Stratégies de diffusion de la culture des ntic et formation des personnels dans l'établissement



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A l'Université de Californie à Santa Barbara la mise en place de l'infrastructure technologique s'est effectuée par la création d'un programme visant à encourager et promouvoir un enseignement de qualité. En 1970, la législature de l'Etat de Californie et l'Université de Californie se sont engagés pleinement dans ce programme : l'entreprise répondait en partie à l'opinion répandue selon laquelle le corps enseignant universitaire accordait plus d'importance aux activités de recherche qu'à l'enseignement. A cette accusation les intéressés répondent invariablement qu'un authentique enseignement de qualité est la conséquence d'un programme actif de recherche. Malgré l'indéniable valeur théorique de cet argument, la pratique ne le reflète pas toujours.

Pour tenter de résoudre ce dilemme, la législature a prévu dans son budget un fonds spécial, destiné a l'amélioration et à l'évaluation de l'enseignement. Par la suite, chaque campus a créé son propre Instructional Improvement Program (Programme d'amélioration de l'enseignement) dirigé par un Department of Instructional Development (Département de Développement Pédagogique). Or, à Santa Barbara ces deux institutions sont, à l'avis général, " virtuellement " uniques, si j'ose dire. Je préciserai tout de suite que ce " département " n'est pas une unité d'enseignement et de recherche, mais plutôt un organisme qui soutient la mission pédagogique du campus. Il fait donc partie de ce qu'on appelle les services académiques auxiliaires de l'université.

(ORGANIGRAMME D'ACADEMIC PROGRAMS)

Le " Instructional Improvement Program " à Santa Barbara a mis en place un système modèle quant à la manière la plus efficace d'utiliser l'argent et les ressources à des fins pédagogiques. Quatre raisons expliquent son incontestable succès.

1. La première est essentielle : le modèle se fonde sur des motivations similaires à celles qui sont offertes au corps enseignant pour poursuivre des recherches, et utilise des ressources analogues, d'où son attrait pour le professorat.

2. Le programme a eu la chance de disposer de sources de financement régulières et flexibles. Ces fonds nous ont permis d'institutionnaliser différentes catégories de programmes de bourses. Chaque année, près de 250 000 dollars de bourses sont distribués au corps enseignant et aux départements, et 125 000 dollars supplémentaires vont à la formation et à l'évaluation des étudiants chargés de travaux dirigés (les Teaching Assistants).

3. Les fonds du programme sont suffisamment souples pour pouvoir s'adapter aux changements d'intérêt du corps enseignant, à la popularité de différents outils pédagogiques, et aux priorités du campus.

4. Le programme a le personnel et l'équipement nécessaires pour aider le corps enseignant à développer et mettre en oeuvre pratiquement n'importe quel projet de nature pédagogique. Depuis 1990 la vaste majorité des projets subventionnés dépend, à des degrés divers, de la technologie. Et cela pour trois raisons : le véritable déluge de nouveaux médias qui ne cesse d'inonder le marché ; l'importance croissante de la technologie dans les travaux de recherche des professeurs et dans l'adaptation pédagogique qu'ils en font. Et enfin, le fait que la technologie parle à la génération d'étudiants qui remplissent aujourd'hui nos salles.

La situation et la structure même du Department of Instructional Development facilitent l'intégration de sa mission dans la vie du campus. Fait important, depuis 1975, le " Department of Instructional Development " est centralisé et situé dans un complexe spécialement conçu et équipé des moyens médiatiques de production et de diffusion les plus sophistiqués. L'" Instructional Development " se divise en deux branches complémentaires : Instructional Consultation (Consultation pédagogique) et "Instructional Resources" (Services Médiatiques).


[ORGANIGRAMME DES SERVICES MEDIATIQUES]

La synergie qui existe entre ces deux branches est exemplaire et est tout à l'avantage de leurs usagers, les professeurs et les étudiants de troisième cycle. Le " client " bénéficie à la fois de la cohérence de l'organisation et de son esprit de collaboration.

Un comité du Sénat Académique conseille l'entière organisation qui, à son tour, rend des comptes au Vice Chancelier pour les Affaires Académiques. Une fois par an le Comité invite les professeurs à formuler des demandes de bourse à des fins pédagogiques.

Tout projet retenu par le comité jouit de quatre éléments de support.

1. Information :

La diffusion de renseignements est indispensable si l'on voudrait intéresser le corps enseignant. Il faut monter une campagne d'ateliers sur les dernières trouvailles techniques et les meilleurs logiciels, préparer des démonstrations bien organisées, et des expositions. A ce propos depuis 1990 et grâce à la générosité d'Apple, nous avons pu organiser tous les ans sur le campus une exposition regroupant les projets à base technologique entrepris par les professeurs et certains doctorants qui avaient obtenu une bourse l'année précédente. En plus des 30 ou 40 exposants, ces dernières années l'événement a attiré un public non négligeable : mille personnes du campus et de la ville sont venues voir les résultats concrets de l'allocation des bourses.

2. Consultation :

Tout professeur peut consulter un spécialiste en matière didactique (du bureau de Consultation Pédagogique) sur les stratégies à adopter pour répondre aux défis posés par un certain cours ou sur la meilleure façon de composer une demande de bourse destinée à une agence extramurale (j'entends : une bourse à des fins pédagogiques),ou encore sur la valeur et la qualité d'un projet. Trois consultants, qui ont des doctorats en sociologie, en éducation, et en anthropologie, donnent leur avis sur le design global du projet et offrent des conseils pour l'améliorer. Le contact entre professeur et consultant s'est avéré tellement fructueux que l'administration vient de nous donner un capital-risque, si l'on peut dire, de $ 20 000 pour engager, à temps partiel, des étudiants de 3e cycle qui ont démontré une compétence spéciale en multimédia afin d'aider les trois spécialistes à rendre service au corps enseignant.

3. Support technique :

Lorsqu'on envisage les services nécessaires à un programme axé sur la technologie, la programmation, l'adaptation des logiciels, la synthéthisation des média pertinents sont souvent négligés. C'est pourtant, du point de vue du professeur, le soutien le plus important puisqu'il le dispense d'avoir à apprendre la programmation, et à s'occuper de toutes sortes de détails qui risquent de dévorer son temps et qui sont plutôt du ressort d'un technicien. Le support technique est souvent l'élément indispensable de l'infrastructure technologique.

4. Support financier :

En fonction des cas, cette aide permettra d'engager un étudiant comme assistant pour le projet, ou de couvrir les frais de production d'aides multimédias, ou d'acheter un logiciel approprié. Puisqu'il est important que ces bourses respectent une certaine philosophie du " capital initial ", on n'offre pas de rémunération aux professeurs, et il est formellement interdit de dépenser les fonds du programme pour l'achat de matériel.


Parmi d'autres éléments qui confirment l'impact de ce programme, je voudrais signaler qu'il a exercé une influence tangible sur les cours d'initiation à des disciplines fondamentales telles que la chimie, la littérature, l'économie, les langues modernes, et les mathématiques.

Pour résumer : un organisme créé pour promouvoir l'enseignement a fini par devenir un véhicule " subversif " en quelque sorte : le soutien efficace qu'il apporte a convaincu une grande partie du corps enseignant d'intégrer dans leurs cours un fort aspect technologique. Il fournissait en somme la réponse à un problème pédagogique réel. En fait, entre 1990 et 1995, 400 des 850 membres du corps enseignant à Santa Barbara ont utilisé les services du Département de Développement Pédagogique.

Le fait que les motivations, les ressources et le savoir-faire technique soient tous requis pour changer de manière significative le comportement et les attitudes du corps enseignant est absolument central au programme.

Je terminerai cette partie de mon exposé en avançant quelques notions qui sont le fruit de plus de 20 ans d'expérience à Santa Barbara.

La première constatation qui concerne les fondements de l'entreprise consiste à observer que toute initiative pour développer une culture technologique au niveau universitaire doit commencer par impliquer les professeurs. Cette vue passerait pour une pure banalité s'il n'existait pas maintes tentatives administratives aux Etats-Unis visant à imposer du matériel et des approches au corps enseignant. Cette observation en entraîne une deuxième : vouloir imposer des initiatives d'ordre technologique est d'une rare imprudence. Comme la France nous l'a appris, la pensée n'est pas collective, et l'on ne doit pas s'attendre à ce que les chercheurs acceptent tous de travailler avec des techniques identiques. (Pour ne donner qu'un exemple, on ne pourrait pas, du moins chez nous, imposer aux professeurs l'utilisation exclusive de la plate-forme IBM ou Apple). Une flexibilité dans ce domaine est à souhaiter parce qu'il est inévitable que les professeurs favoriseront des innovations pédagogiques fondées sur des technologies qui leur sont déjà familières dans leur recherches.

