404 la norme linguistique l'occultation du caractère maternel de la langue nationale


n'existe pas de preuve positive de cet avancé, il existe une preuve néga­tive



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n'existe pas de preuve positive de cet avancé, il existe une preuve néga­tive, si l'on peut dire, qui le supporte assez bien.

Même si, depuis une bonne vingtaine d'années, plusieurs intervenants de l'enseignement-apprentissage ont réussi à modifier de façon importante les perspectives pédagogiques de leurs activités, ils n'ont pu aller jusqu'à modifier leur attitude sur la norme. La norme se trouve alors appliquée à un objet linguistique légèrement modifié ou élargi, mais elle n'a pas changé. Voyons quelques faits.

Dans l'approche traditionnelle de l'enseignement des langues étran­gères (grammaire-traduction), l'écrit a largement dominé: la grammaire enseignée était une grammaire de la langue écrite, et de la seule langue écrite des « bons auteurs », c'est-à-dire des écrivains ou philosophes (es-

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sayistes) les plus appréciés par une certaine classe sociale. C'était la position du « dites, ne dites pas ».

Avec la position structurale qui a succédé à la précédente au début des années soixante (audio-orale américaine ou structuro-globale euro­péenne), on aurait pu s'attendre à voir se développer chez les intervenants de langue étrangère une attitude descriptive plus scientifique parce que cette position était fortement marquée par la linguistique structurale (d'où elle a tiré son nom). Cette attitude descriptive aurait pu remplacer peu à peu l'attitude normative vis-à-vis de la langue. Or, dans les faits, que s'est-il passé?

La linguistique structurale, fondée sur le principe d'immanence - explication scientifique ne reposant que sur un mécanisme et des lois (règles) internes - s'est, du même coup, montrée généralement ignorante des phénomènes sociaux de la variation linguistique, du moins dans ses appli­cations à l'enseignement De plus, même si la priorité de l'oral sur l'écrit a été proclamée comme l'une des perspectives importantes de la linguisti­que structurale, le type de langue orale proposé par les manuels de langues étrangères n'a guère été plus qu'une forme oralisée de l'écrit La perspec­tive linguistique faisant de l'oral la priorité du système linguistique a été interprétée uniquement comme signifiant une simple antériorité chronolo­gique: toute leçon débute par des formes « orales » et ce n'est qu'une fois ces formes maîtrisées que l'on enseigne l'écrit « correspondant ». En d'autres termes, en dépit de ses visées à caractère scientifique, l'approche structu­rale n'a pas été en mesure de contribuer à modifier l'attitude vis-à-vis de la norme: d'un côté, la langue proposée est une langue relativement uni­forme, ce qui n'a pu que renforcer l'idée d'une norme unique à observer, tandis que de l'autre côté, la présence insistante de l'écrit, même par le biais d'une langue pseudo-orale, a entretenu le préjugé de l'existence d'un niveau de « bon usage » à enseigner, niveau que l'on pourrait qualifier d'« oral soutenu ». À moins que ce ne soit l'attitude préexistante qui ait influencé l'application de la linguistique structurale de cette manière dans le monde de l'enseignement des langues. . .

Qu'en est-il de nos jours? Malgré l'influence considérable de l'appro­che structurale sur la didactique des langues, influence encore manifeste dans de nombreux manuels toujours en usage dans plusieurs milieux sco­laires, il est apparu il y a sept ou huit ans un nouveau courant maintenant connu sous le nom d'« approche communicative ». Dans cette approche, la langue présentée aux élèves doit tenir compte du fait que l'enseignement se fait par et pour la communication. On s'attend donc à y trouver des usages linguistiques variés et des documents authentiques, ce qui serait de nature à entraîner une nouvelle définition du contenu et à contribuer à une certaine forme de changement d'attitude, du moins de la part de l'enseignant

Mais, phénomène curieux, au moment où le terrain semble le plus propice à une modification d'attitude grâce à l'incitation à recourir de plus

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en plus au document authentique, le principe de la priorité de l'oral sur l'écrit est déjà battu en brèche. Il est de plus en plus question d'accorder une importance égale à l'écrit et à l'oral en introduisant l'écrit dans la salle de classe dès les premières leçons. Cette fois, l'écrit n'a pratiquement plus de coloration littéraire, mais il gagne en importance à cause de la plus grande facilité de trouver des documents authentiques écrits que des documents authentiques oraux. On peut même se demander si, à longue échéance, tout le poids de l'écrit (même l'écrit utilitaire des affiches, des directives, des modes d'emploi, des petites annonces, etc.) ne viendra pas annihiler les effets positifs obtenus en faveur de l'oral grâce à la démarche structurale. Par contre, puisque l'accent est mis de plus en plus sur la variété des usages, même à l'écrit, pourrait-on espérer qu'il en résulte un changement d'attitude au moins sur ce plan?

