, comme cela a eu lieu dans ces dernières an-
nées, des propriétés bâties, surtout des constructions
en pisé, qui sont en usage dans cette vallée où man-
que la pierre, elles y causent toujours de graves dom-
mages; ce qui est en dehors de notre sujet.

Il est incontestable également, qu’au point de


vue agricole, si elles arriventau milieu de l’été quand
les foins approchent de leur maturité, ou surtout au
moment même où ils viennent d’être coupés, il y a
aussi une perte immédiate. Mais ce cas n’a lieu
qu’exceptionnellement; et d’ailleurs même en en te-
nant compte, on arrive à reconnaître que cette perte
est généralement compensée par la plus-value des
années suivantes.

On va voir par les faits consignés dans ce chapitre


que les submersions généralement profitables aux

prairies ont lieu non-seulement dans la vallée prin-


cipale, mais egalement sur tous les principaux cours
d’eau du même bassin.

II. — Situation et étendue du bassin,


Principaux affluents,

Le bassin général de la Saône qui s’étend au nord


jusqu’au pied des Vosges dans les environs de Darney,
de Plombières, etc., et qui à l’est et au nord-est,
longe le pied de la chaîne du Jura, depuis les envi-
rons de Pontarlier jusqu’aux territoires d’Altkirch
Belfort etc., a une étendue de plus de 38.000kilom.
carrés (3.800.000 hectares). Sa superficie comprend,
pour la plus grande portion, des terrains à sous-sol
imperméable.

C’est ainsi qu’on peut s’expliquer, dès le premier


abord, la grande importance des inondations dans
cette vallée.

Principaux affluents. — Sur un parcours de plus de
320 kilomètres depuis ses sources aux environ de Dar-
ney (Vosges) jusqu’à Lyon, la Saône reçoit une quantité
innombrable d’affluents dont la plupart sont sans im-
portance, mais dont plusieurs sont des rivières consi-
dérables. Sur la rive droite, ces dernières sont princi-
palement : l’Apance, l'Amance et le Saulon qui coulent
dans les départements delà Haute-Marne et de la Haute-
Saône; dans la Côte-d’Or, les Vingeanne, la Tille, la
Dkeume, etc.; dans la Loire, la Grône, qui asoncon-

fluent en aval de Chalon. — Sur la rive droite, qui


est le versant principal, on remarque, particulière-
ment : 1° la Lanterne, ayant cinq affluents secondai-
res qui descendent de la chaîne des Vosges et dont le
confluent est en amont de Port-sur Saône ; 2° l’O-
gnon dont le cours n’a pas moins de 120 kilomètres,
et dont le confluent est en amont de Pontailler-
sur-Saône; 3° le Doubs, qui après un parcours si-
nueux de plus de 340 kilomètres, devient tributaire
de la Saône à Verdun. Il a lui-même pour affluent
la Loue, dont le cours n’a pas moins de 120 kilomè-
tres, sur le versant ouest du Jura, et qui traverse
elle-même de très-vastes prairies, dont l’existence
n’est due en grande partie qu’à ses inondations pério-
diques; 4° enfin la Scille, descendant du plateau de
la Bresse.

Région supérieure. — Dans cette région, qui est
celle des terrains vosgiens, si l’on en excepte la Lau-
terne, traversant des marécages, tous les affluents
ont de fortes pentes et coulent dans des lits généra-
lement encaissés ; de sorte qu’ils ne produisent que
de rares inondations.

Dans tous les cas celles qui ont heu, à des inter-


valles irréguliers, dans cette région supérieure du
bassin de la Saône sont toujours très-favorables aux
prairies riveraines, dont le rendement ordinaire
s’accroît, pour plusieurs années dans une forte pro-
portion.

Le rendement moyen en foin, qui est d’environ


37 quintaux à l’hectare, passe à 43 et 44 quintauxpar suite d’une seule submersion; et cette plus-va-
lue ne décroît qu’à partir de la troisième année.

A la zone des terrains vosgiens succède celle des


terrains jurassiques, compris principalement entre
Pont-su r-Saône et Gray.

