Pierre Hérant, Le Passage (21/08/07)
RENOVATION DE LA GAUCHE ET TERRITOIRES
Notre monde fait face à des enjeux colossaux et le Parti Socialiste vit des moments difficiles. Ces modestes propos ont pour objectif de contribuer à la rénovation de la Gauche à partir d’une lecture territoriale.
La mondialisation et les évolutions de notre société
La mondialisation
La mondialisation a entraîné une convergence des niveaux de vie et a renforcé le potentiel de croissance de l’économie mondiale. Depuis 1975, à l’exception notable de l’Afrique, les nouveaux dragons asiatiques, les pays du golfe soutenus par la manne pétrolière, les pays sud-américains débarrassés de leurs dictatures et de leur inflation, et bien sûr la Chine et l’Inde en sont des exemples indiscutables.
Les développements techniques et économiques qu'ont connus les nations occidentales ont produit des bienfaits qui continuent de s'accroître. La France reste un pays riche et prospère, sixième puissance économique mondiale, quatrième exportateur mondial, avec un niveau de vie qui est l’un des plus élevés au monde. Par ailleurs, cette société portée par l’économie a renforcé l’individualisme et les développements de cet individualisme ont produit des bienfaits en termes de gain d'autonomie pour chacun et de renforcement de la responsabilité personnelle.
La mondialisation génère également son lot de malheurs : Sida, marée noire, perte d'identité... La situation moyenne sur Terre s'améliore, mais les écarts entre nations et les individus se creusent.
A ce sujet, Edgar Morin écrit : "La mondialisation a bouleversé de fond en comble la notion du progrès. Au XVIIIe siècle, il allait de soi chez les esprits éclairés que le progrès des sciences et des techniques n'était pas une fin en soi mais qu'il était englobé dans un projet de civilisation plus vaste. La finalité, c'était de rendre les humains plus libres et plus heureux, d'émanciper les individus de la superstition et de l'obscurantisme mais aussi de la tyrannie de la nature. Mais le progrès a changé de sens avec la globalisation. Aujourd'hui, on progresse tous les jours. Nos portables, nos voitures, etc., progressent … mais ils le font hors de tout projet. Ils progressent parce que ceux qui les fabriquent sont condamnés à progresser. Nous sommes prisonniers d'une logique de la performance économique : si je ne progresse pas, je disparais…"
La mondialisation est-elle seule en cause ?
Non, répond Daniel Cohen dans son ouvrage «Trois leçons sur la société post-industrielle", d’autres ruptures externes peuvent expliquer notre situation :
L’avènement de la troisième révolution industrielle (après la machine à vapeur et l’électricité) : les TIC, Technologies de l’Information et de la Communication ouvrent des champs de possibilités de gestion de l’information débordants.
Le capitalisme a généré une autre organisation du travail car la valeur du travail a augmenté. S’appuyant sur les TIC, aujourd'hui, en effet, dans les entreprises la règle est à l'adaptabilité, la réactivité et l'optimisation des coûts en supprimant les temps morts et en sous-traitant tout ce qui peut l'être.
La prise de pouvoir de la Bourse dans le management des entreprises à partir des années 80 : l'actionnaire couvre ses risques et les reporte sur le salarié. Les structures financières avec l'épargne accumulée sont en mesure de contrôler, à la fois, la direction des marchés et la stratégie des entreprises.
Mai 68, date symbolique où la société hiérarchique a été contestée et où la jeunesse a émergé comme force sociale autonome.
La mondialisation et ses ruptures associées ont donc profondément changé notre société et ce, dans une logique que l’on pourrait qualifier de «rentabilité-efficacité-autonomie". Et bien évidemment, cette logique que l'on applique sur nos vies dégrade les solidarités et accentue le mal-être dans nos sociétés.
De nouvelles inégalités…
En France, de plus en plus de personnes sont en difficultés et la classe moyenne se sent en voie de déclassement. Une vraie coupure s’installe entre la France qui envisage son avenir et celui de ses enfants avec confiance, et puis, l'autre, une France privée d'espérance : tous ceux qui se disent "mes enfants vont galérer" (collèges difficiles, quartiers dégradés, logements chers, petits jobs).