Il est évident qu'une pédagogie orientée vers la communication et l'utilisation de documents authentiques modifie le contenu de l'ensei­gnement et il est vraisemblable qu'à la longue ce changement de contenu puisse entraîner une tolérance plus grande à l'égard des formes plus fami­lières, ou en tout cas plus courantes de la langue. Mais de là à entraîner un changement dans le jugement que les enseignants et leurs élèves peuvent porter sur ces faits de langue et dans les sentiments qu'ils éprouvent à l'égard de ces formes et des personnes qui les utilisent, il y a un pas qui sera certaine­ment long à franchir.

En effet, nous ne possédons que peu de renseignements sur les méca­nismes d'adaptation du langage aux diverses situations de communication et sur les variations linguistiques qui accompagnent cette adaptation. De plus, nous ne disposons pas encore de grammaire de la langue orale avec ses variétés et la recherche actuelle ne va pas dans cette direction. Enfin, l'en­cadrement pédagogique de l'enseignement, c'est-à-dire les consignes, les méthodologies, le matériel pédagogique et la préparation immédiate des enseignants à ce type de pédagogie, est plus lâche qu'il n'a jamais été; en effet, on indique bien au maître ce qu'il doit faire, mais on ne lui dit pas telle­ment comment le faire. II est donc à craindre que les variations recueillies pour des fins pédagogiques (les documents authentiques) ne soient que tolérées, constamment soumises à la référence normative unique du fran­çais soutenu et jugées insuffisantes pour une formation « normale » dans le domaine linguistique. L'approche « communicative » ayant quelque chose d'artificiel parce qu'elle n'implique pas la communication directe avec des membres de la communauté linguistique étrangère, elle risque de n'avoir qu'un effet limité sur le contenu réel de l'enseignement et sur la norme linguistique.

Tout bien considéré, un changement substantiel d'attitude ne peut pas être le produit d'un changement pédagogique, mais plutôt celui d'un chan­gement beaucoup plus important chez la majorité des membres de la com­munauté linguistique où se dispense l'enseignement 1 s'agit alors d'un

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changement dans l'information véhiculée, dans les connaissances que les membres de cette communauté possèdent, dans les jugements qu'ils por­tent, en même temps qu'un changement dans les sentiments éprouvés à l'égard de la langue étrangère et de ceux qui la parlent. Puisque ce chan­gement doit se produire auprès d'un grand nombre de personnes qui ne sont pas directement engagées dans l'enseignement, il ne saurait se faire sans un long processus dont les racines se situent dans le domaine social, éco­nomique et politique, c'est-à-dire dans une modification des rapports de force et de contact entre les deux communautés intéressées. C'est, en tout cas, la seule perspective que nous pouvons envisager, si notre examen des faits est exact et si nos hypothèses sont fondées.

On a parfois pensé qu'il pourrait suffire, pour modifier l'attitude, de modifier l'information, ou, mieux, d'apporter une information intense ou de faire une publicité bien orchestrée. Cela ne paraît pas possible, du moins si on se fie aux résultats des recherches sur le sujet. La majorité des travaux qui ont porté là-dessus, d'après King et McGinnies en particulier, mais aussi d'après les meilleurs comptes rendus qu'on peut consulter, arrivent à la conclusion que des changements d'information ne suffisent généralement pas à changer autre chose que l'opinion, et cela, temporairement. Pour qu'une modification de l'attitude elle-même puisse se produire, il doit s'opérer des changements dans toutes les composantes de l'attitude, c'est-à­dire dans les domaines cognitif, affectif et actif (« comportemental »).

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II Domaines d'application de la norme en langues étrangères (ou secondes)

Toutes les considérations qui précèdent sur la nomme trouvent leur terrain d'application dans les objectifs généraux que les institutions, les professeurs et les élèves se donnent en fonction de l'enseignement-apprentissage, dans la définition du contenu linguistique et culturel de l'enseignement ainsi que dans les instruments pédagogiques.

1. Les objectifs généraux de l'enseignement-apprentissage

Le fait pour un enfant d'âge scolaire de se voir imposer ou de choisir les cours de langue étrangère dans son programme scolaire, le fait pour un adulte d'opter pour l'apprentissage de telle langue étrangère et de décider d'étudier cette langue dans telle institution, le fait d'associer l'apprentissage de telle langue à telle occupation ou à telle utilisation éventuelle ou présente, le fait de vivre dans tel environnement sociopolitique impliquent déjà, au départ, une certaine orientation en ce qui concerne la norme linguistique.