Mais, dans cette zone, on doit distinguer la partie


de la Saône comprise entre Pont-su r-Saône et Gray,
l’Ognon etleDoubs. Plus bas, le terrain jurassique soit
dans la Côte-d’Or, soit dans le Doubs, dans le Jura et
dans l’Ain, s’élève tout à coup à 100 et 200 mètres
au-dessus des terrains bressans, et constitue de vastes
plateaux, n’influant sur la partie basse du bassin
que par les sources nombreuses qui s’en échappent.

Ici, comme dans la région précédente, on a re-


connu que les submersions sont d’autant plus favo-
rables aux prairies que les cours d’eau ont déplus
fortes pentes. Dans les parties à faible pente leur
durée peut être trop prolongée. Mais par suite du
précieux effet du limonage, on retrouve générale-
ment, dans la plus-value de la récolte suivante, la
compensation des pertes éprouvées sur celle qui a été
endommagée par une crue intempestive. Et ce fait
a été vérifié, surtout après la grande inondation de
juin 1856.

En résumé, dans toute la vallée de la Saône supé-


rieure, depuissa source jusqu’au confluent de 1’Ognon
en aval de Gray, les inondations ordinaires sont con-
sidérées comme étant toujours profitables aux ré-
coltes.

Vallée de l'O gnon.— Sur cette rivière qui coule,

à sa partie supérieure, dans les terrains primitifs,


les pentes sont également très-fortes. Les submer-
sions qui ont lieu au printemps sont peu durables
et d’autant plus utiles aux prairies que celles-ci
ne sont pas irriguées en été.

Le rendement de ces prairies s’améliore à mesure


que l’on s’avance dans la vallée. — Aux environs de
Villersexel, où elles sont sur des terrains d’alluvions
en pente, leur rendement moyen arrive jusqu’à
60 quintaux à l’hectare.

En un mot, dans cette vallée comme dans celle de


la Saône, en amont de Gray, les submersions natu-
relles sur les prairies sont toujours très-fertilisantes.
Leur action nuisible n’a lieu que sur quelques points
isolés où la nature du sol exigerait des précautions
particulières, que l’on peut d’ailleurs réaliser à l’aide
de quelques travaux peu dispendieux.

Vallée du Doubs. — Il traverse dans la région su -
périeure la plaine de Morteau, qui reçoit de fréquentes
submersions. Celles-ci sont toujours utiles, quand
elles arrivent dans les mois d’hiver. Ici comme par-
tout elles peuvent être nuisibles si elles surviennent
au moment de la récolte du foin.

De ce point à Montbéliard les submersions des


prairies riveraines soit par le Doubs, soit par la De-
soubre, son principal affluent, produisent les plus-
values ordinaires, et très-rarement des dommages.

De Montbéliard jusqu’en aval de Dole, la vallée


est assez étroite, et partout où elle s’élargit les parties
submersibles sont toujours en prairies naturelles.

La vitesse moyenne des eaux débordées étant trop


faible pour produire des corrosions, les prés sur
lesquels se répandent les crues n’en peuvent éprouver
de dommages que dans les cas fort rares des débor-
dements d’été.

Lavallée de la Loue, au point où elle reçoit les eaux


de la rivière Saint-Nicolas, est plus large que celle
du Doubs et ses rives moins elvées. Aussi sont-elles
inondées plus fréquemment et surtout sur une éten-
due bien plus considérable. Mais comme tout le fond
de la vallée est en nature de prés arrosés, et comme
la vitesse des eaux débordées est trop faible pour af-
fouiller le sol, comme d’ailleurs les eaux de débor-
dement, après que la rivière est rentrée dans son lit,
trouvent des moyens d’écoulement certains, il en
résulte que les inondations sont toujours utiles ; sauf
les cas assez rares où elles se produisent en été et au
moment même de la récolte des foins.

Ces observations s’appliquent à la Savoureuse et


même à la Luzine; si l’on excepte toutefois ce qui
a rapport aux propriétés bâties.

Dans la partie comprise entre Besançon et Dole,


quelques communes, notamment celle de Dam-
pierre, sont exposées à recevoir les inondations à des
époques intempestives. C’est pourquoi, par excep-
tion, les terrains submersibles y ont un peu moins
de valeur que les autres, à conditions égales.