Pour Thomas Piketty, économiste "Le problème social n'est pas tant que toutes les inégalités croissent, c'est qu'elles deviennent moins visibles. L'éducation est le bon exemple : chacun croit pouvoir aujourd'hui accéder aux études supérieures mais en réalité non, car les enfants moins favorisés se heurtent à des montagnes de difficultés insidieuses, et cette barrière concrète provoque des frustrations terribles". Les classes sociales ne sont plus déterminantes ; pour l’emploi par exemple, viennent s’y superposer le degré d’exposition de l’entreprise à la concurrence et le statut du salarié (précaire, protégé, compétitif). Ces inégalités sont encore plus mal acceptées que les inégalités entre catégories sociales, en raison d'un coté aléatoire qui les fait apparaître sans fondement (accident de la vie, destin de l'entreprise…), et en raison de la place prise par les discriminations (lieu d’habitation - banlieue, pays d’origine, sexe…)
Ces inégalités génèrent une aspiration à l’égalité qui heurte de plein fouet la liberté, condition première du "marché". Ainsi la question des inégalités submerge la question de la Nation et de sa cohésion : qui trouvera place dans cette société et qui restera sur le quai ?
La réponse à cette question n’est-elle pas moins liée à la mondialisation et à ses ruptures associées qu’aux défaillances de notre compromis social collectif (arbitrages tacites au détriment des jeunes ou en faveur de la précarisation, par exemple) ?
Face à ces difficultés et face à ces questions, la gauche doit décliner sa vision, sa cible et affirmer sa différence à l’aide de son marqueur : la lutte contre les inégalités.
Une vision, une cible
Notre objectif premier en tant que citoyen de la planète doit être simple : quel monde voulons-nous laisser à nos enfants et aux enfants de nos enfants ? Nos réponses à ce monde commun s’appuient donc sur nos devoirs envers les générations futures. Pour cela, il nous faut conjuguer :
Une politique de création de valeur économique afin d’éradiquer la pauvreté,
Une politique de civilisation, qui ressuscite les solidarités et fait avancer l’émancipation des peuples et des individus,
Une politique de la qualité de la vie qui combat les multiples dégradations de l'environnement, de la nourriture et de la santé.
La mondialisation et la création de valeur économique
Par crainte d'ajouter à la flexibilité du travail, la Gauche a souvent préféré conserver l'existant (retraite à 60 ans, contrainte sur les licenciements) ou partager le "gâteau" (mise en œuvre des 35 heures) dans l'espoir à chaque fois que ces mesures résorbent le chômage...
Or une politique de Gauche doit se préoccuper autant de la production des richesses que de leur distribution. Considérant, de plus, que la France est l'un des principaux pays bénéficiaires de la mondialisation : 26% de son PIB viennent de ses échanges extérieurs, soit le double des Etats-Unis ; les investisseurs étrangers sont à l'origine de 45% des exportations française, (source "N'enterrez pas la France", Jean-Pierre Jouyet - Philippe Mabille), nous devons donc résolument accepter la mondialisation.
Notre économie doit être basée sur le développement durable et sur plus de solidarité. Elle doit permettre à notre société d’être, à la fois, une société de la connaissance à rayonnement mondial et aussi une société de services à enjeu local.
Son développement passe par la croissance, la relance ne viendra essentiellement que de projets d'investissement européen, l'Europe n'ayant pas de dettes. L'Europe, évidemment...
L’Europe encore… Un marché mondial important s’ouvre avec le développement durable, or nous possédons en Europe des compétences pointues dans les domaines de l’énergie, de la gestion de l’eau, de la construction. La constitution de grands groupes à dominante européenne de type Airbus, mariant notamment leur savoir-faire et leur puissance de recherche, serait un atout considérable. Ensuite, une concentration des efforts sur les PME est vitale, ce sont elles qui, aujourd'hui, créent les emplois. Enfin le secteur solidaire (coopératives et mutuelles de production et/ou consommation, commerce équitable, épargne solidaire finançant des projets de proximité…) permet de donner une dimension plurielle à notre économie et pondérer ainsi les effets pervers du capitalisme.
La gauche a un marqueur simple : réduire les inégalités sociales.
La montée des inégalités et du sentiment d’inégalité est au cœur des préoccupations des Français, la Gauche possède historiquement la légitimité de la justice sociale. La Gauche doit donc affirmer son marqueur: réduire les inégalités sociales. Un nouveau modèle social lié à ces attentes est à bâtir ; pour ce faire, il lui faut adapter ses instruments en autonomisant les services publics et en privilégiant l'approche aux personnes par les territoires.
