HUMANITAIRE A LA BILL GATES :
CROQUIS 19
Les médias s’extasient : Bill Gates, troisième fortune du monde, grande intelligence technologique et commerciale va se consacrer à l’humanitaire. Il abandonne le business ? Pas tout à fait puisqu’il reste le premier actionnaire de son groupe et le président du conseil d’administration de sa société. Rien à voir avec cet hindou paradigme dont parle Michaud qui annonce, lorsque << quelque chose ne va pas, même s’il est riche, marié, père de dix enfants >> : « Bon, s’il en est ainsi, je vais mendier. Il confie sa fortune à son neveu et s’en va mendier. >> Il garde aussi sa propriété de Seattle dont la valeur est de 80 millions d’euros, il ne va tout de même pas pousser l’altruisme jusqu’à dormir dehors comme un sadou ou un quelconque poulbot de Kathmandu. Il doit aussi veiller à ce que son tonneau de réserves financières soit toujours alimenté, ne serait-ce que pour payer les frais d’entretien de sa propriété. Mais il va consacrer la plus grande partie de son temps à aider les autres. Il a déjà versé des milliers de dollars et il a même, tenez-vous bien, rencontré des femmes indiennes ! Après s’être extasié sur Soros, qui, lui, s’était enrichi par un simple jeu d’écriture sans avoir jamais rien apporté au monde technique, les médias se pâment devant la générosité de Bill Gates. Et bien moi je ne me pâme pas, je n’applaudis même pas. Certes il pourrait ne pas le faire, certes du fric pour les pauvres c’est toujours bon à prendre, mais je connais trop d’associations humanitaires dont le but n’est pas qu’humanitaire. Et puis, parce que ce qui compte : C’est ce qui reste quand on a tout donné. Or, de l’argent, Bill Gates en a encore beaucoup, beaucoup. C’est pourquoi je ne veux voir dans sa décision qu’un geste de mendicité. Je ne rechercherai pas son amitié, celle de mes petits cons de copains à petits salaires qui, bien qu’ils aient du mal à joindre les deux bouts donnent silencieusement, anonymement et régulièrement, me suffit. Il m’arrive toutefois de rêver a de l’humour dans l’humanitaire, à un Nouvel observateur, un Libération, un Le Monde… qui, négligeant Gates et Soros ou un Emir ayant donné un fort pourboire à un de ses larbins, écriraient régulièrement des articles sur mes cons de petits copains.
L’AFFAIRE DU LAC :
Ce pourrait être le titre d’un roman policier. << Ah ! Ah ! 1000 morts. Le commissaire Khumbu reposa son bol de tchang chaud et se lissa les moustaches. >> Heureusement, il n’y a pas encore 1000 morts, il n’y a pas d’énigme, il n’est donc pas utile d’écrire un roman policier et le mot Khumbu reste une région. L’affaire du lac est une affaire parfaitement limpide. Même si les eaux de ce lac ont un peu la couleur du dudh, celle du lait, parce qu’elles sont chargées de ces sables limoneux composés de très fines particules qui les colorent en blanc. Comme le sont les eaux d’un grand nombre de torrent d’ici, les Dudh koshi, les Séti kola par exemple, ou de nos montagnes en été : l’Arves, la Haute Isère, la Romanche, le Vénéon… Ce lac est un lac morainique, il se nomme l’Imja cho. Imja signifierait pierres plates, lauzes, selon des vieux Sherpas. Cho signifie lac, comme le lac Cho Oyu, le Lac Emeraude qui a donné son nom au pic en fond de vallée de Gokyo. Cette moraine a été créée par le glacier Imja, le lac est alimenté par les eaux de pluie pendant la mousson et les eaux de fonte du glacier du même nom. Il est situé dans la partie orientale du Khumbu. Au pied du pic Imja tsé exactement, un sommet de plus de 6000 mètres très souvent gravi. Le lieu se nomme Paresho gyab, son altitude est d’environ 5000 mètres. Il n’y a donc pas d’énigme policière, pourtant depuis dix huit ans des rumeurs alarmantes courent autour de ce lac. Et, depuis que le réchauffement de la planète a été décrété, ces rumeurs sont devenues des cris assourdissants : << Le lac a grossi, il est devenu énorme, il exerce une poussée colossale sur la moraine qui va s’effondrer. >> Ceux qui ont des connaissances en hydraulique parlent d’effet de renard, ces petites sources qui grandissent et sapent les barrages les plus solides. Un risque existe, bien que la pression exercée sur l’ouvrage de rétention soit indépendante de la longueur du lac, elle ne dépend que de la profondeur au droit du barrage. Mais la pression est là, et c’est pourquoi les stations-alpages de Chukung, de Dingbotché, d’Orsho, de Chomaré, le village de Pangbotché, de Pakding dans le Pharak et bien d’autres vont être balayés, mille morts au moins ! Un séisme peut-il participer à activer la déstabilisation de ce barrage-poids naturel ? Oui sans doute. Y a–t-il urgence ? Dès qu’il y a des vies humaines qui sont mises en danger il faut répondre : << Oui, il y a urgence. >>