Troisième constatation : pour faire accepter l'innovation pédagogique aux professeurs, il est indispensable que les enseignants puissent modifier un logiciel, une vidéo, une présentation quelconque en fonction des besoins particuliers de leurs cours : adapter plutôt qu'adopter est la devise des profs.

Autre constatation : pour le bien-être éducatif des étudiants, il faut essayer de créer, au sein de chaque université, sinon un cyberespace dont le centre est partout la circonférence nulle part, du moins une culture intellectuelle qui comprenne des éléments technologiques. L'étudiant est ainsi obligé de travailler avec des ordinateurs et des logiciels, que ce soit pour un cours de sociologie, de biologie ou même de littérature. Cette approche vers la techno-compétence est beaucoup plus efficace et certainement moins coûteuse que de monter toute une gamme de cours d'initiation à l'ordinateur. Notre expérience montre que l'étudiant apprend en faisant, et que l'apprentissage se poursuit de façon bien plus intéressante et fructueuse, lorsqu'on travaille à un vrai devoir, plutôt que dans l'abstrait. Une telle perspective suppose, bien entendu, que le professeur soit capable de formuler des exercices qui exigent le recours à la technologie. Pour parvenir à ce résultat, il faudra probablement créer des ateliers et des démonstrations destinés exclusivement au corps enseignant.

Un dernier fait, enfin, à ne jamais perdre de vue: là où la technologie est appliquée intelligemment pour l'enseignement, elle est efficace, mais, à une exception près chez nous, elle ne conserve pas un sou, au contraire.

Or, pour arriver au deuxième temps de mon exposé, il existe un lien indubitable entre le Département de Développement Pédagogique et la poussée technologique du campus. Dans le monde cybernétique, vitesse est pouvoir, et les professeurs s'attendaient à avoir immédiatement à leur disposition, pour leurs cours, tous les derniers développements qu'ils repéraient souvent sur le Web. Il a donc fallu développer un réseau intérieur pour permettre aux enseignants d'échanger du matériel et des conseils pédagogiques. Aussi et surtout il a fallu se relier à l'Internet.

A Santa Barbara, par conséquent, la connectivité électronique existe à tous les niveaux : dans le campus, tout le corps enseignant, tout le personnel des bureaux, et les 18 000 étudiants ont une adresse électronique. Les étudiants ne doivent même pas posséder leur propre ordinateur parce qu'il y a une cinquantaine de " Netstations " (des ordinateurs fixés sur place et connectés au réseau local et à l'Internet) qui sont dispersés dans les bâtiments les plus fréquentés, notamment dans la Bibliothèque universitaire. Il existe aussi un complexe de salles formant le Laboratoire des micro-ordinateurs et qui dispose de 200 ordinateurs. Leur usage dépend des priorités suivantes : ils sont d'abord mis à la disposition des professeurs qui enseignent leurs cours directement dans le laboratoire même, et pratiquant donc l'immersion des étudiants dans un milieu technologique. Ils sont ensuite réservés aux enseignants qui imposent à leurs étudiants de faire leurs devoirs et même de les remettre sur ordinateur. Enfin, dans une salle appelée " Accès Ouvert " des ordinateurs sont accessibles aux étudiants qui ne préparent pas un travail universitaire quelconque.

Un développement récent dans ce sens : toutes les chambres des dortoirs permettent depuis peu à ceux qui ont leurs propres ordinateurs de se relier à l'Internet et aux réseaux électroniques du campus.

Le Département of Instructional Development est donc la force motrice du progrès technologique de l'Université de Californie à Santa Barbara. Son personnel est en contact régulier avec les membres des comités essentiels qui s'occupent de la technologie du campus, et je les cite :


[SCHEMA]

Le Campus Networking Committee qui surveille et coordonne l'infrastructure des réseaux du campus.

Les Comités qui ont pour fonction de conseiller les divisions académiques de l'université en matière technologique, c'est-à-dire, les Comités chargés de ce que nous appelons les Humanités, des Sciences Sociales, des Sciences Physiques et mathématiques, et de l'Ecole des ingénieurs.

Le Comité du Sénat Académique dont j'ai déjà parlé qui revoit les bourses accordées aux professeurs pour améliorer l'enseignement.

Et enfin, pratiquement chaque département académique a un comité responsable du développement technologique.

Cette floraison de comités peut paraître lourde et complexe, mais elle est nécessaire pour deux raisons. D'abord, dans l'Université de Californie les professeurs tiennent à ce que la direction de chaque branche soit partagée entre l'administration et le corps enseignant, et le point de contact est souvent un comité. Deuxièmement, la création de ces comités assure l'engagement et la collaboration des professeurs dans le développement technologique de l'université.

Si, comme le disait Boileau, " Un beau désordre est un effet de l'art ", Santa Barbara est une université de toute beauté lorsqu'il s'agit de l'administration du côté technologique. Afin de garder toute la flexibilité possible, nous n'avons pas été tenté de nommer ce qu'on appelle en Amérique un Computer Czar - un tsar de l'informatique. Nous qui sommes responsables du progrès pédagogique de l'université nous craignons qu'un tel tsar ne résiste pas longtemps à la tentation de subsider des projets de recherche plutôt que d'encourager la mission pédagogique de l'université. Ceci dit, il faut reconnaître un certain manque de communication entre les comités à Santa Barbara. Je me propose à cet effet de suggérer la création d'un groupe de coordination générale, un "Campus Computer Planning Committee".

Parlons enfin de financement. Un partenariat avec le secteur privé a beaucoup facilité le renouvellement du Laboratoire des micro-ordinateurs, grâce à un programme appelé les Centres de Nouveaux Médias mis en place par un consortium de firmes intéressées par le multimédia, dont Kodak, Apple, Panasonic et une dizaine d'autres. Ce genre de coopération est indispensable, si chacun des partenaires - institutions publiques et secteur privé - veut soutenir la poussée technologique de l'enseignement supérieur.

En guise de conclusion je vois donc trois aspects fondamentaux à la problématique de l'enseignement supérieur aux Etats-Unis : l'accès, la qualité, et le coût. Il devient de plus en plus évident que les stratégies visant à assurer ces trois éléments dépendent d'un changement de culture des milieux universitaires.
Table ronde 1 - 2 - 1

Les stratégies des établissements français

Les technologies de l'information et de la communication dans la formation des enseignants : TIC et IUFM

Bernard CORNU, Directeur de l'IUFM de l'académie de Grenoble

Vers la société de l'information

Les technologies de l'information et de la communication transforment en profondeur la société. Nous passons d'un savoir stable, imprimé sur du papier, à un savoir dynamique, digitalisé, interactif. L'information, le savoir qui a le plus de prix n'est plus celui qui est le plus stabilisé, le plus ancien, mais au contraire le plus récent et le plus évolutif. Ces transformations touchent tous les domaines de la vie en société, et en particulier l'école : " L'entrée de la France dans la société de l'information constitue un enjeu décisif pour l'avenir ; [...] la bataille de l'intelligence commence à l'école " déclarait le premier ministre Lionel Jospin au mois d'août 1997 à Hourtin.

Pour que l'école ne reste pas au bord du chemin dans les évolutions de la société, c'est dès maintenant qu'il faut former l'ensemble des enseignants à l'usage des technologies de l'information et de la communication.
Former aujourd'hui l'enseignant de demain

Les TIC transforment les savoirs, changent et diversifient la manière d'accéder au savoir, et modifient la construction des connaissances. L'enseignant voit son rôle transformé : il n'est plus simplement celui qui détient le savoir et qui doit le transmettre à ses élèves ; il est celui qui guide l'élève, seul ou en groupe, vers le savoir, qui lui apprend à discerner, à trier, à organiser, à hiérarchiser, à distinguer le vrai du faux, l'essentiel du secondaire. Le métier d'enseignant connaît des évolutions profondes, et en connaîtra certainement encore bien plus dans les décennies qui viennent. Il nous faut former aujourd'hui l'enseignant de demain, et non reproduire simplement l'enseignant d'hier ou d'aujourd'hui. C'est un vaste défi pour les Instituts universitaires de formation des enseignants (IUFM).

Les IUFM accueillent 95 000 étudiants et stagiaires en formation initiale ; chaque année, ils fournissent au système éducatif plus de 25 000 nouveaux enseignants. Il y a 29 IUFM en France, répartis sur 147 sites. 3670 formateurs assurent dans les IUFM la formation des futurs enseignant.
Les TIC dans les IUFM : une situation critique

Actuellement, les IUFM ne disposent que d'un ordinateur à usage pédagogique pour 42 usagers ; pour la documentation et les bibliothèques, on compte seulement un ordinateur pour 242 usagers. Moins de la moitié des postes sont connectés à un réseau. Seuls un formateur sur 7 et un étudiant sur 35 ont une adresse électronique. Mais surtout, les IUFM connaissent un grave déficit en ressources humaines : il n'y a qu'un à deux "informaticiens" par IUFM, mobilisés sur l'informatique de gestion.


