1 Introduction
L’attachement des habitants à leur territoire et à sa culture est une posture de plus en plus revendiquée en France par les acteurs locaux. Ceux-ci veillent à conserver les attributs et avantages qui font de leur environnement, un lieu unique d’épanouissement et de communication.
Dans ces pays à nouveau proclamés, « l’espace public » d’Habermas retrouve une perspective. Le deuxième volet des lois de décentralisation pourrait leur offrir les moyens de leur projet mais en revers, leur laisser une responsabilité accrue dans la gestion des ruptures au sein du local. C’est ainsi que l’apparition d’épidémies galopantes où la survenue d’une pollution envahissante interrogerait les contrées adjacentes à exiger du territoire responsable, des mesures de préservation et de cantonnement des risques.
Il ne s’agit plus de constater les conséquences des catastrophes affectant le local mais de les limiter sinon de les prévenir.
La mise en œuvre d’un recueil et traitement de l’information imposent une perspective de mutualisation des signaux pour le local; elle participe ainsi à la mise en œuvre d’une démarche d’intelligence territoriale.
2 Le territoire, porteur d’incertitudes
Mise à part la contrainte d’évolution des limites géographiques, l’incertitude territoriale est liée à une évolution du sens, lui même ancré sur l’objet culturel. Or, la culture est elle-même dit Hofstède (1991), la résultante d’une coagulation des rites, des valeurs, des symboles et des héros. La dégradation de l’un ou l’autre de ces points d’appui provoque par ricochet, l’altération du sens spatial qu’en donne chacun, entraînant un doute de représentation.
La transformation des territoires miniers puis des sites métallurgiques du Nord en friches industrielles désertes a confisqué chez au moins une génération d’habitants, la représentation du Nord, comme territoire de production.
L’incertitude territoriale devient alors un moteur de blocage des projets. Et de doutes en crispations, de désaccords en farouches oppositions, les acteurs chercheront alors dans un « deus ex machina » providentiel le levier nécessaire à la production d’un nouveau sens ou d’un renouveau du sens initial. La frange politique est fertile en ce domaine ; elle a su offrir par le passé, le meilleur comme le pire.
Aussi, l’utilisation des processus de veille au sein du territoire participe à la dissipation des incertitudes par la visibilité qu’il donne au projet local. Le territoire comme l’entreprise, craint le doute et peut trouver dans le traitement de l’information, les éléments d’une perspective stratégique.
3 L’intelligence territoriale, un nouveau traitement du signal Un enjeu
Aujourd'hui, c'est bien dans le champ économique et technologique que vont s'affronter les États et, avec ou sans leur soutien, les entreprises de toutes tailles et de toutes sortes. Le traitement des flux d’informations est de nature à modifier la donne.
L’arrivée de Clinton aux commandes de la Maison Blanche était accompagnée d’une fébrilité dans les services pour la mise en œuvre de programmes de développement colossaux de collecte du renseignement économique. Les importants moyens consacrés à la recherche et au traitement des informations utiles, par les Japonais et les Américains marquent l'avènement de l'ère de l’information avec la fin de la guerre froide et le recul de la probabilité d'un conflit planétaire.
Nous pensons que dans cet affrontement résiliaire, l'information jouera un rôle d'autant plus grand que les coups portés le seront dans un contexte politique et juridique interdisant l'usage de la violence armée.
La prééminence de l’usage de l’information sur la force reste néanmoins relative dans un contexte où le prétexte non vérifié (production d’armes de destruction massive) sert de cause à une finalité qui parfois n’a pour ambition que la suprématie énergétique.
La veille territoriale est-elle principalement économique ?
Pour E.J. Blakeley (1994), les concepts de développement régional, local ou de community economic development sont synonymes ; le développement s’inscrit d’abord dans l’économique comme valeur ajoutée prioritaire d’une dynamique systémique.
Pour José Arocena (1996), ancien élève d’Alain Touraine, le territoire demeure d’abord un lieu de résolutions des conflits d’intérêts individuels ; il traduit ici sur le sujet, un regard de sociologue.
Laurent Davezies105 propose une thèse opposée : « l’enjeu du développement du territoire n’est pas de créer le plus de richesses possibles mais d’en capter le plus possible ».
En illustration, nous constatons qu’en région Nord-Pas de Calais, certains territoires à vocation plutôt résidentielle, bénéficient d’une augmentation des niveaux de vie et de ressources inversement proportionnels à la valeur ajoutée qu’ils produisent. Les salaires publics, les prestations sociales et les retraites assurent le plus gros des revenus du territoire de résidence et constituent le paradoxe de créer un sur-revenu et une sur-consommation par rapport aux territoires de production de valeur ajoutée.
Cette fonction saprophyte a ses limites par l’existence d’un local productif qui allaiterait un local uniquement capteur.
Cette disposition oriente le schéma d’intelligence territoriale sur d’autres facteurs de succès que les indicateurs productifs habituels.
La Loi n°99-533 du 25 juin 1999 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire amène une rupture avec les schémas nationaux d’aménagement précédents. Elle prend en compte la notion globale de dynamique locale fondée sur un développement solidaire de tous les territoires et s’inscrit dans les nouveaux apports de la nouvelle économie et des stratégies d’actions publiques. Elle incite à promouvoir pour ce faire, une mise en valeur des ressources existantes dans un schéma que l’on peut qualifier de compétitivité économique de la France au sein de l’Europe et du reste du monde ;
Faut-il y voir un discours public de positionnement stratégique, (pro-actif dirait Marcel Godet106), fondé sur la ressource locale mais situé dans une vision mondiale ?
Les dimensions du local obligent à porter un regard systémique sur l’analyse des risques que l’on pourrait en faire. Environnement, emploi, pollution, épidémie, risques géodésiques, sécheresse sont les quelques facettes d’un ensemble de risques à gérer par le territoire.
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