En effet, selon la langue étudiée, le milieu éducatif, les occupations envisagées et les pressions socioculturelles, les apprenants se soumettent à des conditions déjà établies en ce qui concerne le niveau et le type de langue qui seront enseignés et la sensibilité plus ou moins grande du milieu d'en­seignement à l'égard de la norme.

1.1 La langue choisie

On dit généralement que les francophones attachent plus d'importance à la norme linguistique que les anglophones. Cela est visible dans les pro­grammes de langue des écoles et dans la place que les médias écrits accordent aux questions linguistiques.

Presque immanquablement, on trouvera dans les journaux, revues, magazines ou périodiques francophones une chronique sur la langue. Cette chronique portera, la plupart du temps, sur des termes ou expressions à corriger dans notre usage linguistique. II n'y a pas d'équivalent anglophone de cette habitude. Les raisons qui justifient l'existence ou l'inexistence d'un tel intérêt sont obscures ou, en tout cas, peu étudiées. On aura d'ailleurs sans doute du mal à les étudier, car cette habitude est en train de disparaître pour des raisons qu'on ne connaît pas davantage.

Quoi qu'il en soit, il existe chez les francophones un degré de sensi­bilité plus élevé à cet égard que chez les anglophones, et on ne doit pas s'étonner que les écoles francophones de langue maternelle accordent une place très importante à la grammaire et à la correction linguistique alors que les écoles anglophones initient beaucoup plus tôt leurs élèves à l'étude du discours et de la littérature. Une grammaire pédagogique française est toujours

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plus élaborée et plus « complète » qu'une grammaire anglaise destinée aux mêmes niveaux scolaires.

Dans le cas des langues étrangères, on a mis beaucoup de temps à préparer en français un équivalent du Basic English dont la caractéristique principale est la réduction des éléments linguistiques à leur minimum pour des fins pragmatiques de communication. « Voix et images de France » est née beaucoup plus tard et est demeurée relativement plus élaborée et plus directive. Quand au « niveau-seuil », il ne serait sans doute jamais né si le « Threshold Leuel » n'avait pas d'abord ouvert la voie. Ce sont là deux exemples d'un phénomène qui en connaît plusieurs autres.

12 La situation sociopoiitique

L'enseignement du français langue seconde dans les écoles du Canada constitue un bel exemple d'application de la norme linguistique dans le choix des manuels et dans celui des enseignants.

Jusqu'à tout récemment, les écoles anglaises du Canada, et plus par­ticulièrement celles du Québec où l'environnement linguistique est à quatre­vingts pour cent (80%) francophone, exigeaient que l'on enseigne à leurs

élèves le Parisian French. Pour ce faire, on recrutait des enseignants d'origine européenne ou nord-africaine parce qu'ils utilisaient « naturellement » ce type de français, et on sélectionnait des manuels et des méthodes made in France ou made in U.S.A. . L'usage québécois, que l'on connaissait d'ailleurs très mal, avait mauvaise réputation et les enseignants d'origine québécoise n'avaient pas accès à ce domaine d'activité.



Depuis quelques années, le français enseigné dans les écoles anglaises a pu prendre une légère coloration québécoise, d'abord par l'utilisation plus large de manuels made in Canada et, plus récemment, par l'intermédiaire d'un certain nombre d'enseignants d'origine québécoise.

Ce changement dans l'opinion des anglophones canadiens est attribuable au changement de la situation sociopolitique. Autant les anglophones se souciaient peu de l'existence et des caractéristiques de la culture française

du Québec avant 1960, autant ils ont pris conscience, depuis, de la nécessité, surtout au Québec, de manifester leur intérêt pour le milieu francophone ambiant (et majoritaire). L'accent québécois fait moins peur et certains éléments de vocabulaire sont tolérés, encore qu'il s'agisse d'une pronon­ciation de niveau soutenu et de rares québécismes lexicaux. L'utilisation de documents authentiques, encouragée de plus en plus fortement dans la pédagogie des langues secondes, conduira éventuellement à une certaine adaptation aux usages locaux.



Les pressions politiques exercées par les francophones du Québec (élection d'un parti indépendantiste; loi sur le statut et sur l'usage du français) pour la reconnaissance et le développement de leur langue et de leur culture

sur le territoire québécois incitent les anglophones du Québec à préparer


LA NORME LINGUIS71QUE



leurs enfants à comprendre de plus en plus leurs compatriotes francophones. Si ces pressions continuent, la tolérance et l'ouverture actuelles se transfor­meront progressivement en actes de communication effective et prolongée dans la langue des Québécois francophones.

Ce n'est là, bien sÛr, qu'un exemple qui illustre ce qui peut arriver dans tous les pays du monde: le statut sociopolitique d'une communauté linguistique influence directement les objectifs poursuivis par ceux qui veulent apprendre la langue de cette communauté. On pourrait facilement développer cette idée en utilisant les exemples de l'espagnol ou du portugais sud-américains, de l'anglais américain ou australien, ou encore des familles de langues africaines, pour ne pas parler des langues slaves et asiatiques.