Un plan d'urgence

Pourtant, dans de nombreux IUFM des avancées ont été faites. Conscients de la nécessité de former rapidement tous les futurs enseignants, les IUFM ont conduit une réflexion importante. Ils ont dans ce domaine des ambitions, et de nombreux projets. Un plan d'urgence pour le développement des technologies d'information et de communication dans les IUFM est annoncé ; c'est en effet une nécessité. Si l'on veut véritablement que les IUFM mènent à bien la mission de formation qui leur est confiée dans le domaine des TIC, il faut leur en donner les moyens, tant pour s'équiper que pour se raccorder aux réseaux de communication ; il faut leur donner le potentiel humain nécessaire pour équiper, maintenir et administrer les systèmes, et pour former les étudiants et tous les formateurs. Non pas simplement en fléchant des moyens existants, mais par des moyens véritablement nouveaux.


Deux principes : généralisation et intégration

De manière générale, les projets des IUFM s'appuient sur deux principes essentiels.

Généralisation

On ne peut plus se contenter d'expériences pointues avec quelques uns, les plus enthousiastes et les plus motivés ; il est maintenant nécessaire de former TOUS les futurs enseignants à l'usage des technologies de l'information et de la communication.

Intégration

Il ne s'agit pas de considérer les technologies d'information et de communication comme une discipline de plus, mais de les intégrer dans chacune des composantes de la formation : dans chaque discipline, dans chaque modalité de formation. Plutôt que des cours sur les technologies nouvelles, il convient d'utiliser ces technologies dans la formation elle-même. Les futurs enseignants enseigneront non pas comme on leur dit de le faire, mais en reproduisant plus ou moins consciemment la manière dont ils ont eux-mêmes été formés. Par conséquent, les méthodes de formation induisent plus la future pratique professionnelle que les contenus de la formation.


Équiper et former les formateurs d'enseignants

Une telle intégration des technologies nouvelles dans la formation des enseignants pose évidemment un problème crucial : celui de la formation des formateurs ; car on ne peut se contenter de quelques formateurs spécialisés dans ce domaine : ce sont tous les formateurs d'enseignants qui devront intégrer les technologies nouvelles à leur pratique de formation. Pour cela, il faut qu'ils puissent disposer des équipements et des outils nécessaires ; il faut que l'on mette en oeuvre les actions d'information et de formation nécessaires.


L'IUFM de Grenoble : un choix politique et un projet

L'IUFM de l'académie de Grenoble a choisi de faire des TIC l'une de ses priorités. Il a élaboré à cet effet un projet, et sa mise en oeuvre est entamée depuis deux années. Ce projet s'appuie sur plusieurs axes.

1. Développer l'usage des outils bureautiques comme outils professionnels

Tout étudiant doit maîtriser les outils informatiques de base, et notamment un traitement de textes, ainsi que la manipulation des outils multimédias. On peut espérer que bientôt, ces compétences seront acquises avant l'entrée à l'IUFM. Des modules et des ateliers permettent aux étudiants de recevoir cette formation. Un "libre-service" est également disponible. Tous les stagiaires doivent réaliser leur mémoire professionnel au moyen d'un traitement de textes.

2. Développer l'usage didactique des nouvelles technologies, dans les disciplines

Dans chaque discipline, des formateurs intègrent des outils technologiques comme cédéroms, logiciels, etc. Les exemples sont nombreux : logiciels pour l'apprentissage des langues, expérimentation assistée par ordinateur dans les disciplines scientifiques expérimentales, utilisation de l'hypertexte en lettres, Cabri-Géomètre et d'autres logiciels en mathématiques, logiciels spécialisés et cédéroms en histoire, géographie, en musique, utilisation et consultation d'Internet dans plusieurs disciplines, etc.

3. Développer l'accès aux réseaux et leur utilisation

Depuis plusieurs années, existait un réseau de communication électronique interne à l'IUFM ("Quickmail"). Ce réseau a été généralisé et ouvert sur l'extérieur, et, depuis septembre 1997, chaque étudiant, chaque stagiaire, chaque personnel de l'IUFM dispose d'une adresse électronique. 3000 adresses ont ainsi été ouvertes, sur le serveur de l'IUFM (prenom.nom@grenoble.iufm.fr).

L'impact de cet outil sur la communication est intéressant à observer. Il devrait contribuer à développer le travail collaboratif (des expériences antérieures avaient été conduites, comme le suivi par courrier électronique de la préparation du mémoire par les étudiants en stage à l'étranger dans le cadre d'Erasmus).

Des accès à Internet sont disponibles dans tous les centres de l'IUFM, et commencent à être utilisés dans le cadre de la formation. Il reste à étendre le câblage à l'ensemble des bâtiments. L'IUFM a élaboré un "site web", sur lequel commencent à être disponibles des données pédagogiques pour la formation (http://www.grenoble.iufm.fr).

Une expérimentation a été mise en oeuvre pour mettre en réseau l'IUFM et les établissements de stage des étudiants. En effet, lorsqu'ils sont en stage, les étudiants de l'IUFM sont éloignés de leurs formateurs, et sont pris en charge par des conseillers pédagogiques. Une bonne articulation entre les enseignements donnés à l'IUFM et la pratique sur le terrain nécessite un travail collaboratif étroit entre les stagiaires, leurs formateurs de l'IUFM, et leurs conseillers pédagogiques du terrain. Nous avons mis en place des outils de travail à distance pour développer cette collaboration : courrier électronique, forums, mais aussi visioconférence. Cela s'est fait principalement dans deux projets importants : le projet européen "FETICHE" (Formation des Enseignants aux technologies de l'Information et de la Communication : CHangements et Evolutions), au sein du programme "EOD" de Socrates, coordonné par l'IUFM de Grenoble, et associant des partenaires finlandais, portugais, anglais, français et suisses ; et le projet "CEMAFOR", en partenariat avec France Télécom et Hewlett-Packard, qui a permis d'équiper 8 écoles, collèges et lycées pour l'accès à Internet et la visioconférence, et d'expérimenter diverses modalités de travail à distance entre l'IUFM et ces établissements. Le travail collaboratif s'est ainsi instauré entre étudiants, entre formateurs, et entre étudiants, conseillers pédagogiques et formateurs.

4. Produire des outils et des ressources ; développer des recherches sur l'intégration des nouvelles technologies

Si l'IUFM a pour mission d'intégrer les technologies de l'information et de la communication pour la totalité de ses formateurs et de ses étudiants, il doit aussi développer en son sein des activités d'innovation et de recherche. Des équipes y contribuent, et déjà plusieurs outils (logiciels, cédéroms, outils d'enseignement à distance, etc.) ont été produits par des personnels de l'IUFM de Grenoble.

5. Des partenariats

Le développement des technologies nouvelles est l'occasion de nombreux partenariats : localement, les universités et avec des collectivités locales et des entreprises ; nationalement, avec d'autres IUFM ; internationalement, notamment dans le cadre de projets européens, auxquels l'IUFM participe (FETICHE, T3, OLE, APPLAUD, ...). L'IUFM de Grenoble est notamment partenaire de la Région Rhône-Alpes dans le cadre de "contrats d'objectifs".
Dans le cadre du Forum des journées de Poitiers, l'IUFM de Grenoble a réalisé un stand présentant sa politique et ses actions dans le domaine des technologies nouvelles. Une visioconférence a permis, pendant une heure et demie, une rencontre en direct entre des participants aux journées de Poitiers, et des formateurs et étudiants de l'IUFM de Grenoble.
Table ronde 1 - 2 - 2

Les stratégies des établissements français

L'utilisation des NTE dans les écoles d'ingénieurs de la CDEFI

Bernard Heulin, Directeur de l'ECPM* (Université Louis Pasteur - Strasbourg), membre du bureau de la CDEFI

Dans le cadre de cette communication sur la stratégie développée en matière de Nouvelles Technologies d'Enseignement dans les établissements d'enseignement supérieur présentée au séminaire des 6 et 7 novembre à Poitiers, nous avons réalisé une enquête auprès des écoles d'ingénieurs du Ministère de l'Education nationale de la Recherche et de la Technologie afin de tenter de faire le point sur l'introduction et l'utilisation des NTE dans nos formations d'ingénieurs.

La CDEFI (Conférence des Directeurs d'Ecoles et Formations d'Ingénieurs) regroupe 120 écoles représentant environ 11 500 des quelque 20 500 ingénieurs diplômés en France chaque année. L'enquête présentée ici a été réalisée au mois d'octobre 1997.

