404 la norme linguistique l'occultation du caractère maternel de la langue nationale


Appendice 1 Thèses générales du Cercle linguistique de Prague: Principes pour la culture de la langue*



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Appendice 1

Thèses générales du Cercle linguistique de Prague: Principes pour la culture de la langue*

Par « culture de la langue » nous entendons le développement cons­cient de la langue standard; ce développement peut être assuré par 1° les travaux linguistiques théoriques, 2° l'enseignement de la langue à l'école et 3° la pratique littéraire.

Les thèses qui suivent ont pour but d'établir des principes généraux aux seules fins des travaux linguistiques théoriques qui ont un impact sur la langue standard; cet impact est soit favorable, soit défavorable, à moins que la contribution du linguiste ne demeure que virtuelle. Les travaux linguistiques théoriques ne sont utiles à la langue standard que s'ils aident cette langue à remplir ses fonctions le plus efficacement possible, ce à quoi ils peuvent arriver en contribuant 1° à la stabilité de la langue standard et 2° à sa capacité de différenciation fonctionnelle et à son enrichissement stylistique; dans les deux cas, la meilleure compréhension possible de la langue standard courante, c'est-à-dire de sa norme telle qu'elle existe de fait, s'avère une condition essentielle.

1. Si l'on veut réussir le développement de la langue standard contem­poraine, il est nécessaire d'avoir une compréhension théorique de sa norme réelle.

Pour déterminer ce qu'est la période contemporaine de la langue standard, il faut prendre pour critère le moment où chacun de ses aspects est devenu relativement stabilisé dans sa forme actuelle. Les structures fonda­mentales de la langue standard tchèque se sont stabilisées à l'époque de la renaissance nationale (en particulier, grâce aux travaux de Josef Dobrovsky); d'autres structures ne se sont stabilisées qu'à la fin du XIXe siècle (en parti­culier grâce aux grammaires de Jan Gebauer). On peut considérer que le vocabulaire, pour sa part, ne s'est stabilisé dans sa forme actuelle qu'à partir de 1880 environ et la langue technique plus tard encore; certains

Version française d'une traduction tchèque-anglais faite par Paul L Garvin (dans Joan Rubin et Roger Shuy, Language Planning. Current Issues and Research, Georgetown University Press, 1973, pp. 102-111). Paru originalement dans $ohuslav Havrânek et Milôs Weingart, Spisounâ 'cestina a jazykoud kultum, Prague, Melantrich, 1932, pp. 245-258.

Traductrices: Andrée Thouin et Francine Paradis (Ministère des Communications). Réviseur. Paul L Garvin.

LA NORME LINGUISTIQUE



aspects de la terminologie technique tchèque ne sont encore qu'en voie de stabilisation.

La compréhension des normes de la langue standard contemporaine ne peut se fonder ni sur une norme antérieure ni sur une forme quelconque de la langue populaire, actuelle ou passée -quoi qu'on en dise dans certains [travaux puristes]; elle ne peut non plus se fonder uniquement sur la langue qui serait utilisée dans un but fonctionnel particulier, par tel ou tel courant littéraire, ou encore dans un seul secteur de la science ou de la vie quotidienne.

Cette compréhension doit s'appuyer par-dessus tout sur la pratique littéraire moyenne des cinquante dernières années, dont il ne faut pas exclure cependant la littérature et les écrits techniques du XIXe siècle qui ont préparé la voie à la stabilisation de la langue standard actuelle; en étudiant la litté­rature ancienne (par exemple, la langue de Palacky, Havlicek, Némcovâ, Tyl), il faut en effet distinguer, d'une part les éléments qui sont passés dans la langue standard, d'autre part les éléments qui en ont été éliminés, ceux qui témoignent d'un flottement entre langue littéraire et langue populaire, ou encore ceux qui n'ont perduré qu'à titre d'écho d'un état de langue révolu. En ce qui concerne la langue poétique, c'est-à-dire la langue des belles-lettres anciennes et contemporaines, seuls ses éléments automatisés* peuvent servir de fondement à la norme (et seulement si ces automatisations ne sont pas en fait des actualisations figées puisées aux anciens canons littéraires); ces éléments doivent être distingués des actualisations* propres à la langue poétique, qui constituent des distorsions intentionnelles de la nomme, et aussi, en règle générale, de toute utilisation structurale des langues fonctionnelles et locales, des langues de classe et des dialectes; il faut égale­ment tenir compte des attitudes différentes selon les auteurs à l'égard de la norme standard. Bien entendu, avec le temps, les actualisations caractéristi­ques de la langue poétique peuvent finir par passer dans la norme de la langue standard, mais cela se produit habituellement sans que le poète l'ait voulu.