Une politique centrée sur ces objectifs devra inventer un pilotage nouveau des moyens de l'action publique accentuant, d’une part, l’indépendance du fonctionnement des services publics (collectivités territoriales, éducation, université, entreprises de service public…) et, d’autre part, l’évaluation de leurs missions au regard de critères partagés par tous les acteurs. La question de la place du Service public est centrale et ne doit pas simplement porter sur leur mode de gestion, mais aussi sur leur périmètre même. Il y a des produits collectifs, comme l’énergie, qui en ont moins besoin, alors qu'il faut inventer de nouveaux services publics, pour la formation et le logement.
Privilégier l’aide aux personnes par les territoires
L’aide aux personnes…
Les politiques de redistribution sont essentiellement de nature compensatrice, elles se révèlent incapables de prévenir le creusement des disparités. Elles étaient certainement adaptées à une société de plein-emploi avec des carrières continues et largement sécurisées ; elles le sont beaucoup moins dans un monde où les parcours sont plus accidentés (emploi, famille, logement), plus individualisés, et les ressources publiques plus rares. De plus, pour l’éducation, un certain niveau de formation de base s’est universalisé, il est maintenant nécessaire d’aller plus loin et d’inventer des politiques permettant de réduire les handicaps personnels.
Une politique de l'égalité doit donc aussi donner à chacun les moyens de se lancer ou de se relancer correctement dans la vie. Elle doit s'efforcer d'agir sur les processus de construction de soi ou de restauration de ses capacités. Il s’agit de reconnaître l’approche individuelle comme la plus efficiente.
Avec une priorité donnée à l’Education et à l’invention de nouveaux mécanismes d'assurance face au chômage. Par exemple, dans le domaine de l’éducation, des actions préférentielles sont à mettre en œuvre dès le plus jeune âge et dès les premiers cycles scolaires ; dans le domaine de l’emploi, il s’agit de renforcer le soutien actif personnalisé à chacun, l’accès à la formation par le droit et par la validation des acquis, et l’indemnisation dans un système gagnant / gagnant ; le tout avec une unicité de pilotage au niveau territorial.
Cette approche gagnant/gagnant est aujourd'hui nécessaire pour construire une société de citoyens responsables et non pas une société de consommateurs. Le devoir, le mérite, la fidélité aux engagements ou le partage doivent habiter ou ré habiter nos politiques. Autrement dit, il s’agirait de passer d’un système de prestations hyper-spécialisées à une logique d’accompagnement plus individualisé et sous-tendu par la culture du résultat.
Par les territoires
Les villes et les territoires sont au cœur de ces défis, ils sont aussi les mieux à même d'y trouver des réponses. Dans un contexte de mondialisation, tous les problèmes qui se posent au niveau global se posent aussi au niveau local. C'est à partir des territoires que l'on peut comprendre, tisser des relations et inventer des modèles de développement durable : le territoire comme brique de base de la gouvernance de demain.
De plus, l’évolution de notre société a conduit à ce que l’entreprise perde son rôle central de socialisation. C’est désormais dans l’espace de vie que se marquent les appartenances et les distinctions, et essentiellement dans la ville à la faveur de stratégies résidentielles favorisant l’entre soi et le meilleur contexte éducatif. Cette dimension de la ville est vitale pour éviter une alliance potentiellement explosive entre le religieux et le social.
Pour ce faire plusieurs réformes sont nécessaires dans la gestion actuelle de nos villes et de nos territoires. Tout d’abord, prolonger les voies de la contractualisation par territoire (sous pilotage territorial) et lutter contre la segmentation :
en séparant clairement les compétences entre les niveaux de gouvernance (Etat, Région, Département, Agglomération, Commune) afin d’éviter les redondances et les pertes d’énergies. Par exemple, les départements sont responsables des routes, la Région des transports ferrés régionaux, les agglomérations des transports collectifs urbains, ce qui ne peut être idéal pour construire une politique cohérente de transports ! Pour la prévention de la délinquance, l’Etat propose des moyens (adultes relais) directement aux villes alors qu’il devrait fixer des résultats attendus et laisser les territoires définir les bons leviers à actionner !