Nombre d'écoles ayant répondu à l'enquête : 58

Population concernée : 26 300 élèves.

Les 58 écoles ont un réseau informatique.

57 écoles sont raccordées au réseau Internet.

L'utilisation du courrier électronique commence à être chose courante puisque :

dans 45 écoles, tous les élèves ont une adresse électronique, dans 9 écoles, de 10 à 70 % des élèves ont une adresse électronique.

Le nombre de postes informatiques à la disposition des enseignants et des étudiants est en augmentation constante. On dénombre à ce jour un total de 5 500 postes informatiques reliés à Internet :

- 2 500 sont à la disposition des enseignants,

- 3 000 sont à la disposition des étudiants,

et dans 34 % des établissements les élèves ont un accès 24h/24 aux postes informatiques.

L'utilisation des multimédias dans l'enseignement est nettement moins bien répandue puisque, si l'on trouve une structure multimédia accessible dans ou à proximité de 70 % des établissements, seulement 10 % des enseignants utilisent ces moyens pour faire leurs cours ou à l'occasion de travaux dirigés.

50 % des établissements ayant répondu ont développé des logiciels utilisés pour l'enseignement, mais seulement la moitié mettent ces logiciels en réseau interne permettant une utilisation partagée.

Les équipements de vidéoconférence sont relativement rares dans nos écoles, 20 % seulement ; leur prix élevé mais surtout le peu d'occasion d'utilisation en sont peut-être la cause.

En conclusion, nous pouvons dire que si les outils de communication via Internet sont en place dans beaucoup d'écoles, peu de logiciels ont été développés et surtout peu de réseaux thématiques ou autre fonctionnent. Beaucoup d'écoles souhaitent développer une stratégie dans ce domaine. Le séminaire de Poitiers a été sûrement l'occasion d'initier des contacts permettant dans un proche avenir la mise en place de réseaux d'enseignement regroupant enseignants et enseignés.


* ECPM : Ecole Européenne de Chimie, Polymères et Matériaux de Strasbourg.
Table ronde 1 - 2 - 3

Les stratégies des établissements français

Etude de cas : l'Université Montpellier II

Yves Escoufier, Président de l'Université Montpellier II

Je suis un peu confus que l'Université Montpellier II ait été retenue comme l'université à présenter. Je ne prétends pas que nous ayons l'expérience de tous les intervenants précédents. Nous sommes certainement un exemple au sens d'une représentation moyenne des universités françaises.

Montpellier II est une université essentiellement scientifique, une ancienne faculté de sciences maintenant UFR de sciences : deux IUT, une école d'ingénieurs, l'Isim, et un IAE. Tout ceci fait 13 500 étudiants.

Les objectifs qui sont à la base de ce qui se fait à Montpellier II et qui se fait depuis déjà longtemps, sont d'abord de banaliser l'utilisation des outils de manière à en faire des éléments naturels de la vie de l'établissement dans tous les domaines, que ce soit le dialogue externe, le dialogue interne, l'enseignement ou la recherche. Je me permets de signaler que ceci ne se fait pas sans poser des problèmes. À l'heure actuelle, par exemple, nous avons une crise sur l'utilisation de salles informatiques qui étaient partagées entre l'enseignement pour les Deug et l'accès en libre-service des étudiants. Les étudiants ont effectivement pris l'habitude d'aller dans ces salles au moment des libres accès et, résultat, cela ne fonctionne plus, tout est engorgé. Il va donc falloir trouver le moyen de nouveaux investissements ou de nouveaux matériels pour pouvoir passer ce cap, et ceci fait partie aussi de la banalisation de l'utilisation des outils.

Quelles stratégie pour atteindre ces objectifs ? D'une part, des investissements volontaristes, précédant la demande, en tout cas précédant des demandes totalement formulées, ensuite, une communication interne autour des utilisations réussies, même si elles ne sont qu'expérimentales, l'idée étant de faciliter l'accès et, chaque fois que quelque chose marche, de le faire savoir autant que possible.

Si on fait un peu d'historique sur l'utilisation de cette stratégie, et puis on va parler un peu de chiffres, depuis au moins quinze ans, l'université avait créé un LAVUM, un laboratoire audiovisuel où on utilisait les techniques de télévision, et avait créé un site sur Minitel, Unistel, qui était un site de présentation de l'université. Pour reprendre un mot qui a été dit tout à l'heure, ces choses étaient en peu des "cellules" à usage restreint, connues d'un petit nombre d'individus qui les utilisaient très bien. Mais on ne peut pas dire qu'elles aient été totalement appropriées par l'ensemble de l'université.

Dans le même esprit, depuis quinze ans maintenant, existent des salles informatiques, banalisées, laissées à la disposition des étudiants en dehors des cours. Plus récemment, un réseau sur le campus principal - ceci représentait à peu près 3 millions d'investissements en 1991 - et dans le contrat précédent de l'établissement, un équipement assez important pour le service des langues. Dans le contrat actuel, 500 000 francs annuels pour le développement du réseau (on va voir qu'on a de nombreux sites) et puis, à la fin de l'année 1996, une pression amicale sur la manière de gérer les reports qui a fait que les composantes ont toutes fait des investissements assez importants dans le domaine du multimédia.

Des exemples d'investissements : le câblage du campus principal en 1991. À l'heure actuelle, le câblage de toutes les implantations extérieures au campus principal, et elles ne sont pas un petit nombre, puisque l'IUT de Montpellier est installé à Montpellier, hors campus, mais aussi à Sète et à Béziers, l'IUT de Nîmes, la Station d'environnement littoral à Sète, l'Institut de botanique à Montpellier. Bien sûr, tous ces sites ne bénéficient pas de la même vitesse de connexion. Cela aussi fait partie des problèmes.

Des équipements en multimédias : la salle des actes, les amphithéâtres de l'UFR de sciences, la bibliothèque, la duplication, une salle visioconférence développée par l'Institut des sciences de l'ingénieur, mais qui donne déjà des idées d'utilisation, au moins dans deux domaines. Nous pensons en particulier que, pour les DEA, à sceaux multiples, il y a peut-être un usage de la vidéoconférence à faire plus intensif que ce que l'on fait à l'heure actuelle. Et, dans le cadre d'une coopération des universités du bord de la Méditerranée française, avec en particulier les universités tunisiennes, nous envisageons très fortement un développement des moyens de ce type.

Des exemples de communication interne : d'abord, nous avons bien sûr une page sur le Web. Mais, depuis un an à peu près, nous avons un site Web qui ne peut être consulté que depuis l'intérieur de l'université et sur lequel nous donnons l'ordre du jour des différents conseils de l'université, dans les 48 heures, autant qu'on le peut, le relevé des décisions et, lorsqu'ils ont été approuvés, nous y trouvons les comptes rendus des différents conseils.

Autre exemple de communication interne (c'est mon prochain transparent et le dernier), un séminaire interne qui va se tenir la semaine prochaine, le 13 novembre, qui a pour but l'information sur ce qui se fait déjà dans l'établissement. En gros, les interventions du matin sont consacrées à des outils pédagogiques et à l'enseignement à distance ; les interventions de l'après-midi concernent les réseaux et l'accès aux bases de données. Ce séminaire a été organisé par le vice-président du CEVU, Jacques Marignan qui est dans la salle. C'était une interrogation, tout à l'heure, ou un type de stratégie, pour nous, c'est le CEVU qui gère cet aspect.

Je ferai simplement remarquer quelques petites choses. Ici apparaît le CREUFOP, centre de formation permanente que nous partageons avec l'Université de Perpignan. Bien sûr, il est tout à fait concerné par ces choses-là.

Ici, on parle d'utilisation de nouvelles technologies en géologie. Il s'agit d'un collègue qui, au lieu de faire des dessins au tableau noir, fait des simulations à partir d'un micro-ordinateur et en utilisant un vidéoprojecteur, ce qui lui permet de montrer aux étudiants comment évoluent les sols en fonction des pressions qu'ils reçoivent.

Une autre chose que je voudrais montrer ici, c'est que ceci concerne l'IUT, c'est-à-dire que c'est bien tout l'établissement qui est concerné, quelles que soient les composantes.

Autre élément, dans l'après-midi, au sujet des bases données. Ici, pour la chimie, il s'agit de collègues qui, au niveau de la maîtrise, permettent aux étudiants d'accéder à des bases de données où, lorsqu'on met une formule ou une réaction, on peut avoir l'ensemble des publications passées, sorties sur cette réaction ou sur cette formule. Ceci, bien sûr, change radicalement tout ce qui concerne la rédaction de rapports bibliographiques.