On trouve une autre source d'information sur les normes de la langue standard actuelle dans l'intuition linguistique que les intellectuels en ont aujourd'hui ainsi que dans leur propre langue orale, toute coloration locale ou argotique idiolectale étant bien entendu exclue.

• « We thus call autornatization what, in the case of phrases, is sometimes called the lexi­calization of phrases. [... 1 By joregrounding [tchèque aktualisace1, on the other hand, we mean the use of the devises of the Laguage in such a way that this use itself attracts attention and is perceived as uncommon, as deprived of automatization, as deautomatized, such as a live poetic metaphor (as opposed to a lexicalized one, which is automatized) » (Bohuslav Havrànek, « The Functional Differentiation of the Standard Language » dans. Paul L. Garvin, A Prague School Reader on Esthetics, Literrny Structure, and Style, Georgetown University, 1964, p. 10). (N.d.Lr. )

APPENDICE 1



Remarques:

1° Nous traitons ici de la langue littéraire moyenne, en dehors de toute évalua­tion esthétique ou factuelle, et non de la langue de l'écrivain moyen.

2° L'intuitition linguistique mentionnée plus haut et la pratique contemporaine de la langue littéraire et orale peuvent être appelées « langue vivante standard » ou « usage standard »; cependant, on doit se méfier de l'utilisation imprécise que l'on fait souvent de ces termes: on les emploie fréquemment sans établir de distinction entre langue et usage populaires, langue et usage familiers ou langue et usage standard; de plus, « langue vivante » est très souvent opposé à « langue standard ».

3° 1 ne faut pas oublier que la langue standard n'existe pas ailleurs que dans les textes des domaines littéraire et public, qu'ils soient oraux ou écrits, contraire­ment à ce que [les travaux récents des puristes] veulent nous faire croire.

11 faut établir une distinction nette entre, d'une part, les sources d'information utiles à la compréhension théorique technique de la norme contemporaine réelle de la langue standard et, d'autre part, les sources que n'importe quel usager de la langue standard a à sa disposition pour découvrir les mécanismes de la langue et ses diverses possibilités; les sources d'un énoncé particulier peuvent ressortir à un état de langue révolu ou à une langue fonctionnelle étran­gère aux visées de l'énoncé.

Jusqu'à maintenant, il ne s'est fait que peu de recherches dans notre pays au chapitre de la compréhension théorique de la langue standard contemporaine. Seules ont eu droit à une compréhension théorique et à une codification normative les structures grammaticales du tchèque standard actuel, en particulier sa morphologie, et encore seulement dans les grandes lignes et avec certaines tendances archaïsantes bien marquées. Notre con­naissance théorique du vocabulaire de la langue standard courante est très limitée.

Pour arriver à comprendre la langue standard, nous devrions procéder à un travail systématique coordonné et planifié, en premier lieu à la mise au point de manuels pratiques et de monographies portant sur des aspects linguistiques clés. Bien entendu, ces travaux devront être strictement synchro­niques et structuraux (c'est-à-dire qu'il faudra porter une attention constante aux rapports entre les éléments et aux relations de chacun avec le système global de la langue d' une période donnée - dans notre cas, la période contemporaine); cette façon de procéder ne peut faire place à une simple méthode statistique qui se bornerait à accumuler mécaniquement le matériel; de plus, présupposant que pour comprendre la norme il faut déterminer au préalable l'usage de tous les auteurs et la fréquence de tous les phéno­mènes du discours dans leurs oeuvres, elle nuirait davantage au travail qu'elle n'y apporterait de contribution positive.