Mais, en aval de ce point, les choses reprennent


leur situation normale ; c’est-à-dire que les plus-
values ressortent avec évidence.

Une commission présidée, en 1857, par le jugé


de paix du canton de Rochefort, et dont faisaient
partie les maires des communes de Rochefort, Fal-
letans, Dudelange, Lavans, etc., a émis l’avis :

« Que les terres des prés, sujets à être couverts


par les eaux du Doubs, débordées dans des circon-
stances ordinaires, valent d’un sixième au quart en
plus que les fonds des mêmes territoires situés au-
dessus des inondations; et que, si les parties où le
Doubs mine les terrains étaient défendues par de
simples enrochements, les communes riveraines,
dans le canton de Rochefort, n’auraient rien à dé-
sirer de plus.

Dans cette partie de la vallée, les prés non inondés


en 1856 n’ont, en 1857, donné que 38 quintaux de
foin, tandis que ceux qui avaient reçu l’inondation
en ont rapporté 48 quintaux.

Dans la commune de Dole, M. le président de la


commission statistique du canton a déclaré : que les
prés inondés sont, dans les années ordinaires, plus
productifs que les prés non inondés.

En résumé, sauf de rares exceptions, les inonda-


tions du Doubs sont considérées comme très-profi-
tables à l’agriculture.

III. — Régime des crues, dans la. vallée


principale, notamment entre Gray et Lyon,

Pour avoir une idée de l’importance exception-


nelle des inondations dans la vallée de la Saône, il

suffit de jeter les yeux sur les trois tableaux ci-après.


Ils sont extraits d’un rapport rédigé, en 1838, par
M. l’ingénieur en chef Leveillé, alors chargé du ser-
vice spécial de cette rivière.

Surfaces occupées par les inondations de la


Saône dans les localités ci-après :


De Pont-sur-Saone à Gray 7.450 h.

De là à Saint-Jean-de-Losne 11.820

De là à Verdun (confluent du Doubs) 10.070


Les largeurs occupées par la submersion sont


d’ailleurs à peu près proportionnelles à la hauteur
de celle-ci et varient de 800 à 3.000 mètres. Le maxi-
mum correspond aux parties de la vallée comprises
entre Trévoux et Fontaines, en aval de Trévoux.

Le rétrécissement qui a eu lieu, entre Verdun et


Châlon, où la submersion ne peut s’étendre que sur
une largeur de 1.500 à 1.600 mètres, tient à l’exis-
tence sur la rive gauche d’une digue insubmersible,
formant le prolongement des digues du Doubs.

A partir de Trévoux la Saône entre dans un véri-


table goulet, formé par des collines, couvertes de
constructions, et qui va en se rétrécissant depuis

500 mètres jusqu’à 250 mètres ; largeur réduite de


la Saône dans la ville de Lyon. Ce goulet représente
l’émissaire de l’immense lac, de plus de 60.000 hec-
tares que forme la Saône dans ses crues, et qui doit
être considéré comme un puissant modérateur des
crues du Rhône ; si redoutables daus la partie infé-
rieure de son cours ; notamment aux environs de
Beaucaire et de Tarascon ; où il serait impossible de
les contenir, entre des digues insubmersibles.

Hauteur des eaux au-dessus de la plaine.



LOCALITÉS.

NOV. 1840.

mai 1856.

juin 1856.

Ànxnnne

1.74

0.94

1.40

Saint-Jean-de-Losne

1.95

1.50

1.76

Verdun

3.80

3.62

3.30

Châlon

3.47

2.75

2.49

Tournus.

3 30

2.18

1.90

Mâcon

3.85

2 52

2.16

Belleville

3.50

2.09

1 62

Trévoux

3.88

1.89

1.35

Neuville

4.53

2.15

1.72

On voit que les hauteurs d’eau sont, comme on
vient de le dire, à peu près en raison des largeurs
occupées par la submersion, et indiquées dans le
tableau précédent.

Durée de l'inondation.



LOCALITÉS.