Je pourrai vous dire après le 13 novembre, combien de personnels de l'établissement se sont sentis suffisamment motivés. Et peut-être que dans une autre séance, une autre année, on pourra mesurer les progrès que nous avons faits.
Table ronde 1 - 2 - 4

Les stratégies des établissements français

Etude de cas : les INSA de Rouen et de Lyon

Gilbert Touzot, Directeur de l'INSA de Rouen

Je me propose d'illustrer par deux exemples : celui de l'INSA de Rouen que je dirige, qui est une école relativement jeune, en phase de croissance, et qui a à peu près 1 000 élèves, et celui de l'INSA de Lyon qui est la plus grosse formation d'ingénieurs de France, avec environ 4 000 élèves, même si, selon des standards internationaux, elle resterait une école relativement petite. Je veux parler au nom de ces deux écoles de ce qui s'y passe dans le domaine des nouvelles technologies d'information et de formation.

Les objectifs généraux, pour nous, consistent à former des élèves à chercher de l'information, produire de l'information sous une forme moderne, multimédia, et également à utiliser, au cours de la formation en école mais aussi après dans la vie, des techniques d'autoformation. Par ailleurs nous cherchons à :

- éduquer les élèves, par une utilisation réfléchie et validée des nouveaux outils,

- répondre à une demande de l'ensemble des élèves qui est un peu diffuse ou latente, sachant que ces élèves sont issus d'une génération fascinée par l'image,

- offrir aux élèves des activités qui sollicitent leur imagination et leur créativité,

- améliorer la pédagogie traditionnelle en l'illustrant par des procédés multimédias ou des animations, en montrant des procédés industriels, des machines, des savoir-faire, des postes de travail, des situations complexes qu'on a du mal à faire entrer dans cours traditionnels,

- tester de nouvelles démarches pédagogiques,

- renforcer la communication entre les élèves et les enseignants, de différentes manières : par exemple grâce à l'autoformation associée à du tutorat, grâce à du travail collaboratif entre l'enseignant et l'élève, en particulier en créant des documents multimédias dans ce cadre,

- faire apprendre à l'élève, dès l'école, le travail coopératif de groupe, en s'appuyant sur un réseau informatique. Enfin, on a des besoins dans le domaine de la formation continue. On a des besoins de modernisation des outils et d'extension à de nouveaux publics.
La stratégie de l'établissement est la suivante : on commence par la création d'un organe de pilotage qui est une commission que nous avons baptisée "commission image-INSA", constituée à égalité d'élèves et d'enseignants. On peut faire un jeu de mots : dans Image-INSA, il y a "image INSA", il y a aussi "imagine ça". On essaie de faire vivre ces deux aspects de cette commission.

Deuxième volet de la stratégie de l'établissement, le lancement de projets qui visent à impliquer à la fois les élèves motivés (on considère qu'il y en a environ 25 %), les enseignants motivés (il y en a malheureusement un petit peu moins, de l'ordre de 10 %), d'autres établissements parce qu'on croit beaucoup à la notion de réseau de troc, d'échange de savoirs et de " matériels ", au sens anglo-saxon du terme. On veut également impliquer des anciens élèves et des industriels pour qu'ils nous apportent des documents qu'on aurait du mal à créer au sein même de l'école parce qu'appuyés sur la réalité industrielle.

Autre volet de cette stratégie : on cherche à faire évoluer des cours (travaux dirigés, travaux pratiques classiques) vers des actes pédagogiques nouveaux, en demandant aux enseignants de proposer de tels actes, à coût constant en équivalent travaux dirigés, suivant le jargon franco-français. La question qui se pose et qui a déjà été soulignée, c'est l'évaluation de ces nouveaux actes pédagogiques. Pour l'instant, on cherche encore la vérité.

Enfin, dernier point, on va graduellement essayer de généraliser ce qui marche, tout d'abord dans de nouveaux cours, ensuite dans de nouveaux départements, sachant que certains sont plus réticents que d'autres, et enfin dans de nouveaux cycles, sachant qu'il est un peu plus facile, dans nos INSA, de faire évoluer le second cycle que le premier. L'objectif, c'est d'impliquer un pourcentage croissant d'enseignants et d'élèves dans ces actes pédagogiques nouveaux.

Je vais finir par une liste de réalisations en cours. La première qui a été lancée il y a maintenant trois ans, est une manifestation dite manifestation "Image-INSA" qui a lancé tout le processus d'évolution vers les nouvelles technologies à l'INSA de Rouen. Cette manifestation est organisée par les élèves tous les deux ans - il y en a eu une en 1995 et une en 1997 - sur le thème de "l'image", au sens général du terme (l'image à travers les âges, l'image aujourd'hui et demain, les technologies de l'image), et son impact sur le métier d'ingénieur d'une part, et sur la vie de notre établissement d'autre part. Cette manifestation se déroule en deux journées : une de démonstration et de conférences techniques destinée aux élèves, anciens élèves et industriels régionaux, et une seconde destinée au grand public. Lors de la dernière manifestation, il y a eu environ 1 200 visiteurs. Cela force les élèves à se poser de vraies questions sur ce qu'apporte l'image dans la société d'aujourd'hui.

Une deuxième réalisation en cours est un projet dont le nom est Semusdi (je ne le trouve pas très esthétique), et qui signifie : serveur multimédia en sciences de l'ingénieur. Ce projet est piloté par l'INSA de Rouen mais il implique maintenant un nombre rapidement croissant d'organismes. L'objectif est la construction graduelle, évolutive d'une banque de documents multimédias en sciences de l'ingénieur et technologies, qui décrive, sous forme de documents très bruts - c'est-à-dire assez factuels pour qu'on puisse les réutiliser dans des contextes variés - des savoir-faire, des procédés industriels, des machines, des postes de travail, des concepts. Vous en aurez une démonstration à l'étage en-dessous. Il est accessible à l'adresse Internet http://semusdi.insa-rouen.fr. Le premier objectif de ce projet est d'impliquer des élèves dans la conception et la réalisation de documents, en collaboration très étroite, à égalité de droits et de devoirs, avec des ingénieurs et des enseignants.

Le second objectif est la création d'outils d'aide au développement distribué de la base. On veut que des gens de l'intérieur de notre établissement mais aussi d'organismes partenaires puissent très facilement rajouter des briques dans cette base de documents. L'utilisation de la base peut être très variée : illustration de cours, évidemment, création de didacticiels par des enseignants, à partir de documents bruts, travaux pratiques et visites virtuelles, encyclopédie technologique évolutive, base d'exemples de problèmes industriels, de démarches de solutions, support d'auto et téléformation, information des anciens élèves de l'école, dans une logique de service après-vente. Ce projet est basé sur un réseau de partenaires qui inclut aujourd'hui une quinzaine d'écoles d'ingénieurs françaises et étrangères, parmi lesquelles l'Université Laval à Québec, l'École polytechnique fédérale de Lausanne, KTH en Suède, etc., des centres techniques, des industries

Une autre réalisation est la création d'une section image-études à l'INSA de Rouen et qui va être probablement suivie d'une section analogue l'an prochain à Lyon. C'est une formation de type mineur, parallèle à la formation d'ingénieur, sur quatre ou cinq ans, qui introduit à la fois la communication par l'image et aux techniques du multimédia.

Un autre aspect est l'évolution globale de l'Ecole vers la notion de campus virtuel, c'est-à-dire l'intégration, sous forme digitale, du maximum d'informations et de connaissances de l'école pour faciliter leur diffusion, leur duplication, la télé-formation et les échanges. En ce moment, il y a une expérience dans ce sens au sein du département de mécanique de Rouen, en collaboration avec IBM.

Pour terminer les réalisations en cours, nous avons des collaborations tout à fait intéressantes avec plusieurs industriels qui consistent à impliquer des élèves et des enseignants dans des projets de création commune :

- de modules d'initiation utilisables à la fois dans l'école et dans l'industrie ;

- de descriptions de postes de travail industriels, avec illustration par des images et des schémas de principes, des animations et simulations .

