Gaston Bardet



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CONSCIENCE ET MEMOIRE.


Bien entendu, « le fils du patriarcat israélite » s'est gardé de le faire, parce qu'il s'agissait, pour lui « l'humilié », de faire « sauter » la conscience morale avec la conscience psychologique, de nier sa responsabilité ; parce qu'il ne s'agis­sait, pour Freud « le menteur - atteint d'un cancer à la langue - que de justifier ses impulsions coupables et le ma­récage tragico-comique de ses « pipis » !

Comme toujours, nous nous trouvons face à une entreprise de distinction à sens unique, vers l'infer, sans compensation. Si nous voulons éclairer le problème de la conscience, il faut, une fois de plus, faire intervenir l'expérience du transformé. Ainsi le trévirien Jérôme Jaegen nous dit : « Celui qui est favorisé de cette grâce [communication purement spirituelle] s'aperçoit tout de suite que sa nouvelle manière de voir, d'entendre et de penser, sans images et sans paroles, n'est pas l'œuvre de l'homme, mais de Dieu ». « Si l'âme veut faire connaître [cette idée purement spirituelle] à d'autres, elle doit la traduire dans sa langue. C'est là qu'il lui faut être particulièrement attentive à trouver les mots propres et à ne pas mêler ses propres idées à celles de Dieu. Pour comprendre, elle-même, elle n'a pas besoin de traduire en sa langue, puisqu'elle est apte aux communications spirituelles. Elle pense, pour ainsi dire, à la manière de Dieu ».

Et il observe pertinemment : « Tel quelqu'un qui possède parfaitement une langue étrangère. Si un Français, par exemple, sait très bien l'allemand, et lit quelque chose dans cette langue, il n'a pas besoin, pour lui-même, de tra­duire l'allemand en français, puisqu'il pense en allemand. Mais s'il veut faire part de ces idées à un Français qui ignore l'allemand, il lui faut bien transmettre en termes français » 274.

Au-dessus de notre conscient acquis par le filtre des sens, il y a donc un super-conscient infus qui peut faire irruption dans notre conscience psychologique - et - morale 275 ; tout comme l'infra-conscient, acquis (lui aussi par les sens), peut affleurer à la conscience lorsqu'il est en liaison opératoire avec le cortex ; en ce cas, il est généralement appelé le sub­conscient.

Mais le super-conscient, s'il ne se communique pas toujours à la conscience sous forme de grâces infuses, est toujours pré­sent au centre du Château Intérieur. Il n'est aute que la conscience morale 276 en sa forme la plus haute : la connais­sance certaine d'un Ordre supérieur établi ; s'y refuser en­traîne le remords. Tel est en fait ce fameux sur-moi (ou su­per-moi ou moi-idéal ou idéal du moi), ce sur-moi, refoulant bien que non conscient, que Freud a été forcé d'introduire à la fin de sa vie à la place de la censure... sociale. Le « senti­ment inconscient de culpabilité », le « sentiment douloureux de culpabilité » n'a cessé de prendre une place de plus en plus importante au cours des analyses faites sans parti pris ; les psychanalystes re-découvrent malgré eux le péché originel et la malice infinie du péché vis-à-vis du Créateur, ainsi que la hiérarchie : corps-âme-esprit.

L'infra-conscient peut comporter des faits strictement non­ conscients (injectés après dissociation du cerveau antérieur et du nevraxe) qui ne peuvent être rappelés, normalement, par manque de liaison avec d'autres faits consciemment vécus. Ils sont « dragués » soit directement par hypnose totale, soit indirectement et confusément dans un état d'hypnose très légère, par liaison thématique avec d'autres faits ayant plus où moins interféré.