1.3 Le milieu éducatif

Chaque institution éducative se fixe des objectifs linguistiques généraux pour satisfaire sa clientèle de langue étrangère. Pour sa part, le réseau des écoles publiques, des collèges et des universités, a tendance à se donner des objectifs assez ouverts et à adopter une attitude généralement stricte au plan des principes et des programmes, mais permissive au plan de la pratique. Même si les programmes officiels font état d'une nomme exigeante reliée à l'usage le plus « pur », on ne s'arrête pas trop sur les variations particulières des enseignants; par ailleurs, toute variation publique donnera lieu à une correction sévère. Ce sont les objectifs de formation générale qu'on vise surtout à travers l'enseignement des langues étrangères; l'incidence de la norme ne se manifeste dans la pratique que lorsque la langue étrangère est une langue seconde et elle le fait selon les circonstances sociopolitiques du moment (comme l'illustre l'exemple cité plus haut).

Ainsi, l'enseignement de l'anglais dans les écoles francophones du Québec est fait en grande partie par des enseignants d'origine francophone, dont un bon nombre n'est pas véritablement bilingue. Les manuels sont presque tous d'origine américaine (plus ou moins adaptés au Québec): les structures linguistiques sont celles de l'américain dit du Middle West. A cause de l'incompétence linguistique relative des enseignants, l'utilisation de ces structures a peu de chance d'être conforme à l'usage des Américains et encore moins des Canadiens anglais. Pourtant, cette question ne crée pas de problème, et l'association des professeurs d'anglais du Québec (SPEAQ) discute davantage de problèmes méthodologiques que de problèmes de norme.

De leur côté, les écoles de langues privées sont beaucoup plus attentives aux qualifications linguistiques de leurs enseignants et s'adaptent de façon assez rapide et efficace aux besoins de leurs clients en ce qui concerne le type d'usages qu'elles enseignent

Pour les gouvernements qui gèrent soit des écoles de langues pour leurs fonctionnaires, soit des offices linguistiques, soit d'autres organismes

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dévoués à la planification linguistique, à la terminologie, à la traduction, etc., la définition de la norme découle des objectifs propres à chaque orga­nisme. Lorsque les objectifs ne sont pas très particuliers (formation d'espions pour telle mission dans tel pays étranger par exemple), la tendance des gouvernements est de choisir un usage dit « international » ou « standard », c'est-à-dire qui est à peu près conforme à l'usage moyen privilégié du principal pays où la langue est utilisée comme langue maternelle.

1.4 Les occupations

En dehors des étudiants de langue étrangère qui sont prisonniers du système dont ils font partie (écoles publiques, écoles gouvernementales), il existe des personnes qui poursuivent des buts particuliers, parce qu'elles se préparent à occuper des fonctions particulières, et qui veulent s'exposer au type d'usage qui pourra le mieux satisfaire leurs besoins. Apprendre une langue étrangère pour étudier ou pour travailler en pays étranger, pour lire des oeuvres en langue étrangère ou pour voyager ne comporte pas les mêmes exigences linguistiques et culturelles. Et on peut dire que l'usage recherché est celui qui conviendra le mieux à l'occupation anticipée.

Malheureusement, ces personnes ne connaissent pas les variations linguistiques de la langue qu'elles veulent étudier et il est fréquent d'entendre de bons étudiants de langue étrangère se plaindre du fait qu'ils ne peuvent pas communiquer couramment avec des autochtones même lorsqu'ils ont atteint une connaissance avancée de la langue. Cela signifie certainement que les institutions ne sont pas assez sensibles aux variations d'usage et ne consentent pas à préparer leurs élèves à la communication courante avec tout ce que cela suppose de reconnaissance des usages populaires.

D est bien évident qu'on ne peut exiger des institutions qu'elles prévoient dans leurs programmes tous les usages possibles; toutefois, le choix du niveau de langue enseigné est trop souvent théorique et marqué par une sorte de snobisme culturel, que les étudiants eux-mêmes ne découragent d'ailleurs pas. Il y a toujours cette crainte de voir le milieu social réprouver un relâchement éventuel, soit par les médias qui stigmatiseront un tel geste, soit par la clien­tèle qui désertera. C'est à qui ne serait pas le premier à avoir une telle audace.

2. Le contenu

Le domaine d'application le plus évident et le plus marqué de la norme linguistique est sans aucun doute celui du contenu de l'enseignement Dans chaque méthode, dans chaque document, chez chaque enseignant, des choix ont été faits et d'autres restent à faire. Ces choix sont la plupart du temps conscients et portent sur des mots de vocabulaire, sur la pronon­ciation, sur la grammaire et sur les éléments culturels auxquels seront exposés les étudiants de langue étrangère.