Une exploration conjointe des possibilités d'autoformation dans une usine proche de Rouen et dans l'école est en cours, pour voir ce que l'Ecole et l'Industrie peuvent s'apporter mutuellement . Enfin, plusieurs projets sont consacrés à la diffusion de techniques et savoir-faire au sein d'une entreprise, ou de réseaux d'entreprises (sous-traitants de l'automobile).
Table ronde 2 - 1

Modes d'organisation et d'intervention

des politiques publiques

Royaume-Uni

Bahram Bekhradnia, Higher Education Funding Council for England

Afin de comprendre le financement des NTIC en Grande-Bretagne et également dans tous les autres pays, comme nous avons entendu notre collègue allemand, il faut connaître un peu les structures et le contexte dans lequel nous opérons. En Grande-Bretagne, le gouvernement a entièrement délégué son pouvoir en ce qui concerne la direction et la gestion financière des universités. Son seul rôle est de décider le montant total qu'il va mettre à la disposition des universités. Le gouvernement donne alors cet argent à des organismes quasi indépendants en Angleterre, en Écosse et au Pays de Galles. Ce sont ces organismes qui décident comment répartir l'argent entre les différentes universités. Je travaille pour l'un d'entre eux qui s'occupe de l'Angleterre, qui s'appelle Higher Education Funding Council for England, dont je suis le directeur de la politique générale. À notre tour, ayant calculé combien chaque université doit recevoir de subvention, généralement selon une formule de base, nous leur donnons la totalité de cet argent. Les universités deviennent seules à pouvoir décider comment le dépenser. Nous ne divisons pas cet argent entre, par exemple, les salaires pour le personnel, la bibliothèque, l'informatique, etc. En fait, nous donnons à chaque université une somme d'argent globale, somme qui s'ajoutera à ses autres revenus pour former son budget total. Ce budget sera finalement réparti entre tous les secteurs de dépenses.

Il faut préciser que je parle ici de toutes les universités de Grande-Bretagne, en comprenant l'Open University qui est la plus grande université de notre pays, avec 100 000 étudiants. Cette université offre tous ses programmes et toutes ses licences, maîtrises, baccalauréats, doctorats par enseignement à distance. Mais pour la formation de son budget, elle est traitée exactement comme toutes les autres universités. Elle a un budget considérable d'un milliard de francs.

De cette façon, bien que nous demandions aux universités de nous révéler comment elles dépensent leur argent et que nous sachions combien elles dépensent dans chaque secteur, nous n'intervenons pas, c'est leur décision. L'argent qu'elles reçoivent n'est pas destiné à des utilisations précises. Nous savons, grâce aux informations qu'elles nous fournissent, que les universités ont dépensé plus de 10 milliards de francs dans le secteur de l'informatique l'année dernière. Cela a été leur choix. À présent, deux choses apparaissent. La première, c'est qu'il est possible - et c'est le cas - d'avoir des universités avec des degrés divers d'équipement du fait qu'elles font des choix de base concernant leurs propres besoins. La seconde, c'est que l'investissement dans l'informatique fait par les universités anglaises représente une très grande partie de leurs dépenses totales, à peu près 10 %.

Est-ce que le Centre n'a aucun rôle à jouer ? Non, bien sûr. J'ai mentionné précédemment que le gouvernement donnait au Funding Council son argent. Cela a fait à peu près 40 milliards de francs l'année dernière. Avec tout cet argent à notre disposition, il semble bien surprenant que notre organisation ne détourne pas une partie de cette somme pour mettre en marche notre bonne idée. Ainsi, en principe, l'argent que nous recevons doit être directement donné aux universités pour qu'elles le dépensent comme elles l'entendent. En réalité, nous en gardons une bien petite partie. Néanmoins, une petite partie d'une grosse somme représente une somme considérable pour aider des initiatives centrales.

Ces initiatives centrales que nous prenons se divisent en deux groupes. Le premier but est d'encourager les innovations dans l'enseignement et dans la recherche. Le deuxième est d'investir dans l'infrastructure nationale. Nous contribuons donc, à partir du centre, de façon modeste mais ciblée, aux investissements des universités dans le domaine des NTIC. Afin de prendre des décisions avisées concernant les investissements, nous avons créé un Joint Information System Committee, le Jisc. Cet organisme a un budget modeste, soit 350 millions de francs par an. Il fait des investissements dans des secteurs très ciblés. De façon très significative, le Jisc met en place les réseaux académiques nationaux Janet et SuperJanet. En 1982, déjà, le prédécesseur du Jisc a fait fonctionner le Joint Academic Network (Janet) qui, bien que relativement lent, fut très innovateur à ce moment-là et surtout présent dans tout le pays. Depuis 1992, le Jisc met en place le réseau SuperJanet. C'est un réseau à bande large dont la vitesse de transmission est de 155 mégabits/seconde, permettant à l'information multimédia comme les vidéoconférences d'être transmises. SuperJanet est maintenant un réseau présent un peu partout dans les collèges et les universités de Grande-Bretagne, la plupart, avec un accès d'information très rapide. Plus récemment, le Jisc a encouragé les universités de certaines régions, surtout dans les grandes villes, avec plusieurs campus, à investir dans les réseaux Metropolitan Area Networks, afin d'encourager une collaboration entre elles et l'industrie ; et aussi afin de permettre des connexions accrues et plus rentables avec le réseau SuperJanet. La majorité de l'investissement du Jisc se fait dans le réseau et représente environ 170 millions de francs par an.

Une dernière chose à propos du réseau. Actuellement, ses services sont mis gratuitement à la disposition des utilisateurs par le Jisc. Ce qui veut dire que les universités ne paient pas directement pour utiliser le réseau. Cependant, afin de s'assurer que celles-ci vont l'utiliser de façon efficace et de créer de nouvelles ressources pour d'autres investissements, le Jisc a pour projet de faire payer les utilisateurs du réseau à partir de l'année prochaine. Toutefois, nous n'avons pas encore décidé le montant de ces frais ni ce qui est un peu compliqué du point de vue technique : comment vont-ils payer ?

La stratégie au niveau national qui a à son cur le développement du réseau, consiste toutefois en quatre points supplémentaires : le développement et la diffusion du logiciel pédagogique, le financement des services d'information électroniques, le développement des communications et de l'informatique dans l'administration, ainsi qu'un soutien pour développer les stratégies d'information à l'intérieur des universités, ce qui comprend appui et financement au niveau des conseils en gestion, sensibilisation et formation.

Je vais maintenant développer brièvement ces quatre points l'un après l'autre. Tout d'abord, l'apprentissage et l'enseignement du savoir assisté par ordinateur. Il me semble que, bien que l'EAO existe depuis longtemps, il n'ait pas encore pris toute sa mesure. Pourtant, ce potentiel existe définitivement. En 1987, le prédécesseur du Jisc a conclu un programme intitulé The Computers in Teaching Initiative qui comprenait une série de vingt-quatre centres capables de fournir des informations, une orientation et des conseils aux personnels enseignants universitaires. Le rôle de ce programme n'est pas de développer de nouveaux matériaux mais de permettre une meilleure utilisation du matériel déjà existant dans chaque matière et de conseiller le corps enseignant sur ce qui existait déjà et comment l'utiliser.

En 1993, le système universitaire a dû faire face à un problème très important d'augmentation du nombre d'étudiants alors que le nombre de professeurs diminuait. Nous avons alors décidé de nous lancer dans un programme de première importance : the Teaching and Learning Technology Programme, le TLTP, afin de développer du matériel informatique, persuadés que nous ferions gagner des économies. Je dis "persuadés" même si en réalité nous ne pouvions qu'espérer que nous allions changer les choses parce que, autant que je le sache, il n'existe pas à l'heure actuelle de preuve qui démontre que l'utilisation de l'informatique dans l'enseignement permet de faire des économies considérables. Il existe probablement des preuves concernant une amélioration au niveau de la qualité et du choix mais toujours quasiment rien concernant des économies d'argent. Nous avons dépensé, durant les quatre dernières années, à peu près 400 millions de francs, somme qui a été plus qu'égalée par les investissements des universités mêmes. Tous ensemble, nous avons dépensé environ 1 milliard de francs pendant ces quatre années. Du très bon matériel a été produit, que nous utilisons dans beaucoup de classes partout dans le pays, et que nous sommes en train de commercialiser et de vendre à travers le monde entier. Malgré tout, dans l'enquête que nous avons menée, nous ne pouvons pas affirmer que les économies que nous avions espéré ont été réalisées. Cependant, ce qui est sûr, c'est que le matériel informatisé peut jouer un véritable rôle dans l'enseignement universitaire. Bien sûr, la principale difficulté a été d'obtenir une large adhésion du personnel enseignant. Toutefois, il y a aujourd'hui des preuves que les choses sont en train de changer. Notre continuel investissement dans le TLTP est maintenant orienté non pas vers la création de nouveaux matériaux mais vers la sensibilisation, la formation et les changements culturels requis pour permettre à ces technologies d'être très largement utilisées. L'existence d'un réseau de pointe n'a d'intérêt que s'il existe des informations électroniques à transmettre.

Le troisième pilier de notre stratégie nationale a pour but de fournir des informations électroniques. Le Jisc a joué un rôle important dans l'achat centralisé du matériel électronique. D'importantes bases de données et logiciels étaient alors distribués dans les universités du Royaume-Uni à des prix très compétitifs. Le Jisc a aussi beaucoup investi dans la création de nouvelles bases de données, par exemple un centre de traitement des données pour les arts et sciences humaines qui recueille et fournit des informations électroniques de haute qualité et qui offre des conseils sur les bonnes pratiques. Le Jisc est aussi en train d'investir dans un programme pour les bibliothèques numériques. Une somme d'environ 200 millions de francs a été investie pour cela. Un élément novateur de ce programme a été l'intérêt porté à l'évaluation, en termes de résultats, pour les projets individuels, bien sûr, mais aussi des conséquences de ces projets sur la culture changeante à l'intérieur de la profession.