2. Il est vrai que les seules prescriptions de la théorie linguistique ne suffisent pas à stabiliser la langue standard; mais la stabilisation ne se produit pas sans interventions théoriques normatives. Les interventions détermi­nantes de la théorie linguistique se font dans le domaine de l'orthographe, puis dans le domaine de la structure grammaticale - c'est-à-dire la struc-


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ture phonologique, morphologique et syntaxique - et, pour une moindre part, dans celui de la structure et du contenu lexicaux.

En ce qui concerne les interventions théoriques normatives, nous posons les principes généraux suivants:

1° Ces interventions doivent favoriser la stabilisation de la langue standard et ne pas contrecarrer la langue lorsque d'elle-même elle y est parvenue.

2° Le but des interventions ne doit pas être d'« historiciser » ou de retarder artificiellement le développement de la langue standard, mais de permettre une stabilisation fondée sur le but (point de vue fonctionnel), le goût du temps (point de vue esthétique) et l'état réel de la langue standard contemporaine (point de vue synchronique).

3° Les interventions ne doivent pas approfondir artificiellement les différences dans la structure grammaticale propre au discours familier et à la langue des livres, à moins, justement, que ces différences ne soient exploitées de façon fonctionnelle.

4° D serait futile que ces interventions théoriques cherchent à éliminer de la langue standard tous les flottements ou doublets grammaticaux et lexicaux (synonymie grammaticale et lexicale), et cela pour deux raisons: d'abord parce que la stabilisation de la langue standard ne doit pas entraîner un nivellement complet, c'est-à-dire l'élimination de la diversité fonction­nelle et stylistique nécessaire à la langue standard; ensuite parce que, si cela se produisait, la langue standard risquerait de se priver des moyens dont elle dispose pour éviter les répétitions ennuyeuses là où il le faut, c'est-à-dire qu'elle se priverait de ses moyens de différenciation stylistique.

2.1 La codification de l'orthographe, c'est-à-dire la stabilisation de la manière d'écrire, suppose, d'une part, un système orthographique, d'autre part, son application détaillée (â chaque mot en particulier).

Idéalement, le système orthographique devrait refléter le système phonologique de la langue plutôt que sa réalisation phonétique, sans pour autant négliger l'utilisation morphologique différentielle de la phonologie ou encore la fonction visuelle d'un style d'écriture et son effet sur la lecture. Il est entendu qu'une fois établi, le système orthographique ne doit pas être modifié sans raison valable; c'est pourquoi il faut étudier soigneusement le système établi et tout changement proposé du point de vue de sa validité théorique et de son utilité pratique.

L'application du système au mot doit être établie avec soin et, autant que possible, être simple, claire et cohérente. Ici encore, les facteurs déter­minants doivent être la structure phonologique du mot et le besoin de diffé­renciation morphologique, non pas la structure phonétique. L'introduction d'orthographes inhabituelles pour des raisons purement historiques est à éviter [... ].

APPENDICE I



L'orthographe des mots étrangers, surtout des mots d'usage courant, doit se conformer au système orthographique qui l'emprunte [. . .]. En revanche, il n'est ni souhaitable, ni utile d'adapter les termes internationaux au système d'emprunt et de leur donner ainsi une graphie étrange qui les priverait de leur valeur internationale (si, par exemple, le terme joule devait être écrit [en tchèque, N.d.1.r. ] comme il se prononce); ainsi l'orthographe d'origine est acceptable pour les termes techniques, au sens étroit, en parti­culi-,r s'ils sont employés dans des textes de cette nature ou comme marques de commerce; de même, les noms propres qui n'ont pas été bohémisés peuvent être écrits selon leur système d'origine.

Il y aurait lieu de procéder à une étude des fautes d'orthographe les plus fréquentes pour faire le partage entre celles qui sont imputables à une codification ancienne et celles qui tiennent aux imperfections ou aux com­plexités inutiles de la codification actuelle; ce faisant, il ne faudrait oublier ni les besoins de l'école ni ceux de la masse.

Remarques:

1° Il est important de faire une distinction entre les considérations d'ordre théorique -concernant le système orthographique ou les détails de son ap­plication - et les interventions normatives elles-mêmes.

