Les effets des systèmes et des outils multimédias sur la cognition, l’apprentissage et l’enseignement



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Les modèles constructionnistes


À la différence des modèles instructionnistes qui sont centrés sur l’enseignant (teacher-centered model), les modèles constructionnistes sont centrés sur l’apprenant (learner-centered model, Webb & Palincsar, 1996, cité par Lehtinen, 1998). Le terme “ construct ” signifie construire quelque chose en assemblant et en combinant des éléments. Le terme “ construction ” désigne l’activité et le processus de construction (American Heritage College Dictionnary, 1993, p. 299, cité par Hannafin, Hannafin, Land & Oliver, 1997). Le design constructiviste a pour but de créer des configurations d’apprentissage qui puissent rendre les individus capables de s’engager dans le travail coopératif en vue de (co)construire, d’organiser et de structurer les connaissances. Les deux grandes approches qui constituent le paradigme constructiviste ont inspiré deux grandes catégories de modèles d’apprentissage coopératif. La première, d’inspiration piagétienne, a donné lieu par exemple, au modèle d’enseignement réciproque (reciprocal teaching model, Palincsar & Brown, 1984). L’apprentissage coopératif par enseignement réciproque est une méthode d’apprentissage des capacités (skills) de compréhension en lecture. Selon cette méthode, les élèves apprennent à se poser entre eux des questions pertinentes sur le texte qu’ils lisent de façon à se centrer sur les composants les plus importants du texte et à construire la signification globale du texte (voir Järvelä, 1996 ; Lehtinen, 1998).

Dans la seconde catégorie de modèles, les partenaires de l’apprentissage coopératif sont plus que des partenaires, ils sont des constituants contextuels du processus d’apprentissage. Selon Slavin (1997), ce sont les approfondissements théoriques que cette conception nécessite qui ont permis de concevoir les designs constructionnistes et de rendre opérationnalisables les environnements technologiques qu’ils inspirent. Ces enrichissements théoriques ont rendu possible le passage de la recherche sur l’apprentissage coopératif à la recherche collaborative sur la construction des connaissances (Roschelle & Teasley, 1995 ; voir Lehtinen, 1998).

Soutenir que la construction des connaissances dépend du contexte ne suffit pas pour conceptualiser les designs constructionnistes, c’est-à-dire les situations d’apprentissage ancrées dans le réel. Le contexte n’est pas seulement un “ habillage ” artificielle des processus de traitement que l’on veut mettre en place et développer, il doit être théorisé dans la mesure où il est constitutif de ces processus. La métaphore du rhizome inspirée par Eco (“ mind as rhizome ”, 1984), reprise par Duffy et Cunningham (1993) assimile les connaissances à un ensemble de racines, de tiges et de fibres entremêlés qui s’oppose à toute idées de structure, de hiérarchie, d’ordre, de nœud et de noyau. De plus, le rhizome n’a pas d’extérieur, ni d’intérieur, il est un réseau ouvert qui peut être connecté à d’autres réseaux dans toutes ses dimensions. Si l’on file la métaphore, le fonctionnement de l’esprit (à la fois “ mind ” et “ brain ) de l’individu humain, conçu comme système de traitement de l’information, ne peut s’envisager que comme une partie de l’esprit collectif distribué dans les contextes sociaux, culturels, historiques et institutionnels. Wertsch (1985), à partir des travaux de Vygotski en particulier, conçoit ainsi l’esprit comme un système cognitif connecté non seulement aux membres des communautés culturelles et linguistiques, mais aussi aux milieux socioculturels d’appartenance de l’apprenant caractérisés par des outils comme les ordinateurs, la télévision etc. et des systèmes sémiotiques propres à chaque domaine du monde. La pensée n’est donc pas une activité qui se situe dans la tête de l’individu, mais plutôt dans les connections et les interactions entre, d’une part, les individus humains et, d’autre part, les objets du monde qui constituent ainsi des outils cognitifs d’aide à la construction des connaissances.