En adoptant une approche contractuelle transversale qui permette de traiter ensemble, l'habitat, les transports, l'environnement, l'agriculture, le développement économique…
Cette approche territoriale permet de construire des solutions sur mesure au plus près des préoccupations. Dans le domaine social, les politiques concernent les compétences de l’Etat, des régions, des départements, des communes et des organismes de sécurité sociale ; chacun ne disposant que d’une partie d’un levier, voilà des dispositifs complexes fortement cloisonnés ! Ce qui a été créé pour l’emploi avec les "Maisons de l’emploi" doit l’être pour le social ("Maison de la fraternité") ; le secteur associatif très actif sur tous les territoires doit être parti prenante des ces organisations. D’une manière générale, et afin de créer de la valeur au territoire (économique et de solidarité), il s’agit de faire émerger l’intelligence collective d’un territoire, en mettant en œuvre un territoire "branché", c’est à dire permettant la circulation rapide le l’information, son analyse et son interprétation ; et une communauté apprenante, c’est à dire des acteurs du territoire mettant en commun leurs connaissances dans une démarche d’apprentissage et d’action partagée.
Cette approche par territoire peut avoir comme inconvénient une démultiplication des moyens au niveau national qui nécessite alors d’optimiser nos ressources. L’échange de savoir-faire est une réponse, cet échange entre territoires doit être construit au niveau européen ; dans le domaine de l’emploi, par exemple, les solutions mises en œuvre dans les pays scandinaves méritent d’être partagées.
Le Parti Socialiste
Le Parti Socialiste a l’ambition, la volonté et la nécessité de s’emparer de ces questions. Par où commencer ? Par la modernisation du Parti socialiste, c'est une priorité, plusieurs pistes :
La dimension européenne :
Nous le savons, une grande partie des décisions concernant notre pays sont prises à Bruxelles. La Gauche doit s’emparer de cette évidence : un rapprochement avec les partis de Gauche européen et un socle socialiste commun présenté à tous les citoyens européens nous projetteraient dans le XXIe siècle. Ce socle commun pourrait proposer des projets d’investissement ambitieux, le soutien à la création de grands groupes européens autour du développement durable, un renforcement de la dimension universitaire à l’échelle européenne et préfigurer un modèle social européen.
Une approche unifiée :
Nous vivons une époque de faible intensité idéologique, vraisemblablement historiquement datée à partir de la chute du mur de Berlin. Lors de la dernière campagne présidentielle, les discours étaient essentiellement centrés sur les valeurs. Or parler de valeurs reste imprécis, assez moral et tout le monde ou presque est d’accord sur un même socle. Cette époque de faible intensité idéologique diminue la portée des clivages gauche / droite et les conséquences sont doubles :
Les appartenances se décident désormais aussi sur des questions concrètes comme, par exemple, le poids de la dette ou le mariage homosexuel.
Cette situation permet l’éclosion de la notion de "centre", représentant la difficulté à choisir entre gauche et droite ou la certitude que les réponses se situent dans la mise en commun de l’intelligence de droite et de gauche.
Dans une époque de faible intensité idéologique, l’heure n’est plus à l’émiettement, un grand Parti de Gauche rassemblant les socialistes, verts, radicaux, citoyens, communistes, centre, gauche radicale… est incontournable pour remporter des élections. Il s’agit bien de construire une machine électorale.
L’ouverture :
Si nous avions davantage écouté nos électeurs, nous aurions compris plus tôt que la sécurité n'était pas un fantasme de petites gens angoissés mais un besoin élémentaire, qui n'était pas satisfait.
De plus, en France comme ailleurs, aucune des deux forces politiques majeures n'est à l'origine de tous les grands combats d'aujourd'hui : sur les droits des femmes, l'aide au quart monde, le droit au logement, la préservation des climats, l'immigration, l'insertion des plus démunis… Il nous faut donc nous ouvrir plus largement aux sympathisants, aux partenaires locaux (syndicats, association de consommateurs, représentants associatifs, entreprises, universitaires, experts…) pour construire, dans un premier temps, un diagnostic partagé. Cet espace d’échange, de discussion, de confrontation, où l’utilisation des technologies de l’information et de la communication peut s’avérer fort utile, doit redonner toute sa place à l’examen scientifique des faits. Pour fédérer tous les acteurs et répondre aux défis de notre société, il n’est plus utile de bâtir un programme précis, inopérant dans des situations changeantes, mais plutôt une stratégie et une méthode partagée qui tiennent compte des événements et des accidents à venir.