Le schéma hiérarchiquement valable : Surmoi, Moi et Ça, n'implique nullement l'existence d'un panier-inconscient en lequel il faudrait ainsi mettre ensemble le Surmoi et le Ça, c'est-à-dire la super-conscience de Dieu et l'infra-conscience de notre animalité dé-chaînée par le péché originel. Il y a une conscience psychologique ou réfléchie absolument claire qui entraîne délibération de la conscience morale, péché délibéré, faute condamnable par la Loi. Mais nos premiers mouvements, qu'ils soient volontaires ou involontaires, s'ils n'entraînent pas péché spirituel au sens strict - tant qu'ils restent premiers - sont soumis tout autant à la superconscience qui les engen­dre ou qui les juge avant même que notre volonté consciente intervienne en connaissance de cause. Il ne peut en être au­trement, car notre « propre exister substantiel », avons-nous vu, consiste en la mémoire et cette mémoire est l'image du Père. Pas besoin de faire intervenir le traité de la Grâce, une psychologie non mutilée suffit à saisir ce jugement antécé­dent. .

Si l'on voulait parler d'un inconscient profond, il faudrait partir, avant tout, du Château Intérieur où habite le Roi, et qui est notre véritable centre, le pôle autour duquel gravitent tous les faits conscients, subconscients ou non conscients, contenus en notre mémoire. Or, l'inconscient du XXme siècle, Jung le reconnaîtra, n'est pas un véritable centre, c'est un mythe manichéen couplant deux tendances, l'une vers le haut, l'autre vers le bas, alors qu'il n'y a qu'un juge. Dans la présentation freudienne, cet inconscient n'est qu'une sin­gerie du Château intérieur ; il n'est qu'un « masque » de la mémoire, de cette mémoire que le mystique expérimente comme coïncidant avec le « sein du Père ».

Nous possédons des fonctions psychiques qui s'appellent mémoire et imagination 277, l'inconscient n'est pas une « nouvelle fonction du XXme siècle » ! C'est un faux-nom don­né à la mémoire. Pourquoi conserver ce truquage, sinon pour créer la confusion générale et escamoter la mémoire... réflexe très sûr d'Œdipien 278 contre le Père.

Comment des esprits scientifiques, sains, normaux, ont-ils pu supposer qu'il faille attendre le XXme siècle pour décou­vrir ce prétendu « inconscient » ; comment ont-ils pu suppo­ser que le grand clinicien des âmes, Jean de la Croix, ignorait cette fonction ? Et pourquoi ne l'appellent-ils pas par son nom ?

D'une part, les psychologues ont emprunté leur vocabulaire à la philosophie qui se tient sur le plan du réel ontologique, mais non sur le plan « pratiquement pratique » du mode d'ac­tion des puissances. II est bien évident cependant que seul le vocabulaire des mystiques peut permettre - là encore ­d'expliquer ce qui touche à l'intime de l'âme 279. Nous l'em­ploierons aussi souvent que possible.

Par ailleurs, les psychanalystes ont, soit détourné le sens des expressions en usage, soit totalement inventé leur termi­nologie. C'est le « truc » typique des fraudeurs et des hérésiarques. On invente un nouveau vocabulaire gréco-latin au­quel les simples, ni même les savants, ne comprennent rien, ne pouvant se référer ni au bon sens, ni à l'enseignement commun. On personnifie des abstractions, qui en imposent par le prestige de l'occulte et de l'idole. La tâche la plus importante pour les théologiens, à l'heure actuelle, serait d'établir un vo­cabulaire à double entrée ; par l'absence de correspondances les mythes seraient aussitôt démasqués.

Accepter la terminologie des fraudeurs (et ses soixante symboles sexuels) c'est accepter la fraude.

Le plus risible, René Guénon l'a souligné, c'est d'avoir bap­tisé « psychologie des profondeurs » la psychologie des bas­-fonds. C'est une descente à l'égout, un curetage des bas-fonds, « une véritable parodie de la descente aux Enfers » des an­ciennes initiations qui, au lieu d'une catharsis, laisse « une souillure ineffaçable » 280. Il y a bien une psychologie des profondeurs (ou mieux des altitudes) à établir - celle qu'au­raient dû camper les Congrès de (prétendue) Psychologie re­ligieuse. Cette psychologie du « fond-cîme de l'âme » aboutit au Château Intérieur - situé dans le cœur.