Les designs constructionnistes sont divers. Ils s’appuient sur et renvoient à des courants pédagogiques qui inspirent les environnements d’apprentissage : les environnements d’apprentissage ouverts (open-ended learning environments) (Land & Hannafin, 1996), les micromondes et l’enseignement ancré sur la réalité (anchored instruction, Cognition and Technology Group, 1992), l’apprentissage basé sur les problèmes (problem-based learning, Savery & Duffy, 1995), les scénarios pédagogiques basés sur des buts (goal-based scenarios, Shank & Cleary, 1995) ou sur des théories psychologiques comme l’apprentissage situé (Brown, Collins & Duguid, 1989), ou la cognition socialement partagée (Resnick, Levine & Teasley, 1991). Les environnements inspirés de ces designs que Jonassen (Jonassen & Land, 1999 ; Jonassen & Murphy, 1999) dénomme les environnements d’apprentissage constructiviste (Constructivist Learning Environments : cles) diffèrent complètement des environnements inspirés par les designs instructionnistes. Ils incluent tous dans leur conceptualisation une “ théorie de l’action ” inspirée de Vygotski, Leontiev et Luria, mais qui s’appuie sur les fondements théoriques de la philosophie classique allemande (Kant et Hegel) et qui résulte de l’interaction entre l’activité et la pensée. Chacune des deux composantes ne peut s’analyser que dans le contexte où elle opère (Tessmer & Richey, 1997). Jonassen et Murphy (1999) ont proposé une analyse qui permet de décrire les différentes composantes du système inspiré par la théorie de l’activité dans lesquels sont inclus les différents types d’activité (activité, action, opération), les buts et les intentions des participants (motivation, but, condition), les objets et les produits de ces activités, les lois, les normes et les contraintes du contexte général et particulier dans lesquels s’inscrit toute activité humaine.

Cette théorisation du design instructionnel conduit à réanalyser toutes les composantes qui interviennent interactivement dans toutes les activités d’apprentissage. L’analyse de cette interaction n’est pas simple. Elle oblige, par exemple, à réinterroger et à remettre en lumière certaines préoccupations théoriques qui ont fait l’objet de nombreux travaux depuis Gibson (1979) sur l’affordance. Les objets de l’activité affectent la nature de l’activité qui affecte les objets dans une relation dynamique. Selon Jonassen et Murphy (1999), l’utilisation de la théorie de l’action permet de réanalyser les situations et les différents composants du monde réel, et, ainsi, de les intégrer dans la conception des environnements d’apprentissage constructiviste (cles) (Nardi, 1996). De plus, ces différents composants du monde réel constituent autant de facteurs “ qu’il faut être capable d’intégrer dans les plans d’analyse des données, de façon à évaluer la pertinence des modèles et des environnements qu’ils inspirent ” (Jonassen & Murphy, 1999, p. 78). Si la méthode expérimentale classique a encore sa place dans l’analyse de protocoles fondés sur ces designs (Corbett, Koedinger & Anderson, 1999), Kozma (2000), après Richey (1998), propose des méthodologies de recherche alternatives à la recherche expérimentale classique qui tiennent compte de la multiplicité des facteurs inclus dans les designs instructionnistes.

Dans ce cadre, et contrairement aux conceptions du paradigme cognitiviste, la pensée ne se réduit pas à un ensemble d’activités discrètes et désincarnées comme la prise de décision, la catégorisation ou la mémorisation, mais plutôt comme un processus global qui unifie l’attention, l’intention, le raisonnement, la mémoire et le langage. La pensée étant dans la pratique, elle est contenue dans des matrices sociales composées des membres du groupe et des artefacts (outils techniques et systèmes sémiotiques intégrés dans les pratiques sociales) (Nardi, 1996).

Pour analyser le fonctionnement de la pensée ou pour intervenir sur les mécanismes qui la composent, il est donc nécessaire d’analyser les contextes qui les définissent et même qui les constituent afin de pouvoir concevoir des outils et des systèmes sémiotiques d’aide à la médiation entre les composants des interactions. De nombreux environnements d’aide qui appartiennent au design constructionniste sont ainsi conçus comme des outils de médiation.


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