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Même les auteurs du « Français fondamental », qui voulaient reproduire un usage moderne du français, n'ont pu se priver de retrancher des mots, des expressions et des structures grammaticales de l'enquête pourtant scientifique qu'ils avaient réalisée et d'ajouter à leur liste des éléments linguistiques qui leur paraissaient « indispensables » ou surtout « accepta­bles » mais qui n'avaient pas été recueillis. Cette opération consciente, et proprement anti-scientifique, témoigne de la force de l'attitude normative qui gouverne parfois les choix, lorsqu'il s'agit de définir des éléments de contenu. Les auteurs n'ont pu s'empêcher de sacrifier l'oeuvre descriptive à l'oeuvre pédagogique. Cette attitude nous a profondément choqués; mais elle illustre si bien notre argumentation qu'elle nous aurait manqué si elle n'avait pas existé.

On peut considérer que tout élément linguistique destiné à l'enseigne­ment a fait l'objet d'une étude systématique à deux points de vue essentiels: pédagogique et normatif.

Le point de vue pédagogique est justifié par la nécessité de respecter certains principes qui gouvernent la démarche méthodologique: progression, fonctionnalisme, dépendance intralinguistique, « congénarité » (liens d'ori­gine et ressemblance avec la langue maternelle), méthode de présentation et d'illustration, niveau de spécialisation, centres d'intérêt, etc. Nous ne le traiterons pas ici.

Le point de vue normatif repose, pour sa part, sur les objectifs généraux que poursuivent les auteurs et les institutions d'enseignement, compte tenu de l'attitude générale du milieu, des étudiants et des enseignants. C'est ainsi qu'on fait un choix minutieux des éléments linguistiques pour éviter de contrecarrer l'attitude des clientèles normales tout en se rapprochant le plus possible (avec peu de variations dans le possible) des exigences de l'usage contemporain. C'est parfois un choix douloureux, puisqu'il y a souvent conflit ou contradiction entre les besoins de l'usage et l'attitude de la clientèle. Par exemple, il n'y a pas de difficulté à rayer de la liste un québécisme comme « bréquer » (freiner) ou une expression comme « mettre les bréques » (mettre les freins) parce que le mot freiner et l'expression mettre les freins sont également connus et utilisés, même si « bréquer » ou « mettre les bréques » est encore plus fréquent dans l'usage populaire: les francophones du Québec reconnaissent qu'il s'agit là d'unités lexicales empruntées à l'anglais (brake) et se montrent prêts à accepter et à utiliser l'équivalent français. Par ailleurs, les usagers du français au Québec ne sont pas prêts à abandonner banc de neige pour congère, probablement parce qu'il s'agit d'une expression de forme française qui ne trahit pas l'influence anglaise et que le référent n'est pas totalement identique à celui de congère.

Les auteurs de manuels et les institutions d'enseignement du français langue seconde font souvent face à ce type de problème délicat qui consiste à trancher entre l'attitude des « consommateurs » souhaitant apprendre le français dit « international » ou « standard » et les besoins de l'usage

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imposant une forme régionale (on peut facilement comprendre ici le lien qui existe entre la norme en langue seconde et la norme en langue maternelle).

Pour les fins de la discussion, on pourrait résumer en un tableau simplificateur l'essentiel de la distribution des faits linguistiques en fonction des choix à faire pour l'enseignement

registre







géographie français français

régional international

familier/populaire

+

-

soutenu

+

+

spécialisé

-

+




Le registre familier/populaire contient naturellement plus d'éléments régionaux et oraux que d'éléments internationaux et écrits; le registre sou­tenu contient souvent plusieurs éléments régionaux et plusieurs éléments internationaux; le registre spécialisé contient presque exclusivement des éléments internationaux parce qu'il s'inspire de sciences ou de technologies bien admises et toujours écrites.

Comme le tableau nous permet de (illustrer, même s'il s'agit d'une perspective réduite, c'est le registre soutenu qui risque de créer le plus de problèmes car c'est celui où l'attitude normative peut se manifester à son aise. Malheureusement pour les auteurs de manuels et pour les enseignants, c'est le registre recherché par la plupart des étudiants de langue seconde et par les institutions ou organismes d'enseignement. Le choix des éléments linguistiques et culturels se situe à ce niveau: combien d'éléments régionaux va-t-on retenir? Combien va-t-on en éliminer?