La psychologie des bas-fonds, elle, descend à la zone du « centre-obscur » situé au-dessous de la ceinture ; descend afin d'en éclabousser tout ce qui est au-dessus.

Si l'âme « est par nature une mémoire de Dieu » (chap. V), notre unique Mémoire, dans toute son étendue ­- comme la conçoit Jean de la Croix - comporte cinq niveaux naturels d'opération, conséquences de notre organisme cor­porel : la mémoire-rationnelle, la mémoire-volontaire-d'ap­pui, la mémoire-sensible de l'homme, la mémoire-sensible de l'homme-animal ou mémoire de l'infer, enfin la mémoire organique, qui ne sont pas des « centres » différents.

Etant passive, ne faisant pas d'opération, notre mémoire purement spirituelle est la source à laquelle peuvent s'alimen­ter la mémoire rationnelle et la mémoire volontaire, ou af­fective, d'appui des concepts.

C'est en cette mémoire purement spirituelle que le mysti­que très élevé (débarrassé du sensible, des images, du discur­sus) reçoit infusément non des idées, mais des lumières divi­nes qu'il n'exprime par la suite - Jérôme Jaegen nous l'a rappelé - qu'au moyen de son matériel particulier acquis d'idées et d'images.

Notons que malgré cette absence de signe verbal, au dé­part, on vérifie chez différents mystiques une traduction non seulement similaire, mais parfois en termes identiques d'une même expérience.

On observe souvent que la mémoire rationnelle, c'est-à-dire l'acte d'appliquer l'esprit à des notions abstraites, est un acte de raison. En psychologie, on le baptise savoir pour l'éliminer ; ceci souligne simplement que l'organe utilisé par la mémoire rationnelle est bien le cerveau antérieur.

La mémoire rationnelle est, chez l'homme psychique, ali­mentée par les sens d'où proviennent toutes nos idées acqui­ses. Elle peut cependant recevoir - par mode extraordinaire ­- des idées infuses : paroles intérieures, révélations qui font connaître quelque notice nouvelle, distincte. Ce mode excep­tionnel est entièrement différent de la contemplation infuse, simple intuition, lumière aveuglante qui se traduira (ou non) par la suite au moyen de nos signes verbaux acquis.

Cette mémoire des concepts ordinairement acquis ou ex­traordinairement infusés est liée avec la mémoire sensible de l'homme complet (non décérébré) par une mémoire d'appui d'ordre affectif ou volontaire qui joue un rôle considérable. C'est le niveau des archétypes, de toutes les images supérieu­res organisées, voire systématisées. C'est en cette mémoire volontaire d'appui également que Dieu peut, infusément, im­primer les « formes imaginatives » de la prophétie (chap. II, p. 52) ou les flammes juaniques ou les ruisseaux d'eau vive ; de même qu'il peut imprimer des idées infuses dans la mé­moire rationnelle.

Ainsi les transformés ont généralement une vue intellec­tuelle de la Trinité. Ignace de Loyola eut une vue imaginaire en cette mémoire volontaire. « Il vit l'unité trinitaire sous l'image de trois touches de clavier » évoquant un accord par­fait.

En cette mémoire d'appui, d'ordre artistique peut-on dire, des groupes tout structurés, des architectures symboliques nous sont donnés instantanément. Pas besoin de déroulement discursif pour en prendre connaissance comme dans le cas des lumières infuses.

En dessous des deux niveaux précités, rationnel et volon­taire, où le pneuma peut dominer totalement, nous tombons dans le domaine du sensible. Le psyché s'y étale sur les trois étages intellectuel, sensitif et végétatif.