En conclusion, la gauche doit s’emparer offensivement de la création de valeur économique basée notamment sur le développement durable. La Gauche doit marteler son marqueur : réduire les inégalités sociales.
La Gauche doit adapter ses politiques publiques en privilégiant l'approche aux personnes par les territoires. La Gauche doit se moderniser dans une approche européenne, unifiée et ouverte. Simple ? Sans doute pas ? mais les bonnes volontés de Gauche sont nombreuses et motivées pour y travailler…
Michel Bisson, Maire de Lieusaint, Vice-Président du SAN de Sénart, Président de l’EPA Sénart (21/08/07)
LES BASES DU SOCIALISME
Une solidarité établie entre tous les Français permettant aux plus humbles de pouvoir disposer d’une chance de s’en sortir pour offrir une vie meilleure à leurs enfants.
Après que chaque socialiste sera convaincu de cette mission, la recherche des solutions s’impose.
Dans un souci de justice, admettons d’abord que les nantis ne sont pas des bannis.
Ils sont français et doivent bénéficier de la même considération que les autres Français.
En contrepartie, ils doivent œuvrer, dans la mesure de leurs moyens, aux justes besoins de la France, par exemple en faisant l’effort de créer des emplois lorsque l’état du pays le nécessite, comme c’est le cas aujourd'hui.
Les besoins des Français dépassant très largement les moyens du pays, il est primordial de limiter les soutiens aux seuls Français, après avoir éliminé toutes sources de fraudes organisées comme le travail au noir des chômeurs rétribués.
Une solution consisterait à obliger ces chômeurs rétribués à travailler la journée, dans les administrations ayant des besoins, hôpitaux, commissariats, bureaux de postes etc.
Le reste pourrait être proposé gratuitement ou pour une faible rémunération, versée aux Assedic, aux sociétés nationales en premier lieu, aux sociétés privées exportatrices.
D’autres sujets sont à aborder qu’on ne peut traiter en une seule intervention ni par un seul intervenant.
Amicalement,
Lucien Martinez (21/08/07)
CONTRIBUTION A LA RECONSTRUCTION DE LA GAUCHE
Après le lamentable et affligeant spectacle que nous ont donné, à tour de rôle, et nous donnent encore d’éminents responsables politiques de gauche, en ralliant un gouvernement de droite dont ils avaient vilipendé, à peine quelque temps auparavant, la nocivité, il y a forcément des questions à se poser…
Et d’abord, celle-ci : quel degré de confiance peut-on accorder à ces personnalités dont la motivation essentielle tient dans la satisfaction d’ambitions personnelles à peine déguisées ?...
Et cette autre : une des raisons de l’abstention ne réside-t-elle pas dans le refus de cautionner une opération – fût-elle électorale – qui s’apparente, aux yeux des dits abstentionnistes, à une entreprise favorisant la promotion individuelle ? Et cette autre encore : la droite souffrirait-elle d’absence de compétences dans ses propres rangs ? Ou encore : agirait-elle autrement pour casser le PS et, à travers lui, la gauche elle-même ?...