2° Tout changement prévu au système lui-même ou à son application devrait être annoncé à l'avance de façon à permettre la discussion et la critique, qui ne sauraient être que bénéfiques.

2.2 La stabilisation de la prononciation standard relève de l'ortho­phonie. La prononciation standard doit s'appuyer sur celle qui a cours dans les milieux intellectuels où l'on parle la langue standard et non sur la pronon­ciation d'une communauté dialectale, si importante soit-elle, comme celle de Prague, par exemple; elle ne peut non plus prendre appui sur une pro­nonciation populaire sous prétexte qu'elle est la plus répandue géographi­quement

La prononciation standard requiert une différenciation fonctionnelle très développée, c'est-à-dire une connaissance des différents buts de l'énoncé; et c'est cette différenciation fonctionnelle qui doit permettre une détermi­nation des types de prononciation qui soit débarrassée du genre d'évalua­tions que l'on retrouve habituellement en orthoépie (prononciation « soi­gnée », « non soignée », etc.). Outre la normalisation de la prononciation correcte de la langue standard, il faut prêter attention à son aspect esthétique (euphonie, ... ).

Une attention particulière doit être accordée à la lecture et à la diction propres à la radio et aux arts du spectacle du point de vue de leur fonction esthétique tant selon les différents courants poétiques et dramatiques que

selon différentes conditions techniques; il nous faut une orthoépie vraiment professionnelle pour le théâtre. La manière de prononcer peut varier selon


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les conditions techniques, comme par exemple la radio, et nous devons étudier le type de prononciation qui convient à chacune.

2.3 La théorie linguistique favorise la stabilisation de la structure gram­maticale (aspects phonologique, morphologique et syntaxique) de la langue standard, à la fois par la compréhension de la norme telle qu'elle existe réellement et par sa codification.

Nous avons déjà traité plus haut de la compréhension théorique de la nonne.

La codification de la norme grammaticale, si elle est bien comprise, doit tenir compte du fait que même la langue standard évolue inévitable­ment; les efforts en vue de codifier la langue ne doivent pas viser à bloquer cette évolution en maintenant de façon artificielle et inutile, ou même en introduisant des formes archaïques, morphologiques en particulier, comme si elles étaient les seules dignes de constituer la norme - ainsi qu'on l'a fait parfois dans les [revues puristes] et dans les Règles de l'orthographe tchèque [. . .]; cela ne servirait qu'à multiplier inutilement les différences morpho­logiques entre la langue littéraire et la langue parlée, comme nous l'avons déjà fait remarquer. L'évolution inévitable de la langue est à l'origine des doublets qui se sont frayé un chemin dans la langue standard et qui ne devraient pas en être retranchés, ainsi que nous l'avons déjà exprimé plus haut fi s'agit habituellement de doublets fonctionnels (par exemple, la différence fonctionnelle entre une construction génitive ou une construction accusative avec un verbe négatif); mais il existe aussi des doublets qui, sans comporter de différence fonctionnelle constante, ne font pourtant aucun tort à la langue (par exemple, les infinitifs en -ti ou en -t); de tels doublets peuvent même à l'occasion être exploités à des fins fonctionnelles ou stylis­tiques. 1 arrive aussi que des doublets pénètrent dans la langue standard par l'emprunt d'une forme appartenant à un autre dialecte social, la diffé­rence fonctionnelle qui en découle étant mise à profit [... ].

Dans l'ensemble, la structure phonologique du tchèque standard con­temporain est assez stabilisée et bien maîtrisée, à quelques exceptions près qui, comme nous l'avons déjà mentionné, sont dues à la pénétration de la structure phonémique du tchèque familier dans la langue standard, particu­lièrement dans le cas des doublets présentant des nuances de sens et des mots de certains champs sémantiques pour lesquels il n'existe pas d'équi­valent standard [... ].