ANNÉE MOYENNE.

Été.

Hiver.

Auxonne

4j,50

7, 02

Saint-Jean-de-Losne

3 ,85

6 ,52

Verdun

4,80

8 ,18

Châlon

6,44

8 ,68

Tournus

7 ,90

10 ,84

Belleville

6 ,62

10 ,45

Mâcon

6 ,71

11 ,45

Trévoux

5 ,00

11,00

Neuville

5,00

5,92

Ce tableau montre que la durée des crues est à
son maximum vers le milieu de la Saône submergée;
pour diminuer ensuite brusquement en aval dè Tré-
voux, où commence le goulet de Lyon.

En laissant de côté ce qui se rattache aux dom-


mages pouvant atteindre les propriétés bâties, dont
nous n’avons pas à nous occuper ici, et en acceptant
tel qu’il existe un état de choses sur lequel nulle
puissance humaine ne pourrait avoir d’action, nous
devons signaler de suite, au point de vue agricole,
la seule distinction importante qui soit à faire.

Quand les crues de la Saône ont lieu dans les six


mois d’hiver, du 15 octobre au 15 avril, c’est-à-dire
dans la saison normale des submersions fertilisantes,
elles sont le plus grand bienfait qu’on puisse dé-
sirer pour l’entretien de la fertilité de cette riche
vallée. Exemple : crue de novembre 1846.

Quand elles arrivent hors) saison, c’est-à-dire dans


les mois d'été, elles causent des dommages plus ou
moins sérieux ; selon le plus ou moins d’avancement
des récoltes (crues de mai et de juin 1856).

Mais quelques observations particulières sont de


nature à bien expliquer les causes de cette action, si
différente, des eaux de submersion, employées en
hiver ou eu été.

Température de l'eau. — Partageant complète-
ment l’opinion que nous avons émise, dans un des
chapitres précédents, sur la grande influence exercée
par la température de l’eau de submersion, sur les
principales récoltes, et même sur les prairies, l’au-
teur du rapport précité n’hésite pas à attribuer à
cette seule cause le caractère généralement désas-
treux des inondations d’été.

Nous ne pouvons mieux faire que de citer ici son


avis à cet égard et les faits dont il s’appuie, puisqu’il
s’agit incontestablement du point le plus important
à apprécier, pour l’étude approfondie de la question
dont il s’agit.

« Dans la saison d’été les blés ne peuvent, sans


périr, être submergés, plus de trois jours; les foins
plus de cinq.

« En hiver les blés peuvent supporter une sub-


mersion de quinze jours, les prés une submersion
de soixante jours.

« Pour une même époque de l’année, la tempéra-


ture modifie singulièrement ces résultats. La citation
de quelques renseignements pris à cet égard auprèsdes cultivateurs fera ressortir nettement cette in-
fluence.

« La crue de mai 1856 n’avait fait que pour un


cinquième de mal, sur tous les produits agricoles;
tandis que celle de juin a tout anéanti.

« Au 19 mai, le thermomètre marquait 12 degrés


centigrades au-dessus de zéro et à l’ombre ; au lieu
que, le 3 juin, la température s’élevait à 22 degrés,
et que, les trois jours précédents, elle était à 17, 19
et 21 degrés.

« De ce qui précède, et je crois bien que c’est la


base qu’il faut admettre, il résulte que pour qu’une
crue fasse du mal, il faut que l’eau soit à 10 degrés
et l’atmosphère au moins à 15 de'grés. »

«La première crue de mai n’aurait détruit qu’une


portion de la récolte en blé et en herbe; et seulement
dans les parties les plus basses, où l’eau aurait sé-
journé; et, en s’échauffant, pourri les plantes. Une
grande partie de la récolte aurait donc échappé à la
destruction; mais la seconde crue, celle de juin, a
achevé de tout détruire et a empêché le réense-
mencement, de sorte que les fonds n’ont rien pro-
duit.

«Les débordements du Coney (Haute-Saône) durent


rarement plus de trente-six heures; l’eau n’atteint
jamais la température de 10 degrés; et, dès lors, son
action est loin d’être assez énergique pour détruire
les racines des plantes.