Que des dirigeants centristes aient rejoint, dans leur majorité, l’équipe gouvernante de droite n’a rien d’étonnant. C’est toujours ce qu’ils ont fait, il n’y a pas de raison que cela change. L’un des torts du PS est d’avoir cru l’inverse. Celui-ci traverse actuellement une passe difficile, alors que l’électorat lui a assuré une large représentation aux dernières législatives. Ce qui est tout de même assez réconfortant. Il n’empêche : les défections… les exclusions… le bateau déserté par ses principaux navigateurs, qui n’ont peut-être pas abandonné tout à fait l’idée de jouer aussi, un jour, leur carte personnelle. Au moins cela peut-il contribuer à éclaircir la situation, en rendant aux militants eux-mêmes, la maîtrise du pouvoir sur leur parti. Car les nouveaux jeunes « lions », comme ils aiment se proclamer, si brillants et si déterminés soient-ils à vouloir déboulonner les anciens « éléphants » - (qui ne les ont d’ailleurs pas attendus pour s’éclipser) - ne manquent pas de suffisance, dans la mesure où ils semblent disposés à ne les chasser que pour mieux les remplacer…
Ségolène Royal aura, quant à elle, expérimenté à ses frais le peu d’enthousiasme que sa propre candidature aura soulevé dans l’équipe dirigeante de son propre parti. Mais il reste que son score aux présidentielles (47%) est tout ce que l’on pouvait craindre, sauf négligeable. Il est porteur d’un espoir, immense celui-là. Mais…
Mais pour le voir fleurir, cet espoir, il va falloir consentir à des sacrifices, immenses eux aussi. Ce n’est pas gagné d’avance, mais c’est possible… On a cru, là aussi à tort, à l’automaticité du jeu de l’alternance. Or la droite semble désormais d’autant plus indéracinable qu’elle ratisse largement dans les rangs de l’extrême-droite. S’il y a 35 millions d’électeurs, il y a aussi 35 millions de partis. Ceux de la droite ont su se regrouper en un seul dont le sigle, UMP, (Union pour la Majorité Présidentielle), ne veut, en ce qui concerne le contenu politique, absolument rien dire, si ce n’est l’adhésion totale aux décisions d’un seul. Mais ceux-là ont gagné. Avec des sigles comme PS, PC, LCR, Verts etc. on est au moins renseigné sur la couleur ; mais il faut bien reconnaître qu’en l’occurrence, la diversité nuit à l’efficacité, tant qu’elle reste synonyme de division.
La solution au marasme actuel me semble à rechercher dans une refonte totale des instances de la Gauche. Je rêve d’un leader qui puisse plaider pour la constitution d’un Parti Unique de la Gauche, que l’on pourrait par exemple appeler la G.U., la Gauche Unie, dans lequel se dissoudraient tous les courants, sans référence aucune à leurs origines diverses, mais qui se retrouveraient sur l’essentiel des valeurs qui constituent ce que l’on appelle la Gauche. J’appelle de tous mes vœux l’émergence d’une équipe qui puisse appeler, inviter, voire exhorter les responsables de ces groupes, à récuser la tentation du repli sur un aveuglement partisan, à identifier clairement la droite et ses suppôts comme les réels adversaires politiques. Et à se réunir dans des Assises Nationales afin d’élaborer une charte constitutive de ce parti unique de la Gauche, sur la base des valeurs de la Gauche, redécouvertes et réévaluées. Mais, entendons-nous bien : il ne s’agit pas d’un super-parti, où chacun de ceux qui le constituent conserveraient sa propre identité ; cela n’aurait pas de sens. Ni, non plus, d’un parti supplémentaire, à côté des autres, qui, par exemple, récupèrerait les déçus de part et d’autre. Mais bien d’une seule et unique instance politique de Gauche.
Evidemment, sauf à les vivre de l’intérieur, on peut difficilement imaginer les difficultés rencontrées, aussi bien d’ordre matériel que moral, dans la réalisation d’un tel objectif, celles d’ordre matériel d’abord, avec la mise en commun des biens, trésoreries, etc. et tous les problèmes d’intendance qui en résulteraient… Celles d’ordre moral, surtout. Mais les attaches sentimentales, pour légitimes et respectables qu’elles soient, et malgré les déchirements impliqués, ne devraient pas résister à la considération d’un intérêt plus vaste. Car les organisations ne sont jamais que des moyens ; et ceux-ci méritent d’être ajustés à la situation.
Puissent ces responsables, envisager l’avenir avec assez de largeur de vue pour éviter le confinement dans ce que l’on appelle vulgairement l’esprit de boutique et consacrer leurs efforts à la constitution de ce parti unique de la Gauche, condition, à mon sens, de la véritable reprise du pouvoir. Par la nouvelle dynamique ainsi créée, un tel mouvement rencontrerait, d’emblée, l’adhésion d’une partie importante de la population. Le chant de ralliement existe déjà ; et ne clame-t-il pas « Du passé, faisons table rase ».
Dans cette perspective, il n’y a pas à attendre 2008, et encore moins 2012. Le plus tôt sera le mieux. On ne peut naturellement pas préjuger de la réponse qui sera apportée par chacun des groupes concernés. Encore faut-il leur faire la proposition. Qui voudrait refuser sa contribution ?...
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