Pour ce qui est de l'état actuel de la morphologie, tous ses aspects ne sont ni complètement connus ni codifiés de façon satisfaisante. Seules la description synchronique cohérente et l'analyse de la situation réelle en révéleraient la structure actuelle, structure masquée jusqu'à présent, nous l'avons dit, par les analyses diachroniques et archaïsantes qui en ont été faites. La norme codifiée doit par conséquent réduire le nombre de formes désuètes quasi disparues de la langue standard et les identifier expressément comme des archaïsmes. [... 1

APPENDICE I



En ce qui concerne la syntaxe, il faut se rappeler - outre les principes généraux énoncés jusqu'ici, surtout celui qui affirme que la codification ne doit pas cultiver inutilement l'archaïsme - qu'il ne faut pas, sous prétexte de stabiliser, éliminer la différenciation fonctionnelle que permettent les doublets syntaxiques, ni empêcher la création des mécanismes syntaxiques spéciaux par lesquels la langue littéraire diffère du discours familier; on ne doit pas oublier non plus que les différences syntaxiques - tout autant que les différences lexicales - entre la langue des livres et le discours familier sont parmi les mécanismes les plus courants destinés à assurer à la langue standard les moyens de différenciation fonctionnelle qui lui sont nécessaires.

2.4 C'est la stabilisation du vocabulaire dans ses aspects formel et sémantique qui est le moins touchée par la théorie linguistique, mis à part le fait qu'elle peut contribuer à la création de terminologies techniques, sujet dont nous traiterons plus loin. Dans le domaine lexical, les travaux linguistiques théoriques n'exercent qu'un effet indirect par l'étude du voca­bulaire de la langue standard et par une description technique de son état actuel. U faut se rappeler, dans ce processus de « codification » qui consiste essentiellement à relever ce qui existe, qu'il est impossible de déterminer la signification des mots sans tenir çompte de leur différenciation fonction­nelle et qu'il faut être conscient des automatisations qui découlent des diffé­rentes fonctions; l'innovation se situe, par définition, au-delà de la norme (à moins, bien entendu, qu'elle n'ait été absorbée par la norme de la langue standard ... ). Si la terminologie technique requiert une délimitation précise des significations, cette exigence ne s'applique pas au vocabulaire standard en général.

Puisque, à part la syntaxe, c'est surtout le lexique qui fournit les moyens de différencier les diverses fonctions de la langue standard, le vocabulaire standard na doit jamais être réduit à ce qui est propre à une seule de ses fonctions, non plus qu'il ne doit être limité à ce que la norme a englobé jusqu'ici. Répétons-le, les néologismes doivent être évalués non seulement en fonction de leur conformité formelle et sémantique avec le fonds lexical, mais aussi en fonction de leur valeur fonctionnelle et des besoins de la communauté.

2.5 La compréhension théorique de la norme et sa codification contri­buent aussi à la stabilisation de la langue standard en permettant la diffusion de la norme et sa compréhension par d'autres personnes.

Une dernière contribution de la théorie linguistique à la stabilisation de la langue standard consiste à assumer un rôle de critique: en effet, on peut comparer la langue de certains travaux à la norme établie de façon théorique et, parmi les différences notées, signaler les différences dialectales (qu'elles soient géographiques ou sociales), les archaïsmes, les barbarismes (c'est-à-dire l'influence des langues étrangères), les néologismes et les différences dues à une théorisation fautive ou à une mauvaise compréhen­

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sion de la théorie. II ne suffit pas de condamner ces différences en parlant de laisser-aller, etc. (comme le font [les revues puristes]), à moins que ce ne soit à l'école, dans un but pédagogique, ou que l'on ait affaire à un cas d'incompétence linguistique évidente; ces différences peuvent être dues à des déficiences de la norme, établie de façon théorique - et le linguiste doit alors dégager les leçons qui s'imposent-ou encore peuvent indiquer le début d'une nouvelle évolution qu'on ne peut empêcher; il se peut enfin que l'on soit en présence d'une distorsion délibérée qui doit être respectée, aussi soucieux que l'on soit de stabilisation. Pour ce qui est de la langue poétique, son essence même interdit toute velléité de limiter ses écarts par rapport à la norme.