« Une autre circonstance encore tend à faire varier


les effets de la submersion : c’est l’état de la récolteau moment où elle a lieu. Ainsi les plantes inondées,
lorsque leurs semences viennent d’être confiées à la
terre, ou qu’elles sont en germination, sont presque
toujours entièrement perdues.

« A partir du moment où les eaux recouvrent


complètement les récoltes, de deux crues d’inégales
hauteurs, et qui séjourneraient identiquement le
même temps, la plus élevée serait la moins perni-
cieuse, attendu qu’elle aurait pour effet de maintenir
les eaux de fond plus fraîches.

« Les cultivateurs s’accordent sur ceci, que la du-


rée des crues, pour nuire aux récoltes est condition-
nelle. Lorsqu’elles arrivent au moment des semailles,
le blé prêt à germer est perdu, en moins d’une demi-
journée, tandis que celui qui est germé peut rester
près de trois jours sous l’eau, sans en souffrir.

« Les crues d’hiver, lorsque les eaux sont glaciales,


peuvent rester quinze jours, même sur les blés, sans
leur faire de mal. Au printemps, lorsque les eaux
sont plus chaudes, les blés peuvent être perdus dans
les vingt-quatre heures.

« Ainsi se justifie cette opinion, générale dans le


pays, que la crue de mai 1840, malgré la hauteur
extraordinaire de l’inondation et bien que sa durée
aitété de plus de trente-deux jours consécutifs à Chà-
lon, n’a en réalité, eu de suites désastreuses que pour
les propriétés bâties.

« C’est donc exclusivement, pendant l’hiver, lors


du repos de la végétation, que les plantes peuvent

supporter des submersions prolongées, qui' leur sont


alors très-profitables. »

Les divers ingénieurs qui ont été chargés successi-


vement du service spécial de la Saône sont d’ailleurs
unanimes pour constater ce fait fondamental.

IV. Etudes diverses. — Résumé.

Il résulte de ce qui précède que les débordements
périodiques de la Saône, sont d’un grand intérêt
agricole, mais qu’on doit regarder comme impossible
de pouvoir utilement en modifier le régime.

C’est donc seulement dans l’intérêt de quelques


centres de population, ou plus généralement des joro-
priétés bâties, que MM. les ingénieurs ont été amenés
à rechercher les divers moyens auxquels on pourrait
avoir recours; sinon pour éviter, au moins atténuer
les dommages, pouvant résulter des grandes crues
dans cette vallée.

Ils ont commencé par déclarer, dans leur rapport :


« que depuis la crue de novembre 1840 qui a détruit
toutes les maisons, en pisé, existant dans la zone
submersible, on n’y construit plus désormais que
des maisons en pierre ; de sorte que les inondations
ne causent plus aujourd’hui aucun désastre sérieux;
mais seulement des accidents, et toujours une grande
gêne, d’autant plus préjudiciable que le séjour des
eaux se prolonge davantage (1). »

En effet, la crue de mai et juin 1856, qui a été


très-nuisible aux récoltes, n’a causé aux propriétés
bâties que des dommages insignifiants. Les princi-
pales de ces villes, telles que Lyon, Châlon, Maçon et
autres, qui avaient le plus à souffrir, ont exécuté, de-
puis quelques années, des travaux préservatifs, tels
que des murs de quai, des portions de digues en
maçonnerie, etc., et sont aujourd’hui presque en-
tièrement préservées. Quelques-unes réclament en-
core des travaux analogues, mais leur situation ne
présente rien d’alarmant.

En dehors de ces travaux isolés, et d’intérêt local,


on ne voit pas ce qui pourrait être entrepris, comme
mesure générale, spécialement dans l’intérêt des
centres de population.

Les seuls moyens de préservation que l’on pourrait


employer, pour les régions comprenant la vallée prin-
cipale, véritable champ des grandes inondations, ne
seraient autres que ceux anciennement pratiquées
dans d’autres contrées, mais dans des situations dif-
férentes; et consistant dans l’emploi, soit des digues
longitudinales insubmersibles, soit des digues trans-
versales ou des grands réservoirs artificiels.

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