Heureusement, des Occidentaux ont enfin pris les choses en main, ils parlent de « monter une opération Lac de l’Imja » de réunir des capitaux pour… Pourquoi au fait ? Comment stabilise-t-on une moraine frontale formant barrage ? Voici une anecdote, il y a quelques vingt ans, le lac d’Arsine, au pied de la Calotte des Agneaux dans le massif des Ecrins avait pris un tour de taille imposant. Bien qu’on ne parlât pas encore d’effet de serre, la sinistrose française existait déjà, les pessimistes de service ont donc poussé des cris alarmants. << Adieu Villar d’Arène. Bourg d’Oisans cité lacustre. Adieu Monétier, Briançon. Les Méridionaux ont crié : << Adieu Marseille, la sardine va se noyer. >> Le chef de secteur du Parc National des Ecrins, Robert Keck qui était depuis longtemps au courant du problème a, avec humour, calmé les esprits en déclarant : << Il n’y a pas le feu au lac. >> Puis il a fait monter un petit engin de terrassement qui, en quelques jours a taillé un exutoire, un petit canal d’évacuation au niveau prescrit par les hydrauliciens pour diminuer la hauteur du lac. << Objection refusée pour le Khumbu, vont s’écrier les Sinistro-men de service, Pour qu’un engin de terrassement accède au lieu il faut le faire transporter par un hélicoptère, coût de l’opération très élevé, d’où la nécessité de réunir des capitaux. >> Supposition : on fait monter sur les lieux un hydraulicien retraité - voir Retraités sans frontières - tout heureux de se payer un trek en « rendant service ». Il observe puis établit une note technique précisant la position, les dimensions et le niveau de l’exutoire. Un fonctionnaire de la D.D.E. népalaise ou du Parc de Sagarmatha ou un simple sardar, rassemble alors cinq terrassiers, une tente, quelques pioches, deux barres à mine, une masse de cinq kilos, trois pelles, quelques gamelles, un réchaud. Il dit aux terrassiers : << Travailler à 5000 mètres d’altitude est difficile, vous serez payés 1500 roupies par jour. >>. Coût des outils, de la tente mess louée, tout cela, rendus sur place : 20.000 roupies. Temps des travaux estimé à 10 jours. Total : 20.000 plus 10 X 6 X 1500 = 110.000 roupies, soit, taux 2008 : 1100 euros. 1100 euros pour sauver la vie de 1000 Sherpas ! Et cela fait dix-huit ans que le problème a été soulevé ! L’Occident, comme toujours, jacasse, geint, tremble de compassion en pensant aux flots meurtriers. Tout l’Occident est dans cette histoire. Qu’attend une petite équipe de fidèles du Khumbu pour agir ? Avec un peu de publicité, on devrait même trouver des bénévoles occidentaux pour travailler sur place, même s’ils ne sont pas très efficaces à ces altitudes, ils seraient utiles La vie de quelques centaines de Sherpas ne mérite-telle pas qu’on s’y intéresse prioritairement au nettoyage d’un quelconque camp de base ? A quoi servent les associations de montagnes dans lesquelles on trouve des aficionados et des universitaires qui savent tout. Et les journalistes des revues de montagne, de trek, plus compétents encore ? Voilà une bonne occasion pour eux de sortir de leur gnian gnian habituel. Dans tous les cas, que ces Occidentaux arrêtent de courir les ministères népalais dont les dirigeants se moquent de la vie de ces matvalis, ces picoleurs d’alcool bothés ou sherpas. Qu’ils arrêtent de verser des larmes de crocodiles, leurs larmes ne servent qu’à faire monter le niveau du lac et risquent ainsi de précipiter l’effondrement de sa moraine créatrice
Nota : si des travaux devaient avoir lieu en automne, choisir le camp de base supérieur de l’Imja Tsé et non le plus bas, celui-ci étant, à l’automne, exposé aux avalanches de neige.
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