La mémoire sensible de l'homme est l'objet de tous les trai­tés de psychologie. Elle implique non seulement jugement par la conscience sensible mais par la conscience réfléchie, voire par la conscience morale profonde dont la réflexion, pour amortie qu'elle puisse être, n'en existe pas moins.

Cependant l'homme peut être partiellement et provisoire­ment décérébré par le magnétisme, des procédés de sugges­tion divers, soit enfin sous l'influence de fortes émotions qui reproduisent en fait les « chocs » de l'hypnotisme sensoriel. Les images sont alors reçues directement dans la conscience sensible, sans jugement de valeur. L'organe correspondant est la moëlle et le cerveau postérieur. C'est la mémoire de l'infer, stricto sensu.

Alors que les trois premières formes sont sous la dépen­dance du pneuma, de l'anima, celle-ci appartient purement à l'animus, à la psyché animale. Elle est complétée par la mé­moire organique ou organo-végétative (développée chez les yoguins) qui tend naturellement à se liaisonner avec les groupes associatifs de la psyché et dont les organes consti­tuent les systèmes sympathiques.

Le fameux inconscient - envisagé comme faculté de conserver et désirer - c'est la Mémoire dans son étendue totale, portant sur les trois étages : intellectuel, sensitif et végétatif (ou mieux : esprit, âme, corps) dont nous avons vu (chap. III) la dissociation possible des sièges corporels.

L'inconscient « freudien » porte à peu près uniquement sur la mémoire de l'infer agglutinée à la mémoire organique, avec des échappées vers la mémoire sensible. L'inconscient collectif de Jung porte surtout sur la mémoi­re affective d'appui des concepts, la mémoire des grands sym­boles et des archétypes, inconscient inné et non acquis com­me celui de Freud.

Si à la cime de l'anima, nous trouvons le Père, trônant dans le « Château intérieur », dans la mémoire de l'animus, nous rencontrons immédiatement le Serpent.

C'est d'ailleurs la conclusion à laquelle a dû aboutir obli­gatoirement Jung. Il faut réconcilier le cerveau supérieur et le psychisme spinal, retrouver le « secret insoupçonné, le se­cret antique du serpent... le secret terrestre de l'âme infé­rieure de l'homme naturel qui ne vit pas de façon purement cérébrale mais dans lequel la moëlle épinière et le sympathi­que ont encore leur mot à dire ». Nous devrons aller plus loin et montrer selon quel ordre doit se réaliser cette harmonie.

L'inconscient freudien est encore ce que certaines initiations anciennes appelaient le cerveau femelle 281, c'est la « bête intelligente » des hésychastes. Cerveau-femelle est riche d'évocation. Il rappelle la Kundalini, ou Mère divine lovée dans le périnée ; il rappelle que la femme, sans doute parce qu'elle est formée d'une côte d'Adam, est plus sensible au psychisme spinal que l'homme, qu'elle est davantage mue par des ima­ges que par des concepts. Et la première faute d'Eve, comme l'a souligné le P. Thomas Dehau, dans son admirable Eve et Marie, est de s'être scindée de son mari - le cerveau mâle qui doit juger - en se laissant aller à sa convoitise sans prendre conseil de sa « tête ».

Car il y a une tête et un corps et non deux têtes. Les extra­vagations jungiennes sur l'anima et l'animus proviennent de son imprégnation taoïste. Si l'anima chez l'homme est fémi­nin... et chez la femme aussi (car notre suisse n'arrive pas à retrouver la symétrie, malgré ses efforts) c'est tout simple­ment parce que l'âme est épouse chez l'Adam-Eve ; inutile de chercher dans des traditions non seulement dépassées mais qui ne sont que des déviations de la révélation primitive. Hé­las, toute la symbolique psychanalytique est « mixturée » par la méconnaissance de ce que la Grande Mère (datant de la civilisation agricole) n'est qu'une inversion de l'ère primor­diale et qu'elle est définitivement éliminée par le Christia­nisme.



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