Le quatrième point important de notre stratégie nationale est l'investissement de sommes relativement petites dans des enquêtes qui traitent de l'utilisation de l'informatique dans la gestion des universités. C'est largement un programme de recherche et développement et les exemples de sujets traités comprennent l'utilisation des cartes à mémoire pour gérer l'administration d'étudiants et l'utilisation des caméras de surveillance à travers les réseaux locaux.

Le dernier objectif de notre stratégie nationale est d'essayer de faire comprendre aux institutions qu'elles ont besoin d'avoir une approche systématique d'apport d'informations pour faire marcher leur affaire au niveau de l'enseignement, la recherche et la gestion. Le Jisc a fait remarquer, il y a quelque temps, que l'utilisation des nouvelles communications et de l'informatique dépasse largement la capacité des communautés à les assimiler. Une évaluation du programme de la bibliothèque électronique à parlé de saturation fonctionnelle.

Il y a aussi des initiatives pour accroître la sensibilisation concernant les opportunités offertes par l'utilisation de l'informatique afin de disséminer les bonnes pratiques à l'intérieur des communautés universitaires et évaluer les risques quand elles décident de se servir des nouvelles technologies. Et, enfin, pour offrir une formation et une assistance aux personnels.

À l'avenir, nous avons l'intention de développer nos expériences selon trois approches. D'abord améliorer la compréhension des gens afin de mettre fin aux vieux préjugés envers l'usage de l'informatique. Deuxièmement, mélanger les ressources électroniques avec les ressources traditionnelles pour créer des ressources hybrides. Troisièmement, collaborer. Le caractère global des ressources électroniques fait que les mêmes problèmes se présentent dans chaque pays qui essaie de s'en servir. Il est possible ici de faire des économies d'échelle en agissant ensemble. C'est pour cette raison que je suis très content d'être parmi vous aujourd'hui.
Table ronde 2 - 2

Modes d'organisation et d'intervention

des politiques publiques

Suisse


Marino Ostini, Office fédéral de l'éducation et de la science, Berne

Dans une certaine mesure, " le cas de la Suisse " devrait s'apparenter à celui des deux autres pays à structure fédérale présents ici - le Canada et l'Allemagne. Mais j'ai l'impression que les différences sont plus importantes que les similitudes. Oui, à deux exceptions près - les Ecoles Polytechniques Fédérales de Lausanne et Zurich - les universités sont cantonales, tout comme ailleurs elles peuvent être d'une province ou d'un Land. Mais leur taille est différente, leur diversité culturelle et linguistique est autre, et les organes décisionnels qui se disputent la politique de la science et de la recherche influencent probablement autrement la gestion de l'enseignement supérieur.

Le propos ici n'est pas de faire une analyse comparative de nos systèmes éducatifs. Il n'en reste pas moins vrai que la façon dont un système fonctionne influence passablement l'organisation, aussi en matière de technologies de l'information.

Par ailleurs, la Suisse se trouve à mon avis sur deux points au moins dans une situation comparable à celle de tous les pays industrialisés. D'une part, on constate une préoccupation récurrente sur le thème des " nouvelles technologies " : avant-hier c'était l'audiovisuel, hier c'était la micro-informatique, aujourd'hui c'est la télématique et le multimédia, sous la pression technologique exponentielle d'Internet.

D'autre part, on constate une absence récurrente des politiques institutionnelles en matière de pédagogie de l'enseignement supérieur, pourtant condition sine qua non pour la réussite d'une mue efficace et efficiente des actes d'enseigner et d'apprendre. Tout n'est pas échec, mais les déperditions ont été souvent importantes.

Nous ne sommes pas là non plus pour dresser un bilan historique de l'évolution des nouvelles technologies de l'information (NTI) dans l'enseignement supérieur, ni pour parler de pédagogie universitaire. Je me limiterai donc à vous fournir - en quatre tableaux - un portrait de la situation en Suisse depuis cinq ans. En essayant évidemment de mettre en évidence les modes d'organisation et d'intervention des pouvoirs publics.

Au passage, j'aimerais exprimer ici ma gratitude au Ministère français de l'Education nationale, de la recherche et de la technologie de nous permettre de partager avec vous notre modeste expérience. Je le fais d'autant plus volontiers que cela s'insère tout à fait logiquement dans le cadre de la coopération bilatérale franco-suisse dans le domaine scientifique et technique.

La présentation des quatre tableaux se veut un essai d'analyse du processus de décision au niveau

· du local et régional

· des établissements universitaires (ou plutôt de leurs instances " faîtières ")

· d'un " ministère "

· d'un " conseil des ministres "

Qu'il soit mentionné en passant que l'OCDE, dans son étude de 1995 sur les processus de décision dans 14 systèmes éducatifs, dit ceci à propos de la Suisse : " Aucune modification sensible depuis 1970, donc pas de transferts de compétences vers le bas. Difficile, voire impossible, de décentraliser davantage. Comparés à d'autres pays, les établissements ont peu, ou moins, de compétences en matière de décision. Aucun indice ne permet de penser que la situation changera dans les années à venir. " Toutefois, l'OCDE prédit une exception pour le supérieur, en raison de la pression exercée par la reconnaissance intercantonale et internationale des diplômes : " une certaine réorientation des prises de décision vers le haut pourraient éventuellement se produire [entraînant] une augmentation du pouvoir de décision des instances de la Confédération ".
Premier tableau: La politique valaisanne

Le cas du ZUF (Zentrum für universitäre Fernstudien)

Les étapes de l'intervention des autorités

Les modes d'organisation institutionnelle

· Le modèle allemand

· La collaboration internationale

· L'extension francophone

Les enjeux de l'accrédition : le poids du présentiel

Evaluations internes et externes : vers une reconnaissance formelle ?

Il y a cinq ans, dans un paysage universitaire sans tradition en matière de formation à distance (FAD), un Centre régional a été constitué sur le modèle en réseau de l'Université allemande de Hagen. L'initiative en revient à un canton bilingue - le Valais - qui, ne disposant pas d'université propre, essaie de se doter d'un réseau d'établissements d'enseignement supérieur.

C'est donc sur la base d'un modèle universitaire allemand que ce Centre est créé en 1992 dans la partie germanophone du Valais. Cette initiative locale et régionale reçoit le soutien de la Confédération dans le cadre de la promotion de la coopération internationale bilatérale. Deux ans plus tard, force est de constater que la question de la reconnaissance du Centre suscite de nombreuses discussions. Ce qui est positif c'est que certains parlementaires, commençant à saisir les enjeux d'un renouveau du paysage universitaire suisse, déposent une motion en faveur de mesures spéciales pour la FAD dans la loi d'aide aux universités. Ce qui est tout aussi positif, c'est l'ouverture d'un deuxième centre dans une autre région germanophone suisse, toujours sur le modèle de Hagen. Moins réjouissant, mais néanmoins compréhensible, c'est le refus par la Conférence universitaire suisse de reconnaître le Centre comme institution susceptible de recevoir des subsides fédérales. Sur la base des accords bilatéraux entre l'Allemagne et la Suisse, le principe de base de la reconnaissance mutuelle des diplômes est quand même acquis.

La même année commence pour le Centre une période très active en matière de coopération internationale. Grâce à son statut de membre suisse du réseau européen des universités à distance (EADTU), le Centre participe à des projets de R&D de l'Union européenne dans le domaine de la FAD et des nouvelles technologies de l'information.

En 1996, la coopération internationale se renforce et se diversifie avec la création de l'extension francophone (CRED - Centre romand d'enseignement à distance). Des conventions sont signées avec les universités françaises de Franche-Comté, Bourgogne, Grenoble, Paris VIII et le CNED, ainsi qu'avec la Télé-Université du Québec.

Le bilan semble globalement positif, mais le poids du présentiel dans les universités est tel que la reconnaissance officielle tarde à venir. Nous en sommes à la quatrième évaluation, de loin la plus sérieuse, mais...quelle université en Suisse est évaluée avec une telle précision? Suite à l'évaluation de la Conférence universitaire suisse (CUS) en 1994, il y a eu un avis du Conseil suisse de la science (CSS) en 1995, une évaluation d'experts par les autorités valaisannes elles-mêmes en 1996 et maintenant court celle commanditée par - vous diriez - le ministère de co-tutelle, en l'occurrence le Département de l'Intérieur. Cette évaluation - dont le rapport est attendu en décembre - porte sur

· les structures et les activités

· les étudiants et la perception dans le grand public

· le tutorat et l'encadrement

· la collaboration avec les universités présentielles.