La réponse à ces questions peut varier selon la région où elle est posée et selon le degré d'autonomie et de prestige de cette région par rapport à une autre. Le français soutenu recherché au Québec, ou mieux, le français « stan­dard d'ici », comme fa étiqueté (Association québécoise des professeurs de français du Québec à son congrès de 1977, comporte en bonne part les éléments du français international, mais contient également un bon nombre d'éléments propres aux Québécois (mots, prononciation, structures gram­maticales et référents culturels). Cette partie québécoise du français « stan­dard d'ici » correspond à ce que nous avons appelé le français régional, au sujet duquel les questions normatives se posent

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D serait peut-être utile d'expliquer brièvement et d'illustrer les types de difficultés que présente cette opération pour chacune des classes du contenu linguistique. Nous allons prendre nos exemples au Québec, tout en compre­nant que la même problématique s'applique à toutes les régions franco­phones du monde, y compris celles de la France. L'exemple est intéressant, car le français au Québec a connu une évolution rapide et importante durant les deux dernières décennies et les Québécois ont assisté à des discussions féroces sur la norme linguistique. Nous nous contenterons de faire état d'un certain nombre de choix difficiles à faire en matière de lexique, de pro­nonciation, de grammaire et d'éléments culturels.

2.1 Le lexique

La portion régionale du lexique québécois se caractérise par de nom­breux anglicismes et un nombre encore plus grand d'archaïsmes auxquels se sont mêlés certains amérindianismes et quelques canadianismes. Dans chaque cas, nous avons affaire à des sens ou à des formes soit empruntés à l'anglais ou influencés par cette langue très présente dans le milieu, soit conservés de la langue des premiers colons, à cause de l'isolement presque total du Québec francophone durant deux siècles, soit adoptés des langues amérindiennes, ou encore créés de toutes pièces.

Depuis la fin de la dernière guerre mondiale, l'urbanisation et la mo­dernisation rapides du Québec ont entraîné des modifications importantes à la langue des Québécois. Cette poussée économique, sociale et politique

a incité l'élite québécoise à éliminer de son français soutenu plusieurs angli­cismes et archaïsmes. Supportée par les médias d'information et par le gouvernement grâce à son Office de la langue française et à son ministère de l'Éducation, cette correction linguistique s'est appliquée à beaucoup de mots et d'expressions. C'est ainsi qu'on a rapidement substitué, dans le registre soutenu:



ordre du jour à

agenda

auto (voiture) à

char (machine)

robinet "

champlure

lavabo "

évier (éévier)

lampe, phare "

lumière(s)

rendez-vous "

appointement

poste "

malle

réveil-matin "

cadran

maltraiter "

maganer

permis "

licence

disque "

record

bibliothèque "

librairie

pièce "

appartement

boissons gazeuses "

liqueurs (douces)







etc.







Mais on a résisté et on résiste encore fortement à substituer d'autres mots du français international à des mots régionaux québécois. En ne rete­nant que des mots qui seraient utiles à l'enseignement du français langue seconde pour des fins de communication avec des Québécois, on trouvera certainement

LA NORME DANS L'ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE SECONDE 535

régionalisme

équivalent

régionalisme

équivalent

québécois

international

québécois

international

accrocher

suspendre

dîner

déjeuner

avant-midi

matinée

jaser

bavarder

banc de neige

congère

magasiner

faire des courses

barrer

verrouiller

marier (qqn)

épouser

bas

chaussette

mitaine

moufle

bâton (de hockey)

crosse

s'obstiner

contredire

beigne

beignet

passe

billet réduit

billet (métro)

ticket

radio

poste radio

cafétéria

self (service)

souper

dîner

charrue

chasse-neige

roches

pierres

débarbouillette

serviette de

rondelle (hockey)

palet




toilette







cadran

pendule

télévision

poste de télévision







toast (fém. )

toast (masc. )







tuque

bonnet (d'hiver)







etc.







Que faire de ces mots et de ces expressions? (Et encore, il ne s'agit que de quelques exemples du québécois soutenu: il y en a des centaines dans le québécois familier oui populaire.) Doit-on les introduire dans un manuel ou dans un programme? Doit-on les introduire tous? Doit-on leur donner une place spéciale, en appendice ou en supplément? Doit-on les enseigner tels quels? Doit-on les rendre accessibles pour une reconnaissance passive seulement? Combien d'autres questions se posent encore!

22 La prononciation

Il en est de la prononciation comme du lexique: d'une part les Québé­cois ont conservé, dans une large mesure, la phonétique et le phonologie de leurs ancêtres et, malgré un rapprochement considérable du français inter­national dans le registre soutenu, il persiste encore de nombreuses traces du passé dans la prononciation des mots d'origine française; d'autre part, les Québécois prononcent à l'anglaise les noms propres et les emprunts de vocabulaire à la langue anglaise, alors que les Français, par exemple, pro­noncent ces mots en s'inspirant plutôt de leur forme écrite.