3. Les travaux théoriques du linguiste peuvent aussi contribuer à la différenciation fonctionnelle et à l'enrichissement stylistique de la langue standard; pour permettre la différenciation fonctionnelle et stylistique, la langue standard a besoin de moyens d'expression riches et fonctionnellement différenciés, particulièrement dans le lexique et la syntaxe, et d'une exploi­tation efficace de ces moyens.

A ce chapitre, le linguiste peut a) collaborer à la création de termino­logies techniques, b) contribuer à promouvoir l'utilisation fonctionnelle des mécanismes de la langue ainsi que l'étude et le développement cohérents de son potentiel stylistique, c) assurer la critique de certains textes, d'un point de vue fonctionnel.

3.1 La théorie linguistique peut beaucoup apporter à la création de terminologies techniques, processus qui, en fait, n'est jamais achevé. Le linguiste doit veiller, non seulement à ce que le nouveau terme ou la nouvelle extension de sens soit conforme à la structure lexicale de la langue tchèque, mais aussi s'interroger sur son efficacité et sa capacité de rendement fonc­tionnel. Il doit se rappeler que les langues scientifique et juridique craignent la parenté de leurs termes avec les expressions courantes, cette parenté entraînant une polysémie incompatible avec le discours théorique et juridique, mais aussi une certaine coloration affective indésirable [... ].



En revanche, dans les domaines pratiques et technologiques, cette parenté avec les mots de tous les jours et leurs significations, de même que la coloration affective, sont souvent des atouts, puisqu'elles contribuent à accélérer l'introduction et la propagation des termes [... ]. En élaborant la terminologie administrative et commerciale, il faut tenir compte de son besoin de formules figées. On doit accorder la préférence, dans le choix des termes, aux mots qui se prêtent facilement à la dérivation [... ].

Finalement, il serait futile d'occulter les origines internationales de la terminologie technique: l'harmonisation avec l'usage international est possible si l'on adopte les termes internationaux étrangers tout en maintenant aussi la coïncidence sémantique entre les termes vernaculaires et les termes étran­gers.

APPENDICE 1



3.2 La théorie linguistique peut aussi contribuer à accroître le rendement fonctionnel des mécanismes de la langue et signaler de nouvelles possi­bilités stylistiques:

1° La linguistique est en mesure de déterminer de façon systématique et détaillée les moyens linguistiques spéciaux et leur exploitation dans différents dialectes fonctionnels, qu'il s'agisse d'individus, d'écoles, de cou­rants de pensée, etc.

Remarques:

1° La langue de la philosophie, par exemple, tirerait grand avantage d'une ana­lyse de la terminologie philosophique des hégéliens, herbartiens, positivistes et autres philosophes tchèques.

2° Q faudrait analyser les exigences particulières à la langue journalistique, certains phénomènes en particulier, comme le cliché.

2° La linguistique identifie les possibilités de différenciation et d'exploi­tation fonctionnelles des mécanismes de la langue, en particulier celles du lexique et de la syntaxe, ainsi que les tendances qui influent sur elles; elle fait en outre des recommandations pertinentes, sans imposer, évidemment, toutes les fonctions à toutes les langues.

3° La linguistique est capable d'une élaboration stylistique systématique des différents dialectes fonctionnels.

3.3 Enfin, la théorie linguistique peut assurer une critique de textes fonctionnelle. Cette critique ne doit pas être fondée sur des critères généraux tels que la clarté, la précision, etc.; elle doit plutôt évaluer les ressources de la langue et leur utilisation uniquement en fonction de la manière dont elles servent les buts de l'énoncé, tout en tenant compte de la liberté de choix de l'auteur. Ainsi, la précision ne doit être un critère que si tel est le but de l'énoncé (après tout, l'imprécision peut aussi avoir une justification fonctionnelle); les formules figées de la langue commerciale doivent être évaluées en fonction de leur but particulier, etc. Cette critique, tout en iden­tifiant le but des différents énoncés et les différentes fonctions de la langue standard, doit se garder d'introduire une échelle de valeurs qui accorderait priorité à l'une ou l'autre fonction. Les écarts par rapport à la norme ne doivent être évalués que d'un point de vue fonctionnel. La critique linguis­tique est foncièrement différente de la critique littéraire qui, elle, est toujours liée à une évaluation esthétique.

Appendice II



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