Partout, le bilan est globalement bon, sauf dans la collaboration avec les universités, où on en reste à des collaborations ponctuelles et personnelles. Et pour la reconnaissance formelle, tout reste ouvert, avec trois pistes à explorer : l'émergence d'une université valaisanne - à l'instar de l'Université de la suisse italienne créée l'année dernière - ou alors, plus réalistes, les pistes du status quo comme établissement " étranger " ou de la reconnaissance comme centre de compétences en matière de FAD, dans le cadre d'un réseau universitaire suisse encore à créer.
Deuxième tableau: La politique des établissements universitaires

Le cas de la conférence universitaire suisse (CUS)

Impact des mesures spéciales en faveur de la formation continue

Le poids des interventions parlementaires

Le cadre juridique pour la promotion de la science et de la recherche

Le travail des experts :

· Premières recommandations

· Création d'un site national sur Internet

· Planification stratégique 2000 - 2003

Création d'un campus virtuel national : horizon 2006

Confrontée à l'apparition de cette entité institutionnelle " hors norme " que représentait le Centre valaisan de formation à distance, la CUS se devait d'agir. Comment l'a-t-elle fait ? Il n'est pas inutile de rappeler ici qu'au début des années 90, les universités avaient déjà été invitées à " expérimenter " la FAD dans le cadre des mesures spéciales en faveur de la formation continue. N'étant pas contraignante, cette invitation n'a pas suscité de vocations particulières... Si par la suite, certains parlementaires s'agitent et présentent une initiative en faveur de la FAD et des nouvelles technologies dans l'enseignement supérieur, la " loi " d'aide aux universités (Message 96-99 pour la promotion de la science et de la recherche) qu'il voteront par la suite en 1995 ne prévoit aucune ressource particulière dans ce domaine. On en reste au stade des intentions.

En 1995, la Commission de planification de la CUS confie à un groupe d'experts la tâche de formuler des recommandations pour le développement concerté de la FAD dans les universités. L'objectif était aussi, au préalable, de faire l'inventaire et l'analyse de l'existant et d'identifier les problèmes majeurs (pour la petite histoire, un premier bilan avait déjà été fait en 1990, mais par le ministère de tutelle ...). En bref, voici les recommandations émises un an plus tard par les experts :

· créer des centres d'échange et d'appui

· créer des centres d'innovation pédagogique

· soutenir des expériences pilotes

· évaluer les expériences en cours

· inciter à la collaboration inter-institutionnelle

· renforcer la coopération internationale

Dans les discussions qui ont suivi dans les cercles décisionnels, il a également été question d'accord entre les universités sur les contenus à traiter en commun, d'introduction généralisée d'un système de crédits, d'une convention pour la reconnaissance des cours, voire des compétences acquises. Ajoutons qu'au niveau de la Direction des Ecoles Polytechniques on a insisté sur la notion de partenariat et de partage entre le centre et la périphérie, entre secteurs public et privé, pour éviter de faux espoirs d'un état central seul responsable des développements à venir. Les parlementaires qui se sont exprimés ont rappelé l'importance de la notion d'équité (d'accès, etc.) et de l'élargissement des réflexions à la formation continuée tout au long de la vie.

Entre temps, un nouveau rapport d'experts (quasiment la même composition, mais avec un nom accentuant les NTI au " détriment " de la FAD) a été déposé, reprenant pour l'essentiel les recommandations contenues dans le premier rapport, et en ajoutant une idée forte nouvelle: celle de la création d'un campus virtuel suisse. Entre temps, un site national Web a été créé pour inciter les universités à une mise en commun d'expériences éparses, mais aussi pour les préparer à mettre en oeuvre leurs propres recommandations stratégiques pour la période de planification 2000-2003. Parmi les idées fortes nouvelles il y a lieu de mentionner - outre la création souhaitée d'un campus virtuel national - la prise en compte de l'ensemble du paysage de l'enseignement supérieur, donc englobant les universités, les écoles polytechniques et les nouvelles hautes écoles spécialisées. Et cette fois-ci il faut souhaiter que les ressources financières et humaines recommandées par les experts seront accordées par les décideurs politiques.


Troisième tableau: La politique du Département fédéral de l'intérieur

Le cas de la reconnaissance

Mission sur la virtualité et ses conséquences :

· Reconnaissance des institutions

· Reconnaissance des formations

· Reconnaissance des compétences

L'impact de la diversification et de l'internationalisation

Convergences et divergences : quelles nouvelles bases juridiques ?

Il est évident que le " Ministère " de tutelle que représente le Département fédéral de l'intérieur est également partie prenante dans les deux " tableaux " précédents. Mais il est un dossier qui a fait l'objet cette année d'une attention particulière, celui de la reconnaissance. Ce qui a donné lieu à une véritable mission de reconnaissance sur l'impact de la virtualité sur l'enseignement supérieur.

Au départ, l'urgence a été créée par le problème de la reconnaissance institutionnelle du Centre valaisan d'enseignement à distance. Mais finalement le mandat a été élargi, formulé de façon plus large :

a) Identifier et élaborer des conditions-cadre pour une future institutionnalisation des compétences acquises par des cours virtuels ;

b) établir les conditions de base pour une réforme curriculaire prenant en compte les avantages et les inconvénients de la virtualité.

Mission ambitieuse, qui a en partie échoué, en tout cas pour ce qui est du deuxième point. Mais cela a permis de mettre en route une réflexion sur les trois niveaux de reconnaissance : institution, formations, compétences. 8 personnes ont travaillé à ce sujet sur 6 mois, la situation dans 8 pays a été examinée et 8 recommandations ont été émises.

Dans un premier temps, trois recommandations semblaient être retenues par les décideurs politiques :

· la généralisation de l'application du système ECTS (European Credit Transfer System) à la FAD ;

· la poursuite de l'étude des modifications nécessaires des lois existantes ou la création de nouvelles bases légales pour la reconnaissance équitable des formations virtuelles ;

· l'insertion de mesures spéciales en faveur de l'intégration des NTI dans le plan 2000-2003 pour la promotion de la science et de la recherche.

Actuellement, face aux problèmes financiers de l'enseignement supérieur, tout reste hypothétique. Mais la diversification de cet enseignement et son internationalisation demandent que la reconnaissance fasse partie de toute mesure d'intégration des NTI.


Quatrième tableau: La politique du Conseil fédéral

Le cas de la société de l'information

Comment s'y préparer ?

Secteurs examinés :

· Economie

· Droit


· Administration publique et citoyenneté

· Culture et médias

· Education

L'éducation dans le cadre du plan national d'action

C'est sous l'impulsion des G-7 que furent lancés en 1995 une dizaine de projets pilotes dans autant de domaines touchés de près par l'avènement de la société de l'information. Sans être membre, la Suisse a pu s'y associer et s'est dotée d'une unité opérationnelle G-7. Un an plus tard, le " Conseil des ministres " a impliqué cette unité dans l'élaboration d'un mandat d'experts extérieurs à l'Administration fédérale, afin d'aider la Suisse à se préparer à la mue promise par les autoroutes de l'information.

Le rapport a été livré en été 1997, prévoyant pour le secteur de l'éducation et de la formation une offensive majeure englobant tous les niveaux, du primaire à l'éducation des adultes, en passant par le supérieur. Les mesures proposées

· créer des conditions adéquates (organisation et planification) pour une promotion ciblée des NTI à tous les niveaux de formation ;

· préparer une infrastructure moderne de NTI à tous les niveaux de formation ;

· concrétiser les stratégies de développement et la coordination à tous les niveaux

convergent vers une action " interministérielle " et intersectorielle qui, aux dires des experts, se doivent d'être la base du développement à long terme dans tous les autres secteurs. Scolarité obligatoire, formation professionnelle, enseignement supérieur seront tous touchés par les actions qui seront promues...encore une fois, si les décideurs politiques sauront mesurer les défis à venir. Même si l'enseignement supérieur n'est concerné qu'en partie, il devra se plier aux exigences d'une planification à long terme et comprendre le contexte global dans lequel les changements vont s'opérer.

Deux conclusions brèves à cette présentation de la situation en Suisse. L'une se veut réaliste, la deuxième pragmatique. D'une part, il faut savoir qu'à l'heure actuelle aucune décision politique définitive n'a été prise au sujet d'aucun des quatre " tableaux ". D'autre part, il faut rappeler qu'aucun plan global de politique de l'éducation sur l'intégration des NTI n'aura véritablement de succès s'il n'est pas lié aux politiques de R&D, de l'emploi et de coopération internationale en la matière. L'isolement n'apporte rien et les opérateurs sur ces terrains semblent l'avoir compris.


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