II existe des descriptions plus ou moins élaborées de la phonétique et de la phonologie québécoises. Nous rappelons ici quelques-unes de ces caractéristiques, par opposition au français dit international:

1. les consonnes t et d se réalisent en ts et en dz respectivement devant les voyelles i et u dans toutes les positions syllabiques: ex. pour d: dit; du, durant, rendu, discours, radis, éditer, endurer;

2. plusieurs voyelles du système vocalique connaissent une opposition phonologique voyelle brève/voyelle longue: ex. è, â, e, o;

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3. la plupart des voyelles longues sont diphtonguées: ex. paère (père), pâoute (pâte), fleeur (fleur), pôoule (pôle);

4. les voyelles dites fermées, comme i, u et ou connaissent une opposition tendue/relâchée, la voyelle relâchée se réalisant systématiquement dans des syllables fermées (terminées par une consonne ou plus): ex mie/mille, miche, mime, etc.; mue/mûle, muscle, mufle, etc.; mou/ moule, mousse, mouche, moudre, etc.;

5. les voyelles nasales sont plus fermées que leurs correspondantes inter­nationales; la voyelle un, pratiquement inexistante en français inter­national, occupe encore une place bien définie en québécois;

6. beaucoup de mots se terminant par deux consonnes se prononcent comme s'ils se terminaient par une seule consonne, la première des deux: ex. arbre/arbe (ou même aoube), piste/pisse, livre/Iive, etc.;

7. la concaténation des mots dans les phrases est plus serrée et des unités phonétiques (voyelles et consonnes) sont tronquées ou assimilées forte­ment, dans des positions précises: ex dans la rue/dans ... rue, dans les champs/daims ... champs, à l'école/è ... cole, où est-ce qu'il est/ous qu'iést, etc.

L'accent québécois, qui vient d'être décrit brièvement dans ses caracté­ristiques les plus persistantes, doit-il être enseigné? Doit-il être utilisé en classe de langue seconde? Doit-il être exploité dans des documents authen­tiques? Faut-il retenir certaines caractéristiques et en éliminer d'autres? Dans l'affirmative, lesquelles?

Par ailleurs, malgré un changement important depuis une vingtaine d'années dans le domaine international de l'enseignement des langues secondes, changement caractérisé par la montée des méthodes orales et l'influence de la linguistique descriptive et théorique, plusieurs caracté­ristiques de la prononciation standard du français ne sont toujours pas en­seignées. Elles sont de plus en plus tolérées parce que les enseignants les utilisent lorsqu'ils parlent aux élèves ou lorsqu'ils font des exercices oraux avec eux, mais on a encore beaucoup de mal à leur donner un statut formel dans les méthodes ou dans les programmes. L'influence de l'écrit continue de se faire sentir de façon encore déterminante, surtout dans les cas de concaténation des mots dans les phrases. Voici quelques-unes de ces carac­téristiques propres à l'oral courant international:

1. l'élision ou la troncation de la voyelle e dans des mots comme je, le, de, ce, se, que, me, te, ne, en finale des autres mots de la langue se ter­minant à l'écrit par un e et souvent à l'intérieur de mots comme médecin;

2. l'élision ou la troncation de la consonne 1 dans les pronoms personnels il, elle, ils, elles (prononcés i au masculin et è ou a au féminin);

3. l'assimilation de sonorité des consonnes, consécutive à la troncation de voyelles, les sonores devenant sourdes devant une consonne sourde, et les sourdes, sonores devant une consonne sonore (ch'travail au lieu de je travaille, métsin, au lieu de médecin, par exemple).

LA NORME DANS L'ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE SECONDE



Cette résistance à la reconnaissance de certaines caractéristiques de la prononciation du français relève à n'en pas douter du domaine de l'attitude vis-à-vis de la norme. Bien plus, le monde francophone de l'édition n'a pas encore osé publier une grammaire pédagogique du français oral qui con­tiendrait ces caractéristiques bien inoffensives; on peut prétendre qu'il s'agit là d'une résistance d'inspiration normative.

2.3 La grammaire (morphologie et syntaxe)

Les choix à faire en ce qui concerne la grammaire sont d'un type semblable à ceux qui concement la prononciation. Les premiers choix dépendent de l'attitude à propos de la grammaire orale du français inter­national par opposition à la grammaire écrite, et les seconds de l'attitude relativement à la grammaire régionale par opposition à la grammaire inter­nationale.

