Parallèlement à l’élaboration de critères de sélection professionnelle précis et transparents, il apparaît indispensable de former les jurys et d’en imposer la féminisation
Depuis 15 ans, les circulaires successives ont rappelé la nécessité de féminiser les jurys de concours tant pour les concours de recrutement que pour les examens professionnels, tant pour ce qui concerne les membres de ces jurys que leurs présidents. On ne dispose pas de statistiques sur la participation des femmes aux jurys de concours mais les directeurs du personnel consultés dans le cadre de la préparation du présent rapport signalent que les objectifs fixés par circulaires n’ont pas été atteints. Il faut désormais, pour l’ensemble de la fonction publique, faire de la féminisation des jurys une obligation, et à cet effet l’imposer par la loi en ce qui concerne la fonction publique territoriale et par le règlement pour les autres fonctions publiques.
Selon les personnalités interrogées, les difficultés à attendre sont de deux ordres : la première serait l’absence de vivier de candidatures. La seconde est l’existence, dans certains statuts particuliers et notamment pour des corps très masculinisés, de dispositions qui fixent précisément la composition des jurys. Rien de tout cela n’est rédhibitoire. Les exceptions à la féminisation des jurys, si elles sont justifiées, peuvent être prévues par dérogation. Le vivier, quant à lui, pourra être très facilement élargi pour peu que l’on s’efforce de placer la recherche des membres des jurys dans une perspective interministérielle.
Chapitre 3 : La modernisation pour et par les femmes
¤¤ D’une manière générale, la meilleure connaissance des déroulements de carrière des hommes et des femmes qui partent de situations comparables permettrait de mieux comprendre ce qui, au cours de la vie des femmes, constitue un blocage dans la carrière. Ici encore des statistiques plus précises seraient une aide considérable.
7ème proposition : La transparence et la connaissance du phénomène par des statistiques et des études
La direction de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) dispose de nombreuses statistiques grâce aux effets conjugués de sa ténacité, de son travail et de la qualité des liens qu’elle a tissés avec l’INSEE. Toutefois, la base statistique est insuffisamment précise pour fournir les renseignements indispensables sur les thèmes ici évoqués. En outre, elles sont essentiellement synchroniques : elles permettent d’avoir une photo bisannuelle de la composition sexuée de l’administration par ministères, corps, filières et métiers. Mais des études plus suivies sur des périodes assez longues seraient seules à même de permettre de déceler les points de blocage des carrières féminines.
En outre il serait utile de mettre en relation, parmi la centaine de corps les plus féminisés (à part l’enseignement), les déroulements de carrière qu’ils offrent avec le pourcentage de femmes qui les composent, ainsi que la proportion de femmes qui accèdent aux formations par corps et par ministères, le pourcentage des femmes promues au choix par corps et par ministères etc…
Il conviendrait de définir pour chaque ministère, selon ses déséquilibres propres, des objectifs statistiques comportant une définition précise des évolutions à mettre en lumière : corps à féminiser, concours à promouvoir auprès des femmes, etc…
Par ailleurs, on a vu l’utilité de l’étude citée ci-dessus, effectuée auprès de la DGI. Il serait particulièrement utile que d’autres études sexuées de cohortes de fonctionnaires de divers niveaux, incluant leur déroulement de carrière, leurs refus ou acceptation d’emplois, leurs candidatures à des concours, leur situation de famille, etc… puisse être menées dans divers services et renouvelées régulièrement, en fonction des difficultés repérées.
Une cellule interministérielle placée à la DGAFP devrait être chargée de contrôler et de coordonner les études statistiques de diverse nature sur cette question, outre la collecte bisannuelle à laquelle procède déjà ce service et qui mérite quant à elle d’inclure d’autres informations. Une lettre du ministre de la fonction publique, de la réforme de l’Etat et de la décentralisation à ses collègues, qui figure en annexe, leur demandait dès avril 1998 de fournir à cet effet à la DGAFP les compléments utiles aux informations qu’elle est chargée de synthétiser.
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¤¤ Il est nécessaire de prendre des dispositions plus volontariste pour rééquilibrer la proportion d’hommes et de femmes dans l’encadrement supérieur, dans tous les cas où les critères de recrutement sont opaques et le choix des candidats discrétionnaire.