11 est quand même étrange qu'on ne retrouve dans aucun manuel et dans aucun programme institutionnel que nous connaissions, aussi bien en France, en Belgique, en Suisse et en Afrique qu'au Québec, de nombreuses formes très courantes (on pourrait dire standard) de la morphologie du français parlé. Le progrès le plus marqué qu'on ait enregistré dans ce domaine depuis les vingt dernières années est celui d'avoir éliminé de l'enseignement certaines formes écrites non utilisées ou moins utilisées non seulement à l'oral, mais aussi à l'écrit. C'est le cas du passé simple, des subjonctifs imparfait et plus­que-parfait et de certaines structures littéraires. Mais où sont donc:

1. la forme négative sans ne (pas pour ne ... pas);

2. la forme on comme sujet de la première personne du pluriel (on pour nous);

3. les mises en relief propres à l'oral, comme: moi, le chat, je lui donne à manger; mon père, lui, il travaille à la banque; moi, lui, je l'aime pas ou, pour citer Richer (1964: 112): le voleur, le gendarme va l'attraper; le gendarme, il va l'attraper, le voleur; il va l'attraper le gendarme, le voleur; le gendarme, il va l'attraper le voleur, etc.;

4. les phrases syncopées ne contenant ni sujet, ni verbe, ni complément; ni sujet, ni verbe; ni verbe, ni complément, ou ni sujet, ni complément;

5. les abréviations de mots du type maths, psycho, écolo, accus, etc.;

6. les désignations particulières pour des référents généraux (une Renault pour une voiture);

7. les troncations de sujets grammaticaux (faut, faudrait, pour il faut, il faudrait;



8. les nombreuses variations syntagmatiques pour exprimer des contenus à peu près identiques (quel âge as-tu? quel âge tu as? quel âge t'as? t'as quel âge? quel âge que t'as? quel est ton âge? ton âge, c'est quoi? c'est quoi ton âge? etc.)?

LA NORME LINGUISTIQUE



Nous pourrions poursuivre l'énumération.

A plus forte raison en ce qui touche les régionalismes grammaticaux, les manuels et les programmes ne reconnaissent aucune valeur ou aucun intérêt aux formes qui ne sont pas celles de l'écrit. Et cela, croyons-nous, dans aucun pays du monde francophone. Pourtant, ce sont des faits lin­guistiques qu'on reconnaît déjà soit entre nous, soit dans des descriptions scientifiques. On trouvera d'ailleurs un très grand nombre des références relatives à la description du français québécois dans la bibliographie ana­lytique publiée par l'Office de la langue française (cf. Sabourin et Lamarche).

2.4 Les éléments culturels

Depuis une bonne quinzaine d'années, au Québec et au Canada, on s'est montré de plus en plus conscient des différences culturelles qui existent entre la France et le Canada et on a cherché à tenir compte de ces différences dans le choix des méthodes. C'est surtout au Québec que cette conscience a été la plus grande et que l'on a accepté l'idée que certains traits culturels des Québécois francophones pourraient constituer un objectif d'apprentissage dans l'acquisition du français langue seconde. Mais cela seulement dans la mesure où ces traits coïncidaient avec ceux de l'Américain du Nord. Ainsi, par exemple, on accorde moins d'importance aux repas et plus aux loisirs, on tient compte des différences dans l'organisation et l'administration pu­blique (on parlera de commissions scolaires, de gouverneur général ou de sénateur, de collèges dans le sens d'institutions préuniversitaires, de bureaux de poste, de canaux de télévision, etc., entités qui n'existent pas en France ou qui portent d'autres noms), on utilise les noms géographiques et les noms de personnalités, les noms d'aliments, de voitures, de compagnies de transport, de grands magasins canadiens et on adopte des horaires de travail nord-américains, etc.

C'est sans doute dans ce domaine qu'on s'est rapproché le plus de la réalité sociale d'un milieu où le français est utilisé comme langue maternelle. Cependant, comme cette réalité s'exprime le plus souvent dans un lexique

« épuré », dans une prononciation et une structure grammaticale beaucoup plus influencée par l'écrit que par l'oral, le naturel se trouve souvent à manquer.



Des témoignages culturels comme les pièces de Michel Tremblay, écrites en québécois populaire, n'ont pas encore leur place dans les classes même avancées de langue seconde, bien qu'elles aient déjà franchi les murs de la classe de langue maternelle.

Voilà donc un ensemble de faits qui illustrent les effets de la pensée normative dans la préparation ou dans le choix des manuels d'enseignement du français langue seconde et dans la préparation des programmes d'en­seignement. Nous n'avons pas parlé de l'évaluation, mais nous pouvons affirmer qu'elle suit l'attitude normative générale.

LA NORME DANS L'ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE SECONDE



Comme nous l'avons indiqué dans la première partie, cette attitude a ses fondements dans les facteurs sociaux qui contribuent à définir ce qui est bon ou mauvais pour une société. Nous n'avons pas à juger cette attitude et, même si nous la jugions, cela ne la changerait pas.

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