8ème proposition : Les plans d’objectifs
On n’envisagera pas ici de modifier les modalités anonymes d’entrée dans la fonction publique, qui sont excellentes. Les mesures énumérées au chapitre précédent doivent permettre de favoriser les choix des filles pour des carrières de fonctionnaires et de rééquilibrer les résultats des concours selon les mérites des uns et des autres.
En revanche, en ce qui concerne les promotions au choix, les nominations sur liste d’aptitude, etc... la situation est tout autre. Une forte opacité couvre les critères de sélection et elle n’est pas favorable aux femmes, comme on l’a vu. On se trouve en outre dans un domaine où la liberté de choix de l’autorité qui nomme est bien plus étendue. On peut donc, en l’occurrence, adopter des mesures résolument volontaristes pour rééquilibrer la situation en faveur des femmes.
L’introduction de plans d’objectifs modulables et progressifs s’avérerait probablement très positive. On pourrait reprendre l’exemple sur ce point de plusieurs de nos voisins européens, notamment la Belgique, et l’adapter à nos propres modes de fonctionnement.
Dans les ministères où des déséquilibres existent dans l’encadrement supérieur, on fixera un objectif en terme de pourcentage obligatoire à atteindre en trois années (ou cinq). Cet objectif sera calculé pour permettre de rattraper une partie du retard. Le plan pluriannuel sera renouvelé régulièrement pour atteindre, par paliers successifs, le même pourcentage de femmes dans les emplois de débouché que dans le corps qui leur sert de vivier.
Bien entendu, l’idée mérite d’être précisément déclinée. Tout emploi de débouché ne dispose pas d’un corps vivier spécifique, il peut y en avoir plusieurs, voire aucun en particulier. Dans ce cas, les plans d’objectifs doivent aboutir à des pourcentages finaux adaptés à la situation dans l’ensemble du département ministériel ou dans le service concerné. Ainsi, va tout-à-fait dans ce sens, l’effort particulier du ministre de l’éducation nationale qui dispose désormais d’autant de femmes que d’hommes aux postes de directeurs d’administration centrale, ce qui correspond à la proportion globale d’hommes et de femmes dans les effectifs de son ministère.
Pour assurer la solidité du dispositif, il serait préférable d’opter pour un ensemble de décrets par ministères. Ces décrets devraient être élaborés à partir d’un projet de décret type préparé par la DGAFP.
L’avantage de cette pluriannualisation des objectifs, par rapport aux systèmes adoptés par certains de nos voisins sous forme de quotas de parité ou d’obligation de nommer uniquement des femmes jusqu’à rétablissement de l’égalité, est de parer au risque de l’absence de candidate ad hoc pour un poste donné. On évitera surtout que les femmes nommées soient regardées comme choisies faute de mieux et se voient discuter leur compétence.
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¤¤ Les responsables signalent souvent que leurs choix en faveur d’hommes résulte du manque de femmes susceptibles d’être candidates. Une aide à la décision devra leur être offerte en mettant à leur disposition des viviers de candidatures.
9ème proposition : la constitution de viviers de candidatures féminines
Il n’est pas entièrement inexact de dire que lors des nominations, pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, la bonne volonté ne suffit pas pour trouver les femmes ayant le profil recherché. On a vu qu’elles souffrent, en la matière, d’un manque certain de visibilité. Pour aider à la décision lors des nominations, il serait utile de créer des listes par profil et compétence des fonctionnaires disponibles, occupant des postes ouvrant sur l’encadrement supérieur et qui en constituent le vivier. Dans le souci, notamment, de permettre une bonne application des plans d’objectifs, la mise sur pied de viviers spécifiquement féminins est à cet égard indispensable.
La gestion de ces viviers devra faire l’objet d’une mise à jour permanente et pourra servir au contrôle de l’application des diverses mesures que propose le présent rapport si le gouvernement décide de les adopter. A cet effet, le gestion des viviers devrait être confiée à un haut fonctionnaire qui serait nommé dans chaque ministère et chargé de l’égalité entre les hommes et les femmes. Il serait chargé également de la médiation entre les autorités investies du pouvoir de nomination et les femmes.
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¤¤ les textes statutaires ne spécifient pas expressément l’égalité d’accès dans les emplois supérieurs
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